SÉANCE DU 4 BRUMAIRE AN III (25 OCTOBRE 1794) - N° 1 49 sion aux loix que nous sommes dignes de la liberté, de l’égalité et du bonheur que nous avons droit d’attendre de tes sollicitudes. Vive la République, Vive la Montagne. Suivent 103 signatures. c [Les administrateurs du département du Loiret à la Convention nationale, s. d.] (4) Liberté, Egalité. Représentants du Peuple. Qu’ils sont heureux les administrateurs du département de Paris, d’avoir pû les premiers, vous témoigner la satisfaction qu’ils ont éprouvé à la lecture de l’adresse sublime que vous venez de proclamer, dans votre séance du dix huit de ce mois. Nous avions à peine lû cette déclaration consolante, des vrais et sages principes que vous y manifestés, que nous regrettions déjà de ne pouvoir, comme eux, vous porter aussitôt nous-mêmes l’hommage de notre reconnaissance et de notre félicitation. Oui, Citoyens Représentans, vous le voulés, le salut de la Patrie... La Patrie sera sauvée... quels que soient les efforts, quelles que soient les manoeuvres des agitateurs, des anarchistes, des terroristes, des prétendus amis par excellence de ce peuple magnanime, pour lui inspirer des craintes, de la défiance et des inquiétudes ; il ne peut plus en douter, son bonheur est certain; il étoit l’ennemi des factions, vous venés de les détruire, il abhorroit le sis-tême de terreur et de sang, auquel il vient d’échapper, et que des conspirateurs hipocrites n’avoient établi, que des continuateurs non moins scélérats ne vouloient entretenir, que pour le ramener au plus honteux et au plus dur esclavage, vous venés d’assurer le triomphe de la vertu, de la justice et de l’humanité. Il ne craint plus l’aristocrate insolent, le malveillant perfide, le dangereux modéré ; vous avez garanti ses droits et sa liberté contre les tentatives que ces castes abominables voudroient faire pour les lui ravir par le maintien du gouvernement révolutionnaire. Comme les administateurs du département de Paris, nous maintiendrons avec vous en ce qui nous concerne, ce gouvernement salutaire, nous nous rallierons toujours aux principes de nos législateurs, nous n’avons jamais entendu d’autres voix que la leur, reconnu d’autorité légitime que celle qui réside entre leurs mains, nos travaux, nos soins, notre sollicitude, ne seront dirigés que vers le bonheur de la France et la prospérité de la République, notre dernier cri sera toujours pour elle et pour ses dignes représentans. Labbé, Carmentier, Doumen, Maravelle, président, Chamouillet, Bernard, Taboureau, Marie. (4) C 323, pl. 1384, p. 39. d [La société populaire d’Aubigny à la Convention nationale, le 24 vendémiaire an HT] (5) Liberté, égalité, fraternité. Citoyens Représentans, La proclamation que vous venez d’adresser au peuple français est l’expression de la sagesse, la garantie de votre gloire et le présage de nouveaux triomphes. Les amis de la liberté y retrouvent ces principes féconds de la prospérité des Républiques que des mains atroces avaient couvert d’un voile souillé de sang. Ils triompheront en dépit des fripons et des intrigants ! Vous interrogez le peuple, naguère il n’osoit s’expliquer. Sa réponse aujourd’hui sera franche et unanime. Vive la Convention! qu’elle fasse regner à jamais la justice! les agitateurs sont a nud, on les compte, ils rugissent devant le faisceau indivisible du peuple et de ses représentans. Leurs voix mensongères nous criaient en vain que l’existence des sociétés populaires était compromise, que la liberté chancellait. La liberté ne chancelle pas quand elle s’appuye sur la justice. Ce sont eux qui avilissent les sociétés populaires, mais qu’ils ne s’y trompent pas, ils ne trouveront pas d’azile dans nos enceintes, nous repousserons les ennemis de la patrie de quelque masque qu’ils soient couverts. Vous les avez signalé, c’est assez. Nous vous faisons passer l’adresse que nous avons envoyé à la société des Jacobins. C’est l’exposé de nos principes et la condition de notre union avec eux. Sans doute, ils feront tous leurs efforts pour étouffer de dangereuses divisions. Ils se souviendront de leurs vertus premières, ils ne se sépareront pas du peuple