[Étals gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 377 veut y délibérer sur un intérêt opposé au leur, et cela n’est pas sans beaucoup d’exemples -, 2° De diriger le vœu des habitants quand ils sont timides et qu’ils n’ont pas de communistes éclairés. Beaucoup de droits n’existeraient pas sans l’ignorance ou la faiblesse de ceux-ci. 19° Que tout comme il n’y a qu’un souverain, il ne doit y avoir qu’une justice royale ; en conséquence, 'demander l’extinction de' toutes les juridictions seigneuriales. 20° La suppression aussi des capitaineries de chasse et de pêche. Le droit exclusif que les seigneurs de fiefs exercent est une source de vexations. Le laboureur est toujours réduit à voir dévorer toutes ses récoltes par le gibier et autres animaux, parce qu’il ne peut s’en défendre. On lui fait des procédures s’il tend des lacs, s’il tue quelque gibier avec son bâton, on lui tue son chien s’il court le gibier. Cette suppression est d’autant plus nécessaire que tous les oliviers ayant péri par le froid, iis ne se reproduiront plus si les jets et leur pousse nouvelle est rongée par le gibier. 21° La liberté aux communes et à chaque particulier individuellement de se racheter en tout temps, et en divers payements, des droits et devoirs seigneuriaux consistant en censes, tasques, lods, retraits, banalité et autres, sur quelque titre qu’ils soient assis, en indemnisant ainsi et de la manière que les Etats généraux ordonneront que l’estimation en soit faite; l’agriculture et le commerce y gagneront, la population augmentera dans les villages qu’on déserte par les mêmes raisons qui les faisaient déserter dans les treizième et quatorzième siècles. 22° Que les communes de Provence pourront nommer un syndic avec entrée aux Etats de la province. 23° Que le tiers-état sera en nombre de sa population et de sa contribution dans les Etats provinciaux et généraux, avec le clergé et la noblesse, et tout au moins en égalité de voix même dans les commissions intermédiaires, regardant comme inconstitutionnelle toute assemblée d’Etat et dans laquelle cette égalité au moins ne se rencontrerait pas. 24° L’exclusion des magistrats des Etats provinciaux et généraux. 25° La liberté de la presse, comme faisant partie de la liberté individuelle. Chacun doit pouvoir disposer de son opinion ; elle servira à propager les lumières. 26° La modération dans le prix du sel rendu uniforme dans tout le royaume. L’augmentation a ruiné la Provence, détruit l’agriculture, tari totalement les engrais qui fertilisaient les champs, la toison des troupeaux servait aux vêtements du cultivateur, le lait le nourrissait ; tout lui manque. 27° La réduction des droits sur les cuirs :'cette fabrication importante et nécessaire est détruite par l’augmentation de ces droits]; celle des droits royaux dans les tribunaux de justice et qui se reproduisent dans le même procès. 28° La suppression des dîmes, qui ne furent dans le principe qu’une oblation volontaire et pour sustenter les pasteurs. Les communes fourniront à leur entretien suivant que les Etats généraux en ordonneront. Elles seront chargées des églises et maisons curiales. Le résidu de l’immense produit qui nourrit le luxe de ceux qui le reçoivent ailleurs que dans le lieu où elle se perçoit servira à l’extinction de la dette publique et nationale. 29° Les communes de Provence seront maintenues dans la faculté constitutionnelle d’asseoir l’impôt ainsi qu’elles voudront et même de l’abonner. Enfin, la communauté de Peyrolles charge expressément ses députés de faire insérer dans le cahier des doléances, que son terroir , sans cesse exposé aux débordement de la rivière de Durance, est sans cesse endommagé, et qu’il sera inévitablement détruit si le gouvernement ne le protège pas, et ne vient pas à son secours ; qu’elle supporte des charges excessives par les impositions annuelles qu’elle emploie à des réparations avec lesquelles elle n’a pu se garantir. Que les dépenses excédant ses moyens, elle espère de la justice du meilleur des rois qu’il destinera une somme annuelle pour ces réparations pour être faites sur le terroir de la communauté et sous la direction des officiers municipaux, en conformité des devis des ingénieurs qu’elle choisira. Qu’il sera libre à ses habitants d’aller prendre sur le lit de ladite rivière le sable et pierres qui lui seront nécessaires pour leur bâtisse, sans que le seigneur du lieu puisse les en empêcher, soit à titre d’épave, alluvion ou autrement, ainsi qu’il prétend le pouvoir et qu’il l’empêche effectivement. Déclarant, au surplus, le conseil, quequantaux autres objets soit généraux pour le royaume, soit particuliers à cette province, il s’en réfère absolument au cahier des doléances qui sera dressé à la prochaine assemblée pour l’élection des députés aux Etats généraux, approuvant dès à présent tout ce qui sera fait et arrêté par eux et tous les pouvoirs qui leur seront donnés. Ainsi que dessus a été délibéré, et se sont tous les chefs de famille sachant écrire soussignés. Supplément des doléances au désir des communistes. Le conseil charge expressément ses députés de réclamer; l°que la communauté rentre dans toutes ses possessions, domaines, terres gastes, îles et autres nonobstant, toute transaction sur ce passées entre les seigneurs de fief et les communautés, suivant que les Etats généraux en ordonneront. 