[Assemblée nationale.) AIU’.HIVES PAULEMËNTAIHES. [8 octobre 1790.] 505 pense d’un million qui embarrasserait la marche des autres ; c’est une bigarrure qui ne peut plus exister. Voici, en conséquence, le décret que votre comité vous propose : » L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : » Art. 1er. L’intérêt des 400 millions d’assignats-monnaie créés par le décret des 16 et 17 avril dernier, cessera le 16 du présent mois, et n’accroîtra plus le capital, à compter de cette époque. » Art. 2. Les trois coupons d’intérêt attachés à chaque assignat, pourront en être séparés ; et sur la remise qui en sera faite, les six mois d’intérêt, échus au 15 octobre, seront payés à bureau ouvert, à partir du 1er janvier 1791, dans les caisses qui seront désignées par l’Assemblée nationale, tant à Paris que dans les départements. Ils seront reçus pour comptant, à partir du 16 de ce mois, dans toutes les caisses d’impositions et de perceptions ; Savoir : » Les trois coupons réunis des assignats de 1,000 livres, pour 15 livres ; » Ceux des assignats de 300 livres, pour 4 liv. 10 sols; » Et ceux des assignats de 200 livres, pour 3 livres. » Art. 3. La valeur des billets de la caisse d’escompte, et les promesses d’assignats qui ne sont pas garnies de coupons d’intérêt, sera fixée au 16 de ce mois ; Savoir : « Les billets de 1000 livres, à 1015 livres. « Les billets de 300 livres, à 304 liv. 10 s. » Les billets de 200 livres, à 203 livres. « Art. 4. Cette valeur fixe demeurera auxdits billets jusqu’à leur échange fait contre des assignats ; et, à cette époque, les assignats donnés en échange, et séparés de leurs coupons d’intérêt, ne vaudront plus que 1000 livres, 300 livres, ou 200 livres, nonobstant la mention de l’intérêt faite dans le libelle de l’assignat. Les coupons d’intérêt séparés desdits assignats seront payés conformément à l’article 2. » M. Brillat-Savarin. Je crois avec votre comité que l’intérêt des assignats doit cesser; mais ce doit être de manière que personne n’en souffre. Je propose, en conséquence, d’en reculer l’époque, afin que les départements en soient instruits. M. Moreau. Je demande la question préalable sur le décret proposé. Il me semble contraire au respect que vous devez à vos propres décrets. L’intérêt fait partie des assignats, et il ne peut en être soustrait. M. Malouct. Je ne suis pas de l’avis de la question préalable, car Je décret me parait fort juste; mais il faut qu’il soit amendé. Il faut prendre garde à l’impression qu’il pourrait faire dans les départements. Il est possible qu’il donne de la méfiance à nos commettants. Ils ne sauront pas les motifs qui nous auront déterminés à révoquer nos décrets des 16 et 17 avril. Je propose donc d’abord d’expliquer ce motif dans le préambule du décret qui nous est présenté. Je propose, en outre, de fixer au 16 décembre l’époque à laquelle les 400 millions d’assignats cesseront de porter intérêt, et de dire qu’alors araîtront les nouveaux assignats, afin de donner cette opération l’ensemble que l’intérêt des finances et celui du commerce exigent. (L’Assemblée décide qu’il sera fait un préam� bule au décret. Le second amendement, proposé par M. Malouet, est écarté par la question préalable.) (Le décret proposé par M. de Montesquiou est adopté.) M. de IVIonte«qiiiou, rapporteur, présente ensuite un autre décret sur la fabrication et l'émission des assignats. Messieurs, le papier le plus solide et le plus transparent est le meilleur à employer pour les assignats; celui dont on s’est servi jusqu’alors n’a aucun de ces avantages. Le ministre des finances avait cru trouver le mieux, et il s’était trompé. Sans avoir égard à toutes les propositions spécieuses, je crois qu’il faut donner la préférence à un papier trouvé sous vos yeux, et qu’on n’a encore jamais essayé d’imiter ; c’est celui employé pour les billets portant promesses d’assignats. Si l’Assemblée ne donne point des ordres contraires, nous en conclurons le marché avec M. Réveillon, si connu par ses malheurs et son patriotisme. Voici le décret que votre comité