et de vous. Nous aimons à épancher dans votre sein ce voeu sincère. Investis de la confiance nationale et de l’autorité suprême, celui qui vous méconnoit, outrage le peuple. Artisans infatigables du bonheur public, celui qui ne vous est pas attaché est un monstre d’ingratitude. Girault, président, Nourassuy, secrétaire. [La société populaire dAubigny à la société des Jacobins, le 15 vendémiaire an III] (6) Egalité, Liberté, Fraternité. Frères et amis, Où tend cette guerre de dénonciations qui nous agite et ménace la tranquillité de l’état? Sacrifierons nous la patrie à l’irascibilité de l’amour propre? Il n’y a qu’un moyen d’affermir la République et d’utiliser cinq années d’efforts et de sacrifices, c’est etouffer les germes de division qu’un (5) C 325, pl. 1404, p. 4. (6) C 325, pl. 1404, p. 5. 50 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE génie infernal jette sans cesse parmi nous. Les armées des despotes ne résistent pas à la masse de nos deffenseurs. Les ennemis intérieurs se débattront en vain contre la masse des bons citoyens qui marchent de concert au seul but de la révolution, au règne de la liberté et de l’égalité. Il est bien constant que la sagesse seule peut fixer notre bonheur. Au milieu de tant de crises, les éléments en sont encore épars. Confierons nous le soin de les rassembler à l’ambition, à la jalousie, à l’intrigue à cette nuée de passions viles et turbulentes qui excitent les haines et la fureur des partis. On tiraille l’opinion, on l’egare et au lieu de ce faisceau de lumières qui devrait en jaillir pour guider la Représentation nationale et lui découvrir le voeu sincère et prononcé du peuple, la perfidie s’efforce d’établir une opposition funeste entre la pensée du peuple et celle de ses représentans. Diverses bannières sont élévées, comme s’il pouvoit en exister deux pour les hommes libres. N’est-ce pas pour nous dégoûter de la République qu’on affecte de la placer dans une perspective éloignée; sur la pointe d’un rocher ou quelques hommes seuls peuvent gravir ; comme si la nature ne l’avait pas placé à côté de nous. On mettoit aussi la vérité au fonds d’un puits; mais la vérité et la liberté se donnent la main, le peuple françois qui les a trouvé l’une et l’autre, ne les perdra jamais. Quelle est donc cette manie d’entasser révolutions sur révolutions pour arriver à un résultat simple, rapproché de tous les coeurs ? Ont-ils des enfants ou des pères dans les camps ceux qui se jouent ainsi de la loyauté et du courage de vingt-cinq millions d’hommes? Nous avons acquis en peu de temps une longue expérience. La liberté n’est pas dans ces tourbillons qui se croisent, se heurtent et finissent par se détruire mutuellement. Elle est dans le peuple qui se bat pour elle, dans ce peuple fier et sensible qui n’a d’autres jouissances que ses triomphes ; de sentiment plus habituel que la haine des tyrans, dans ce peuple que rien n’étonne lorsqu’il s’agit d’assurer son indépendance, si ce n’est les entraves qu’apportent à sa volonté mille factions renaissantes. Un homme sanguinaire et ambitieux a été précipité. Au faite du gouvernement il combi-noit une domination atroce : des âmes de boue, dans toute l’étendue de l’empire répondaient à ses projets, personne ne doute combien ils ont abusé du gouvernement révolutionnaire, bientôt tous les Français auraient été suspects. Les victimes s’amoncelaient, la nature a frémi. Tout-à-coup la Convention nationale s’est levée contre Robespierre, comme la nation s’étoit levée contre Capet, il falloit replacer la justice inflexible ou regnoit la terreur, redonner aux citoyens l’attitude de la liberté et à la pensée son essort. La Convention s’est empressée de venger l’innocence et la morale publique. Quelques hommes crient maintenant au modérantisme ; mais criaient-ils à la tyrannie ? Ces hommes sont-ils le peuple? Est-il bien certain que ce ne soit pas le regret de n’être plus dominateurs, la rage de voir libres ceux que des vengeances personnelles avaient plongé dans les cachots, l’orgueil enfin d’un sistême qui inspire tant de vociférations ? Où en sommes nous, si nous n’abattons jamais que les