668 [Assemblée nationale.] eu connaissance, quand même le contreseing aura i été supprimé; la véritable quesiion e-t que, vu la multitude de papiers qui se répandent dans le royaume à t:ès peu de frais, qui ont des abonnements avec la poste, et qui sont dictés, dans le moment actuel, soit par l’exaltation des têtes, soit par différents autres motifs, pour y travailler les citoyens dans un sens absolument opposé aux principes de l’Assemblée nationale et aux véritables intérêts de la nation, il importe, dans un moment semblable, de ne pas empêcher les députés qui sont ici, qui connaissent le véritable état des choses et les motifs qui font mouvoir ceux qui égarent les opinions, il importe, dis-je, de ne pas ôter à ces membres de l'Assemblée les moyens les plus faciles, les plus prompts de porter la lumière dans leurs départements. Le salut de l’Etat, la conservation de la monarchie, l’intégrité des principes constitutionnels sont beaucoup plus importants à nos yeux que la légère économie qui pourrait résulter de soumettre au port les paquets. Je dt mande doue, Munsieur le Président, que l’Assemblée nationale passe immédiatement à l’ordre du jour sur des motions très dangereuses sous leur véritable point de vue. M. Defermon. Je suis loin de combattre les principes du préopinant; mais je crois qu’il serait un moyen pour l’Assemblée de prévenir les abus qu’on vient de lui dénoncer, et auxquels une partie des membres de l’Assemblée désire trouver le remède, c’est d’ordonner que tous les paquets d’imprimés ne soient cachetés que sous bandes. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) Une députation des écoliers de l' Université est introduite à la barre. V orateur de la députation s’exprime ainsi : «< Législateurs, « Nos pères ont juré de mourir pour la défense de la Constitution que vous avez donnée à la France : animés des mêmes sentiments, leurs enfants viennent à leur tour vous promettre de marcher sur leurs traces. Eh! pourrions-nous ne pas imiter leur dévouement généreux! lis ont essuyé les orages inséparables u’une grande Révolution ; et, plus heureux, nous en recueillerons les fruits. Elèves de la liberté, instruits sous ses auspices, si notre âge est encore tendre, il n’en est pas moins mûr pour elle. Nos condisciples, dont nous sommes ici les organes, brûlent de déposer sur l’autel de la, patrie le serment d’être fidèles à la nation et à la loi; et ce serment, nos cœurs l’avaient formé depuis longtemps.»(A;?y>ûm-dissements.) M. le Président répond : « Messieurs, « Quand votre civisme vous conduit auprès des repœsentants de la nation, c’est une jouissance que vous leur procurez ; car ils voient en vous l’espérance de la patrie; ils voient en vous ceux pour lesquels ils ont plus particulièrement travaillé. Une grande Révolution n’a pu se faire qu’au prix d’un grand nombre de sacrifices. Le nivellement des distinctions n’a pu s’établir sans causer des regrets à tous ceux qui devaient leur élévation à des préjugés. Mais, pour vous qui ne connaîtrez pointlapnvationdequelquesavantages [2 juillet 1791.J illusoires, l'égalité aura tous ses charmes, la liberté aura tout son prix. Suivez donc avec intérêt les travaux dont vous êtes l’uhjet; suivez les progrès de l’art social ; étudiez avec s<>in ces prin ip�s qui sont la base des bons gouvernements, ces principes que, dans la théorie, l’on ne saurait combattre, et qu’une assemblée d’hommes libres, qui fut le fléau des grands, osa mettre en pratique pour le bonheur du peuple; voyez avec enthousiasme la carrière nouvelle et’ brillante qu’une Constitution libre offre aux talents. Ce ne sont plus des places achetées, briguées, obtenues par l’intrigue ou par la faveur; cest te vœu d’une nation qui vous élèvera à la dignité de fonctionnaires publics; ce sont les intérêts de tout un peuple sur lesquels vous aurez à prononcer. C’est désormais, enfin, avec la conscience de vos vertus, que vous aurez à jouir de vos succès. « Soyez donc les umis de notre Constitution ; soyez ses plus zélés défenseurs. Aimez la patrie avec enthousiasme : cette passion, la volupté des grandes