548 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE d’instruction publique, pour le travail extraordinaire qu’il y a fait pendant plusieurs mois (78). 30 Un membre [RICHARD], au nom du comité de Salut public, annonce que Maëstricht est tombé au pouvoir de la République le 14 brumaire. Il a fait lecture des dépêches du général Jourdan et des représentans près les armées de Sambre-et-Meuse : elles annoncent que Maëstricht étoit défendu par une garnison nombreuse, par deux cents pièces d’artillerie, et qu’elle a été contrainte après douze jours de tranchée ouverte. La garnison a été faite prisonnière de guerre, transportée sur les frontières ennemies pour être échangée. L’artillerie et les magasins sont restés en notre pouvoir; ils en rendront compte incessamment. Us ajoutent que l’armée entière s’est distinguée par sa bravoure ordinaire, ainsi que le général Kléber, Bollemont, chef d’artillerie et Marescot, officier du génie; que l’accord le plus parfait règne dans les opérations savamment combinées de ces trois officiers (79). Dès le commencement de la séance, le bruit se répandait que Maëstricht était pris. La joie était peinte sur tous les visages. Richard monte à la tribune ; les plus vifs applaudissements l’y accompagnent. RICHARD, au nom du comité de Salut public : L’armée de Sambre-et-Meuse vient d’ajouter de nouveaux lauriers à ceux dont elle est couverte. Maëstricht est au pouvoir de la République. ( Toute la Convention se lève aux cris de Vive la République ! et de nombreux applaudissements expriment la satisfaction générale.) Cette place, une des plus fortes de l’Europe, devait arrêter longtemps des troupes qui auraient eu moins de dévouement; cette place est tombée entre les mains de l’armée de Sambre-et-Meuse après onze jours de tranchée ouverte. ( Applaudissements .) Les difficultés que présentait ce siège sont incroyables ; mais elles ont été surmontées par une bravoure et un courage plus incroyables encore. La tranchée a été inondée; il a fallu triompher de tous les éléments pour obtenir la victoire. ( Nouveaux applaudissements.) Voici les lettres officielles (80) : (78) P.-V., XLIX, 54-55. C 322, pl. 1368, p. 35, minute de la main de Boissy d’Anglas, rapporteur selon C * II 21, p. 24. (79) P.-V., XLIX, 55. (80) Moniteur, XXII, 457. Débats, n° 776, 683-684; C. Eg„ n° 812 et 813; Ann. Patr., n° 677; Mess. Soir, n° 813; Ann. R. F., n° 47; J. Fr., n° 774; J. Perlet, n° 776; M. U., XLV, 298 ; J. Univ., n° 1808 ; Gazette Fr., n° 1041 ; J. Paris, n° 49 ; Rép., n° 49; J. Mont., n° 26. Les représentants du peuple près les armées du Nord et de Sambre-et-Meuse, au comité de Salut public. Au quartier général devant Maëstricht, à Pettersheim le 14 brumaire, l’an troisième de la République française une et indivisible. Citoyens Collègues, Maëstricht est à la République ; la place s’est rendue ce matin à cinq heures, après onze jours de tranchée ouverte. Nous ne vous dirons pas combien cette entreprise était difficile, sur-tout dans une saison aussi avancée. On sait que Maëstricht est une des plus fortes places de l’Europe; elle étoit défendue par une garnison nombreuse et plus de 200 pièces d’artillerie. La contenance des assiégés sembloit annoncer d’abord qu’il faudroit recourir aux derniers moyens pour la réduire ; mais la célérité et l’audace de nos travaux, et le feu terrible de notre artillerie les ont bientôt convaincus que toute résistance étoit inutile. La garnison s’est rendue prisonnière de guerre. [(On applaudit J] (81) L’armée de Sambre-et-Meuse s’est montrée digne d’elle-même dans cette grande entreprise ; elle a bravé, avec une contenance et un courage au dessus de tout éloge, le mauvais temps et le feu des batteries de la place; accoutumés à vaincre, les soldats s’indignoient qu’une place isolée osât leur résister. Jamais on ne vit plus de zèle dans les travaux ; les jours de tranchée sembloient être pour chaque soldat un jour de fête. [( Applaudissements .)] (82) Nous devons des éloges aux officiers de toutes les armes. Le général Kléber comman-doit en chef l’armée de siège, Bollemont, l’artillerie et Marescot dirigeoit les travaux du génie. Un grand accord a régné dans toutes les opérations, et tous ont parfaitement rempli leur devoir. Le nombre des républicains que nous avons à regretter est d’environ soixante, et cent blessés. Nous ne pouvons encore vous donner l’état des magasins, ni de l’artillerie et des munitions ; on s’occupe d’en dresser des inventaires que nous vous enverrons aussitôt qu’ils nous auront été remis. Salut et fraternité. Signé, Frécine, Gillet, Bellegarde (83). Jourdan, commandant en chef de l’armée de Sambre-et-Meuse, aux membres composant le comité de Salut public. Au quartier général à Pettersheim, le 15 brumaire, l’an troisième de la République française une et indivisible. (81) Moniteur, XXII, 457. (82) Moniteur, XXII, 457. (83) Bull., 18 brum. Débats, n° 776, 684-685 ; Moniteur, XXII, 457; C. Eg., n° 812 et 813; Ann. Patr., n° 677; Mess. Soir, n° 813; Ann. R. F., n° 47; J. Fr., n° 774; J. Perlet, n° 776; M. U., XLV, 306-307 ; J. Univ., n° 1808; Gazette Fr., n° 