vous propose : « L’Assemblée nationale décrète : 1° Que les nouveaux assignats créés par le décret du 29 septembre seront de 2,000 livres, 500 livres, 200 livres, 100 livres, 80 livres, 70 livres, 60 livres, 50 livres et non au-dessous. « 2° Cette division sera faite de la manière suivante : 200,000 de 2,000 livres ; 400,000 de 500 livres; 400,000 de 200 livres; 400,000 de 100 livres; 400,000 de 80 livres; 400,000 de 70 livres; 400,000 de 60 livres ; 400,000 de 50 livres, formant en tout trois millions quarante mille billets et une valeur de 800 millions de livres. « 3° Les assignats de 2,000 livres seront sur papier blanc, eu caractères rouges, de la même forme que ceux qui sont en circulation, mais sans coupons et sans intérêts. « 4° Les assignats de 500 livres seront également sur papier blanc, en caractères noirs, et de la même forme que ceux de 2,000 livres. « 5° Les assignats depuis 100 livres jusqu’à 50 livres seront également sur papier blanc, en caractères noirs; ils seront de plus petite forme, ne porteront point l’eflige du roi, et présenteront seulement l’empreinte nationale, avec ces mots : la loi et le . roi. « 6° Ces assignats seront en outre frappés d’un timbre sec aux armes de France. « 7° Chaque série sera composée de 40,000 numéros, de manière que les assignats de 200 livres feront cinq séries, ceux de 500 livres onze séries, et les autres dix séries. « 8° Les formes et matières qui auront été employées pour la fabrication du nouveau papier desdits assignats, et tous les ustensiles qui auront servi à l’impression, à la gravure et au timbre, seront, immédiatement après l’exécution respective de ces différentes parties de la fabrication, déposés aux archives de l’Assemblée nationale, et ne pourront en être déplacés qu’en vertu d’un décret spécial. » M. de Mirabeau. Il ne suffit pas d’avoir arrêté la création de 800 millions d’assignats-monnaie pour subvenir au payement de la dette exigible: nous devons encore veiller à ce que cette fabrication soit exécutée de manière que la contrefaçon en devienne impossible, ou tellement difficile, qu’elle rebute tout contrefacteur. Nous devons aussi faire en sorte que cette monnaie 506 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [8 octobre 1790.] soit commode et solide. Nous devons enfin nous efforcer que sa fabrication s’exécute avec le plus d’économie possible. Ces deux premiers objets tenant au mode d’assignats se confondent. J’en parlerai conjointement. Il faut considérer dans les assignats-monnaie le papier et l’impression. — On ne saurait donner trop d’attention au choix du papier qui doit servir à leur fabrication. Tout artiste éclairé et de bonne foi vous dira qu’un dessein de gravure quelconque s’imite, ou très parfaitement, ou tout au moins de manière à tromper une attention superficielle, et les personnes qui n’ont pas assez de connaissance de l’art pour saisir les incorrections de la copie. Il n’en est pas de même du papier : cette matière est très difficile à imiter, et l’on distingue les papiers de toutes les manufactures. G’est donc à la fabrication du papier des assignats-monnaie qu’il faut singulièrement s’attacher, pour lui donner le degré de perfection dont il est susceptible, soit dans sa matière, soit dans sa vergeure. Le papier vélin que l’on a adopté pour les assignats existants n’est point du tout propre à cette opération; il semble plus solide que l’autre, mais il s’use très facilement. Les assignats-monnaie ne paraissent que depuis deux mois, et déjà l’on se plaint de ce genre de papier, tandis que d’anciens billets de caisse existent encore intacts. En vain dirait-on que le papier fin est trop susceptible d’être entraîné, ou par le feu au par le courant de l’air: je réponds qu’il n’y a pas de nécessité à se mettre auprès d’une cheminée pour recevoir, donner ou compter des assignats. On doit au propriétaire de l’assignat de le sauver autant que possible de l’astuce du contrefacteur, mais non de sa propre négligence. L’expérience a prouvé que le papier de soie, très fin et très transparent, manipulé