[Assemblée nationale.] ARCHIVES Pj Que vouloir tout envahir en prétextant qu'on ne veut que conserver, c’est montrer une injustice qui doit être loin de leurs cœurs; Que dans la distribution des avantages entre les villes, c’est l’intérêt général de 350,000 habitants, ou de la majorité, qu’il faut chercher, avant de songer à l’avantage particulier des cités et des citadins. Enfin nous leur assurons que lorsque nous trouverons l’avantage du peuple, qui doit être notre boussole, notre signe de ralliement, nous serons prêts à lui tout sacrifier ; mais que nous mettrons à repousser les prétentions qui le blessent toute l’énergie que doit inspirer aux représentants de la nation la défense d’une cause sacrée pour eux. ■ Signé: ÜE LA RoCHEFOüCAULD-BayERS, évêque de Saintes. Regnaüd. Aitgier. Lan-DREAU. LEMERCIER. RiCHIER. DE BONNE-gens. Le comte Pierre de b remond d’ars. Ratier. Le marquis deReauchamps. Garesché. La broinse de Beauregard. ASSEMBLÉE NATIONALE* PRÉSIDENCE DE M. RABAUD DE SAINT-ÉTIENNE-Séance du mercredi 24 mars 1790 (1). M. le Président, en conformité du décret du 21 mars, ouvre la séance à 9 Heures précises du matin. L’Assemblée ne comptant qu’une trentaine de membres, il est donné lecture des adresses suivantes : Adresse de la ville de Langres, contenant adhésion aux décrets de l’Assemblée natiooale; et félicitation sur les travaux auxquels elle s’est livrée et se livre sans interruption, ainsi que sur la bonne harmonie qui règne entre elle et le monarque adoré de la France. Cette ville joint à ces expressions de son patriotisme, la remise d’une somme de trente mille livres dont elle est créancière de l’Etat, et envoie les titres acquittés de cette créance. Adresse de la ville de Bar-sur-Aube : après l’expression des mêmes sentiments, elle annonce la formation constitutionnelle de sa municipalité, laquelle s’est faite à la grande satisfaction de tous ¬ ses citoyens. Adresse de la. ville d’Allunèse : elle offre à la nation le montant des impositions sur les ci-de-vant privilégiés, pour les six derniers mois 1790. Adresse des officiers et soldats composant la garde nationale de la ville de Mende : elle rend compte de la solennité avec laquelle elle a prêté le serment civique, proteste de maintenir la nouvelle constitution du royaume, et se félicite de vivre dans un Etat libre, et sous un monarque si digne de l’amour de son peuple. Adresse des officiers municipaux de la ville de Bar-le-Quc : ils présentent à l'Assemblée nationale l’hommage de leur respect, et l’assurance d’une ferme et entière adhésion à tous ses décrets. Ils annoncent que la commune de la ville, par un vœu unanime, les a chargés d’exprimer de sa (i) Cette séance est incomplète au Moniteur. lLEMENTAIRES. [34 mars 1790.J 339 part les mêmes sentiments à l’Assemblée, et fom don patriotique de 854 livres en leur nom, et de 324 livres de la part des écoliers de leur collège. Adresses des municipalités réunies de Miribel, Rillieux, Neyron, Thilet Satonay en Bresse, contenant, avec leur adhésion aux décrets de l’Assemblée nationale, les expressions de leur respect pour ses membres, le renouvellement entre leurs mains du serment civique qu’ils ont fait de maintenir tes décrets, de les observer, et de les faire observer dans toute leur plénitude, d’être fidèles à la nation, à la loi et au roi, de maintenir la tranquillité qui a régné jusqu’à présent dans leur canton, et de préserver leurs concitoyens des désordres qui ont eu lieu dans les provinces voisines. Ils demandent l’établissement d’un tribunal de district à Miribel. Adresse des nouvelles municipalités des villes de Reims et de St-Etienne en Forez. Adresse de la ville d’HurieL district de Noyon, qui supplie l’Assemblée de lui abandonner les biens d’un prieuré situé dans son territoire, pour les faire servir à des établissements de bienfaisance et d’éducation. Adresse de la communauté de Boussès en Al-bret : elle annonce que le peuple ne s’est livré à des actes de violence dans cette contrée, que parce qu’il avait été trompé; mais que bientôt désabusé de son erreur, la tranquillité publique n’a pas tardé à se rétablir dans son territoire. M. le Président. L’Assemblée étant devenue plus nombreuse, MM. les secrétaires vont dan*_ ner lecture du procès-verbal. M. présentants de la nation. Un membre rappelle le don patriotique offert par M. le comte de Pawlet dans une des séances précédentes, d’un plan combiné qui. embrasse. les milices auxiliaires , les travaux publics et la police générale, du royaume. L’Assemblée ordonne de nouveau l’impression de ce travail et autorise M. le président à témoigner à ce citoyen la satisfaction de l’Assemblée sur l’utilité des travaux dont il s’occupe. M. le Président fait part à l’Assemblée d’une lettre de M. d'Ogny, intendant des postes, par laquelle cet administrateur expose qu’il