tyrans, sans détruire la tyrannie? Demain un autre s’élève et l’énergie du peuple est vaine... Ce n’est que dans des cas extrêmement rares qu’il est necessaire de voiler la statue de la liberté, pour celle de la justice quelle main sacrilège osera la dérober aux yeux du peuple. Tous les amis vrais de la République sont convaincus de la nécessité du gouvernement révolutionnaire, tant que les ennemis du dehors ne sont pas hors de combat. Il double l’activité des moyens, brise l’insouciance et l’égoisme, inocule les vertus républicaines et les moeurs d’un peuple nouveau, sur une nation dont les anciennes habitudes concorderaient mal avec la Démocratie, et prépare le règne durable d’une constitution simple mise sous la garde de toutes les vertus. Le gouvernement révolutionnaire comprime la malveillance, déjoue les complots et venge le peuple des conspirateurs, mais ce gouvernement a des principes, il n’est pas assis sur l’arbitraire, il doit être jugé par la postérité. Suffira-t-il qu’il ait ensanglanté les pages de l’histoire. Le confondra-t-on avec la domination de Sylla et n’aurons nous travaillé qu’à établir la tyrannie des vengeurs? Frères et amis, ne mettons pas à fonder la République cette légèreté que l’Europe nous reprocha jadis, ne nous querellons pas sur des mots. Il a fallu de l’audace pour abattre le trône, mais nous avons aussi à construire à la liberté un temple immortel. Ecartons l’ennemi qui rugit de le voir s’elever majestueusement sur les décombres des bastilles et des autels imposteurs, éclairons les architectes mais ne semons pas la division parmi eux. Est-ce ainsi que la reconnoissance publique les payera du plan hardi qu’ils ont conçu sous les poignards et qu’ils exécutent encore sous les poignards. Nous sommes les colonnes de la République, remplissons notre vocation. Nous voyons avec douleur que des esprits exaspérés en dirigeant contre quelques uns de vos membres des reproches sur lesquels nous ne pouvons juger, portent en général aux sociétés populaires des coups dangereux, mais les droits de l’homme sont devant nous... Nous vous sommes attachés parce que les tyrans vous détestent, la société des Jacobins pourrait-elle cesser de bien mériter de la patrie? Vous nous avez exposé vos principes, nous vous répondons en épanchant dans votre sein, nos plus intimes sentiments. Occupons nous des grands interets de la patrie. La patrie comptera nos services. Que peuvent les libelles contre la probité d’un républicain? La vraie réponse aux injures est la fidélité à ses devoirs. Venez dans nos campagnes, sondez la pensée de la classe agricole sur ces dissentions qui perpétuent la crise révolutionnaire ; sondez la pensée de la classe intéressante des artisans, interrogez aussi nos valeureux frères d’armes? Voila bien le peuple, le peuple pour qui se fait la révolution et qui doit y trouver son bonheur, ils vous répondront tous qu’ils ne veulent pas SÉANCE DU 4 BRUMAIRE AN III (25 OCTOBRE 1794) - N° 2 51 plus du règne des intrigants que de celui des roix. Ils vous diront tous qu’ils comptent au nombre des conspirateurs ceux qui entravent la marche de leurs fidèles représentans, ceux qui les détournent de porter la vie et la prospérité dans toutes les parties du gouvernement; ils vous diront tous qu’ils veulent gôuter le prix de leur sang. Frères et amis qui résistera à la voix du peuple? Voulons nous laisser partager les dépouilles à cette poignée d’ambitieux qui les convoitent tour-à-tour, nous, nous servons le peuple, rallions nous aux principes et faisons pour jamais le sacrifice des haines et des vengeances particulières. Nous n’avons pas trop de fiel pour les tyrans. Salut et fraternité! Pour copie Nourassuy, secrétaire. 