en un mot avec tout le soin qu’indique l’art, est aussi fort et moins susceptible de se trouer et de se déchirer que la plupart des autres papiers: par cela seul il serait plus convenable pour les assignats. Il faut en outre que la vergeure en soit parfaitement dessinée, et qu’elle présente de grandes difficultés à l’imitation. L’intelligence de certains papetiers est plus que suffisante pour vous rassurer à cet égard, et je partage l’opinion du comité sur M. Réveillon . On a cru que l’on empêcherait la contrefaçon en colorant le papier : c’est une de ces erreurs nombreuses dans lesquelles sont tombés les premiers aperçus des demi-connaisseurs. Le papier le plus blanc, ou au moins le plus transparent, est celui dont on apercevra le plus tôt la contrefaçon. Croyez que je ne vous donne ici que le résultat des observations les moins contestées des gens de l’art. La gravure de vos assignats peut annoncer le talent de l’artiste; mais elle vous garantira mal l’impossibilité de l’imiter. Je vais plus loin : plus vous surchargerez vos assignats de décoration et de bariolage, moins il sera facile de s’apercevoir de la fraude. Il faut qu’elle puisse frapper l’œil le moins expert; il faut qu’à la première inspection du papier et de l’impression, la contrefaçon saisisse les yeux les moins exercés. Or, comment m’apercevrai-je que sur deux mille traits il en manque un? Que votre assignat soit donc très simple; mais exécutez-le dans le dernier degré de perfection, afin que sa beauté soit en quelque sorte de niveau avec les connaissances de tout le monde, puisque c’est à tout le monde que l’assignat est destiné : et cependant que la correction des planches rebute l’ouvrier peu intelligent : ce n’est jamais l’homme d’un grand talent qui essaye d’être un fripon heureux. Voilà pour la fabrication des assignats ; voici pour l’économie qui doit y présider. C’est une chose bien étrange, mais bien remarquable, qu’à mesure que vous expulsez un vice de i’anciea régime, on le voie se représenter par quelque issue nouvelle. Nou3 n’avons cessé de nous plaindre du gaspillage des finances, et on les gaspille encore; j’en pourrais donner mille preuves; mais je ne parlerai que de vos derniers assignats. Je commencerai sur cet objet par le détail le moins important, et cependant vous serez fort étonnés sans doute qu’un ouvrier, qui n’a peut-être jamais gagné un louis par jour, gagne aujourd’hui 285 livres, oui 285 livres par jour, et qu’il soit au momentde gagner 570 livres dans sa journée, et dans une année à peu près un million. Le calcul le plus simple va vous en donner la preuve. On donne à M. Haz, imprimeur en taille-douce, 6 livres par cent de feuilles d’assignats. M. Haz fait exécuter l’ouvrage par des ouvriers auxquels il donne 3 livres du cent. M. Haz emploie 30 ouvriers; chaque ouvrier rend de 200 à 300 assignats par jour. Conséquemment les 30 ouvriers font au moins 8,250 assignats dans un jour (ils doivent même en fournir 10,000, puisqu’on en met 10,000 par jour dans le commerce) : les 8,250 assignats, à 3 livres de profit pour M. Haz, fui valent 285 livres : ainsi M. Haz gagne par jour 285 livres. Si M. Haz est chargé de l’impression des nouveaux assignats, il sera forcé de doubler ses ouvriers, ce qui doublera son profit; ainsi il gagnera 570 livres par jour. Or, voici la fortune que fera M. Haz : sur les 1,200 millions d’assignats, combinés de manière qu’il y en ait 600 millions en billets de 10, 20, 30 et 100 livres, divisés également, et 600 millions de 200, 300 et 1,000 livres, divisés aussi également, ils exigeront 18,866,667 billets, qui, à raison de 6 livres le cent, coûteront 1,132,000 livres, et procureront à M. Haz, tous ouvriers payés, une somme de 566,000 livres. Le gain de M. Haz n’est pas le plus considérable , puisqu’on ne pourrait économiser sur cette partie que 566 livres. Les frais vraiment énormes sont ceux de gravure, qui se portent, pour chaque assignat, à 6 sous au moins. On donne à M. Saint-Aubin 50 louis pour une planche d’assignats; elle en contient deux. On ne peut tirer au