2° Que les Etats généraux statueront sur ce qu’à l’avenir, pour ne pas détruire l’espèce, qu’il ne soit plus tué de veaux, agneaux et autres bêtes nécessaires pour l’engrais et la culture des terres. Signé Maurel, lieutenant déjugé; Ricard, maire; Abeau, consul; Michel ; Audan ; Gaspard Bernard; Isnard; Antoine Guenez ; A. Jayses ; Audran Baill ; Marin ; Pena Morel ; Pascal ; Joseph Ruenoux ; Joseph Reynoird; Jean-Baptiste Go ffin ; Monge ; Balier ; Gatemet ; Abeau ; Alary ; Jourdan ; Au-quier ; Hemiton ; Bernard ; Gautier ; J.-B. Rey-naud ; Nicolas ; Adainst ; B.-P. Robert ; Bouca-tier ; Boureillon ; Antoine Olonne ; Athenous , greffier. Paraphé ne varietur. Signé Maurel, lieutenant de juge. CAHIER Des doléances, plaintes et remontrances de la communauté de Porcioux (1), Délibéré en suite des ordres du Roi dans l’assemblée de tous chefs de famille convoquée à cet (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. 378 [Élats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix .] effet au 25 du présent mois de mars, et à laquelle ont été présents les sieurs: Jean-Baptiste Marentier ; Paul André; François Barthélemy ; Joseph Fabre ; Pierre-Marcel-Martin Véranne; Martin Barthélemy ; Jean Augier ; André André ; Sébastien Tassy ; Hilaire Blanc ; Alexis Blanc ; Pierre Marcel ; Joseph Cariés ; Joseph Philip ; Jacques Clément ; Charles Chaine ; Pierre Donnât ; J. -B. Marcel ; Leger Philip ; Jean-Baptiste Moutel ; Joseph Sabatier ; François Blanc ; Laurens Veranne ; Jean Camoins ; Antoine Car-telans ; Jacques Bremond ; François Chaine ; Joseph Rebassat ; Alexandre Chaine ; Marc-Antoine Barthélemy; Joseph Moutel ; Germain Guif; Louis Veranne ; Joseph Remusat; Cédoine Ver-saque ; Claude Barthélemy ; Dominique Chaine ; Pierre Barthélemy ; André Moutel ; Martin Marcel ; Martin Veranne Martin Barthélemy ; Maximin Guix ; Jean Blanc ; MartinAndré ; Mathieu Alard ; Joseph Germond ; Pierre Fabre ; François Bonnefoi , Joseph Reyfort ; Jean-Baptiste Chavet; ; Antoine Fabre ; Joseph Beson ; D. Ganole, J.-P .Blanc ; Pierre Roux. Affaires générales du royaume ; constitution des Etats généraux ; formation. Il sera expressément sollicité : 1° Que les Etats généraux du royaume auront essentiellement leur principe et leur complément dans les Etats des provinces, et qu’en conséquence il en sera établi dans toutes celles qui sont gouvernées par un autre régime, et que partout ces Etats seront constitués sur les principes de ceux du royaume. 2° Que les Etats généraux continueront d’être composés des trois ordres de la nation, savoir : le clergé, la noblesse et le tiers-état!, mais le clergé n’y aura qu’un sixième des députés, la noblesse, le tiers, et le tiers-état la moitié. 38 Que les officiers de justice, éligibles dans tel ordre qui voudra les nommer, ne pourront être compris dans les députations des provinces que pour un douzième de la totalité de la députation 4° Que les colonies françaises, dans telles parties du monde qu’elles soient situées, auront aussi leurs députés aux Etats.généraux, et qu’ils pourront être choisis tant parmi les propriétaires résidant en France, que parmi ceux domiciliés dans lesdites colonies, ou même n’êtreque de simples fondés de procuration, pourvu que dans tous les cas ces députés aient été élus par leurs colonies aux formes prescrites par la députation aux Etals généraux. 5° Que nul ne pourra être député dans aucun des trois ordres, s’il n’est naturel Français et domicilié dans les terres soumises à la domination française. 6° Que le nombre total des députés aux Etats généraux sera, au moins, de douze cents. 7° Que la répartition des députés aux Etats du royaume entre les provinces et autres pays de la domination française sera faite proportionnellement à la masse d*e leurs contributions respectives. 8° Que la nomination des députés sera faite dans chaque province par ses Etats particuliers renforcés par un nombre double de représentants des trois ordres nommés en la même forme que les membres ordinaires desdits Etats, c’est-à-dire à l’égard du tiers, par des conseils de tous chefs de famille dans les lieux où la population ne les porterait pas à plus de trois cents, et là où ils excéderaient ce nombre, par des assemblées muni-pales de 200 personnes élues dans des assemblées particulières de corporation, et à l’égard du clergé et de la noblesse, par des assemblés générales de leur ordre. 