[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j *g 34 « Cette action* qui est un vrai triomphe pour les armes de la République, est d’un excellent augure pour nos opérations ultérieures, car, que ne devons -nous pas attendre d’une attaque concertée et bien mesurée, lorsque nous faisons bien à l’improviste * « Je ne saurais trop louer la bonne conduite de tous ceux de nos frères d’armes qui ont voulu se battre. Parmi ceux qui se sont le plus dis¬ tingués, et qui m’ont le plus aidé à rallier et pousser en avant, ce sont les citoyens Bona¬ parte, commandant d’artillerie; Arena et Cervani, adjudants -généraux. « Dugommier, général en chef. » Barère, au nom du comité de Salut 'public. Citoyens, si le comité de Salut public ne vous annonce pas tous les jours des succès complets, c’est le sort inévitable de plusieurs armées agissantes à la fois sur plusieurs points de la République, qui veut qu’elles partagent entre elles les hasards de la guerre. Voici les résul¬ tats. Aux armées de la Moselle et du Rhin, bra¬ voure soutenue, succès retardés ; au Nord, snccès réels; à la Vendée, les brigands cherchent à rentrer dans leurs anciens repaires, mais ils sont poursuivis par les armées de la Répu¬ bliques; au Midi, avantage remporté sous les murs de Toulon. Voici les détails. Barère fait lecture de plusieurs lettres datées de Schumberg, les 11 et 12 frimaire, adressées au comité de Salut public par les représentants du peuple, Soubrani et Michot (Richaud); elles contiennent les détails d’une affaire qui a eu lieu entre les troupes de la République commandées par le général Hoche, et les Prussiens, dans laquelle ces derniers, beaucoup plus forts, ont obligé nos braves républicains à se retirer sur Limbach, Deux-Ponts, Hornbach. La retraite s’est faite avec le plus grand ordre : nous n’ayons pas perdu une seule pièce de canon; pas même une voi¬ ture de transport. Une autre lettre écrite par les représentants du peuple, Lacoste et Baudot, qui doivent rem¬ placer Soubrani et Michot (Richaud), près l’armée de la Moselle, contient les mêmes détails que les précédents. Armée du Rhin. Strasbourg, 11 frimaire , Dieche général de divi¬ sion, commandant à Strasbourg, à Bouchotte, ministre de la guerre (1). « Je n’ai que le temps d’écrire que l’armée a eu un avantage considérable hier, 10 frimaire. L’armée s’est battue toute la journée. Notre droite les a repoussés au-delà de Gambsheim; leurs redoutes ont été enlevées la baïonnette aux reins, ainsi que les hauteurs qu’ils occu¬ paient, et d’une si rude manière qu’il n’y en a pas d’exemple. L’ennemi a perdu considérable¬ ment de monde, et nous très peu. Tous les enfants de la République étaient animés de la même ardeur et du même courage. La gauche (1) Bulletin de la Convention du 6e jour de la 2e décade du 3e mois de l’an II (vendredi 6 dé¬ cembre 1793), a aussi gagné du terrain; et deux divisions qui étaient séparées par quelque espace, se sont réunies. Il est inutile de dire qu’aucun répu¬ blicain n’a fui : depuis que nous avons des généraux sans-culottes, on ne connaît pas ça. Quelques blessés que nous avons eu criaient de toutes leurs forces en entrant dans la com¬ mune de Strasbourg : Vive la République ! Ça va, ça ira, mon sang coule! Un autre : Rai mon bras emporté, mais je m'en /..., ça va, ça ira, et vive la République! Enfin, on ne peut se faire une idée de leur dévouement à la Ré¬ publique. « Signé: Dieche. » Barère lit ensuite deux autres lettres ; elles renferment des détails sur l’ affaire du général Hoche. Nos troupes se sont battues pendant trois jours avec un courage au-dessus des éloges, elles ne se sont décidées à la retraite que par le grand nombre de troupes fraîches qui se présentaient pour les combattre