plus que 2,000 exemplaires de chaque planche, dont 4,000 assignats, Or, 4,000 assignats à 6 sous font bien les 1,200 livres qu’on donne à M. Saint-Aubin. Et c’est ici le cas de demander encore une fois à quoi sert le luxe de ces billets. J’en atteste tous les artistes; rien n’est si facile à imiter que vos assignats existants. Ces assignats sont d’autant plus faciles à contrefaire, et il sera d’autant plus difficile de prouver la contrefaçon, que ne pouvant tirer d’une planche que 2,000 assignats semblables, il y aura autant d’assignats dissemblables que de renouvellements de planches, car il est impossible que deux planches gravées soient rigoureusement parfaitement semblables. Ce luxe de nos assignats ne profite donc qu’à M. Saint-Aubin, dont il fait la fortune, mais aussi dont il engourdit et enfouit les talents; ce qui est très préjudiciable aux arts. M. de Montesquiou, Je suis forcé d’observer que cela n’est pas vrai ; il n’en coûtera pas 10Û.0Q0 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (8 octobre 1790.] franGS pour la fabrication des 1,200,000 assignats (1). M. de Mirabeau. J’ai puisé ces détails dans les ateliers de MM. Haz et Saint-Aubin. Je suis autorisé à vous proposer un autre mode d’assignats, dont voici les avantages : 1° On assure que vos assignats vous coûtent 10 sous pièce; ceux que j’indique ne coûteront que 3 sous, c’est-à-dire moitié moins des seuls frais de gravures : ainsi il y aura au moins 7 sous d’économie. Sur la valeur de 18 millions, il vous en coûtera 6,603,334 livres de moins, car 18,866,667 billets à 10 sous coûteraient 9,433,333 livres : tandis qu’à 3 sous ils ne coûteraient que 2,829,999 livres ; donc, il y aurait un bénéfice clair de 6,603,334 livres, qui serviront plus utilement à la liquidation de la dette de l’Etat qu’à l’embellissement des assignats. 2* Vos assignats seront sur un papier dont il sera plus facile de reconnaître la falsification, et l’impression n’en sera pas moins soignée; mais il y éntrera moins de cet art qui ne peut séduire que les esprits superficiels, et elle aura ce degré de perfection qu’il sera facile à tout le monde de saisir, et qui est le plus difficile à imiter. 3° Tous les dessins et caractères seront rigoureusement de la plus parfaite égalité et ressemblance, eussiez-vous 100 milliards de billets ; perfection à laquelle ne peuvent atteindre vos assignats actuels, qui varient de précision, non seulement à chaque planche, mais deux fois sur la même planche. 4° La nouvelle méthode d’impression des assignat rendra l’émission à volonté, vingt, trente et cent fois plus active, c’est-à-dire qu’au lieu de 8 à 9,000 assignats que l’on fabrique en un jour, on en fabriquera 200,000 s’il le faut; et comme les petits assignats deviennent très importants en ce moment, afin d’écarter la vente d’argent, on peut fabriquer en un mois ce qu’il faut pour Paris, et en six semaines ce qu’il en faut pour la France. Votre fabrication d’assignats-monnaie, puisqu’ils sont monnaie, devrait sans doute être classée sous la direction du régime des monnaies; j’en conçois la difficulté. Le plus encombré des régimes u’est pas encore déblayé; c’est une tâche dont j’essayerai de partager le fardeau. J’espère avant peu mettre à la portée des bons esprits, et soustraire au charlatanisme des gens du métier, cette science qu’on a tant cherché à obscurcir. J’espère montrer combien elle est intéressante, peu connue, ou même absolument ignorée, et de ceux qui régissent cette administration, et de ce tribunal que vous avez supprimé avec beaucoup de sagesse; mais en attendant je présenterai quelques observations sur les mesures provisoires à faire marcher de front avec l’émission des assignats. Nous ne devons pas oublier que le bien que nous attendons exige une émission d’une autre natqre, celle de la petite monnaie, dont ia disette se fait sentir plus que jamais. Nous avons besoin de pièces de 24, 12 et 6 sous ; mais d’un côté continuerons-nous à les fabriquer d’un argent aussi pur, et de l’autre ne serait-il pas plus avantageux de les avoir de 20, 10 et 5 sous? Quant au titre, sans doute il faut qu’une pièce ait la quantité (1) Voyez aux Annexes de la séance, p. 51 8, la lettre de M. de Mirabeau à M. de Montesquiou, sur la fabrication des assignats. 