[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 septembre 1791.] Si j’ai réussi à vous prouver que la comptabilité ainsi simplifiée et réduite au seul compte du Trésor public donnera peu de matière à difficulté, j’ai réussi à vous prouver qu’il n’est pas nécessaire de créer un tribunal de 42 membres et de donner, par l’examen d’une cinquantaine de difficultés par an, autant de sujets et de soins que vous en avez donné pour la cassation de tous les jugements qui peuvent se rendre dans cet Empire. On dirait que nous n’avons créé ce tribunal superflu que pour donner aux départements qui n’ont pas pu élire des membres au tribunal de cassation le plaisir de s’en dédommager. S’il y a des dificultés dans les départements, le commissaire de la Trésorerie actionnera le receveur et le tribunal rendra le jugement. M. Cochard, rapporteur , et plusieurs membres demandent la parole. Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. (L’Assemblée, consultée, ferme la discussion et décrète, à la presque unanimité, qu’il n’y aura pas de tribunal unique de comptabilité.) M. le Président. M. le ministre de l’intérieur demande la parole ; je la lui donne. M. Melessart, ministre de l'intérieur. Je demande à fixer un instant l’attention de l’Assemblée sur un objet pressant. Parmi les départements qui ont montré le plus d’empressement à fournir des volontaires pour la formation des bataillons de gardes nationales, destinés à la frontière, celui de Seine-et-Marne s’est particulièrement distingué. Beaucoup de gardes nationales, beaucoup de citoyens se sont présentés pour se faire inscrire; leur rassemblement a été fixé au 10 de ce mois, et c’est de cetie époque seulement, aux termes des décrets de l’Assemblée nationale, que doit courir la solde qui leur est attribuée. Mais il est arrivé que ceux qui se sont fait inscrire dans le premier moment ont été obligés de renoncer aux occupations qui faisaient leur subsistance; iis ont été remplacés dans les ateliers, chez les cultivateurs, par d’autres personnes; il en est résulté pour eux une lacune dans leurs moyens d’existence; ils se sont adressés alors au département et ils ont réclamé avec force. Le département n’a pas cru devoir les faire repentir de leur zèle et il a jugé nécessaire de leur promettre qu’à compter du premier de ce mois, leur solde leur serait payée; il a pris, en conséquence, une délibération qui est subordonnée aux vues de l’Assemblée nationale et qui a besoin de sa confirmation. C’est pourquoi je viens prier l’Assemblée de vouloir bien prononcer sur cet objet et décider que les gardes nationales du département de Seine-et-Marne seront payées à compter du premier de ce mois, en retenant toutefois ce qui est nécessaire pour l’habillement. M. Prieur. Pour la régularité de la délibération, je demande le renvoi de cette affaire au comité des finances pour en faire le rapport demain à l’entrée de la séance. (La motion de M. Prieur est mise aux voix et adoptée.) M. le Président fait donner lecture, par un 301 de MM. les secrétaires, d’une lettre des députés d’Avignon, ainsi conçue : « Monsieur le Président, « Nous nous sommes présentés chez vous pour vous faire part de notre empressement à présenter à l’Assemblée nationale l’hommage du Comtat et d’Avignon, et lui demander leur réunion à la nation française. Nous vous réitérons cette prière, et nous espérons que vous obtiendrez pour nous d’être entendus dans son sein, avant le rapport qui doit avoir lieu samedi, et que vous aurez la bonté de nous indiquer l’heure et le jour auxquels nous serons admis. « Nous sommes, etc. » Plusieurs membres : Demain soir. (L’Assemblée décrète que les députés d’Avignon seront entendus à la séance de demain soir.) M. le Président lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. VERNIER. Séance du vendredi 9 septembre 1791, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Lecture est faite des procès-verbaux des séances du vendredi 2 septembre et