SÉANCE DU 7 VENDÉMIAIRE AN III (28 SEPTEMBRE 1794) - N° 39 121 tionnaires publics avoient été admis sans examen; l’affiche de ces scandaleuses erreurs avoit été arrêtée sans discussion. Ils ajoutent que, soulevés d’une juste indignation de cette marche audacieuse, ils ont rappelé la société aux principes, ajourné ses séances, soumis à une épuration nouvelle ceux de ses membres admis en masse, et envoyé l’orateur au comité de Sûreté générale. Insertion au bulletin, et renvoi aux comités de Salut public et de Sûreté générale (66). [Charlier et Pocholle, représentans du peuple, envoyés à Commune-Affranchie par le décret du 4 fructidor, et dans les départemens du Rhône et de la Loire par celui du 10 du même mois, à la Convention nationale ] (67) Citoyens collègues, La situation de Commune-Affranchie fixe en ce moment, d’une manière particulière, vos regards et votre sollicitude : nous devons vous faire connoître tous les moyens que nous employons pour y épurer l’esprit public, et pour en bannir à jamais toutes les semences de désordre dont les développemens ont causé dans son sein de si funestes ravages; c’est un corps malade, épuisé par de longues souffrances, dont quelques hommes ont pu vouloir l’anéantissement total, mais que des soins prudens, et surtout un amour de la patrie, peuvent rendre à la vie et à la liberté. La société populaire sembloit avoir été choisie ces jours derniers, par les intrigans, pour être le théâtre de leurs mouvemens contre-révolutionnaires et le foyer des complots les plus sinistres. Un orateur avoit osé y proférer ces paroles impies : Le souverain est immédiatement dans les sociétés populaires... Il est un grand principe qu’on ne sauroit jamais trop méditer; ce n’est pas une société populaire seule qui est le souverain, ce n’en est qu’une fraction ; la volonté générale se compose du vœu de chaque société populaire. A la suite de son discours artificieusement prolongé, et sur sa proposition, un nombre considérable de ci-devant fonctionnaires avoient été admis sans examen; l’impression et l’affiche de ses scandaleuses erreurs avoient été arrêtées sans discussion ; des murs en étoient couverts, les bons citoyens en frémissoient, et la terreur reprenoit son empire. Soulevés d’une juste indignation à la vue de cette marche audacieuse, nous avons rappelé la société aux principes; ajourné ses séances qui se tenoient dans une salle de spectacle, jusqu’au moïnènt où elle aura trouvé un local plus propre (66) P.-V., XLVI, 142-143. Mention dans Ann. Patr., n" 636; Ann. R. F., n” 8; C. Eg., n° 771; F. de la Républ., n° 8; Gazette Fr., n” 1001; J. Fr., n” 733; J. Paris, n° 8; J. Perlet, n°735; J. Univ., n° 1769; M. U., XLIV, 117-118; Mess. Soir, n° 771 ; Rép., n° 8. (67) C 320, pl. 1329, p. 14. Bull., 7 vend. ; Moniteur, XXII, 107-108; Débats, n“ 737, 92; M. U., XLIV, 130-131. à l’ordre et à la gravité de ses délibérations; soumis à une épuration nouvelle ceux de ses membres qu’une motion insidieuse avoit fait admettre en masse, et envoyé l’orateur au comité de Sûreté générale. Cet homme a-t-il été l’instrument d’une intrigue locale? ou l’étrange paradoxe qu’il a mis en avant, appartient-il à un complot plus vaste dans lequel on chercberoit à envelopper la république entière ? C’est ce que votre comité examinera dans sa sagesse, et d’après les renseignemens que nous lui fournissons; mais nous demandons à tout républicain qui pense, si l’aristocratie, désespérée de n’avoir pu entraîner le peuple dans le piège qu’elle lui avoit tendu en lui proposant la convocation des assemblées primaires, pouvoit imaginer un système plus atroce que celui de transporter dans les sociétés populaires l’exercice de la souveraineté, pour préparer par-là l’anéantissement du gouvernement révolutionnaire, de la convention et de la liberté. Nous n’avons eu besoin que de signaler ces erreurs pour en faire sentir les désastreuses conséquences : l’arrêté dans lequel nous les dénonçons à l’opinion publique, parut hier; de toutes parts on se rassembloit pour le lire; ces principes recevoient un assentiment général; c’est qu’ils sont puisés dans la nature, et que le peuple, qui sent ses droits, ne se trompe jamais quand on les lui expose avec franchise. Nous vous en faisons passer quelques exemplaires, et nous joignons le placard infâme qui l’a provoqué. Comptez sim notre dévouement et notre haine inextinguible pour tous les empyriques, tous les dominateurs et tous les traîtres. Salut et fraternité. Signé, Pocholle, Charlier. PROCLAMATION. Au nom du Peuple français. Charlier et Pocholle, représentans du peuple, envoyés à Commune-Affranchie par le décret du 4 fructidor, et dans les départemens du Rhône et de la Loire, par celui du 10 du même mois. Informés qu’au nom de la société populaire régénérée de Commune-Affranchie, il a été affiché en divers beux de cette commune, un imprimé qui contient les maximes les plus dangereuses et les plus contraires au bonheur social : Qu’on y a avancé, comme principe incontestable : que le souverain est immédiatement dans les sociétés populaires ; qu’on lit plus bas: « Il est un grand principe qu’on ne sauroit trop méditer, ce n’est pas une société populaire seule qui est le souverain, ce n’en est qu’une fraction. La volonté générale se compose du vœu de chaque société populaire ». Considérant que l’adoption de ces idées se-roient une atteinte coupable à la souveraineté du peuple; qu’elles tendent à détruire le gouvernement révolutionnaire, et deviendroient, entre les mains des intrigans, une source