50-7 d’argent que sa valeur indique; mais à cette quantité d’argent on peut joindre quelque alliage, et voici le double avantage qui en résultera : 1° Le cuivre ajouté à l’argent rendra le métal plus dur, et conséquemment plus difficile à être effacé par la circulation très vive de la petite monnaie ; 2° S’il entre dans la petite monnaie autant de cuivre nue d’argent, la matière qui se perdra par le frai des espèces sera d’une moindre valeur que si elle était un titre plus fin. C’est une des causes de la déperdition du métal, à laquelle on ne fait pas assez d’attention. Nous sommes obligés de faire venir l’argent de l’étranger; il est de notre intérêt de veiller à ce qu’une perte indiscrète ne nous force pas à en faire un achat plus considérable, et ne diminue pas la matière qui reste pour les ateliers d’industrie. Je dis ensuite qu’il est plus commode pour le commerce (et tout le monde en convient) que notre monnaie présente le nombre décennaire : ainsi des pièces d’or de 50, de 20, de 10 livre?; de la petite monnaie de 20, 10, 5 et 2 sous sont les monnaies qu’il nous faut adopter. Or, comme il est important que la petite monnaie concoure avec les assignats, je conclus; 1° à ce que l’on fabrique sans délai une quantité considérable de monnaie de cuivre, et que l’on supprime ensuite toute la monnaie de billoq, et que l’on remplacera, sans perte pour le public, par la nouvelle monnaie de cuivre, avec la précaution de déclarer, pour réprimer les faux mon-nayeurs, soit étrangers, soit régnicoles, qu’attendu l’ancienneté de la dernière fabrication du billon, toute pièce nouvelle, par cela seul évidemment fausse, sera soustraite et non échangée; 2° A ce qu’on fabrique de la petite monnaie de 20, 10, 5 et 2 sous, au titre de 6 deniers, avec un remède de deux grains au plus ; que pour cette fabrication on emploie toutes les pièces d’argent dont l’empreinte est effacée ; et lorsque la totalité de cette fabrication sera finie, que l’ancienne petite monnaie, remplacée sans perte pour le public, soit décriée par une proclamation ; 3° Que huit bureaux soient ouverts à Paris, pour l’échange des assignats ; on n’y échangera en espèces que les billets de la dernière somme décrétée pour les plus petits assignats ; que les changeurs donnent caution pour les sommes qui leur seront confiées. Avec cet arrangement si simple, vous verrez que, dans moins de trois mois, ces bureaux deviendront inutiles, car l’argent reprendra sa circulation.il résultera, je l’espère, de mon plan, et j'en fais mon compliment de condoléance à ceux qui poursuivent avec tant d’acharnement les assignats ; il en résultera, dis-je, que l’échange en sera très facile, et j’annonce une bonne nouvelle à tous les bons citoyens. M. de Montesquiou. Le comité est persuadé que la fabrication est mauvaise, mais il n’en est lias de même pour la gravure ; la perfection du travail est une difficulté de plus à vaincre. Je répète ici que les 1,200,000 assignats qui ont été fabriqués et gravés à la ti n du mois n’occasionnent pas une dépense de 400,000 livres. D’après cela, il paraît difficile d’y rapporter les calculs qui ont été faits. M. Poignot. Gomme membre du comité des monnaies, j’annonce que nous espérons tirer un grand partidu métal des cloches, et nous sommes à la veille de faire un rapport à ce sujet. Nous invitons M. de Mirabeau à se rendre au comité, avec d’autant plus de raison, que la plupart des vues (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES |8 octobre 1790.] qu’il vient de présenter nous ont déjà été indiquées. Le comité est persuadé qu’on trouvera facilement le moyen de mettre les assignats au pair. M. Pétion. II me semble que la division d’assignats que l’on vous propose ne descend pas assez jusqu’aux besoins ordinaires. Ou dit qu’ils feraient disparaître le numéraire : ce qui rend le numéraire rare c’est