402 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Sénéchaussée d’Aix.] après avoir employé les travaux de toute Tannée pour faire fructifier leurs possessions circonscrites, trouver le salaire de leurs peines. Pour le surplus de ses doléances, ladite communauté donne plein pouvoir à ses députés de concourir à celles qui seront dressées dans l’assemblée qui se tiendra par-devant M. le sénéchal ou M. son lieutenant, laissant à la prudence d’iceux de consentir à tout ce qu’ils trouveront juste et raisonnable pour le bien de l’Etat, pro-mettan, tladite communauté, d’approuver et ratifier tout ce que ses députés auront consenti. Fait et publié à la Roque-d’Antheron, dans l’église paroissiale du même lieu, le 29 mars 1789, aux heures de relevée. Signé Garcin ; Joseph Garcrn ; S. Jacqueme ; Gautier ; S. Phelix; J. Deine ; Gardios; R. Michel; Villevieille; P. Massié; Daubergue cadet ; Reyre; J. Auphan ; Barret ; Bénéforte; Auphan ; J. Gor-niilon; P. Villevieille; Brunet; Barret; Bomard ; P. Auphan; Danbergue neveu ; Rey; P. Serre; J. Jacquème; F. Garmain; S. Èlzear Mazet ; J. Bonnet ; J. -B. Bonnard ; Rossen ; A. Turphème ; Bernard ; Grespin ; Atertian ; Philys ; Jabonine ; L. Gourbon ; Michel; B. Philip ; D. Roussiez ; J. -B. Seguin; Ghrespin ; D. Jacquème; F. Sambuc; P. -J. Muse; J. Rey ; M. Consul; Minesse, juge; P. Julien, greffier. CAHIER Des doléances, remontrances et réclamations de la communauté de Roquefort, sénéchaussée d’Aix en Provence (1). Bans ces heureuses circonstances qui sont les plus fameuses et les plus remarquables de la monarchie, le Roi a appelé tous ses sujets. Il les rassemble autour de son trône pour concerter avec eux les moyens les plus sûrs et les plus efficaces qui pourront être pris pour couvrir le déficit qui existe dans les finances, et pour consolider la dette nationale ; il les invite à lui proposer et à lui remontrer tout ce qui peut concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, la prospérité générale du royaume et le bien de tous et de chacun de ses sujets. La communauté de Roquefort, profitant d’une faveur aussi signalée qui la confirme toujours plus dans les justes sentiments d’amour, de respect et de reconnaissance dont elle est pénétrée envers Sa Majesté, lui présente avec la confiance qu’elle lui a inspirée, de très-humbles et très-respectueuses doléances et remontrances : 1° Sur les droits féodaux qui l’accablent. Ces droits ont pris leur origine dans des temps malheureux, vers la fin de la seconde race de nos rois, époque où l’anarchie qui régnait fut cause qu’on ne put arrêter la violence de ceux qui les usurpèrent. Ges droits devinrent, dans la succession des temps, l’indemnité des seigneurs feudataires des dépenses qu’ils étaient obligés de faire pour le service militaire ; alors iis pouvaient les exiger . légitimement ; mais aujourd’hui, où, depuis le règne de Louis le Grand, le service militaire se fait aux dépens de l’Etat, et n’est payé, pour ainsi dire, que par les peuples, ces droits deviennent injustes entre les mains des seigneurs, parce qu’ils ne peuvent les exiger du peuple qu’en se soumettant à les payer deux fois, une (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. au Roi j en corps de province, et une au seigneur chacun en particulier. Non-seulement les droits seigneuriaux sont injustes par leur nature, parce qu’ils ont été usurpés, mais encore par leur effet. La cause, quoiqu’elle ait pour base un titre légitime, est néanmoins injuste dans son effet, puisqu’elle est inextinguible ; elle nuit aux affaires publiques et à l’intérêt du particulier, parce qu’elle rend les ventes' de fonds plus difficiles; le vendeur en souffre un dommage considérable par la raison que l’acheteur prélève sur le prix du fonds les redevances foncières et les lods, et d’ailleurs la servitude attachée au fonds le déprécie beaucoup. Le cultivateur qui est déjà accablé sous le fardeau des impositions royales et autres, est souvent obligé de déguerpir, le fonds ne pouvant subvenir au payement de la