9° Que les députés aux Etats généraux seront nommés concurremment par les trois ordres réunis, ou séparément par chacun d’eux, selon qu’ils le trouveront bon. 10° Qu’ils seront toujours nommés au scrutin, mais à la pluralité absolue des suffrages, à moins qu’elle ne pût se réunir pendant trois tours consécutifs, auquel cas il suffirait de la pluralité relative, et même en cas de partage le plus âgé des concurrents serait élu. 11° Qu’il sera nommé des députés de remplacement pour être substitués, suivant le rang de leur élection, à ceux qui ne pourraient accepter la députation ou qui la refuseraient, qui vien-draient à décéder, ou à être grièvement malades, avant ou pendant la tenue des Etats généraux. 12° Que dans le cas où les députés des trois ordre auront été nommés par chacun d’eux séparément, ils seront présentés aux Etats de leur province pour y être reconnus et les instructions dressées en commun, si toutefois encore les ordres en conviennent. 13° Que dans les instructions des députés données en commun par les trois ordres ou séparément par chacun d’eux, leurs pouvoirs seront limités pour tous les objets majeurs de telle manière que les provinces jugeront à propos, et quant aux objets ordinaires, les pouvoirs seront accordés des plus amples tant pour ceux qui seront connus, que pour ceux qui n’auraient pas été prévus. 14° Que les députés seront toujours comptables de leur conduite à leur province et à leur ordre; qu’ils pourront toujours en être révoqués, et que sur la simple notification de leur révocation, ils seront tenus de se retirer des Etats et leur voix y deviendra nulle. 15° Que toutes les délibérations, même celles qui sembleraient n’intéresser qu’un seul ordre, seront prises par tête concurremment et à l’alternative entre les trois ordres, en observant seulement leur priorité, et sans autre distinction entre les individus que celle de l’âge, et à l’égard des provinces que celle du tour de rôle d’une tenue d’Etats à une autre. 16° Que la pluralité nécessaire pour former une délibération sera des deux tiers des voix. 17° Que les articles des instructions en vertu desquels les voix formant la délibération auront été données seront énoncés en marge, afin que les provinces puissent vérifier si on les a fidèlement suivis. 18° Qu’à l’égard des objets majeurs touchant lesquels la pluralité des deux tiers des voix ne pourrait se rencontrer faute d’avoir été prévus, ou d’y avoir été suffisamment pourvu par les provinces, la délibération en sera renvoyée à la tenue d’Etats suivante, si l’objet n’est pas urgent, ou elle sera différée jusqu’à ce que les provinces aient envoyé de nouveaux pouvoirs. 19° Que l’exécution de tous les articles qui limitent les pouvoirs des députés aux Etats généraux n’aura pas lieu néanmoins, pour ceux de la présente année, attendu que s’agissant de régénérer la constitution française et de se concilier entre les diverses provinces et les différents ordres, ce grand ouvrage ne saurait s’opérer sans les pouvoirs généraux les plus amples, et attendu encore que la nation doit aux vertus de son souverain et aux intentions sages du gouvernement de leur accorder une entière confiance. 379 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 20° Qu’outre la limitation des pouvoirs des députés, et afin de rendre les délibérations des Etats généraux toujours plus�véritablement le résultat de la volonté nationale, tous les objets qui devront y être traités seront annoncés dix mois, au moins, avant l’ouverture des Etats. 21° Que les grosses villes du royaume s’en occuperont tout de suite et adresseront, chacune dans leurs provinces, leurs observations à celles du second ordre, qui les enverront avec les leurs aux villes moindres, lesquelles en feront part, ainsi que de leurs propres réflexions, aux bourgs et aux paroisses de leur voisinage, et que cette progression sera observée pour faciliter la connaissance des matières aux moindres lieux du royaume, et les mettre à portée d’avoir un vœu fondé sur l’instruction ou sur la confiance. 22° Que pour prévenir toujours davantage les inconvénients de la limitation des pouvoirs, le résultat général des observations de chaque province ainsi progressivement données serait aussitôt communiqué par chacune d’elles aux administrations intermédiaires des autres provinces, et sur le rapport qui en serait fait aux Etats provinciaux, ils prendraient sur ces objets des délibérations, qui d’une extrémité du royaume à l’autre, ne pourraient que s’accorder assez. 