[Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] 47 bienfaisant, parlons sans crainte, sans emportement, sans confusion, selon l’exacte vérité découvrant les maux, peines et gênes qu’éprouvent les pauvres mercenaires ; ne nous occupons que du soutien de l’Etat selon notre pouvoir et aux plus grandes nécessités de notre province. Nous demandons : Art. 1er. Que le blé soit diminué, le pain étant si cher que le pauvre mercenaire n’en peut manger que le quart de son nécessaire en travaillant du matin au soir, ses journées ne lui étant pas payées plus cher que dans le temps où le blé est bon marché. Art. 2. Nous demandons la modération de toutes les denrées nécessaires au corps humain. Art. 3. Nous demandons la destruction de toute espèce de gibier, notamme*nt des lapins qui ruinent les bois et les blés de la campagne; qu’il soit permis aux habitants de la paroisse de les détruire; que les seigneurs n’auront leurs réserves que sur leurs biens propres, à la charge qu’ils les entoureront de murs. Art. 4. Nous demandons qu’il n’y ait qu’un seul terrier dans chaque paroisse au nom du Roi, déposé à la municipalité, où chacun sans exception déclarera, établira par représentation de titre de sa propriété double du terrier et du plan rapporté au dépôt royal ad hoc et dans la bibliothèque du Roi. Art. 5. Nous demandons la suppression des justices seigneuriales qui causent la ruine des meilleures familles. Art. 6. Nous demandons qu’il n’y ait plus de cens, ni lods et ventes. Art. 7. Nous demandons que l’impôt soit désormais unique, foncier, proportionné et justement réparti sur toutes les terres sans distinction d’aucune qualité qu’elles puissent être, selon leur produit habituel, sur les châteaux, maisons, jardins, parcs, bois, édifices publics, en un mot que tout ce qui est de fond paye sans aucune réserve. Art. 8. Nous demandons une seule mesure pour tout le royaume ; que la voirie de chaque paroisse soit à la garde de sa municipalité, qui touchera leur revenu, à la charge d’entretenir les chemins qui sont impraticables, les grandes routes et tout édifice public, chacun respectivement sur son terroir, même d’acquitter la taxe foncière desdits chemins et voiries ; les seigneurs déchargés de L’entretien pour la suite, sont plus que payés de leurs premiers frais par le profit qu’ils ont tiré jusqu’à présent d’un bien public. Art. 9. Nous demandons l’exportation des grains, défendue, qui rendrait la famine en France si l’on n’y met pas l’ordre en punissant les compagnies qui les font passer en pays étrangers. Art. 10. Nous demandons que les emplois soient diminués; qu’un seul fermier ne puisse avoir que trois charrues et n’occupera que sa ferme en y demeurant ; cette clause fera renaître les habitants qui ne demandent qu’à être occupés ; chacun pourra avoir quelque petit lot de terre ; les bestiaux se multiplieront et tous les vivres ne seront pas si chers. Art. 11. Nous demandons que les nouveaux possesseurs des bénéfices, commanderies cures et chapelles, soient obligés de maintenir les baux de leurs prédécesseurs. Art. 12. Nous demandons que les chapelains résident dans le lieu de leur bénéfice. Art. 13. Que tous les curés et autres ecclésiastiques soient soumis à tous les impôts que supportera la nation. Art. 14. Nous demandons que les baptêmes, mariages et sépultures soient faits gratuitement. Art. 15. Nous demandons que les journaliers et les plus pauvres habitants ne faisant aucun commerce, ne possédant aucun bien, soient exempts de toute espèce d’impôts. Art. 16. Nous demandons que les dîmes de chaque terroir soient perçues par la municipalité pour en faire l’emploi sur les parties que les Etats généraux jugeront à propos. Art. 17. Nous vous représentons que la paroisse de Puiseux en France est privée très-souvent d’eau, tant pour les habitants que pour les bestiaux, seconde nécessité après le pain. Art. 18. Que les chemins sont impraticables et presque tous détruits par les ravins qui les traversent; qu’il serait de toute nécessité de donner du secours tant pour l’eau que pour construire un pavé qui pourrait se rejoindre à deux grandes routes. Il a été promis par des lettres circulaires de Saint-Germain qu’on s’occuperait de trouver des moyens pour