qu’ils sont à une somme trop forte, et que le mauvais débiteur s’en prévaut. Voilà un assignat, dit-il à son créancier, rendez-moi. On remédierait à cet abus en créant des assignats de 25 livres. M. Rœderer. Au lieu d’adopter la division proposée par le comité, je voudrais qu’on y substituât l'opinion de M. Poignot, présentée dans une des dernières séances. Elle consiste à émettre des assignats de 200 livres, de 150 livres, de 125 livres, de 100 livres et au-dessous. M. Regnaud ( député de Saint-Jean-d’ Angély). J’appuie la proposition de M. Rœderer, avec cet amendement, que l’on suivra les fractions par dizaine depuis 100 jusqu’à 200 livres. M. Poignot. J’ai moi-même amendé mon projet ; j’ai considéré qu’il y avait à i’hôtel-de-ville beaucoup de petits intérêts à payer; que pour cela il faudrait ou acheter des piastres fort cher, ou acheter de l’argent sur la place, ce qui le renchérirait encore. En conséquence, j’adopte ’avis de votre comité. La discussion est fermée. — Les articles 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 sont adoptés sans discussion. M. de Folleville propose, par amendement à l’article 8, qu’il soit ajouté après ces mots : « déposés aux archives, » ceux-ci : « dans un coffre fermant à trois clefs. » Une discussion s’élève sur la question de savoir entre les mains de qui ces clefs seront déposées. Cette partie est ajournée, et l’amendement de M. de Folleville adopté, ainsi que l’article 8. M. le Président prononce le décret en ces termes : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les nouveaux assignats créés par le décret du 29 septembre dernier, seront de 2,000 livres, 500 livres, 100 livres, 90 livres, 80 livres, 70 livres, 60 livres, 50 livres, et non au-dessous. Art. 2. « Leur division sera faite ainsi qu’il suit: Savoir : Formant ensemble trois millions quarante mille billets, lesquels représentent huit cent3 millions. Art. 3. « Les assignats de 2,000 livres seront imprimés sur papier blanc, en caractères rouges ; ils seront de la même grandeur et de la même forme que les assignats déjà en circulation, mais sans coupons et sans intérêts. Art. 4. « Les assignats de 500 livres seront sur papier blanc, en caractères noirs, de la même grandeur et dans la même forme que ceux de 2,000 livres. Art. 5. » Les assignats depuis 100 livres jusqu’à 50 livres seront également sur papier blanc, en caractères noirs ; ils seront distingués des précédents, en ce que leur forme sera plus petite, et qu’ils ne porteront point l’effigie du roi ; ils présenteront seulement l’empreinte nationale aux armes de France, avec ces mots, la loi et le roi. Art. 6. « Tous les assignats seront, en outre, frappés comme les anciens, d’un timbre sec aux armes de France. Art. 7. « Chaque série sera composée de 40,000 numéros, de manière que les assignais de 2,000 livres formeront 5 séries ; ceux de 500 livres, 11 séries; et tous les autres, 10 séries. Art. 8. « Les formes et matières qui auront été employées pour la fabrication du nouveau papier desdits assignats, tous les ustensiles et matrices qui auront servi à l’impression, à la gravure et au timbre, seront, immédiatement après l’exécu-lion respective de ces différentes parties de la fabrication, enfermées dans une caisse à trois clefs, déposées aux Archives nationales, et ne pourront en être déplacées que par un décret spécial. » Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une note du garde des sceaux, contenant la sanction des décrets suivants : « Le roi a donné sa sanction, le 5 de ce mois : « 1° Au décret de l’Assemblée nationale, du 18 septembre dernier, relatif à des faits concernant la Chartreuse de Mont-Dieu. « 2° Au décret du 21, relatif aux opérations prescrites par l’article 10 de la troisième section du décret du 22 décembre dernier, pour la liquidation dans les provinces où il y avait une administration commune, et qui sont divisées entre plusieurs départements, des dettes contractées sous le régime précédent. « 3° Au décret du 22, portant que, provisoirement et pour cette année seulement, les appoin-