[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 janvier 1791.] f)2 ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. EMMERY. Séance du vendredi 7 janvier 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, qui est adopté. M. î�eleu de la Ville-aux Bois, secrétaire, donne kcture de la déclaration suivante : « Nous soussignés, prêtres, diacres, sous-diacres, ci-devant bénéficiers de l’église métropolitaine de Paris, sous les titres de chanoines de Saint-üenis-du-Pas, de Suint-Jean-le-Rond, et vicaires de Saint-Aignan, de plus, les musiciens clercs de ladite église; après avoir pris connaissance d'une protestation des ci-devant chanoines et chapitres; et, en outre, d’une déclaration par eux faite aux officiers municipaux de cette ville, lors de l’apposition des scellés sur les effets mobiliers de ladite église ; désirant, autant qu’il est en nous, demeurer fidèles au serment civique que nous avons prêté avec tous les Français, montrer de la manière la plus solennelle notre entière soumission aux lois décrétées par l’Assemblée nationale et acceptées par le roi, et spécialement à la constitution civile du clergé ; déclarons désavouer authentiquement toutes protestations ou déclarations, réelles ou supposées, secrètes ou publiques, sous le nom du chapitre de Pans; reconnaissons que l’Assemblée nationale a eu le droit de décréter, et le roi de sanctionner et faire exécuter comme loi obligatoire pour tout ecclésiastique citoyen , ladite constitution civile du clergé, dans laquelle nous n’avons rien reconnu que de conforme aux quatre articles du clergé de France, et aux libertés de l’Eglise gallicane ; que nous sommes disposés à prononcer le serment exigé des fonctionnaires : ecclésiastiques de la nation, sans y être portés I par d’autres motifs que ceux de la conscience, de la raison, de la justice et de l’amour de la patrie ; en foi de quoi nous avons signé la présente déclaration. « Signé : Feray, prêtre, ci-devant chanoine de Saint-üenis-du-Pas ; « Larson nier, prêtre, ci-devant premier vicaire de Saint-Aignan ; « Damas, prêtre, ci-devant chanoine de Saint-Jean-le-Rond ; < Merlin, diacre, ci-devant chanoine de Saint-Denis-du-Pas ; « Bauwens, musicien ; « üeviliiers, clerc; r. « Pinard, clerc ; « Gontie, sous-diacre, ci-devant chanoine de Saint-Jean-le-Rond ; «r Messier, clerc de matines ; « üumon, diacre, ci-devant chanoine de Saint-Jean-le-Rond ; « Cornu, clerc ; « Huby, clerc ; « Paris, ce 13 janvier 1791. » (L’Assemblée ordonne l’impression de ce document et son insertion dans le procès-verbal.) Un membrs demande que l’Assemblée renvoie la fixation de la circonscription des ressorts des tribunaux de .commerce de Pézeoas et de Reziers, dans le département de l’Hérault, aux corps administratifs. M. Kenaud demande que cette fixation soit renvoyée au comité de Constitution, qui y procédera d’après l’avis du département et en fera ensuite rapport à l’Assemblée. (La motion de M. Renaud est adoptée.) M. le Président. J’ai reçu de M. de Montmo-rin une lettre par laquelle il me fait passer le serment civique prêté à Londres, le 3 décembre ! dernier, par MM. de La Luzerne, ambassadeur en Angleterre ; Barthélemy, secrétaire d’ambassade et Nettement, secrétaire particulier de M. de La Luzerne. (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention de cette lettre dans son procès-verbal.) M. Vyau de Baudreuille , député du département de la Nièvre , demande un congé de trois semaines. M. Briault, député des Deux-Sèvres, demande un congé de quinze jours. M. Ral»y, député de Toulouse, demande un congé ne six semaines. (L’Assemblée accorde ces congés.) M. le Président. Je dois informer l’Assemblée que M. Gallet, professeur de mathématiques des élèves de la marine militaire, directeur des études des élèves de l’Ecole de Vannes, fait hommage à l’Assemblée d’un plan d’éducation nationale. (Ce travail est renvoyé