la construction de cet édifice, mais il nous paraît que tout cela a été oublié ; c’est pourquoi nous nous recommandons aux autorités et pouvoirs des Etats généraux, en espérant le soulagement nécessaire à notre position. Telles sont nos demandes pour le calme et la tranquillité du meilleur des rois, les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre üxe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité du royaume et le bien-être de tout un chacun des sujets de Sa Majesté. Signé Fournier ; Henri, curé ; Simon Lionnet ; Pierre Moray ; François Dubois ; Langlàis, syndic ; Hamel, greffier. CAHIER Des plaintes, doléances et remontrances des habitants de la paroisse de Puteaux (1). Le village de Puteaux, situé sur le bord de la rivière de Seine, et dont le territoire ne contient que 600 arpents environ, paye 10,200 livres ou environ de taille, et plus de 3,000 livres de vingtièmes ; ce poids énorme d’imposition accable les habitants, absorbe tout le fruit de leurs sueurs et de leurs travaux; ils payent en outre par abonnement 3 livres par arpent de toute nature pour la clîme. Art 1er. Demander la suppression des capitaineries, qui sont un sujet de vexation de la part des subalternes et qui occasionnent une multiplication de gibier qui détruit et ravage les récoltes. Art. 2. La destruction de tous les colombiers des particuliers qui n’ont pas de terres dans les champs, même de ceux qui ont le droit d’en avoir; les obliger de tenir leurs pigeons renfermés pendant la récolte et les semailles. Art. 3. Demander la suppression des droits d’aides, qui exposent les vignerons à des vexations révoltantes qui les ruinent ; les droits d’aides sont d’autant plus accablants pour la malheureuse paroisse du Puteaux, que presque tout son territoire est planté en vignes qui produit du vin de la plus médiocre qualité dont la vente est presque impossible, attendu que les marchands de Paris ne veulent pas en acheter, vu que les entrées (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. [Etats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] coûtent aussi cher pour ce mauvais vin que pour le meilleur de Bourgogne, Champagne et autres. Il serait à souhaiter pour les environs de Paris que les vins qui en proviennent fussent classés et que le prix des entrées fût modéré et relatif à leur valeur. DEMANDES PARTICULIÈRES. Art. 4. Les chemins ont été multipliés d’autorité jusqu’à l’abus dans cette paroisse ; on a pris des terres de différents particuliers qui n’ont pas encore été indemnisés et qui ne peuvent pas parvenir à l’être, ce qui est un atteinte portée à la propriété qui est un objet sacré. Art. 5. Demander la suppression du tirage de la milice, qui est un impôt désastreux qui trouble la tranquillité des pauvres cultivateurs et répand la désolation dans le cœur des veuves et des veillards en leur enlevant leur soutien, leur seule ressource. Art. 6. Qu’il soit établi dans la paroisse un corps municipal élu tous les deux ans par les habitants, à qui on confiera le soin et l’exercice de la police, qui veillera sur les mœurs et prendra connaissance de tous les différends pour les terminer à l’amiable sans frais ; dans le cas où les partis ne voudraient pas y adhérer, leur avis sera toujours inscrit dans la demande que fera le parti qui voudra poursuivre et qui pourra servir d’instruction locale aux juges devant qui le procès sera porté. Art. 7. Demander la suppression de tout casuel pour l’administration des sacrements et fonctions ecclésiastiques, attendu que cela est contraire à l’esprit de l’Eglise et à -la sainteté de la religion, sauf à pourvoir d’ailleurs à la subsistance et à l’entretien honnête et convenable des curés et vicaires qui desservent les paroisses. Art. 8. Demander la suppression ou la diminution des droits sur le sel comme denrée de première nécessité. Art. 9. Demander la révocation de l’édit qui permet l’exportation des blés â l’étranger. Art. 10. Demander qu’il soit établi un impôt unique sur tous les biens-fonds du royaume, et qu’il soit payé par tous les propriétaires usufruitiers sans distinction et porté au trésor royal en droiture. Art. 11. Demander la réforme de la procédure, l’abréviation de la vénalité des charges de