1041; J. Paris, n° 49; Rép., n° 49; J. Mont., n° 26; F. de la Républ., n° 49. SÉANCE DU 18 BRUMAIRE AN III (8 NOVEMBRE 1794) - N° 31 549 Citoyens Représentans, Je vous envoie le citoyen Ducheiron, mon adjudant général, pour vous prévenir que Maëstricht a capitulé hier au soir; la garnison sortira le 17 avec les honneurs de la guerre; les troupes qui la composent poseront les armes sur les glacis ; elles se rendront prisonnières de guerre, elles seront conduites jusqu’aux premiers postes ennemis, et ne pourront porter les armes contre la République qu’après avoir été échangées. Cette place, une des plus fortes et des plus en état de défense, n’a tenu qu’onze jours de tranchée ouverte. On doit sa prompte réddition à la bonne intelligence qui a régné entre le général Kléber qui commandoit les troupes, le général Bollemont qui commandoit l’artillerie, et le général Marescot qui commandoit le génie. Les troupes ont travaillé avec une ardeur incroyable, et les travaux ont été poussés avec une rapidité étonnante. Notre perte est d’environ 150 hommes tués ou blessés. Je ne connois pas encore la force de la garnison, mais on la porte à 7 à 8 000 hommes, et la place est pourvue d’une artillerie formidable. Tous les détails, de même que les drapeaux, seront remis aux représentans du peuple aussitôt que la garnison sera sortie. Salut et fraternité. Signé, Jourdan (84). Ces lettres, ainsi que le rapport de Richard, excitent le plus vif enthousiasme (85). Sur la proposition du même membre [RICHARD], au nom du comité de Salut public, la Convention décrète que l’armée de Sambre-et-Meuse ne cesse de bien mériter de la patrie (86). L’Assemblée se lève toute entière, par un mouvement spontané, et décrète cette proposition au milieu des acclamations générales (87). 31 RICHARD : L’armée de Sambre-et-Meuse n’est pas la seule qui remporte des victoires signalées ou des avantages éclatans : ( Applaudissemens .) L’armée de la Moselle, qui a si bien mérité de la patrie par sa marche victorieuse contre les Prussiens et en les forçant (84) Bull., 18 brum. Débats, n° 776, 685 ; Moniteur, XXII, 457-458 ; C. Eg., n° 812 et 813 ; Ann. Patr., n° 677 ; Mess. Soir, n° 813 ; Ann. R. F., n° 47; J. Fr., n° 774; J. Perlet, n° 776; M. U., XLV, 306; J. Univ., n° 1808; Gazette Fr., n° 1041; J. Paris, n° 49 ; Rép., n° 49 ; J. Mont., n° 26. (85) Débats, n° 776, 685. (86) P.-V., XLIX, 55. C 322, pl. 1368, p. 36, minute de la main de Richard, rapporteur selon C* II 21, p. 24. Bull., 18 brum. ; Débats, n° 776, 685. (87) Débats, n° 776, 685. de repasser le Rhin, vient de s’emparer de l’importante place de Rheinfeld. ( Vifs et longs applaudissemens). RICHARD lit les nouvelles qui suivent (88) : Toujours au nom du comité de Salut public, le même membre [RICHARD] annonce que l’armée de la Moselle continue ses glorieux succès et donne lecture des dépêches des représentans du peuple près de cette armée, datées de Coblentz, le 11 brumaire. Elles contiennent les détails de la prise du fort de Rheinfeld, à la défense duquel la nature et l’art ont également contribué. Ils observent que le général Vincent, à qui l’ordre avoit été donné de s’emparer de ce poste avantageux, se dépouilla de l’uniforme de général, prit celui de soldat et feignit d’être la sentinelle perdue et suppléa par cette ruse à la foiblesse de sa vue, reconnut la position du fort et celle où l’on pourroit établir des batteries. Il se retira après avoir essuyé plusieurs coups de carabine auxquels l’ennemi eût plus d’attention s’il eût cru fusiller un général; il fit les dispositions pendant la nuit et le plus grand succès a été le résultat de cette sage mesure (89). Bourbotte, réprésentant du peuple près les armées du Rhin et de la Moselle, au comité de Salut public. Coblentz, le 11 brumaire, l’an troisième de la République française une et indivisible. Après avoir chassé l’armée prussienne toute entière au delà du Rhin; après nous être rendus maîtres de la rive gauche de ce fleuve, depuis Mayence jusqu’à Coblentz, et avoir fait tomber ce principal repaire des brigands royaux et des émigrés, il nous restoit encore, chers collègues, à forcer les Autrichiens de nous céder, avant le poste de Mayence, celui qu’ils occu-poient sur la même ligne, entre Dopper et Baccarat, et qui coupant nos communications dans cette partie de la rive gauche du Rhin, nous causoit une gêne fatigante. Le fort de Rheinfeld, à la defense duquel la nature et l’art ont également contribué, ce fort protégé d’ailleurs par des batteries nombreuses établies sur la rive droite du Rhin, donnoit encore à l’ennemi la faculté de s’étendre sur la rive opposée, de faire des incursions dans le pays d’où nous l’avions repoussé, et de communiquer librement d’un bord à l’autre, au moyen d’un pont volant qu’il avoit établi sur cette partie du Rhin. Le général Vincent, auquel l’ordre de s’emparer de ce fort avoit été donné, prit, pour en aller faire la reconnoissance, un moyen que je ne crois pas devoir vous laisser ignorer. Ce général n’ayant pas la vue très bonne et voulant s’approcher d’assez près pour (88) Débats, n° 776, 685-686. (89) P.-V., XLIX, 55.