838 [Assemblé# nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 février 1790.1 à le releverfdans l’opinion. Ce parti ne produirait peut-être pas tout l’effet possible ; mais s’il peut un moment éloigner ou arrêter les brigands » les lois sur la féodalité, arrivant ensuite» calmeront tout, ôteront tout prétexte à l’insurrection. Par prudence, par politique, par humanité, on doit n’avoir recours qu’au pouvoir exécutif, et le charger de tous les moyens possibles pour arrêter les troubles. M. l»ünjuinats. Les causes des troubles du département de Bretagne sont connues. Les arrêtés du 4 août ont été le signal de toutes les vexations féodales; on a multiplié les exécutions pour le paiement des rentes arriérées; on a exigé les corvées féodales, les assujettissements avilissants. Depuis la publication des décrets, on a intenté quatre cents procès» au sujet des moulins Seulement; les meules des moulins à bras, moyens uniques de subsistance du pauvre, ont été brisées avec violence... On calomnie aujourd’hui les municipalités : celle de Rennes mérite les éloges dés bons citoyens et la reconhaissahce des privilégiés; elle a employé, pour défendre ceux-ci, toute la force dont elle pouvait disposer : chaque individu de la garde nationale s’est disputé le plaisir d’aller secourir les nobles attaqués. Elle a surtout usé avec süccès des moyens ae conciliation; les communautés contre lesquelles elle avait marché ont exprimé le vœu de lui être réunies, soit par l’arrondissement du district, soit autrement. La désobéissance des magistrats a encore été Une des causes des troubles; les paysans disaient : 11 n’y a pas de justice, nous ne serons pas punis... Je demande qu’on ajoute au décret que les voies de conciliation et d’exhortation Seront d’abord employées» et qü’on ne recourra à la force armée que dans la plus urgente nécessité. Je crois aussi convenable, pour remplir cet objet, d’insérer dans 1 adresse qui doit être rédigée, au sujet de l’union intime du roi avec l’Assemblée, quelques phrases relatives aux circonstances qui nous occupent, et que cette adresse soit lue au prône» M; de Caialfes raconte avec beaucoup de calme que, danâ le bas Quercy,od a brûlé un de seschâ-tëatii ; les habitants ont éteint l’incendie, et attaqué les brigands avec succès. Ainsi, dit-il, les malheurs qui nous affligent ne prennent pas leur sodrce dâiiS les vexations, que je crois fort rares, mais dans le défaut de force publique, et dans la faiblesse du pouvoir exécutif. ’M. de Robespierre. M. Lanjuinaisa proposé d’éptiiser les voies de conciliation avant d’employer la force militaire contre le peuple qui a brûlé les châteaux... M. Duval d’Fprémesnil. Ce n’est pas le peuple, ce sont des brigands. M. dé Robespierre. Si vous voulez, je dirai les citoyens accusés d’avoir brûlé les châteaux... MM. déFoUcatiId et Duval d’Eprémesuil. Dites donc des brigands 1 M. de Robespierre. Je ne nie servirai que du mot d’hommes, et je caractériserai assez ces hommes en disant le crime dont on les accuse. La force militaire employée contre des hommes est un crime, quand elle n’est pas absolument indispensable. Le moyen humain proposé par M. Lanjuinais est plu9 convenable que les propositions violentes de M. l’abbé Maury. Il ne vous est pas permis d’oublier que nous sommes dans un moment où tous les pouvoirs sont auéan-tis, où le peuple se trouve tout à coup soulagé d’üne longue oppression; il ne vous est pas permis d’oublier que les maux locaux dont on vous rend compte sont tombés sür ces hommes qu’à tort ou à raison le peuple accuse de son oppression et des obstacles apportés chaque jour à la liberté; n’Oubliez pas que des hommes, égarés par le souvenir de leurs malheurs, ne sont pas des coupables endurcis, et vous conviendrez que les exhortations peuvent les ramener et les calmer. Craignons que cet amour de la tranquillité ne soit la source d’un moyen propre à détruire la liberté ; craignons que ces désordres ne servent de prétexte poür mettre des armes terribles dans des mains qui pourraient les tourner contré la liberté ; craignons que ces armes ne soient dirigées par des hommes qui ne seraient pas les meilleurs amis de la Révolution. L’Assemblée, à peine de manquer à la cause populaire qu’il est de son devoir de défendre, doit ordonner que les municipalités useront de tous les moyens dë conciliation, d’exhortation et d’instruction, avant que la force militaire puisse être employée. Plusieurs membres demandent la parole; le rapporteur la réclame : l’Assemblée décide qu’il 6era seul entendu» — M. l’abbé Grégoire observe que ce qui concerne les curés ne forme pas partie du décret. M. Faydel demande la parole. — 1 On remarque qu’elle ne peut plus être accordée. On fait lecture de diverses rédactions et amendements. L’Assemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur les amendements. La priorité est accordée au projet de décret du comité de rapport. Plusieurs membres [demandent une nouvelle lecture du projet de décret. M. le Président. Le projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité, décrète : « 1° Que le roi sera supplié de donner incessamment les ordres nécessaires pour l'exécution du décret du 10 août dernier, en ce qui concerne le maintien de la tranquillité publique ; « 2° Que le Président sera chargé d’écrire aux municipalités où les troubles ont eu lieu» pour - témoigner combien l’Assemblée est affectée des désordres dont la continuation nécessiterait le pouvoir exécutif de déployer toutes les forces qui sont à sa disposition. » Le décret du comité des rapports est mis aux voix et adopté. M. le Président. L’Assemblée se réunira demain à 9 heures du matin. La séance est levée.