118 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [ Vifs applaudissements ] MERLIN (de Thionville) : Je demande le renvoi au comité de sûreté générale, et je saisis cette occasion pour ajouter à ce qu’a dit mon collègue, que le comité ne cesse d’examiner toutes les affaires de ce genre, pour tenir les aristocrates sous une verge de fer, et rendre la liberté aux patriotes. (On applaudit). (1). Mention honorable, insertion au bulletin, et renvoi au comité de sûreté générale. 37 Un membre [BARÈRE], au nom du comité de salut public, fait un rapport sur l’organisation de la garde nationale parisienne (2). [Applaudissements] BARÈRE : Citoyens, il y a six jours que j’annonçai à la tribune, au nom des deux comités de sûreté générale et de salut public, qu’ils allaient se réunir pour rompre les fers de tous les patriotes opprimés et de tous les bons citoyens que l’abus de l’autorité ou des passions particulières avaient entassés dans les maisons d’arrêt. A cette époque, un orage politique, survenu dans le sein de l’Assemblée, a tourné tous les regards et consumé notre temps et nos efforts pour nous délivrer d’une trop longue tyrannie. Aujourd’hui que la justice est vraiment à l’ordre du jour par le fait, et non par les maximes; aujourd’hui que vous voulez lui donner une application bienfaisante, et autant pour la patrie que pour le citoyen, nous nous occupons de cet objet important, qui tient de si près à la liberté civile et politique. Déjà les réclamations les plus évidentes, les demandes les plus urgentes ont été entendues, et plusieurs citoyens profitent du bienfait de cette heureuse révolution. Je suis chargé de vous annoncer que les deux comités se réunissent constamment dans l’objet de faire cesser la détention des patriotes, des bons citoyens, de ceux que de vraies passions personnelles, et non l’intérêt de la république, ont fait arrêter; de ceux que des haines particulières et des vengeances hideuses ont poursuivis à la place des lois. Nous allons ramener à exécution le décret des suspects, en proscrivant toutes les extensions odieuses et injustes, impunément pratiquées par des intrigues, par des moyens contre-révolutionnaires et des mesures impolitiques; nous allons enfin suivre les intentions de la Convention nationale, en conciliant la morale et la politique, en exécutant les lois révolutionnaires avec justice, et sans (1) Moniteur ( réimpr.), XXI, 364; J. Perlet, n° 680 (d’après cette gazette, la section aurait réclamé « le juge de paix Lameinière, Julien et quelques autres »); Débats , n° 682; J. Sablier (du matin), n° 1 477; M.U. , XLII, 267; J. S. -Culottes, n° 536; Ann. patr., n° DLXXX; C. Eg., n° 715; F.S.P., n° 395; J. Fr., n° 678; C. univ., n° 946. (2) P.-V., XLIII, 11. Décret n° 10 220. Rapporteur: Bo. oublier que cette équité nationale ne cesse pas d’être justice, quoiqu’elle soit placée entre le salut de la patrie et les crimes de ses ardents ennemis. Cette disposition de travail de vos comités aura sans doute votre approbation au moment où vous allez rédiger avec plus de précision les lois du tribunal révolutionnaire, des lois terribles, mais positives, mais claires; distinctes avec raison, et terribles avec justice. Aucun membre de la Convention ne veut sans doute faire grâce ni transiger avec l’aristocratie vindicative et rebelle; [Non, non, s’écrie-t-on ] mais nous désirons tous que les crimes de lèse-patrie, que les délits contre-révolutionnaires soient punis; si quelques citoyens coupables ou vraiment suspects à la République inspirent de l’intérêt ou de la pitié, si des familles malheureuses excitent les sentiments généreux de l’homme, que le citoyen se souvienne qu’il est aussi une patrie qui demande à ne pas être déchirée, et qu’il est une famille générale qui doit inspirer un grand intérêt; que le législateur n’oublie pas qu’il est chargé de faire et d’achever une révolution; qu’il ne perde pas de vue que le modérantisme est aux aguets à la porte de cette assemblée, et que le spectre horrible de l’aristocratie peut reparaître pour chercher à effrayer la liberté. Que les ennemis reconnus de la République n’espèrent pas des succès; cette révolution est tout entière pour la liberté; on ne renverse pas un tyran nouveau pour soutenir les amis de l’ancienne tyrannie. [Applaudissements], Ce ne sont pas les institutions révolutionnaires qui sont erronées, ou vindicatives, ou coupables; ce sont les individus, ce sont les instruments dont il faut surveiller les opérations et les mouvements; les bons patriotes parlent avec une sagesse éclairée contre les abus de pouvoir; mais les aristocrates parlent avec une chaleur furieuse contre les institutions. Les patriotes veulent faire cesser les injustices, mais les contre-révolutionnaires veulent briser les instruments du pouvoir national. Accordez à l’aristocratie la destruction d’une institution républicaine, demain ils demanderont la suppression du mot République; vous êtes forts, vous êtes sages; le peuple vous doit son salut dans cette dernière crise; ne perdez pas de vue le peuple et sa reconnaissance pour avoir frappé ses ennemis. [Applaudissements ] Je passe à un objet urgent pour la force publique de Paris et pour l’organisation de la 17e division militaire. Vous avez sagement décrété que le commandement de la force publique de Paris serait séparé de la 17e division militaire; nous venons vous proposer trois officiers pour la commander; nous avons pensé qu’il était digne de la Convention de placer dans ce commandement un vieux et brave militaire, couvert de blessures honorables dans plusieurs actions, et deux citoyens déjà employés dans la garde nationale de Paris, et qui se sont distingués par leur activité et leur dévouement à la représentation nationale dans la nuit du 9 au 10.