âmes, donnera du ressort, de i’energie à toutes vos vertus, et vous éprouverez que lu premier de tous les biens, comme le dernier terme de l’ambibon, c’est la gloire d’être citoyen dans un pays libre. ( Applaudissements répétés.) t L’Assemblée regrette que l’étendue du lieu de ses séances ne lui permette pas de vous accorder les honneurs de sa séance; elle espère cependant qu’un certain nombre d'entre vous voudra bien y assister. » M. le Président lit la formule du serment. Les membres de la députation : Nous le jurons! (L’Assemblée décrète l’impression du discours de la députation et de la réponse du Président et leur insertion dans le procès-verbal.) M. le Président. Voici une lettre du sieur Vaudron , entrepreneur de bâtiments : « Messieurs, « Les jeuues gens qui doivent être un jour les soutiens de l’Empire viennent de jurer en ce moment d’obéir aux lois que vous avez faites : me sera-t-il permis, Messieurs, de déposer dans le temple de la Constitution une somme de 300 livres, somme faible, il est vrai, mais relative à mes facultés. Si des circonstances impérieuses me forcent à rester dans mes foyers, ne me permettent pas de voler sur la frontière et d’y verser mon sang pour la défense de la patrie, je n’oublierai jamais que l’amour de la liberté exige de moi des sacrifices d’une autre nature. *i Oui, Messieurs, cet enthousiasme passe dans le cœur des femmes : j’ai vu avec transport mon épouse vouloir contribuer aux dépenses de l’Etat : Les soldats du despotisme sauront un jour que la devise d’un pays libre et généreux sera toujours de vaincre ou mourir. (Vifs applaudissements.) « Je suis etc... « Signé : VAUDRON. » M. le Président. Le citoyen qui fait cette offre généreuse est eu ce moment à la barre. Plusieurs membres : La séance ! M. le Président. Monsieur, l’Assemblée vous accorde les honneurs de la séance. (Applaudissements.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 juillet 1791.] (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention, dans le procès-verbal de la lettre du sieur Vau-drou.) M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, d’une lettre de MM. les commissaires envoyés dans les départements du Doubs , du Jura , de la Haute-Saône et de l'Ain. Cette lettre est ainsi conçue : « Besançon, le 28 juin 1791. « Monsieur le Président, « Nous avons cru devoir nous rendre dans la garnison la plus nombreuse, et où se trouvent réunis les officiers généraux commandant la division. Nous avons trouvé dans les régiments qui sont dans ceite place les sentiments qu’on a droit d’attendre des militaires français, au moment où la patrie est en danger; et nous les avons vus prêts à sacrifier leur vie pour elle. La garnison, composée de 4 régiments, s’est réunie hier au Champ de Mars, en aimes; la garde nationale s’y est également rendue, les directeurs du département et du district, la municipalité étaient présents. Au milieu d’un peuple nombreux et des acclamations des citoyens, les officiers généraux, le commandant de la place, les chefs des corps, les officiers de tout grade et les troupes ont prêté à la souveraineté nationale le serment décrété par l’Assemblée ; les troupes et les commandants de la citadelle l’ont également prêté. Nous avons reçu la promesse individuelle et écrite des officiers de tout grade. Le petit nombre de ceux qui ont refusé de prêter l’engagement décrété par l’Assemblée a reçu, en déclarant son refus, la permission de s’éloigner. « La crainte d’employer trop longtemps les moments de l’Assemblée, nous empêche d’entrer dans de plus grands détails, qui seront consignés dans notre procès-verbal ; nous ne pouvons cependant pas nous refuser de lui annoncer que l’union la plus entière règne ici entre les troupes de ligne et la garde nationale. « Lajoie, l’unanimité, les transports qu’aexcité la prestation du serment, nous ont présenté le spectacle le plus touchant ; et, dans cette journée comme dans celle qui l’avait précédée, dans cette ville comme sur notre route, nous avons recueilli pour l’Assemblée nationale des témoignages constants de coniiance, de reconnaissance