et qui excédait leur nombre de plus de 20,000. Quant à la nouvelle Vendée, Barère lit un grand nombre de lettres qui toutes s’accordent sur les détails. Les unes sont écrites par les administrateurs composant le comité de cor¬ respondance du département d’Indre-et-Loire, à Tours; les autres par les représentants du peuple qui se trouvent dans ce canton. Il en résulte sommairement que pour rentrer dans leurs anciens repaires, les rebelles tentent un passage sur la Loire ; qu’ils sont entrés dans la Flèche, qu’ils ont été ensuite obligés d’éva¬ cuer; plusieurs y sont péris de misère et de froid, n’ayant ni chaussures ni habits, et qu’ils menacent d’attaquer Angers, où ils paraissent vouloir hiverner. Le général Coumer écrit de Saumur, le 13 frimaire : « L’ennemi vient de se porter sur Angers, qu’il attaque sur tous les points; depuis trois heures du matin le canon gronde; mais l’esprit des habitants et de la garnison est excellent, et la ville est très bien fortifiée. Ainsi, je ne doute pas que ses tentatives ne soient vaines; c’est en vain qu’ils veulent passer le pont de Cé, les soldats républicains sont là pour les en empêcher. Saumur est dans un état respec¬ table; il vient d’être proclamé en état de siège par un arrêté des représentants du peuple. Le patriotisme qui anime les habitants eu la gar¬ nison, promet une bonne défense si les ennemis venaient nous attaquer; ce que je ne crois pas. Je compte bientôt pouvoir vous annoncer que les rebelles ont été repoussés sur tous les points. » Voici l’extrait de la lettre du représentant du peuple, Guimbertaut, au comité de Salut public, de Tours, le 14 frimaire. « Hier nous avons reçu une bonne nouvelle; on nous a appris l’évacuation de la Flèche. Les brigands ont fait de grandes pertes dans leur retraite. L’armée de Mayence les poursuit toujours, toutes les dispositions sont prises pour les empêcher de passer la Loire. Ce mâtin le général a fait battre inopinément la générale, aussitôt tous les citoyens se sont rendus en armes aux différents postes, et les administra¬ teurs à leur tête. On vous a représenté cette ville en état de contre-révolution, c’est une calomnie, il vous aurait suffi pour vous assurer du contraire, d’être témoins du courage et de l’énergie de ces braves républicains. « Vive la République! Mort aux brigands! [Convention nationale.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. { » SXe’IlS 35 « p, S. — J’ai fait un tour sur les fortifications, j’y ai éprouvé une douee sensation en voyant les jeunes gens travailler avee les ouvriers; ils ont renouvelé le serment de vivre libres ou de mourir. Les brigands, disaient -ils, nous passe¬ ront sur le corps avant d’entrer dans la cité. » Le général en chef de V armée du Nord à la Con¬ vention nationale (1). a Au quartier général d’Avesnes, le 14 frimaire. » « Le général Sousbam m’a annoncé qu’il avait fait attaquer quelques avant-postes de l’ennemi, que nos troupes leur avaient tué beaucoup de monde et fait 140 prisonniers. « La municipalité de Landrecies, ainsi que le commandant, m’ont annoncé que le 11, on avait fait rentrer dans la place beaucoup de grains, de fourrages et de bestiaux qui étaient dans le faubourg d’Happegarde, et que cela s’était opéré sans tirer un coup de fusil; mais le défaut de voitures n’ayant pas permis d’ache¬ ver cette opération, on recommença le lende¬ main. « Signé : Jourdan. » Barère. Avant de vous donner connaissance de l’avantage que nous avons remporté à Toulon, je dois vous donner connaissance d’une lettre qu’a reçue, de Londres, le ministre des affaires étrangères. Elle annonce que le roi d’ Angleterre vient de donner le commandement de l’armée qui est à Toulon, au général Ohara. On attribue beaucoup