23° Que dans les Etats généraux nulle délibération ne pourra être prise que plusieurs jours après que l’objet en aura été proposé, et que la. longueur du délai sera déterminée par l’assemblée, si celui annoncé ne paraît pas suffisant. 24° Que dans cet intervalle tous les titres, tous les renseignements dont les députés pourront avoir besoin leur seront fournis par les secrétaires des Etats; que même toutes les archives, tous les dépôts leur seront ouverts, et qu’ils pourront y aller prendre en original et en extrait toutes les pièces nécessaires. 25° Qu’atin que les secrétaires des Etats soient empressés, à raison de leur dépendance des députés, à faire tout ce qui leur sera demandé, ils seront élus au scrutiu, à la pluralité des deux tiers des voix, et tous les autres officiers des Etats seront élus de même. 26° Que, conformément à ce qui fut pratiqué aux Etats de 1356, où Charles V, sur la demande de la nation, retira ses commissaires afin de ne pas gêner les délibérations par leur présence, les Etats ne seront présidés que par un de ses membres élu au scrutin, à la pluralité des deux tiers des voix, et pris dans l’un des deux premiers ordres. 27° Que la nomination du président des Etats ne sera faite que pour un mois, et qu’il pourra cependant être continué par élection nouvelle. 28° Que la prérogative de la présidence se bornera à exposer les affaires, proposer les objets de délibération, recueillir les suffrages, et prononcer les résultats. 29° Que tout membre de l’assemblée aura néanmoins le droit, durant le cours des opinions, de ■ proposer tout ce qui pourra être relatif à l’objet mis en délibération, et dont la discussion servirait à préparer un vœu plus éclairé. 30° Que les motions indépendantes des matières agitées pourront encore être faites par chaque député, mais seulement après que le président aura déclaré n’avoir plus rien à proposer. 31° Que ce sera encore alors que les demandes particulières des provinces pourront être faites. 32° Que les Etats seront régulièrement assemblés tous les quatre ans à compter du jour de l’ouverture des précédents, et qu’ils seront convoqués trois mois au moins auparavant. 33° Que si, à l’époque précise de la convocation, elle était éludée par les ministres, au bout de deux mois, chaque province procédera à la nomination de ses députés qui s’assembleront à Paris le premier du cinquième mois. Fonctions des Etats . 34° Que les Etats généraux connaîtront spécialement des objets suivants : 35° Tout ce qui sera relatif à la constitution de la monarchie soit dans ses principes fondamentaux, soit dans la manière d’exercer les droits de la nation, et les changements devenus nécessaires dans l’une ou l’autre partie de la constitution, ne pourront, dans le cours ordinaire des choses, être faits qu’à l’expiration de chaque siècle, et dans le cas d’une révolution extraordinaire, que sur la demande des deux tiers des provinces, et dans l’un et l’autre cas les Etats généraux seront renforcés d’un tiers de députés et le nombre en sera porté à dix-huit cents. 36° Tout ce qui appartiendra à la législation. 37° L’exercice du pouvoir judiciaire dans les causes nationales où la liberté, les droits ou la propriété de l’Etat seraient compromis, et notamment la poursuite des prévarications des ministres, chargés du gouvernement de l’Etat, des administrateurs quelconques et des magistrats souverains. 38° L’audition des comptes de l’emploi des deniers octroyés aux Etats précédents. 39° La promulgation des décrets de l’assemblée sous le nom du souverain, et leur enregistrement dans les provinces, qui seront nécessairement faits pendant la tenue des Etats généraux, et même avant de pouvoir s’occuper de l’octroi des impositions. 40° L’octroi libre et volontaire de toutes les levées de deniers quelconques sur la nation, lequel ne pourra jamais être fait que pour un terme limité non excédant celui de la durée des Etats suivants, et qui cesseront au terme de cette époque d’être exigibles, en tout ou en partie, et suivant ce qui aura été accordé ou refusé alors par les Etats. 41° L’assignation des fonds nécessaires à chaque département de l’administration du royaume ou à chaque genre de dépense. Pouvoirs intermédiaires des Etats provinciaux. 42° Que dans les intervalles des tenues des Etats généraux, leur pouvoir et leur administration intermédiaire seront exercés concurremment et à la pluralité des deux tiers, pour les Etats particuliers des provinces. 43° Qu’à cet effet, et pour tous les objets quelconques, d’administration générale ou particulière, les provinces correspondront assidûment entre elles par leurs bureaux intermédiaires. 