et de respect. L’allégresse publique règne et n’a été troublée par aucun désordre ; la tranquillité a régné dans toute la place, dans les quartiers et dans la citadelle. Chacun semble avoir reconnu la nécessité d’entretenir l’ordre dans ce moment, d’apprendre par là à nos ennemis que leurs efforts contre la Constitution ne tendent qu’à l’affermir, et de seconder ainsi, autant qu’il est en des citoyens, les efforts de leurs représentants. « Les corps administratifs, la municipalité et la garde nationale de ce départ, ment ont montré, avec le plus heureux accord, un zèle actif, une surveillance exacte et une fermeté admirable et imposante. Administrateurs et soldats, tous ont veillé nuit et jour et veillent encore nuit et jour. Le petit nombre d’opposants ou de mécontents disparaît et se cache, soit par cra nte, soit par respect, et nous n’avons trouvé dans tout le département que des citoyens soumis à la loi, des hommes libres décidés à ne jamais cesser de l’être, .les soldats courageux prêts à mourir plutôt que de laisser aborder les ministres des tyrans ou les satellites des rebelles sur la terre de la liberté. ( Applaudissements .) 869 « Nous partons demain pour le département de la Haute-Saône. Nous aurons l’honneur de vous instruire de ce que nous y ferons. « Nous sommes, etc. « Signé : de Toulongeon, Regnaud (de Saint— Jean-d’Angély), de Lacour d’Ambezieux. » M. le Président. Messieurs, la distraction flatteuse que nous venons d’éprouver a emporté beaucoup de temps et paraît faire craindie que l’Assemblée ne puisse pas entreprendre de délibérer sur l’ordre du jour. On propose d’entendre la lecture des adresses. (Oui! oui!) M. Coclielet. Messieurs, dès que le département des Ardennes fut informé des troubles qui s’étaient élevés dans les villes de Givet et de Cbarlemont entre les régiments ci-devant Foix et d'Alsace , il a jugé convenable d'v envoyer 3 commissaires pour rétablir l’harmonie dans ces deux régiments. Je suis heureux d’annoncer à l’Assemblée qu’ils y sont parvenus et que citoyens et soldats se sont embrassés en signe de fraternité. M. Deferinon donne lecture d’une adresse des citoyens de Saint-Malo qui, réunis en armes au nombre de 4,000 sous les murs de la ville et ayant avec eux la troupe de ligne de la garnison de Suint-Servan, ont prêté le serment solennel de vivre libres ou de mourir, et de conserver la liberté qui leur est acquise et assurée par la Constitution. Le même serment a été répété parleurs femmes et leurs enfants. Cette adresse est transmise et signée par tous les chefs des corps administratifs et tous les chefs militaires. Un de MM. les secrétaires donne lecture des lettres et adresses suivantes : Lettre des sous-officiers , grenadiers, soldats et chasseurs des 4e, 5° et 6e régiments composant les garnisons d’Aire et de Béthune , à laquelle est joint un exemplaire de l’adresse qu’ils ont faite à l’armée française : « Quels sont ces traîtres, disent-ils, qui ont fait oublier au roi le serment qu’il a prononcé? ce sont ceux qui se sont alimentés des sueurs de nos pères et mères; ces sangsues ne respirent que la vengeaoce... Qu’ils tremblent et qu’ils sachent que nous sommes Français ! Coalisons nos forces, ayons tous les mêmes sentiments de fraternité; mélions-nou3 des pièges que nous tend l’astuce de nos ennemis, et qu’ils payent chèrement toutes les tentatives qu’ils feront pour introduire de vils suppôts de la tyrannie dans notre terre libre. » Ces militaires renouvellent le serment sacré de conserver leurs droits, ou de périr sur les débris de leur patrie. Lettre du directoire du district de Longwy, à laquelle est jointe la suite du procès-verbal de la continuation de ses travaux, ainsi qu’une lettre des sous-officiers et hussards du 2e régiment ci-devant Ghamborand. Le directoire loue beaucoup la bravoure et la vigilance du 6e régiment ci-devant Armagnac, et des hussards Ghamborand; il ajoute que le détachement des canonniers du régiment d Auxonne mérite une mention expresse; qu’il est impossible de décrire l’activité qu’il a mise aux travaux qui le concernent; que les chefs, sous-