au comité de Constitution.) M. le Président. J’ai reçu plusieurs lettres et adresses contenant des pétitions; les auteurs de ces pétitions demandent à être admis à la barre de l’Assemblée. Je dois consulter l’Assemblée à ce sujet. M. d’André. Messieurs, j’ai l’honneur de vous faire observer qu’il y a déjà une foule de vos décrets qui portent qu’on n’admettra à la barre que les départements et la municipalité de Paris. Ces décrets sont parfaitement sages. Tout corps, tout citoyen a sans doute le droit de pétition; mais tout citoyen n’a pas le droit de faire sa pétition à la barre : ainsi il faut très fort distinguer cela. Toutes personnes, tout corps, tout individu peut et doit avoir le droit de porter ses réclamations à l’Assemblée. Mais dans quelle forme ? Par une lettre ou par une adresse envoyée au président, lequel la renvoie aux comités. Si les comités pensent que l’affaire soit assez importante pour que la partie réclamante soit entendue à la barre, les comités disent à l’Assemblée : C’est une affaire majeure qu’tl faut entendre à la barre. Ceux-ci présentent la pétition et l’Assemblée prononce sur le rapport. Je vous prie d’observer que si vous admettiez à la barre tous ceux qui s’imaginent que leurs pétitions sont intéressantes, tout le royaume serait à la barre dans huit jours et vous auriez ici douze à quinze mille pétitionnaires. Ainsi donc, Monsieur le Président, je demande qu’aliu de ne point perdre notre temps, vous (1) Cette séance est iacomplète au Moniteur. 17 janvier 1791.] 53 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. n’admettiez à la barre que ceux qui sont admis par les décrets, savoir : le département et la municipalité de Paris ; et je conclus, Messieurs, à ce ue le Président fasse exécuter vos décrets, sauf ans le cas où l’Assemblée jugerait à propos de faire exception. Je propose, en conséquence, le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, conformément à ses précédents décrets, décrète qu’il ne sera admis à la barre que les députations des corps administratifs ou directoires des départements, et celles de la municipalité de Paris. « Décrète, en outre, que les pétitions adressées à l’Assemblée seront renvoyées dans les comités, qui en rendront compte à l’Assemblée nationale. » (Cette motion est décrétée.) L’ordre du jour est la suite de la discussion du ; projet de décret sur le tarif des messageries. M. Dauchy, rapporteur (1). Messieurs, vous avez renvoyé’ au comité d’impositions les différents articles qui étaient nécessaires pour que le ministre des finances put passer le bail des messageries. 11 s’agit principalement de fixer le tarif. Si vous le portez à un prix trop haut, la concurrence des loueurs de chevaux et des voituriers forcera nécessairement le fermier, qui est obligé de faire un service, à baisser sou prix et à entrer en composition. D’un autre côté, il faudrait de grands sacrifices pour supporter une mauvaise année, si le prix était trop bas, et calculer sur la dépense de cette année qui permet de faire le service à un taux inférieur à celui que nous allons vous proposer. Dans cette circonstance quel est notre devoir? C’est de fixer le maximum. Nous vous proposerons donc de décréter que le fermier ne pourra recevoir un prix de place excédant 14 sous par lieue. M. Reguautl {de Saint Jean d'Angély). Je crois que l’intérêt des soumissionnaires est d’établir un tarif au plus bas prix possible; si le prix des transports est élevé trop haut, la concurrence s’accroît en raison des avantages qu’on laisse aux spéculateurs; l’effet de la concurrence ne peut cesser qu’en ne laissant aux particuliers aucune espèce de gain pour le transport des voyageurs. Ainsi l'établissement des messageries, en détruisant toutes les concurrences, deviendra aussi bon qu’il peut l’être dans l’état actuel des choses; ce que les fermiers auront perdu par la baisse du prix des places