du mardi 6 septembre , qui sont adoptés. Un membre observe qu’une multitude de procès-verbaux des séances de l’Assemblée, transcrits sur les registres, n’étant pas encore signés, il est essentiel de prendre un parti à cet égard avant que les travaux de l’Assemblée ne soient terminés, et que ses membres se soient séparés. Un membre fait remarquer qu’il suffit que les présidents ou secrétaires, successeurs des absents ou moris, soient autorisés à remplacer parleurs signatures celles de ces membres. (L’Assemblée accueille favorablement cette dernière observation et passe à l’ordre du jour.) M. le Président fait donner lecture, par un de MM. les secrétaires, de 2 lettres du ministre de la guerre : A la première, est joint un état général des dépenses ordinaires et extraordinaires du département de la guerre, pendant Vannée 1791 [2), duquel il résulte que les dépenses ordinaires s’élèveront à la somme de 91,596,242 1. 13 s. 4 d., et les extraordinaires, à celles de '68,380,796 I. 1 s. 4 d., en tout, 159,977,038 1. 14 s. 8 d. (L’Assemblée ordonne l’impression de cet état.) La seconde est relative à l'armement des 97,000 gardes nationaux dont la levée a été décrétée le 28 juillet dernier, et depuis, portée à 105,616 hommes. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. (2) Voir ci-après ce document aux Annexes de la séance, pf-e 306 et suiv. [Àsiénûbléé natianale.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [9 septembre H9l.j m Le miniêtre observe qu’il se rencontre beaucoup de difficultés à ce que les municipalités chargées de leur levée les présentent armés, et qu’il u’y a aucun inconvénient à fournir des armes des magasins de l’Etat aux 45,000 volontaires naiionaux destinés à garnir les frontières depuis Dunkerque jusqu’à Belley, ainsi qu’aux 15,000 formés en réserve �ur Senlis et Gompiègne, mais qu’il n’en est pas de même des 45,000 destinés à la garde des autres frontières et des côtes; que les magasins de ees différentes parties étant totalement dégarnis, tant par les enlèvements faits dans les premiers moments de la Révolution, que par les distributions qui ont eu lieu en vertu des décrets de l’Assemblée, il y aurait de grands inconvénients à leur fournir l’armement des magasins des départements frontières du Nord ; qu’ainsi, il paraît convenable d’inviter les département frontières de Belley à Antibes, et ceux des côtes, à armer leurs volontaires au moyen des fusils qui leur ont été délivrés. M. Gaultier-Biauzat demande le renvoi de cette lettre au comité militaire. (Ce renvoi est ordonné.) M. le Président donne communication à l’Assemblée d’une adresse et pétition des négociants français résidant au Caire, en Égypte, représentant les dommages considérables qu’ils ont essuyés par l’effet des actes d’autorité arbitraire du Capitan-Pacha, lors de son expédition en ce pays, en 1786; ils réclament la protection et la garantie nationales pour le redressement de ces torts, conformément aux capitulations avec la Porte. A cette pétition sont jointes une adresse et un mémoire du sieur Magallon , l’un de ce? négociants, résidant depuis 30 uns dans cette échelle; il réclame le remboursement des avances qu’il a faites pour le service de la nation, depuis 14 ans. (L’Assemblée ordonne le renvoi de ces pièces au comité de la marine.) M. Bouche. Je suis informé d'ün fait dont il est nécessaire que l’Assemblée soit instruite. A la suite dü décret relatif aux colonies que vous avez rendu le 15 mai dernier, vous nommâtes 3 commissaires pour porter la loi à Saint-Domingue. Ces Scommbsaires reçurent, au.'S.tôt après leur nomination, les expédiions dé leur commission et on leur garnit les mains de 6,000 livres chacun; ils refusèrent ensuite de partir ou n’osèrent pas le faire. Des plaintes vous furent portées à cet égard; vous décrétâtes qu’il serait nommé de nouveaux commissaires; ces commissaires sont à Brest sur le point de partir; peut-être même sont-ils déjà partis. Aujourd’hui, les