336 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE champêtres, les vieillards et les parens des défenseurs de la patrie. Art. IX. - On les conduira quelquefois dans les manufactures et les ateliers où l'on prépare des marchandises d’une consommation commune, afin que cette vue leur donne quelqu’idée des avantages de l’industrie humaine, et éveille en eux le goût des arts utiles. Art. X. - Une partie du temps destiné aux écoles sera employée à des ouvrages manuels de différentes espèces utiles et communes. Art. XI. - Il sera publié une instruction pour faciliter l’exécution des deux articles précédens, en rendant la fréquentation des ateliers et le travail des mains vraiment utiles aux élèves. Art. XII. - Des prix d’encouragement seront distribués tous les ans aux élèves, en présence du peuple, dans la fête de la jeunesse. Art. XIII. - Le comité d’instruction publique est chargé de publier, sans délai, des réglemens sur le régime et la discipline internes des écoles primaires. Art. XIV. - Les jeunes citoyens qui n’auront pas fréquenté ces écoles, seront examinés, en présence du peuple, à la fête de la jeunesse ; et s’il est reconnu qu’ils n’ont pas les connoissances nécessaires à des citoyens français, ils seront écartés, jusqu’à ce qu’ils les aient acquises, de toutes les fonctions publiques. Art. XV. - La loi ne peut porter aucune atteinte au droit qu’ont les citoyens d’ouvrir des écoles particulières et libres, sous la surveillance des autorités constituées. Art. XVI. - La Convention nationale rapporte toute disposition contraire à la présente loi (110). 33 ISORÉ [au nom du comité d’ Agriculture et des Arts] : Malgré les besoins impérieux que la voluptueuse voracité multiplie sans cesse, je crois devoir mettre sous les yeux de la Convention nationale, en défendant les droits de la nature, l’état dans lequel tomberaient les précieux troupeaux de l’agriculture, si une loi répressive ne retenait la cupidité scandaleuse de certains cultivateurs qui livrent à la boucherie les brebis fécondes et leurs agneaux; l’exemple du passé doit préparer une juste retenue pour la conservation de ces animaux utiles et estimés. Souvenons-nous qu’il est péri trois cent mille agneaux de la production de l’année dernière, et que la même chose pourrait arriver cette (110) P.-V., XLIX, 248-255. Bull., 28 brum. ; Moniteur, XXII, 535-537; Rép., n° 58 et 59; J. Mont., n° 33. année. Le comité a su apprécier ce qu’il en coûte à l’agriculture, et, après des convictions effrayantes, il s’est empressé de préparer le remède qu’il nous charge de vous présenter ; ce n’est pas en vain que vous protégez l’art qui ne peut supporter aucune altération sans nuire à l’existence de la société. Vous l’avez dit, législateurs, et à votre voix le courage et l’industrie champêtres se sont éveillés, les campagnes ont soif de lois conservatrices des troupeaux : c’est la loi seule qui impose à l’intérêt mercantile, et la raison la provoque au nom de la nature; l’usage précipité du produit des troupeaux est un meurtre nuisible; et la nourriture et le vêtement de l’homme sont livrés aux spéculations destructives de l’approvisionnement futur des subsistances et du commerce manufacturier . Votre comité a cru que c’était à lui à parler contre ces abus, et non seulement il vous demande une loi répressive pour conserver les brebis fécondes et leurs agneaux, mais encore il réclame en faveur de la fécondité pour empêcher que les agneaux femelles ne soient livrés à la castration. Cette précaution peut contribuer beaucoup à la propagation, et s’il est de l’intérêt du gros cultivateur d’exercer cette industrie rigoureuse, en même temps le contraire arrive dans la multiplication générale de l’espèce. Si la Convention nationale a senti les conséquences de ce rapport, elle adoptera à l’instant le projet de décret suivant : Le rapporteur lit un projet de décret qui est adopté en ces termes : Article premier. - Il est défendu à qui que ce soit, et notamment aux bouchers, de tuer aucune brebis qui n’a pas l’âge de quatre ans. Article II: Il est pareillement défendu à tous propriétaires de bêtes à cornes de soumettre à la castration aucun agneau femelle, et ils soustrairont également à la castration un agneau mâle, par quarantaine de brebis. Article III : Les municipalités sont chargées de surveiller et de dénoncer les contrevenants au présent décret. La police correctionnelle prononcera une amende de 10 L. Article IV : Le comité d’Agriculture est chargé de présenter les moyens pour la propagation des bêtes à cornes. (111). La Convention nationale, après avoir entendu [ISORÉ, au nom de] son comité d’Agriculture et des arts, décrète : Article premier. - A compter de la publication du présent décret, aucune brebis ne pourra être livrée à la boucherie (111) Moniteur, XXII, 529. Débats, n° 785, 810, mention du rapport. Rép., n° 60. J. Paris, n° 58, mention du décret. J. Mont., n° 33, reproduction du rapport. Il s’agit du dernier numéro publié du Journal de la Montagne, qui indique en dernière phrase « ... le projet est adopté, nous le donnerons demain. » SÉANCE DU 27 BRUMAIRE AN III (17 NOVEMBRE 1794) - N° 33 337 qu’elle n’ait atteint l’âge de quatre ans et aucun agneau mâle avant l’âge d’un an. Art. II. - Aucun agneau femelle ne pourra être livré à la castration. Art. III. - Tout citoyen convaincu d’avoir tué, soit une brebis, soit un agneau, avant l’âge fixé par la présente loi, sera condamné à payer une amende de la somme de 25 L par chaque tête de bétail. Art. IV. - Les contraventions aux articles précédens et paiemens des amendes seront poursuivis à la diligence des agens nationaux des communes et jugées par la police municipale. Art. V. - Les propriétaires des troupeaux seront tenus de conserver entiers les plus forts et les mieux conformés de leurs agneaux mâles, et dans la proportion d’un sur quarante brebis; la Convention nationale se réservant d’accorder des primes à ceux qui seront parvenus à élever les plus beaux béliers. Art. VI. - L’insertion du présent décret au bulletin tiendra lieu de promulgation (112). (112) P.-V., XLIX, 255-257. Rapporteur Isoré selon C* II, BOURDON (de l’Oise) observe que ce décret ne peut donner lieu qu’à des vexations contre une foule de citoyens ; et qu’il lieu de ces règlements et lois punitives, contraires à l’agriculture, il est de la sagesse des législateurs de combiner des mesures qui, parlant à l’intérêt de tous, seront entendues et suivies de tous ; il réclame en conséquence le rapport du décret et l’envoi de ses observations à l’examen du comité. Après quelques débats, cette double proposition est décrétée. (113) La séance est levée à trois heures et demie (114). Signé , LEGENDRE, président; GOUJON, MERLINO, THIRION, secrétaires. En vertu de la loi du 7 floréal, l’an troisième de la République française une et indivisible. Signé , GUILLEMARDET, BALMAIN, J. -J. SERRES, C.A.A. B LAD, secrétaires (115). (113) Rép., n° 60. (114) P.-V., XLIX, 257. Moniteur, XXII, 529 indique quatre heures. (115) P.-V., XLIX, 257. 21.