44° Qu’elles auront aussi constamment chacune dans la capitale du royaumedes députés pour communiquer directement avec le souverain dans toutes les affaires majeures, et gérer aussi les détails des intérêts particuliers de leur province. 45° Que les Etats provinciaux surveilleront l’exécution des décrets nationaux ; 46° Qu’en fin de tous les principes, de toutes les règles ci-dessus détaillés, il sera fait et enregistré partout, les Etats tenant, une charte solennelle publiée de l’autorité du Roi, pour déterminer aussi avec précision et irrévocablement la 380 [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Sénéchaussée d’Aix.I constitution de la monarchie, et en perpétuer la force et la splendeur . ADMINISTRATION DU ROYAUME; RÉFORMAÏION DES LOIS CRIMINELLES. 11 sera encore sollicité : 1° Que les lois criminelles seront réformées et qu’en conséquence, 2° L’instruction de la procédure, de laquelle seule dépend l’absolution ou la condamnation de l’accusé, ne pourra être faite que par trois juges, au moins, dans les premiers tribunaux, et par cinq dans les cours souveraines, et les premiers juges seront les baillis ou les sénéchaux. 3° L’instruction sera publique, et les moyens de défense seront aussi multipliés en faveur de l’accusé que ceux de l’attaque le sont pour l’accusateur. 4° La contumace ne sera plus une semi-preuve du délit, car il doit être permis de redouter l’erreur et même la prévention des juges, et de chercher à s’y soustraire par la fuite. 5° L’innocence de l’accusé sera présumée jus-ques à son entière conviction, et jusqu’alors, il sera traité avec tous les ménagements que l'on doit à la probité malheureuse. 6° La peine de mort sera réservée aux crimes vraiment capitaux, et une foule de délits que nos mœurs atténuent, ou que le génie fiscal trouve seul bien graves, ne seront plus réprimés que par des peines pécuniaires. 7° Enfin l’absolution de l’innocence sera toujours accompagnée de dédommagements proportionnés à la nature de l’accusation. Ré formation des lois civiles. 8° Que les lois civiles seront réformées aussi. Il serait même nécessaire d’en changer tout le système, et de le simplifier au point de le mettre à portée des esprits les plus ordinaires, puisque les lois pour exiger raisonnablement notre soumission, ne doivent offrir que des règles que chacun puisse aisément comprendre et retenir. Gela même aiderait beaucoup à simplifier les formes et à diminuer les frais de justice. 9° Que si ce système n’était pas adopté, on demandera quant à l’ordre judiciaire : 10° La suppression de tous les tribunaux d’exception, pour les réunir aux tribunaux ordinaires. 1 1° La diminution du nombre de ceux-ci, et la réduction des degrés de juridiction à deux. 12° L’établissement dans tous les tribunaux d’un nombre d’officiers suffisant pour que les parties puissent s’y. choisir leurs juges et en convenir entre elles , ainsi que l’on convient d’arbitres. 13° La souveraineté des premiers tribunaux jusqu’à la concurrence de quelques cent livres. 14° La prohibition en cause d’appel d’une seconde instruction du procès, pour ne répéter que les mêmes moyens et les mêmes formalités, mais avec bien plus de dépenses. 15° La suppression de la vénalité des charges our laisser l’élection des officiers de justice aux tats provinciaux, et leur nomination au Roi sur la présentation qui lui serait faite de trois sujets. 16° Enfin, la réduction du ressort des parlements dont la juridiction s’étend à plus de quinze lieues de leur résidence, et la création de nouvelles compagnies souveraines dans ces parties de leur ressort. Ré formation du système des finances. 17° Que le système actuel des finances sera réformé, et qu’en conséquence : 18° Tous les impôts distinctifs d’ordres, et non universels à cause des privilèges, seront supprimés et remplacés pardes contributions nouvelles qui porteront indistinctement sur tous les ordres et tous les individus sans aucune exception, et l’impôt territorial sera pris, surtout, en considération comme le plus équitable. 19° La répartition de la masse universelle des impôts entre les provinces sera faite par les Etats généraux proportionnellement aux facultés de chacune, et leurs Etats particuliers auront le droit d’imposer ensuite de la manière qu’ils trouveront la plus douce et la plus équitable pour faire le montant de leur quotité des impositions du royaume, pourvu toutefois que le genre d’imposition et le mode de perception adoptés ne gênent point le commerce et la circulation intérieure; qu’ils portent également sur tous les ordres et tous les individus, et qu’ils ne favorisent que les classes indigentes. 20° Il ne pourra y avoir dans chaque province qu’une caisse générale sur laquelle seront tirées toutes les rescriptions nécessaires à l’acquittement des dépenses locales, et le surplus sera versé directement au trésor royal. 