anciens commissaiféâ destitués se présentent disant et soutenant qu’ils Sont toujours commissaires ; mais je crois que ce qui leur tient le plus à cœur, c’est la restitution des 6,000 livres que chacun d’eux a reçues d’aVauce. (Rires.) Il existe de nouveaux commissaires qui ont remplacé les anciens, lesquels, ne sont plus rien et ne doivent plus rien être ei qui doivent restituer les 6,000 livres qui leur ont été données. Je demande, en conséquence, Messieurs, que vous vouliez bien décréter que ces messieurs dout je ne sais pas le nom, ne sont plus commissaires. ( Murmures et interruptions .) Ou si l’Assemblée le préfère, je me borne h demander que M. le Président soit chargé d’écrire" au ministre de la marine pour savoir les moyens qu’il a pris à l’effet que les 18,000 livres soient restituées dans le Trésor public. M. Defermon. D'après l’interpellation de M. Bouche, je puis rendre compte à l’Assemblée des faits qui sont à ma connaissance. Les 3 premiers commissaires qui avaient été nommés, sont restés à Brest en attendant ies instructions pour les colonies ; ils y étaient déjà lors des évènements du 21 juin. Ils écrivirent, alors, qu’ils ne croyaient pas pouvoir partir dans i’etat où était le roi et demandèrent à raison des circonstances, ou que l’on ajournât leur départ, ou qu’on acceptât leur démission. D'abord le ministre avait écrit au comité de la marine, pour demander s’il n’était pas pressant de faire partir de nouveaux commissaires, et, par conséquent, d’accepter leur démission. Les comités ont renvoyé le ministre à l’Assemblée nationale et le minbtre est venu et a dit : « Les 3 commissaires olfrent leur démission s’ils n’effectuent pas leur départ ; je crois devoir l’accepter et nommer d’autres commissaires. L’Assemblée n’a pas rendu de décret, elle a seulement, par ses applaudisœments, approuvé la conduite du ministre ; le ministre a nommé 3 autres commissaires qui sont paitis pour Brest. Eh bien ! Messieurs, les 3 anciens commissaires avaient gardé le silence; mais, depuis, ils écrivent au ministre, et ils disent qu’ils sont les seuls commissaires, parce qu’ils ont été nommés par le roi, et que les 3 autres n’ont été nommés que par le ministre. (Rires.) 11 résulte que ces 3 commissaires, qui avaient reçu 3 mois d’avance, comptaient sans dôme retirer les 3 mois d’avance, peut-être demander des indemnités jusqu’à ce qu’on leur dise qu’ils ne sont plus commissaires. Dans cet état, les comités ont pensé qu’il n’était point de leur compétence de prononcer. Deux questions sont donc à trancher : ces messieurs, d’une part, doivent-ils ou non se considérer comme commissaires? La négative n’est pas douteuse. Doivent-ils, d'autre part, restituer ou non les avances qui leur ont été faites ? M. Bouche propose à cet égard de charger M. le Président d’écrire au ministre de la marine pour savoir ies moyens qu’il a pris à l’effet que les 18,000 livres soient, restituées dans le Trésor public : c’est la seule chose que l’A-semblèe puisse ordonner à ct t égard; aussi je demande que la motion de M. Bouehe soit mise aux voix. (La motion de M. Bouche est mise aux voix et adoptée.) M. d’André. Il y a 3 jours que j’ai proposé à l’Assemblée de se faire rendre comnte par le comité de Constitution de la pétition des administrateurs du département ne Maine-et~Loire, relativement au payement des électeurs et de prendre une décision sur cet objet. Vous décrétâtes, ce même jour, que le comité vous rendrait compte de ses vues à 2 heures; il ne le lit pas et cependant il est indispensable de prendre un parii. Ce n’est pas par le silence qu’il faut répondre à des demandes de cette nature il faut que la loi prononce. Ce serait en vain qu’on dirait qu’il ne faut pas indisposer les électeurs, qu’il faut ménager tout le monde, qu’on peut attendre encore 8 à 10 jours. Ce n’est pas avec des ménagements que l’on ïsÈt des lois : c’est en ménageant ainsi beaucoup de personnes que vdus avez été forcés de passer