452 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J novembre ira” vée en voyant que vous vous occupiez de la ré¬ génération des mœurs et de l’éducation natio¬ nale; articles-essentiels pour assurer d’une ma¬ nière stable la prospérité de la République. « Que de bénédictions les honnêtes femmes, les mères de famille ne vous donneront -elles pas quand elles pourront se faire accompagner de leurs filles sans craindre que leurs yeux soient blessés par l’aspect hideux du vice et des images obcènes qui le représentent; quel bien vous pro¬ curerez aussi à T humanité en empêchant les victimes de la débauche de s’y livrer; que de malheureux objets de la séduction rentreront avec plaisir dans la classe des honnêtes femmes et combien cela en empêchera-t-il d’en sortir puisqu’elles ne seront plus soudoyées par la cor¬ ruption des grands, ni entraînées par l’exemple des autres : « Une fois les mœurs épurées, l’éducation ré¬ publicaine sera facile à donner aux enfants ; on pourra alors leur inspirer l’amour des vertus et leur faire sentir combien le vice dégrade l’homme ; que ne feront-ils pas pour en conserver la di¬ gnité quand ils connaîtront la déclaration des droits, déclaration sublime, dont la confirma¬ tion seule vous immortalise. « Avec quelle impatience nous attendons le moment où de sages instituteurs apprendront à nos enfants à être de véritables républicains, et celui où pour y parvenir plus efficacement vous rendriez un décret qui obligerait les pères et mères non seulement à envoyer leurs enfants aux écoles nationales sans qu’aucun prétexte puisse les en exempter, mais qui leur enjoin¬ drait d’y aller eux-mêmes et que ceux qui s’en dispenseraient seraient regardés comme de mau¬ vais citoyens. Un tel décret procurerait un grand bien, parce que les parents étant instruits des devoirs du citoyen, seraient plus à même de les faire mettre en pratique à leurs enfants et de leur faire observer par leur exemple surtout qu’il faut n’exister que pour la patrie, et que son uti¬ lité, son bonheur, doivent être le but de toutes nos actions. C’est ce qui m’a engagée, citoyens législateurs, à vous prier d’accepter une bourse de jetons d’argent pour que le produit soit em¬ ployé au soulagement des veuves, mères et or¬ phelins des défenseurs de la patrie; j’éprouve d’autant plus de satisfaction à vous l’offrir, que cela détruira des signes de l’ancien régime. « J’espère que vous voudrez bien accueillir cette lettre avec indulgence et bonté, n’étant accoutumée à écrire qu’à mes parents et amis, je ne connais que le langage simple du cœur; mais comme c’est celui de la vérité, peut-être vous plaira-t-il davantage que celui de l’éloquence. « Il ne me reste plus qu’à vous prier, citoyens législateurs, d’agréer les vœux ardents et sin¬ cères que je ne cesse de faire pour que vos tra¬ vaux soient couronnés de tout le succès que les bons républicains doivent désirer, et pour que nos armes, partout victorieuses, nous procurent une paix qui nous donne les moyens de jouir pleinement des bienfaits d’une Constitution si bien faite pour le bonheur de l’humanité. « Une vraie républicaine, citoyenne de la ville et du district de Reims. « Le 11e jour du 2e mois de la IIe année de la République française une et indivisible. Salicetti et Gasparin, représentants du peuple près l’armée campée devant Toulon, sollicitent îa prompte arrivée des troupes dont ils ont besoin pour réduire cette ville rebelle, et annoncent qu’hier une Commission militaire a condamné à mort un enseigne entretenu de la marine, amené prisonnier par 18 matelots de son bord. Renvoyé au comité de Salut public (1). Suit la lettre des représentants du peuple, près l'armée campée devant Toulon (2). Les représentants du peuple près l'armée campée autour de Toulon, à la Convention nationale. « Au quartier général d’Ollioules, le 8 du 2e mois de l’an II de la République une et indivisible. « Nous avons vu, dans les papiers publics, citoyens collègues, que vous avez formé une Commission pour recueillir les traits de courage et de vertu qui honorent les sans-culottes de l’armée. Vous lui renverrez sans dèute la lettre ci -jointe dont les sentiments républicains sont dignes d’être cités (3). « L’exactitude de notre correspondance avec le comité de Salut public doit vous tenir au cou¬ rant de notre situation. Nous avons lieu d’espérer qu’elle s’améliorera par l’arrivée des troupes qui ont soumis Lyon, mais il est bien important qu’elles nous arrivent promptement et en grand nombre, car notre ennemi, maître de la mer, reçoit, et peut recevoir continuellement des ren¬ forts. Il nous arrive journellement des bataillons de la première réquisition, mais vous sentez bien que cette brave jeunesse a besoin d’être guidée par l’exemple de troupes qui aient vu le feu. « Salut et fraternité. « Saliceti; Gasparin. « P. S. Une Commission militaire a condamné hier à mort un enseigne entretenu de la marine, que 18 matelots de son bord ont amené prison¬ nier : il a été exécuté militairement aux cris de Vive la Eépublique ! » Le citoyen Syriat, membre de la municipalité de la commune d’Arbigneux, expose que des in¬ trigants, coupables de plusieurs malversations, ont surpris au représentant du peuple Prost un arrêté portant destitution de plusieurs fonction¬ naires publics du district de Belley; il rend compte des vexations que ces mêmes intrigants ont exercées contre beaucoup de patriotes : il demande qu’un représentant