21° Les comptes des finances, divisés en autant départies qu’il y aura de départements principaux, seront publiés annuellement dans le plus grand détail et avec des notes explicatives sur tous les objets qui ne seraient pas universellement connus. 22° L’envoi en sera fait aux Etats de chaque province, et ils seront répandus par la voie de l’impression. Acquittement du déficit et reconstitution de la dette publique. 23° Que par zèle et par attachement pour la personne du Roi, et pour la gloire aussi de la nation, le déficit des finances sera comblé, quelle qu’en soit l’étendue, et pour y parvenir : 24° On recherchera avec exactitude la somme précise à laquelle il monte. 25° On ordonnera tous les retranchements et toutes les économies possibles dans toutes les parties de l’administration. 26° Et pour le surplus, on assurera l’acquittement exact des intérêts, et on pourvoira à l’amortissement successif des capitaux. 27° Toutes les créances légitimes sur l’Etat seront reconnues et reconstituées par la nation ; mais à l’avenir les prêteurs qui placeraient leurs fonds dans des emprunts non autorisés par les Etats généraux, seraient non-seulement sans action pour répéter leurs capitaux, mais ils pourraient même être poursuivis pour la restitution des intérêts qui leur auraient été payés sur les fonds de l’Etat. OBJETS DIVERS. 28° Qu’il sera aussi demandé des réformes et des améliorations pour les objets suivants : 29° La suppression des intendances des provinces, que l’établissement universel des Etats provinciaux rendra inutiles, puisque les fonctions d’administration qui y sont attachées pourront aisément être réunies aux commissions intermédiaires de ces Etats, et que la partie contentieuse devait être attribuée aux juridictions ordinaires; 381 [État3 gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d'Aix.j on délivrerait ainsi les provinces de l’arbitraire de cette magistrature et des gaspillages énormes auxquels elle donne lieu. 30° L’abolition des lettres de cachet, et la liberté individuelle des citoyens qui ne pourront être arrêtés que pour être remis dans les vingt-quatre heures dans les prisons ordinaires. 31° La liberté indéfinie de la presse, avec la seule précaution d’exiger la signature des auteurs et de tes rendre judiciairement responsables de leurs écrits. 32° La réformation de l’éducation publique, ue l’on dirigerait sur un, plan propre à former es hommes et des citoyens, au lieu de les élever pour n’être que des grammairiens et des sophistes. 33° L’abolition du droit de chasse dans les terres semées ou plantées, et la liberté aux propriétaires de se garantir dans leurs fonds, par tous les moyens possibles, du gibier et des bêtes fauves. 34° La suppression de tous les droits féodaux contraires à la liberté publique et individuelle. 35° Un nouveau système de législation pour le tirage des milices. AFFAIRES DE LA PROVINCE. Il sera encore sollicité : 1° Que les députés du tiers-état de Provence aux Etats généraux déclareront expressément pour leur ordre, qu’il renonce quant à présent à l’exercice du privilège de la province de se gouverner séparément en qualité de co-Etat de nation principale unie et non subalternée, et qu’il demande que tous les décrets des Etats généraux soient exécutés en Provence de la même manière que dans les autres pays de la domination française et avec le même appui de la nation, afin de âonner aux autres provinces des preuves solennelles de confraternité et de pouvoir parvenir légitimement et sans aucune dissension civile au redressement de ses griefs, que l’obstination invincible des premiers ordres ne lui permet pas d’espérer pouvoir obtenir autrement. 2° Que les mêmes députés déclareront encore, au nom de leur ordre, qu’ils désavouent très-expressément toute députation pour la Provence faite contre les dispositions des règlements de Sa Majesté des 24 janvier et 2 mars, et notamment la députation des gentilshommes possédants fiefs qui contrarie toutes les règles. Il ne sera communiqué avec ces députés pour aucune affaire, et l’on s’opposera à leur admission aux Etats généraux. 3° Que pour l’acceptation et la ratification des • décrets nationaux concernant soit les affaires générales du royaume, soit celles de la province et aussi pour tous les objets qui n’auraient pu être traités aux Etats généraux, ou qui auraient été omis, il sera tenu immédiatement après leur séparation une assemblée générale des trois ordres conformément à la demande que la province n’a cessé d’en faire, et dont le Roi vient de reconnaître la nécessité pas son règlement du 2 mars. 4° Que toute exemption, tout privilège pécuniaires seront abolis en Provence, et que les deux premiers ordres contribueront proportionnellement à toutes les charges publiques, soit de l’Etat, soit de la province, soit des vigueries ou des communautés, sans aucune espèce d’exception ni de modération. 