de mérite à ce général, voilà pourquoi on. l’a nommé : car on est per¬ suadé que les Français vont attaquer Toulon, de manière qu’il sera difficile de leur résister. Cette lettre annonce aussi que les alliés sont divisée pour savoir s’ils brûleront nos arsenaux et nos vaisseaux, et s’ils se retireront. Barère lit une lettre du général Dugommier et une du représentant du peuple Saliceti, qui contient les mêmes détails. Elle finit ainsi : « Dans ce moment on vient d’amener un par¬ lementaire anglais qui portait une lettre du commandant des forces anglaises dans Toulon. Nous vous la ferons passer. » Barère. Cette lettre, adressée au général français par les scélérats qui ont acheté Toulon, réclamait l’indulgence de la nation, en faveur du général Ohara. Le comité de Salut publiera pris des mesures dont vous serez satisfaits. La séance est levée à 4 heures 1/4 (2). Signé : Romme, président; Roger-Ducos, Philippeaux, Frecine, Merlin (de Thion-ville), Reverchon, Richard, secrétaires. (1) Supplément au Bulletin de la Convention natio¬ nale du 7e jour de la 2e décade du 3e mois de l’an II (samedi 7 décembre 2793). (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 28. PIÈCES ET DOCUMENTS NON MENTION¬ NÉS AU PROCÈS-VERBAL MAIS QUI SE RAPPORTENT OU PARAISSENT SE RAP¬ PORTER A LA SÉANCE DU 16 FRIMAIRE AN II AU MATIN (VENDREDI 6 DÉCEMBRE 1793.) I. PÉTITION DES CITOYENS DE LüSIGNAN PAR LAQUELLE ILS DEMANDENT QUE CETTE VILLE s’appelle désormais Fondecef - la - Mon¬ tagne (1). Suit le texte de cette pétition, d’après un docu¬ ment des Archives nationales (2). « Lusignan, Il frimaire l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible et le leï de la mort dn tyran. « Citoyens représentants, « Notre ville portait le nom d’anciens tyrans. Les Lusignan ne s’étaient pas contentés d’asser¬ vir leurs compatriotes, ils profitèrent d’un temps où le fanatisme était à son comble et où la raison était étouffée sous la masse des préjugés énormes pour aller porter la guerre à des peuples paisibles et s’emparer d’un paya qu’ils disaient sanctifié, mais dont l’henrense fécondité faisait le seul objet de leur ambition. De vrais patriotes ont en horreur tout ce qui peut conserver l’idée du despotisme; ce senti¬ ment était inné chez nous, citoyens représen¬ tants, avant que vous eussiez fait tomber la tête des tyrans. Nous avons donc rejeté le nom de Lusignan, que notre ville a porté jusqu’ici, et nous lui avons donné celui de Fondecef-la-Montagne; le nom d’une fontaine célèbre par la beauté de sa source, et qui porte autour de notre commune la fertihté et l’abondance, mérite bien de remplacer celui des despotes qui l’opprimaient. Nous y joignons celui de la Montagne, et nous le devons au sentiment de reoonnaissauce pour l’heureuse constitution que nous a donnée la vertueuse Montagne de la Constitution. Nous sommes donc résolus, ci¬ toyens représentants, de ne point porter d’autre nom que celui de Fondecef-la-Montagne, et nous espérons que vous approuverez cette dénomination. Vous avez an reste commencé le bonheur des Français, nous vous invitons, nous vous prions même de ne point abandonner votre poste avant de l’avoir entièrement con¬ sommé. Ce sont les vœux des fidèles républicains de la commune de Fondecef-la-Montagne. « Ruet, secrétaire; J. Grimault, secrétaire; Naudeau, président. » (1) La pétition des habitants de Lusignan n’est pas mentionnée au procès-verbal de la séance du 16 frimaire an II; mais, en marge du document qui existe aux Archives nationales, on lit l’indication suivante : « Renvoyé aux comités d’instruction pu¬ blique et de division, le 16 frimaire an II de la République ; Roger Ducos, secrétaire. » (2) Archives nationales , carton F17 1008*, dos¬ sier 1356.