cense, et l’Etat est frustré ainsi du produit du fonds déguerpi qui reste sans culture. Le droit de lods présente aussi des injustices révoltantes. En voici un exemple : le seigneur inféode ün fonds de dix écus, on construit sur ce fonds un édifice qui coûte mille écus ; le fonds et l’édifice se vendant, le lods n’est pas perçu seulement sur les dix écus du prix du fonds, mais encore sur les mille écus du coût de l’édifice ; y a-t-il de la justice en cela ? Le droit d’indemnité est injuste en général, par la raison que le lods n’est dû naturellement qu’en cas de mutation, mais particulièrement pour deux objets : 1° pour la maison curiale, parce que les seigneurs , leur famille et leurs gens ont un égal besoin du ministère du curé, et que, par cette raison, ils doivent concourir à leur logement ; 2° pour l’hôtel de ville , parce que les seigneurs, ayant des biens roturiers, font assister un préposé aux assemblées municipales. Le retrait féodal est la source de beaucoup d’abus révoltants; des millions d’exemples nous apprennent que si un particulier fait une bonne affaire dans l’acquisition d’un fonds, le bénéfice est pour le seigneur qui le retient pour lui, ou pour un autre particulier qu’il favorise, en lui cédant son droit, et encore si l’acquéreur ne rapporte quittance du lods du seigneur lui-même, celle de son fermier n’étant valable que pour assurer la somme payée, il s’en voit dépouillé au bout de dix, vingt ou trente années par le seigneur qui la retient pour lui ou pour un autre en cédant son droit. Par l’acte de reconnaissance qui est nécessaire pour la conservation des droits dont on vient de parler, les seigneurs étendent souvent ces mêmes droits par des menaces de tout genre faites, et même effectuées envers des vassaux ignorants et timides. Les seigneurs extorquent le consentement de ceux-ci à des préventions tantôt douteuses, tantôt injustes, et même la renonciation à des privilèges qui leur sont acquis ; ce fait est d’autant plus vrai qu’il n’est peut-être pas un seul seigneur, en Provence, dont les reconnaissances modernes s’accordent parfaitement avec les reconnaissances anciennes, ce qui ne serait pas si les seigneurs n’avaient d’autre but en fai* sant reconnaître que le renouvellement de leurs droits certains. Sous' ces différents points de vue, la directe d’où dérivent les droits ci-dessus étant inextinguible de sa nature, est à l’Etat ce qu’est au corps humain cette maladie qui, le rongeant tous les jours, sans se jamais rassasier, en opère à la fin la destruction ; d’où il suit très-évidemment qu’il serait salutaire à l’Etat et au peuple de ren- [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.. 403 dre ce droit de directe, et ceux qui en naissent, rachetables en plusieurs payements, attendu que le payement entier, en une seule fois, serait impossible aux communautés. Et tels sont les vœux, doléances et réclamations que la communauté de ce lieu fait. La justice des seigneurs doit être abolie ; les abus, dont elle est la source, présentent le s[3ec-tacie le plus affligeant. Si un particulier n’a pas le bonheur de plaire au seigneur, soit parce que, dans le sein de l’assemblée municipale, il aura porté un suffrage, juste en soi, mais contraire aux intérêts de ce seigneur, soit parce que, dans d’autres circonstances, pour opérer le bien, il ne se conformera pas à ses vues, ce seigneur se sert du droit imposant de sa justice pour le tracasser et le vexer. Il y parvient, en se conciliant avec ses officiers qui retardent tant qu’ils peuvent Je jugement d’une demande juste que ce particulier aura intentée contre son débiteur, ou, dans le cas opposé, en accélérant les jugements de demandes intentées contre lui; s’il s’agit d’une matière criminelle, presque toujours le justiciable est traité suivant le degré de faveur ou de haine que le seigneur lui porte; d’autre part, les justices seigneuriales sont presque partout exercées par des officiers ignorants, et quia peine sachant signer leur nom, sont, à tous égards, incapables de juger de la valeur d’une prétention, que des véritables formes sous lesquelles elle doit leur être présentée. Un autre motif qui fait désirer à cette communauté l’abolition des justices seigneuriales, c’est la facilité qu’ont les débiteurs de ne payer que quand ils veulent, l’auditoire ne s’ouvrant qu’une ou deux fois l’année; les jugements y sont rares et les procès éternels, en sorte qu’il vaut mieux souffrir que de se plaindre. La communauté, par tous ces motifs, sollicite la suppression des justices seigneuriales, et réclame qu’il leur en soit substitué de royales avec arrondissements suffisants ; que les officiers qui les exerceront soient payés par le fisc, et qu’ils soient obligés de motiver leur jugement, afin que s’ils violent ouvertement la loi, ils soient responsables de leurs mauvais jugements. Le droit de chasse exclusif est un des plus injustes et des plus intolérables de la féodalité ; les préjudices et les dommages que cette communauté en reçoit la mettent à portée d’en décider et l’invitent à en demander l’abolition. Il est de droit naturel qu’on puisse se défendre contre les animaux qui nuisent à nos plantes et à nos fruits, et cependant le droit du seigneur s’y oppose; il faut, suivant ce droit, que nous laissions ravager nos campagnes par les animaux qui les infectent dans tous les quartiers de notre terroir. On voit des compagnies nombreuses de perdrix, qui, en hiver, ne trouvant de quoi manger, attaquent impitoyablement nos blés en herbe, et dans les temps d’humidité, ils les arrachent; à leur maturité , ces volatiles veulent se nourrir des grains, et, pour en manger un, ils en perdent dix. Les vignes, qui, dans notre terroir, ne sont pas si étendues qu’aux environs, en reçoivent des maux inappréciables ; la plupart du fruit est pour ces animaux, et la grappe est pour le propriétaire : les lapins et les lièvres ne causent pas moins de préjudice; on les voit partout courir et partout faire du dommage, non-seulement ils en causent aux blés, comme les perdrix, mais encore plus aux vignes, en mangeant le premier bourgeon qui est ordinairement celui qui apporte le fruit; il n’est pas jusqu’aux arbres qui ne se ressentent de leur effet ; ces animaux leur rongent l’écorce du pied, et l’arbre, se desséchant, meurt : il faut encore, suivant le droit du seigneur, que nous laissions courir dans nos fonds son chasseur avec une meute effrayante de chiens, qui, sans égard pour les temps que la chasse est défendue et la prohibition d’entrer dans quelques-unes de nos possessions, en certain temps de l’année, va les foudroyer dans toute sorte de temps indistinctement. Le chasseur du seigneur n’est pas îe seul fléau qui afflige la communauté sur ses biens; quelquefois elle a le désagrément de voir sur ses terres une douzaine de chasseurs, suivis d’une vingtaine de chiens, qui, dans le temps où les blés sont en tuyaux, les écrasent* et dans celui où les raisins sont en maturité, en font un dégât excessif; La communauté est fondée, par mille raison� toutes légitimes, à demander la liberté de chasser; mais afin qu’il n’en puisse résulter aucun inconvénient, cette liberté sera restreinte pour chacun dans ses terres et sans fusil. La banalité doit être également abolie; elle l’a déjà été par le souverain dans les communauté� qui l’avaient aliénée à prix à leur seigneur, mais la difficulté qui se rencontre et les procès qui naissentà l’occasion deprouver par quel moyenles seigneurs possèdent la banalité, sont des motifs assez puissants pour qu’elle soit abolie, à quelque titre qu’elle ait été établie ; néanmoins sous due indemnité. Le pigeonnier du seigneur est encore un objet qui tourne au détriment du peuple; des vols de plusieurs centaines de pigeons en partent, et lorsqu’ils tombent sur une terre semée ils l’écrasent. Pendant les semences, la communauté est obligée de louer des hommes qui parcourent le terroir, et font quitter aux pigeons les terres nouvellement semées* qu’ils entreprennent pour n’avoir pas le désagrément de n’avoir jeté leur grain en terre que pour ces animaux. La poule que le seigneur de ce lieu se réserve en inféodant des biens, est un pacte usuraire et injuste., parce qu’elle se multiplie en autant de fois qu’on ait dans la suite de portions de biens inféodées, de sorte que si un fonds de cent écus donné à nouveau bail se divise en vingt portions, chaque portionnaire est obligé de payer une poule grasse au seigneur, ce qui absorbe, dans le laps de cinq ans, le payement du prix de la valeur foncière du fonds qui, originairement, ne devait qu’une seule poule ; le Roi sentira cette injustice. Le sol de ce canton, peu fécond par lui-même* est réduit à tel état d’épuisement, par les entraves de l’empire féodal, que ses productions annuelles sont presque entièrement absorbées par les frais d’exploitation, les censes, les charges royales, provinciales et locales, et enfin par la dîme. Dans cet état de choses, l’agriculteur ne retire pas trois dixièmes du produit de son fonds; avec cette faible récompense de ses soins et peines, il est tenu de toutes les réparations casuelles et d’entretien, au manque des récoltes, à la perte pour cause d’altération de son vin, denrée essentielle, et enfin aux événements dont sont susceptibles les productions de son domaine; ces circonstances ont-elles lieu , ce qui est fréquent, l’agriculteur est réduit à rien. Nous disons que le propriétaire n’exige que les trois dixièmes des produits ; le calcul est clair, car, vu le prix excessif des engrais, des transports et de la main-d’œuvre , l’exploitation annuelle 404 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] emporte plus de cinq dixièmes ; ajoutez environ deux dixièmes pour la taille, les cens et la dîme, que reste-t-il donc au propriétaire? La communauté réclame donc l’abolition de la dîme, et offre de se charger de l’entretien de tout ce qui est nécessaire au pasteur qui la'gou-verne. Elle trouvera, en cela, cet avantage, qu’en augmentant les revenus de son pasteur, les indigents du pays trouveront toujours chez lui un remède contre les besoins les plus pressants, aulieu, qu’en l’état des choses, la dîme ne produit d’utile que la congrue du curé, et le restant va servir au luxe brillant et aux voluptés des décimateurs, qui insultent, par l’étalage de leurs richesses, plus mondaines qu’évangéliques, à la misère du peuple qui les lui fournit à la sueur de son front. Cependant comme il pourrait se faire que la dîme ne fût pas abolie, la communauté réclame alors qu’elle ne puisse être perçue que sur le roduit net des fruits et grains, ‘déduction faite es impositions royales et locales, et non sur la portion représentative des avances dont le moindre retranchement est une usurpation atlenta-toire et destructive de tout principe social. 2° Sur les affaires particulières et relatives à la province. L’administration particulière de la province présente beaucoup d’abus et d’inconvénients. Depuis longtemps les deux premiers ordres sont administrateurs et votent des impôts qu’ils ne payent pas. Ils profitent de la supériorité du nombre pour ne faire délibérer que ce qu’ils veulent. Lacommunauté réclamede la justice de Sa Majesté que la constitution du pays soit réformée ; à cet effet, qu’il soit permis aux communes de se nommer un syndic avec entrée aux Etats, de s’élever contre la perpétuité de la présidence, et contre la permanence de tout membre non amovible, ayant en l’état des choses entrée auxdits Etats, de requérir l’exclusion des mêmes Etats des magistrats et de tous officiers attachés au fisc; la désunion de la procuration du pays du consulat de la ville d’Aix. L’admission des nobles non possédant fiefs, et du clergé du second ordre, l’égalité des voix, par l’ordre du tiers, contre celles des deux premiers ordres, tant dans les Etats que dans la Commission intermédiaire, et surtout l’égalité de contribution pour toutes les charges royales et locales sans exception aucune, et nonobstant toute possession et privilège quelconques, attendu que le service militaire auquel les possédants fiefs étaient