féconde d’agitations et d’inquiétudes; que si les 122 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE droits des assemblées primaires, dont la collection peut seule former le véritable souverain, étoient transportés dans des sociétés partielles, le peuple seroit dépouillé, par le fait, de sa souveraineté, et le gouvernement révolutionnaire sans garantie; Considérant que les propositions dont il s’agit se trouvent dans un discours à la suite duquel, par un mouvement dont les causes ne sont pas encore bien connues, la société de Commune-Affranchie s’est tout-à-coup accrue d’un nombre considérable de citoyens dont l’admission n’a point été soumise aux formalités ordinaires, et à celles que prescrivoit notamment l’arrêté des représentans Laporte et Reverchon, en date du 6 fructidor; Qu’il seroit injuste de rien préjuger contre le caractère civique et moral d’aucun des individus admis de cette manière, mais qu’il y aurait en même temps une sorte d’aveuglement à ne pas voir que, dans cette circonstance, les hommes les plus purs peuvent être trompés par les plus perfides; Désirant que la vérité éclate dans tout son jour, que les seuls coupables soient punis, et que tous les bons citoyens, ceux qui n’ont pris aucune part aux intrigues, aux brigandages, aux actes d’oppression qui ont fait le malheur de cette commune, et qui, fidèles aux principes de probité et d’honneur dont la masse des sans-culottes s’est montrée constamment animée, n’ont souillé leurs mains ni leurs cœurs d’aucun crime, recueillent le témoignage dû à leur incorruptibilité ; Considérant que tel fut le but des représentans Laporte et Reverchon, lorsqu’ils formèrent un nouveau noyau de société populaire, et qu’ils approuvèrent le mode d’admission que les membres choisis pour le composer jugèrent utile d’adopter : que leurs intentions ont été perfidement perverties, quand, pour empêcher l’effet de leurs mesures salutaires, on a prétendu que les ci-devant membres de la société se trouvoient, par cette régénération, calomniés en masse et confondus avec ceux qui, sans-doute en très-petit nombre, ont dirigé les vexations et les injustices auxquelles ils ont voulu mettre un terme; que ces représentans n’ont jamais pensé qu’on pût leur reprocher d’avoir enveloppé dans une proscription générale tous ceux qui n’ont point été appelés à former le noyau régénérateur, mais qu’ils ont cherché seulement à les soumettre à une épuration propre à donner à leurs principes et à leur patriotisme un nouvel éclat; Considérant enfin que de toutes parts on cherche à dissoudre les sociétés populaires en les éloignant de leur véritable but, et en transformant en autorité la surveillance qui doit essentiellement leur appartenir ; que le moyen de tromper les efforts des malveillans qui veulent les abattre, est de les ramener aux principes quand elles s’en écartent, et de les éclairer sur les pièges qu’on peut leur tendre; Arrêtent ce qui suit : Article premier. - La société populaire régénérée de Commune-Affranchie est provisoirement composée des membres qui la formoient avant la séance du 29 fructidor. Art. II. — Les membres admis depuis cette séance seront soumis à l’épuration prescrite par les réglemens, et aucunes admissions collectives ne pourront désormais avoir lieu. Art. III. - Attendu que le local de la société n’est point favorable à ses délibérations, qu’il a pu être en partie cause du désordre qui s’y est introduit, il sera fait choix incessamment d’un nouveau local, et jusqu’à ce moment les séances demeurent suspendues. Art. IV. — Le peuple sera appelé à se réunir décadi prochain dans un lieu qui sera consacré provisoirement à son instruction, et qui sera indiqué par les représentans du peuple. Art. V. - Les bons citoyens sont invités à surveiller tous les rassemblemens qui pourraient troubler la tranquillité publique, et à tenir les yeux sans cesse ouverts sur les manœuvres des ennemis de la révolution. Art. VI. - Le présent arrêté sera sur-le-champ envoyé à la Convention nationale, avec un exemplaire du placard dont il y est fait mention; il sera imprimé et affiché dans toute l’étendue des deux départemens du Rhône et de la Loire. Toutes les autorités constituées existantes à Commune-Affranchie sont chargées de son exécution. Fait à Commune-Affranchie, le 3 vendémiaire, l’an III de la république française une et indivisible. Les représentans du peuple. Signé , L. J. Charlier, Pocholle. 40 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités de Salut public, d’instruction publique et des Travaux publics, réunis, décrète ce qui suit : Article premier. - L’école centrale des travaux publics, préparée à Paris en exécution de la loi du 21 ventôse dernier, sera ouverte le 10 frimaire prochain. Art. II. - Il ne sera admis, en qualité d’élèves, que des jeunes gens qui auront justifié de leur bonne conduite, ainsi que de leur attachement aux principes républicains, et qui auront prouvé leur intelligence en subissant un examen sur l’arithmétique et sur les éléments d’algèbre et de géométrie. Art. III. - Cet examen aura lieu en même temps dans plusieurs communes distribuées sur le territoire de la France, et où les candidats pourront se rendre suivant la proximité des lieux et la facilité des communications. Pour l’année actuelle, ces communes seront : Dune-Libre [ci-devant Dunkerque], Amiens, Mézières, Caen, Rouen, Reims, Paris, Metz, Strasbourg, Brest, Rennes, Nantes, Tours, Auxerre, Dijon, Rochefort, Bordeaux, Bayonne, Toulouse, Montpellier, Marseille et Grenoble.