SÉANCE DU 23 VENDÉMIAIRE AN III (14 OCTOBRE 1794) - N08 20-21 135 périeurs à leurs troupes les plus vantées par la précision et la promptitude de leurs manoeuvres ; qui ont fait une marche de six lieues sans qu’un seul d’entre eux quittât son rang et en faisant retentir les airs des chants patriotiques qui guident nos armées dans le chemin de la victoire. Toutes les municipalités voisines admirent la discipline qui règne parmi eux et qui y est maintenue sans force, au point qu’elle paraît être pour eux une habitude acquise par une pratique de plusieurs années. Cette nuit, on a battu la générale à deux heures du matin ; en moins de dix minutes toute l’armée était en bataille dans le plus grand ordre et le plus absolu silence. On l’a conduite sur les hauteurs du Lauty ; un tiers y est resté et s’occupera toute la journée et la nuit prochaine à se retrancher; demain matin nous irons les attaquer. Ici la pratique marche avec la théorie et le général ne fait faire aucun mouvement sans faire remarquer aux élèves les suites qui en résultent. Nous avons bien employé notre séjour au camp de Gresillon; nous le quittons le 24 pour retourner aux Sablons, où nous attendrons les ordres de la Convention. Salut et fraternité. Signé Moreau, Bouillerot. 20 Le citoyen Bezu, peintre, du district d’Egalité-sur-Marne [ci-devant Château-Thierry, Aisne], fait hommage à la Convention nationale d’un tableau servant aux arts. La Convention décrète la mention honorable et l’insertion au bulletin, et le renvoi du tableau au comité d’instruction publique (51). 21 a Un membre, au nom du comité de Salut public, fait lecture d’une lettre des repré-sentans du peuple près les armées du Nord et de Sambre-et-Meuse, qui apportent des détails sur la prise importante de Bois-le-Duc : 146 bouches à feu, dont 107 en bronze, 130 milliers de poudre, une quantité immense de fer coulé, 9 000 fusils, 2 500 prisonniers, sont les avantages brillants de cette prise (52). (51) P.-V., XLVII, 150-151. C 321, pl. 1335, p. 5. Bull., 24 vend, (suppl. 2); Ann. Patr., n' 655. (52) P.-V., XLVII, 151. RICHARD, au nom du comité de Salut public, fait lecture de la lettre suivante : [ Les représentants du peuple envoyés près les armées du Nord et de Sambre-et-Meuse, La-combe (du Tarn) et Bellegarde, aux membres composant le comité de Salut public, d’Hees-wick, le 20 vendémiaire au III] Par notre courrier du 9 de ce mois, chers collègues, nous vous avons annoncé la prise du fort de Crèvecoeur; nous vous annonçons au-jourd’hui que la place importante de Bois-le-Duc vient de se rendre aux armes de la république française. Cent quarante-six bouches à feu, dont cent sept en bronze, cent trente milliers de poudre, une quantité immense de fer coulé, neuf mille fusils, deux mille cinq cents prisonniers de guerre, sont les avantages brillants résultant de cette prise. Un point avantageux sur la Meuse, qui assure nos quartiers d’hiver; l’assurance de nos subsistances, jusqu’ici très-précaires par la longueur du rayon depuis Anvers, en sont les avantages utiles et peut-être incalculables. Nous sentions combien il était important pour la suite de vos projets que Bois-le-Duc se rendît promptement ; aussi n’avons-nous pas hésité de le faire attaquer avant d’avoir réuni nos moyens de siège. Les dispositions ont été faites d’une manière savante par les généraux en chef des différentes armes qui y ont servi ; et en donnant des éloges bien mérités à tous nos républicains, il est juste de dire que les armes de l’artillerie et du génie y ont principalement marqué. La place de Bois-le-Duc, si importante par ses rapports militaires et politiques, fut regardée, depuis le fameux siège du prince d’Orange, comme inattaquable ; effectivement, jamais siège n’offrit plus de difficultés. Sur les cinq attaques, qu’on avait multipliées à dessein pour accabler la garnison de fatigues, presque tous les cheminements se sont faits à travers un terrain submergé ; et, pour comble d’obstacles, une pluie abondante, qui a duré pendant tout le siège, faisait échouer les moyens qu’on employait sans cesse pour rendre les tranchées praticables. Les ouvriers, continuellement sous l’eau et le feu, étaient quelquefois accablés, mais jamais rebutés ; à la voix de la patrie ils recouvraient de nouvelles forces; ainsi donc rien n’est comparable au courage de nos troupes, que celui des généraux qui les commandent; ainsi deux places, devant lesquelles le tyran Louis XTV a perdu seize mille hommes sans prendre l’une d’elles, ont été emportées dans quinze jours par nos républicains, et seulement avec des pièces de bataille ; car l’équipage de siège n’est arrivé que le jour de la capitulation. Le général en chef Pichegru est forcé de se retirer pendant quelques temps, pour guérir une maladie de peau résultant des fatigues excessives de la guerre qu’il a faite avec tant d’activité; mais, en cédant pour quelque temps à