magistrature. Signé Pâté ; Gault ; Nezot, syndic ; Nezot Jul-lien; Jean-Guillaume Gilbert; Chevallier ; Derue; Louis Nezot ; Nezot Gault ; Louis Nezot; François-Jean Delong ; Antoine-Jean Gromet ; Hermer ; Guillaume Nezot; Huche; Jacques Nezot; Langlois. Ces Messieurs des Etats généraux voudront bien avoir égard à cette observation, que tous les fermiers cultivateurs des terres payent tailles, vingtièmes, capitation, accessoires, ainsi que l’industrie; que tous ceux qui récoltent ne payent aucun autre droit et que les pauvres vignerons payent les mêmes impôts ci-dessus, et qu’un arpent de vigne, dans les années favorables, peut rapporter douze demi-queux de vin, qu’ils sont obligés de vendre ledit vin pour satisfaire auxdits impôts, faire subsister leur pauvre famille, payer leurs dettes, et se trouve redevables aux droits des aides de la somme de 120 livres; qu’un arpent qui vaut 600 à 700 livres se trouve obligé de payer 150 livres d’impôts quene l’on peut payer. Signé Guillaume Nezot, syndic; Gilbert Gault. Paraphé ne varietur, au désir de notre procès-verbal de cejourd’hui par nous, Jacques-Louis Langlois, avocat au parlement, ancien procureur au bailliage deRueil, y exerçant la juridiction pour l’absence de MM. les luges du Puteaux, ce 14 avril 1789. Signé Langlois. CAHIER Des plaintes , doléances et remontrances de la paroisse de Quincy - sous-Senart. Extrait du procès-verbal de l'assemblée de la paroisse de Quincy-sous-Senart, tenue le 17 avril 1789 (1). L’an 1789, le 17 avril, neuf heures du matin, l’assemblée de Quincy-sous-Senart ayant été convoquée au son de la grosse cloche et précédemment annoncée par le syndic, d’après la notoriété publique, que dans toutes les paroisses il s’était tenu des assemblées pour députera celle de M. le prévôt de Paris le 18 du présent mois, sept heures du matin, dans la salle de l’archevêché ; lecture faite par ledit syndic de la lettre du Roi pour la convocation des Etats généraux et du règlement y annexé pour la prévôté et vicomté de Paris, ensemble de l’ordonnance de M. le prévôt de Paris, rendue en conséquence de ladite lettre et dudit règlement en ladite assemblée composée de douze individus réunis dans la salle ordinaire du presbytère ; observation faite de l’article 24 du susdit règlement, par lequel ledit seigneur Roi veut et ordonne que tous les habitants composant le tiers-état des paroisses et communautés des campagnes, ayant un rôle séparé d’impositions, seront tenus de s’assembler à l’effet de'rédiger le cahier de leurs plaintes et doléances et de nommer des députés pour porter ledit cahier aux lieu et jour indiqués. Toute l’assemblée est convenue, que, quoique lesdites lettres, règlements et ordonnances ne lui eussent pas été directement exposées, la paroisse de Quincy-sous-Senart, étant d’une création très-moderne, et que lesdites lettres et ordonnances n’eussent pas été lues le dimanche précédent au prône de la messe paroissiale ni à la porte de l’église, ainsi qu’il a été fait partout ailleurs , il était nécessaire néanmoins, pour entrer dans l’esprit desdites lettres, règlements et ordonnances, de procéder, ainsi qu’il y est ordonné, à la rédaction du cahier demandé et à la nomination des députés pour porter leedits cahiers. Après donc en avoir conféré , ladite assemblée a arrêté que le Roi serait très-humblement supplié d’agréer des remerciments de ce qu’il veut bien permettre à la paroisse de Quincy-sous-Senart de faire parvenir à la connaissance de Sa Majesté les souhaits et les vœux des habitants. Que ces souhaits unanimes sont d’obtenir : Art. 1er. Que l’importation des blés ne puisse avoir lieu que d’une province à une autre, sans sortir du royaume. Art. 2. La diminution des impôts dont la paroisse de Quincy ne peut soutenir le poids accablant. Art. 3. La destruction totale du lapin et de la majeure partie du lièvre et de la perdrix, dont le nombre prodigieux dévore les productions de son sof, le plus ingrat, le plus stérile par sa nature. Art. 4. Qu’il soit fait un nouvel arpentage et une juste estimation de la valeur de chacun des arpents de son territoire, relativement à l’extrême modicité de ses productions, de la quantité de se-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire.