128 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» [11 janvier 1791.] et aujourd’hui c’est la maison d’Orléaus qui réclame une somme payée à sa décharge, ou plutôt donnée pour elle, et qui a été fournie par le Trésor royal. Je demande l’ajournement et l’impression du rapport et des titres. M. Camus, rapporteur. Le contrat de mariage s’est fait par Louis XV d’une part, et par les ministres d’Espagne de l’autre; les motifs de l’alliance sont exprimés dans le préambule du contrat; l’intention du roi était de resserrer les liens entre les deux puissances. Est-il bien étonnant que la France ait accordé une dot à la fille du régent, qui épousait l’héritier présomptif de la couronne d’Espagne? Nous avons proposé d’annuler tous les dons secrets de la faveur ; il ne s’agit pas ici de confirmer un article du livre rouge, mais d’acquitter un engagement contracté par le roi pour consommer une alliance favorable à l’intérêt delà nation et à l’éciat du trône. M. Martineau. Si Mademoiselle d’Orléans avait eu des enfants de son mariage, et que ses enfants se présentassent aujourd’hui pour recevoir le payement de la dot, nous n’aurions pas même à délibérer; ils mériteraient toute la faveur due à la foi d’un contrat de mariage; mais qui est-ce qui se présente aujourd’hui pour recevoir le payement de cette dot? C’est l’héritier de celui en faveur de qui mademoiselle d'Orléans, dotée par la nation, a renoncé à la succession paternelle et maternelle ; c’est-à-dire que celui quia la chose ■voudrait encore en avoir le prix. (Plusieurs membres applaudissent.) Je demande la question préalable sur le projet de décret, ou le renvoi au bureau de liquidation. M. de Croix. Il faut avant tout décréter le remboursement demandé. M. de Tracy. Je ne doute pas que le mariage cle la tille du régent avec le prince des Asturies n’ait été déterminé par de fort bonnes raisons d’Etat ; mais il me paraît évident qu’il a été fait aux dépens de la nation française. Je réclame, comme M. Martineau, la loi delà responsabilité et je crois, du reste, que cette réclamation n’aurait peut-être pas été connue, si M. d’Orléans n’avait point exposé l’état de ses affaires lorsqu’on traitait de son apanage. M. delLachèze. Le payement de la dot n’ayant pas été effectué du vivant de la princesse, je crois ses héritiers sans titre pour la réclamer. M. Rcwlïcl. Je m’étonne que l’on mette en doute la validité d’un titre qui a été si souvent reconnu. La nation ne fait aujourd’hui que ce que fait un particulier en payant ses dettes. Assurément aucun particulier ne pourrait contester la validité d’un titre semblable. L’Assemblée, consultée, décrète ce qui suit : « L’Assemblée nationale , sur le compte qui lui a été rendu par ses comités de l’extraordinaire et de la direction de liquidation, des demandes formées par M. d’Orléans pour le payement de la somme de 4,158,850 livres, montant de la dot de Louise-Elisabeth d’Orléans, liquidée par lettres patentes du 11 juin 1725, ajourne sur la décision de cette demande, et cependant ordonne l’impression du rapport, du contrat de mariage, ainsi que des lettres patentes dont il a été rendu compte, et le renvoi du tout à la direction générale de liquidation. » L’ordre du jour est la suite de la discussion sur le projet de décret concernant l'établissement du droit de timbre. M. Rœderer, rapporteur , fait lecture des articles qui ont été décrétés hier et ajoute : Vous pouvez, par un seul article que je vais vous proposer, régler une chose infiniment simple et infiniment instante. Il faut que l’Assemblée sache que les notaires de Paris, qui autrefois n’étaient point assujettis au contrôle, étaient soumis en revanche à un droit de timbre beaucoup plus rigoureux qu’il ne l’était dans tout le reste du royaume. C’est à compter du 1er janvier prochain que, comme tous les autres notaires du royaume, ils seront soumis au nouveau droit d’enregistrement que vous avez substitué au droit de contrôle. H est donc juste, Messieurs, qu’à compter du 1er février prochain, vous autorisiez les notaires de Paris à user jusqu’au 1er avril prochain, époque du nouveau timbre, à user, dis-je, du papier timbré dont on se sert dans le reste du royaume. En conséquence, je vous propose ce décret, qui ne me paraît susceptible d’aucune discussion : « L’Assemblée nationale décrète qu’à compter du 1er février et jusqu’au 1er avril prochain, les notaires de Paris pourront employer du papier timbré tel qu’il est maintenant en usage dans le reste du royaume. » (Ce décret est adopté.) L’Assemblée reprend la suite de la discussion sur la jurisprudence criminelle et l'institution des jurés. M. Boutteville-Rumetz. Il s’agit de décider, Messieurs, quelle sera la procédure qui aura lieu devant le juré de jugement, et si l’instruction se fera verbalement ou par écrit? Commençons par reconnaître qu’il n’est personne qui ne s’élève avec vous contre le détestable abus qui mettait tout individu à même de vérifier le fait et d’appliquer la loi, et qu’un des plus zélés défenseurs des preuves écrites est convenu que les magistrats n’avaient point pariagé le ridicule versé sur les docteurs en us accusés d’en être les inventeurs; que le juge n’a d’autre loi que la direction intérieure de sa conscience. Une autre vérité reconnue dans toutes les opinions, c’est que le calcul des preuves écrites est une grossière et monstrueuse absurdité, qui ne doit plus souiller ni corrompre votre procédure criminelle. Ici, Messieurs, commence la diversité des principes et des opinions. Il n’est pas douteux, disent les défenseurs de l’écriture, que les preuves morales ne l’emportent infiniment sur les preuves écrites; mais les unes et les autres ayant leurs avantages, est-il impossible de les conserver? Deux avantages ne valent-ils pas mieux qu’un seul? Or, quel moyen vous offre-t-on pour les conserver et aplanir toutes les difficultés? Rien de si aisé : en mettant les jurés entre leur conscience et la loi, en leur remettant la preuve écrite, à laquelle ils seront les maîtres d’avoir tel égard que de raison. Par là vous remédiez à tout; vous vous épargnez l’embarras de choisir entre les deux genres de preuves différentes que vous parvenez à vous assurer. Voilà donc l’état actuel de la délibération. L’écriture devant le juré de jugement est-elle, en effet, applicable dans l’exécution ? Nous laisse-t-elle jouir de