5° Qu’à l’égard de la formation de nos Etats, ils seront reconstitués sur les principes et les règles ci-dessus détàiltés pour la constitution française, en y ajoutant les détails de localité qui suivent, et qu’il serait très-utile aux autres provinces d’adopter pour leurs Etats particuliers. Et en conséquence : 6° Que nulle place, nulle dignité dans aucun des trois ordres, ne donneront droit de séance aux Etats, mais que chacun de ses membres n’y aura entrée qu’en vertu d’une députation librement faite par ceux de son ordre. 7° Que les représentants du clergé seront élus au scrutin dans une assemblée générale et d’après les proportions établies pour le nombre des députés des diverses classes de la hiérarchie ecclésiastique. 8° Que les représentants de la noblesse seront pareillement élus au scrutin dans une assemblée générale, et d’après la proportion établie pour le nombre des députés des nobles possédants fiefs, et des nobles qui n’ont que des domaines ruraux ; on pourra aussi employer le tour de rôle. 9° Que les représentants du tiers-état seront élus au scrutin dans les assemblées de district ou viguerie dont les membres auront été nommés par les communautés dans des conseils de tous chefs de famille pour les lieux où la population ne les porterait pas à plus de trois cents personnes, et pour les villes d’une populatiouplus considérable, dans des assemblées formées des députés des corporations. 10° Que la députation des communautés aux assemblées de viguerie sera proportionnelle à leur affouagement. 11° Que les vigueries trop étendues seront subdivisées en plusieurs, et que celles trop circonscrites seront réunies à d’autres. 12° Que lesofficiers de justice, et principalement ceux des cours souveraines, ne seront éligibles dans aucun ordre pour la députation aux Etats, et qu’ils ne pourront y avoir séance, afin que la crainte qu’inspire leur autorité ne puisse gêner la liberté de l’assemblée. 13° Que tous les membres des Etats seront nommés pour quatre ans, et mi-partie d’anciens et de nouveaux, de sorte qu’il en sera élu une moitié tous les deux ans. 14° Que le syndic des communes leur sera rendu avec tous les droits qu’il avait anciennement, et surtout avec l’entrée aux Etats, mais que les autres ordres ne pourront y faire entrer leurs syndics, tant parce qu’il ne leur y est pas nécessaire, qu’à cause des plaidoiries interminables que le concours de ces syndics occasionnerait. 15° Qu’il sera adjoint au syndicat deux commissaires pris dans les communes, afin de conserver au tiers-état la direction réelle de ses affaires, et que la nécessité d’avoir pour syndic un homme de palais ne lui donne pas un maître. 16° Que la présidence des Etats sera rendue élective, qu’on ne pourra y nommer que pour une année, et que le président sera pris dans les deux premiers ordres, et nommé au scrutin dans les Etats. 17° Que le président ne sera que le premier entre égaux, qu’il n’aura donc en rien plus de droits que les autres membres de Rassemblée, et qu’avec la police sa place ne lui attribuera d’autres prérogatives que celle de proposer le premier les objets de délibération, de recueillir les voix, et de prononcer les résultats. 18° Que la signature de tous actes émanés des Etats n’appartiendra au président que concurremment avec des commissaires pris dans chaque ordre et nommés par eux. 382 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 19° Que tous les officiers des Etats, à l’exception du trésorier, seront élus au scrutin. 20° Que chaque ordre aura le droit de s’assembler à part pour ses affaires particulières, avant, lors et après la tenue des Etats 21p Que ces assemblées d’ordre ne seront autorisées que par un de ses membres. 22° Que les comptes de la province ne seront plus rendus que par-devant ses auditeurs qui seront l’administration intermédiaire, et que la chambre des comptes n’en aura que la révision. 23° Que dans l’administration intermédiaire, nulle place, nulle dignité, n’en constitueront de droit les membres, et que par conséquent le président en sera électif, et les consuls d’Aix n’en seront plus ni les directeurs-nés , ni même les membres nécessaires, et la procuration du pays sera désunie du consulat d’Aix pour être incorporée à l’administration intermédiaire collectivement. 24° Que néanmoins deux membres de l’administration intermédiaire en exerceront plus particulièrement les fonctions sous le même titre de procureur du pays ou sous celui de procureur général syndic, et l’un d’eux sera constamment pris dans le tiers -état, et l’autre alternativement dans chacun des deux premiers ordres. 