du peuple soit en¬ voyé sur les lieux; que les destitués soient réta¬ blis dans leurs fonctions; qu’il soit sursis à l’exé¬ cution des mandats d’arrêt décernés par le co¬ mité de surveillance de Belley; enfin, que les mandats d’arrêt lancés par l’officier de police, pour délits nationaux, actes arbitraires, assassi¬ nats prémédités, faux, subornations de té¬ moins, etc., soient exécutés, et les procédures continuées. Un membre convertit en motion la pétition du citoyen Siriat, et la Convention nationale rend le décret suivant : (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 5. (2) Archives nationales, carton G 278, dossier 735. (3) Voy. ci-après, p. 454, la lettre du citoyen Claude Fournier. (Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j J6 h{u'�c *nTu 453 « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu la pétition du citoyen Siriat, et la proposi¬ tion faite par l’un de ses membres, décrète : Art. 1er. « Qu’il est sursis à l’exécution de l’arrêté du représentant du peuple Prost, relatif à des des¬ titutions et remplacements dans le district de Belley, jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné. Art. 2. « Que les fonctionnaires publics destitués con¬ tinueront provisoirement l’exercice de leurs fonc¬ tions. Art. 3. « Qu’il sera également sursis à l’instruction et jugement de l’accusation portée contre Vetard, Piot et complices, pendant le mois. Art. 4. « Que les personnes détenues par ordre du co¬ mité de surveillance de Belley seront provisoire¬ ment mises en liberté, à l’exception des ci-devant nobles. Art. 5. « Enfin, que son comité de sûreté générale de¬ meure chargé de lui faire incessamment un rap¬ port sur le contenu de la pétition du citoyen Siriat, et objets accessoires (1). » Un membre [Laurent-Lecointre (2)] expose l’état où sont les détenus dans les prisons et mai¬ sons d’arrêt de Paris, et présente, à cet égard, un projet de décret que la Convention rejette par la question préalable (3). Suit l'exposé (4) de LaurenULecointre (5). Des plaintes s’élèvent de toutes parts contre les vexations qu’éprouvent les détenus dans les prisons. Entassés les uns sur les autres, ils gé¬ missent dans la plus affreuse misère ; leur si¬ tuation fait frémir l’humanité : aucun n’ose éle¬ ver la voix, tous tremblent et sont dans la stu¬ peur. On exige de malheureux citoyens vingt sols par jour pour leurs gardiens; quelques-uns de ces infortunés sont contraints de vendre leurs habits pour payer leurs geôliers. Je ne pouvais croire à ce tissu d’horreurs, mais l’accusateur public du tribunal révolution¬ naire, que j’ai eu occasion de voir hier, ne m’a que trop confirmé l’état affreux où sont plongés (1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 5. (2) D’après les journaux de l’époque. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 6. (4) Cette pièce non signée est de la main de Lau¬ rent Lecointre. (5) Archives nationales, carton C|277, dossier 731. grand nombre d’individus, les uns coupables, les autres victimes de l’erreur ou de la malveillance combinée. Plusieurs de mes collègues, ici présents, ont assisté au récit que l’accusateur public nous a fait : comme moi, ils ont été indignés. La commune de Paris, dont on ne saurait trop louer l’active vigilance, l’administration de po¬ lice, à laquelle appartient directement le soin de régir ces lieux, sont si surchargés de services extraordinaires, qu’il leur est impossible de prévenir et arrêter les désordres et les vexations qui se commettent dans ces maisons. Pour y parvenir, l’Administration aurait besoin d’être secondée par une autorité spé¬ ciale. Si mon devoir est de vous dénoncer ces abus affligeants pour l’humanité, vos principes, bien connus, sont d’y apporter un prompt remède : je le crois facile, en adoptant le projet de décret suivant : « La Convention décrète : Art. 1er. « Le comité de Salut public est chargé de nom¬ mer deux commissaires tirés du sein de la Con¬ vention nationale, ils se feront accompagner d’un membre de la commune et d’un de l’ad¬ ministration de police, qui seront tenus de visiter toutes les prisons et maisons d’arrêt de la com¬ mune de Paris, au moins deux fois la semaine ; ils dresseront procès-verbal de la situation des prisonniers, et en rendront compte à la Con¬ vention nationale à la fin de chaque décade. Art. 2. « Ces deux commissaires seront changés tous les premiers de chaque mois, et leur mission se bornera à recevoir et vérifier, seulement, les plaintes des prisonniers, relatives à la police in¬ térieure des prisons ou maisons d’arrêt. Art. 3. « Le comité de législation présentera sous trois jours, à la Convention nationale, un projet de décret tendant à déterminer les peines à infliger aux différents préposés des prisons, qui abuseraient de leur pouvoir, et exerceraient aucun genre de vexation ou de concussion à l’égard des prisonniers. Art. 4. « Dans toute l’étendue de la Eépublique où il y a des maisons d’arrêt, un membre de la municipalité, accompagné d’un membre du co¬ mité de surveillance, feront, au moins deux fois la semaine, la visite des prisons; recevront les plaintes que les détenus auraient à faire contre les préposés à leur garde; ils y feront droit, s’il y a lieu, et enverront, tous les mois, au co¬ mité de sûreté générale, un état, signé d’eux, contenant le nombre de prisonniers, de leur si¬ tuation et de la bonne ou mauvaise tenue des prisons et maisons d’arrêt de leur com¬ mune. »