sera plus que compensé par l’activité du service qui s’établira toujours dans la proportion de célérité des transports, de la sûreté des voyageurs, de leurs effets et de la modicité des prix; je demande que le prix des places soit fixé à 12 sous par lieue et que, sous quelque prétexte que ce soit, il ne puisse demander aucune indemnité ni aucun compte de clerc à maître. (Cette motion est adoptée.) M. Le Chapelier. Je demande que les places de cabriolet qui sont devant les voitures soient fixées à 8 sous par lieue et que les places dans les voitures non suspendues ou daus le panier soient tixées à 4 sous. (Cette motion est adoptée.) M. Dauchy, rapporteur. Il reste à statuer mainte Voyez les discussions antérieures, Archives parlementaires, tome XXI, pages 600 et 681. tenant sur le transportées bagages et des matières d’or et d’argent. Il est un usage constant dans les messageries, qui faisait même partie de leurs règlements : c’est que chaque voyageur emportait avec lui uu paquet quelconque, fixé à dix livres; ce poids est faible; nous vous proposons de le fixer à quinze livres. (Cette motion est adoptée.) M. Dauchy, rapporteur. Un des objet s qui intéresse le plus le commerce, surtout dans un moment de pénurie, est le transport d’argent. En 1775, le tarif fut réduit à 40 sous par 1000 livres et par 20 lieues. Cependant il est de fait que tous les transports importants d’argent se font à des prix infiniment inférieurs. En effet, il est plus facile de voler un sac de 1,200 livres qu’un tonneau de piastres; voilà donc la raison de la réduction. Nous proposons actuellement de réduire à 30 sous par mille au lieu de 40, c’est-à-dire une déduction d’un quart sur cet objet. Quant aux grosses sommes, vous devez laisser au fermier, qui n’a plus de privilège, le droit de faire des compositions qui pourront lui convenir. Je vous propose seulement de réduire de 40 sous le mille à 30. M. deCazalès. Je propose de dire que le prix de 40 sous sera réduit à 30, et ainsi sur toutes les autres sommes, dans les mêmes proportions, c’est-à-dire d’un quart. (Cette motion est adoptée.) M. Dauchy, rapporteur. Messieurs, il existe encore un autre détail : les transports de papiers de procédure qui exigent un peu plus de soins et qui ne peuvent pas être mis dans lin magasin comme un ballot de marchandises. Cet objet était plus considérable autrefois qu’il ne le sera maintenant, car nos procédures ne seront plus si volumineuses; cependant il existe des papiers à transporter. On a toujours exigé pour eux le double port des autres marchandises. Je crois que l’on peut, sans inconvénient, conserver ce double port là. (Cette motion est adoptée.) M. Dauchy, rapporteur. Au moment où vous avez décrété le transport de for et de l’argent, j’ai oublié d’y joindre une disposition nécessaire. La voici : c’est que les bijoux, les galons et autres objets précieux dont la valeur sera déclarée payeront la même taxe que l’or et l’argent. (Cette motion est adoptée.) M. Dauchy, rapporteur. Il reste encore une autre disposition ; les petits paquets, sans consulter leur poids effectif, étaient toujours censés peser 10 livres. Il n’est pas possible de changer cet usage. Je propose que leur transport par la diligence soit maintenu au prix actuel; ce prix était calculé à raison d’un sou la livre par vingt lieues, et ainsi de cinq en cinq lieues. Il ya un tarif annexé à la loi de 1775 qui est très bien fait. Je proposerai de le conserver pour les diligences seulement. Nous passerons à l’article des transports de marchandises. Je crois que cela doit faire deux objets distincts. Vous ne pouvez laisser subsister l’abus qu’il y avait à payer le même prix pour deux transports inégalement faits. Je propose de conserver l’ancien tarif sur les messageries. (L’Assemblée décrète la proposition et fixe à 15 livres par quintal au lieu de 25 le transport des grosses marchandises.)