25° Que les membres de l’administration intermédiaire seront élus par les Etats, au scrutin, qu’ils seront tous nommés pour quatre ans, et mi-partie d’anciens et de nouveaux, de sorte qu’une moitié sera élue tous les deux ans. 25° Que le président de cette administration sera élu au scrutin, par ses membres, entre ceux des deux premiers ordres, qu’il ne sera nommé que pour une année, et que le président des Etats ne pourra jamais l’être de l’administration intermédiaire. 27° Que dans l’administration intermédiaire, ainsi que dans les Etats, le clergé n’aura qu’un sixième des voix, la noblesse un tiers, et le tiers-état la moitié. 28° Que le syndic des communes aura séance dans tous les bureaux de l’administration intermédiaire pour y proposer, requérir et discuter les affaires ; 29° Tous ces sujets de plaintes et de doléances ont naturellement fait sentir à l’assemblée le besoin qu’ont les peuples de l’appui de leur roi pour en obtenir le redressement ; les preuves multipliées de bienfaisance et de protection qu’ils en ont déjà reçues leur ont inspiré la plus juste confiance pour le succès de leurs demandes, et tous les délibérants, pénétrés de reconnaissance et d’attendrissement, ont voté par acclamation de très-humbles remercîments au meilleur des rois, et ont expressément chargé leurs représentants aux Etats généraux de confirmer solennellement à Sa Ma-esté et de perpétuer, par un monument durable, e titre de Bienfaisant que la voix du pauvre lui a déjà décerné d’une extrémité du royaume à l’autre. Ce sont là les objets concernant les affaires générales du royaume et celles du pays de Provence en particulier que les membres de la présente assemblée ont unanimement arrêtés, estimant qu’il fallait se borner pour le moment aux objets les plus majeurs et les plus urgents qui sont la constitution des Etats généraux, les réformes dans l’Etat, les plus pressées, et la constitution des Etats de Provence. Fait à Porcioux, cejourd’hui 25 mars 1789, dans la maison du sieur de Regis aîné, attendu que la maison de ville n’a pu contenir les assemblées et ont signé : Bouffier, lieutenant de juge; Joseph Rebuffat ; Augier; Biaise; Merienté; Joseph Fabre; Maximin Guix; Bonnefoi; Tassy; Blanc; Martin André; Roux; Descours, Collationné par nous, greffier de cette commune, Descours. CAHIER Des doléances de la communauté de Pourrières , pour ses députés a l'assemblée générale des trois ordres qui doit avoir lieu à Aie c le 2 avril prochain , pour y députer aux Etats généraux du royaume (1). Les sieurs maître Joseph-Claude de Bouchard, notaire royal; maître Félix Accosl, aussi notaire royal; sieur Claude-Ambroise Morette, marchand drapier, et Gaspard Meinier, négociant, tous de cedit lieu ; Députés élus par le conseil général de tous chefs de famille de la communauté de Pourrières, tenu le 29 mars 1789, sont. expressément chargés, au nom delà communauté de cedit lieu de Pourrières et de tous les habitants, d’y solliciter : 1° La réformation du code civil et criminel. 2° La suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux. 3° Une attribution à ceux des arrondissements des souverainetés jusqu’à concurrence d’une somme déterminée. 4° L’abrogation de toutes lettres attentatoires à la liberté des citoyens, et la faculté à ceux-ci, et de quelque ordre qu’ils soient, de concourir pour tous emplois militaires, bénéfices et charges attributives de noblesse, Et d’y réclamer surtout contre la vénalité des officies; lesdits sieurs députés réclameront, en outre, une modération dans le prix du sel rendu uniforme pour tout le royaume ; Comme aussi l’abolition de tous droits de circulation dans son intérieur, et notamment le reçu le ment des bureaux des traites dans les frontières. Quant aux affaires relatives et particulières à la province, le conseil charge les sieurs députés de solliciter la convocation générale des trois ordres pour former ou réformer la constitution du pays. De solliciter la nomination d’un syndic avec entrée aux Etats. De s’élever contre la perpétuité de la présidence, et contre la permanence de tous membres % non amovibles ayant, en l’état des choses, entrée auxdits Etats. Comme aussi *de requérir l’exclusion des mêmes Etats des magistrats et de tous officiers attachés au fisc. La désunion de la procure du pays du consulat de la ville d’Aix. L’admission des gentilshommes, non possesseurs de fiefs, et du clergé du second ordre, les deux tiers des voix pour l’ordre du tiers, contre celles des deux premiers ordres, tant dans les Etats et surtout dans la coqimission intermédiaire, et surtout l’égalité des contributions pour toutes charges royales et locales sans exception aucune, et nonobstant toute possession ou privilèges quelconques. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.