autrefois soumis, qui était la cause de ces privilèges, n’est plus fait aujourd’hui par les possédants fiefs, mais par la nation qui paye les frais de la guerre. Que la contribution du clergé reste dans le pays ; l’abolition ou du moins la domination des droits établis sur les vins qui passent à l’étranger-, même diminution pour ceux qui sont portés à Marseille ; la prohibition de l’entrée dans le royaume des vins étrangers, tels que les vins d’Espagne et autres - l’impression annuelle des comptes de la province dont envoi sera fait à chaque communauté, et que la répartition des sommes que le Roi accorde au pays, ensemble de l’imposition du 15 livres par feu, affectée à la haute Provence, sera faite dans le sein des Etats, et par eux arrêtée ; ce qui empêchera que ces sommes soient réparties, par faveur et par protection, au préjudice des communautés qui ont le plus souffert. 3° Pour subvenir aux besoins de l’Etat, il faudrait prendre sur les biens superflus de l’Eglise, et cela n’est pas sans exemple dans les siècles passés ; cela opérerait le bien de l’Eglise par le retour de plusieurs de ses sujets que les richesses égarent, et à l’Etat, en comblant le déficit des finances. Quant à tout ce qui concerne les Etats généraux, la réformation de tous ces grands abus qu’intéresse la généralité du royaume, cette communauté se réfère aux suffrages qui seront portés par les députés du tiers-état, plus et mieux instruits qu’elle à ce sujet, aux Etats généraux. Telles sont les très-humbles et très-respectueuses remontrances et doléances de la communauté de Roquefort. Elle espèreavec confiance, de labonté paternelle du souverain, qu’il voudra bien les accueillir favorablement. Elle lui offre les biens, les fortunes et les vies même de tous ses habitants pour les consacrer à sa gloire, au bien et à la prospérité de l’Etat, lui renouvelant le serment de la fidélité la plus inviolable. En foi de quoi, tous les habitants présents à Rassemblée généralement convoquée, qui ont su écrire, se sont soussignés, ainsi qu’au cahier double destiné à être conservé dans les archives de la communauté, au désir du règlement. Signé L. Julien; Pignol de Poiretricon ; Jean Negre; J. Michel; Bonifay; Joseph Tricon; Liver-tad; Ghaulan, secrétaire pour MM. les consuls illettrés. Coté, par première et dernière page, et paraphé au bas de chacune d’icelles, par nous , viguier, lieutenant du juge au lieu de Roquefort, soussigné, à Roquefort, le 28 mars 1789. Signé Gastau-doigt. CAHIER Des doléances , 'plaintes et remontrances de la communauté de Roques-Hautes (1). Le terroir de Roques-Hautes, naturellement très-sec, présente un sol aride et des plus ingrats du pays de Provence. La nature n’a rien fait pour les hommes dans cette partie de roc. 11 faut que l’homme y fasse tout ; ce n’est que par un travail opiniâtre et continuel qu’on peut arracher quelque production à la terre, et les habitants sont réduits à la plus affreuse misère. Ce roc infertile n’a point échappé à la féodalité, et c’est le seigueur seul qui profite du travail de ses habitants; il y a banalité de toute espèce, droit de chasse, et le seigneur entretient un colombier qui détruit les légumes que le malheureux habitant cultive. La communauté avait, comme toutes les autres, les droits d’usage, et la faculté de faire du bois dans les terres gastes ; le seigneur veut les priver de ce droit, et il abuse de ce que sa misérable communauté n’est pas assez forte pour lutter contre lui. La communauté demande que la chasse soit abolie, les gardes-terres, les chasseurs et les chiens étant plus incommodes que le gibier dont on peut se délivrer par des moyens moins onéreux; que les petites communautés de la province aient un défenseur ou un syndic, ou un bureau syndic, défenseurs libres, indépendants, et qu’on ne soit pas obligé de payer à l’Etat, de faire valoir les droits des petites communautés contre leur seigneur. Les grandes communautés ont des moyens de (lj Nous publions ce cahier d’après un manuscrit de s Archives de l’Empire.