2 La société populaire de Paimboeuf [Loire-Inférieure] invite la Convention nationale à prendre des mesures sévères contre les brigands de la Vendée, mais elle demande que ces mesures ne s’étendent pas au gré des turbulens anarchistes. « Gardez-vous, dit-elle, citoyens législateurs, d’embrasser ce système de terreur, qui naguère alarmoit les vrais amis de la patrie! cet exécrable système qui n’auroit pas entré dans l’âme d’un Néron, a trouvé des prosélytes et a dominé un instant : quels malheurs n’en ont pas résulté! des flots de sang ont coulé, des milliers de victimes de tout âge, de tout sexe... Vous frémissez! La Loire a pû les engloutir, mais elle ne pourra jamais laver la tache que de pareils forfaits impriment dans l’histoire de la révolution ». Elle annonce qu’elle va redoubler d’efforts pour surveiller tout ce qui pourroit porter atteinte à la représentation nationale. Mention honorable, insertion au bulletin (7). \La société populaire régénérée de Paimboeuf à la Convention nationale, le 23 vendémiaire an III\ (8) A chaque courier, nous recevons, Citoyens Législateurs, une foule d’adresses qui vous ont été présentées : La plus grande partie, écrites dans le même sens et tendant au même but. Cette conformité si exacte, cet accord si subit ne serait-il point le cachet de l’imposture? A en croire ces productions artistement colorées, il semble que tout est en combustion et que la chose publique est plus que jamais en danger. Les meilleurs citoyens, vous dit-on, sont (7) P.-V., XL VIII, 40-41. (8) C 325, pl. 1404, p. 3. Mess. Soir, n° 798. incarcérés, les ennemis du peuple sont élargis, les patriotes sont opprimés, le modérantisme reprend son empire, l’aristocratie triomphe : et l’on finit toujours par vous inviter à prendre des mesures de sévérité, à punir, à fraper, à faire éclater la foudre nationale. Frapés de ces grandes déclamations, nous avons regardé autour de nous. Qu’avons-nous vu? Rien, Citoyens Représentans, de ce qui vous est annoncé. Les patriotes, loin d’être persécutés, sont tranquilles et respirent avec confiance l’air de la liberté, depuis que vous avez abattu le Coriphée des désorganisateurs. Sans cesser de surveiller, on se repose avec sécurité sur la Convention ; ses décrets sont exécutés, les autorités sont respectées, et nous ne voyons s’agiter que nos premiers ennemis, les brigands de la Vendée. Ainsi c’est contre eux seuls que nous vous invitons à prendre des mesures sévères. Mais gardez-vous, Citoyens Législateurs, d’étendre ces mesures au gré des turbulents anarchistes; gardez-vous d’embrasser ce sis-tême de terreur qui, naguère allarmait les vrais amis de la patrie. Cet execrable sistême, qui n’aurait pas entré dans l’âme d’un Néron a trouvé des prosélytes et a dominé un instant : quels malheurs n’en ont pas résulté. Des flots de sang ont coulé; des milliers de victimes de tous âges, de tous sexe... vous frémissez ... La Loire a pu les engloutir, mais elle ne pourra jamais laver la tache que de pareils forfaits impriment dans l’histoire de la révolution. Non, Citoyens Législateurs, le crime n’est pas fait pour des hommes régénérés. Ce n’est pas par le sang qu’on honore la liberté ; il faut un autre culte à cette divinité des Français et ce n’est pas en marchant sur des monceaux de cadavres que l’on parvient à son sanctuaire. Que faut-il donc? L’exercice des vertus que vous avez mis à l’ordre du jour : la justice et la probité. Voilà nos sentiments, Citoyens Législateurs, nous ne les avons pas emprunté. Nous ne suivons aucun parti, aucune faction. Nous ne nous appelions ni Jacobins, ni Montagnards. Républicains fidelles, Républicains constament attachés à la Convention, à tout ce qui émane d’elle : voila le seul titre auquel nous aspirons, et nous nous l’attribuons avec fierté. Si des exagérés, si des hommes ultra révolutionnaires qui veulent du sang au lieu de principes, de la terreur au lieu d’équité, du désordre au lieu d’union, de la morgue au lieu de fraternité, l’inquisition au lieu de la liberté. Si ces hommes là dis-je, nous traitent de modérés, honorés de leur censure, nous ne leur répondrons pas et ce sera pour nous un droit de plus à votre confiance. Nous allons redoubler d’efforts pour surveiller tous ceux qui pourrait porter atteintes à la représentation nationale, pour ne nous faire d’ennemis que les ennemis du bien public. Nous croyons, Citoyens Représentans, que nous éviterons les écarts de l’erreur, tandis que nous conserverons au dedans de nous ce sentiment que vous aimez tant à répandre, ce sentiment qui ennoblit et élève l’homme en le