est arrivé de Reauvais quatorze paquets contresignés et cachetés du seeau de l’Assemblée nationale; ce qui, suivant lui, peut faire soupçonner qu’on abuse 340 [Assemblée nationale.] ARCHIVES Pj dans quelques municipalités du contreseing de J 'Assemblée. A cette lettre est joint un des paquets, effectivement timbré de Beauvais, et scellé du cachet de l’Assemblée. Un membre observe que ces paquets ont vraisemblablement été adressés par des députés de V Assemblée nationale à la munici palité de Beauvais, chef-lieu d’un département, pour être par elle envoyés aux municipalités des chefs-lieux de ses districts, et qu’ils peuvent contenir des instructions pour la formation des assemblées de district et de canton ; ce qui s’est ainsi pratiqué pour plusieurs autres départements. Cette réflexion détermine l'Assemblée à renvoyer la lettre et le paquet adressés à M. le Président par M. d’Ogny, aux députés du département de l’Oise , lesquels rendront compte à l’Assemblée, de ce qui a donné lieu à l’envoi de Beauvais des quatorze paquets contresignés de son cachet. M. Baron, membre du comité des domaines , expose à l’Assemblée les abus des échanges faits depuis quelques années -, lui propose de suspendre l’exécution de ceux qui ne sont pas encore consommés ; et, pour cet effet, il présente un projet de décret qui est adopté par l’Assemblée et qui est conçu en ces termes : « L’Assemblée nationale, après avoir ouï son comité des domaines, a décrété et décrète qu’il sera sursis à toutes opérations relatives aux échangesdes domainesde lanation non consommés, et notamment à l’expédition et au sceau de toutes lettres de ratification de ces échanges , jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné par l’Assemblée. » M. l’abbé Gouttes présente, au nom du comité de liquidation, un projet de décret relatif à la lettre de M. de La Tour-du-Pin. Ce projet est ainsi conçu : « Les appointements des officiers de l’état-major des places frontières, pour 1789, seront compris dans les dépenses courantes, et comme tels acquittés par le Trésor royal. L’Assemblée n’entend comprendre dans cette disposition que les lieutenants de roi, majors, aides-majors, sous-aides-majors, capitaines des ports et autres officiers subalternes qui sont en pleine activité de service. » M. Camus fait lecture de quelques-uns des articles des états des paiements faits au Trésor royal, pour le département de la guerre, depuis le l*r janvier au 4 mars. A la date du 18 janvier, c’est-à-dire quatre jours après le décret qui défendait toute espèce de paiement, se trouve M. le prince de Confié, pour son gouvernement de Bourgogne, 35,000 livres pour les six premiers mois et les six derniers mois de 1788; M. le duc de Bourbon, gouverneur de Champagne, 31,510 livres; M. le duc du Châtelet, gouverneur du pays de Toul, 28,000 livres. Les deux états réunis forment un total de 620,471 livres 13 sous. M. Camus propose de mander sur-le-champ à la barre le caissier de l’extraordinaire des guerres, pour qu’il rende compte des ordres en vertu desquels il a fait les paiements contenus dans les deux états déposés au comité de liquidation, et pour exhiber lesdits ordres. M. fréteau observe que ce décret ne peut être exécuté sur-le-champ, parce qu’il doit être envoyé ELEMENTAIRES. [24 mars 1790.] à la sanction ; l’Assemblée n’ayant point encore établi que cette formalité n’est pas nécessaire en pareil cas. M. Camus. Par un décret sanctionné , il est ordonné à tous les ordonnateurs des départements de remettre aux différents comités toutes les pièces et renseignements qui seront demandés ; la faculté accordée aux comités n’appartient-elle pas, de plein droit, à l’Assemblée, et n’est-il pas en ce moment uniquement question de renseignements nécessaires pour une opération aussi pressante que celle dont les comités sont chargés ? M. Target. Les observations du préopinant sont extrêmement justes : un fait vient encore à leur appui. L’Assemblée a déjà jugé la question, en ne faisant point sanctionner le décret par lequel, dans le mois de novembre, M. le garde des sceaux a été mandé. (La proposition de M. Camus est mise aux voix et décrétée.) M. le duc du Châtelet. Quand hier j’ai été interpellé, j’ignorais que celui qui est chargé de mes affaires eût touché plus de 3,000 livres ; il a encore reçu 2,655 livres. 11 n’est pas étonnant que je n’en aie pas été instruit, parce que celte somme ne lui a été remise que le 20 de ce mois, et je ne compte pas tous les jours avec lui. C’est au Trésor royal à savoir ce qu i! doit payer, et non à des gens d’affaires, dont toute la mission est de recevoir. Les 3,000 livres dont il était hier question m’ont été données en vertu d’uu décret de l’Assemblée. Je demande qu’il me soit permis de faire un don patriotique des 2,655 livres dont je parle aujourd’hui. M. Devillas. Si M. le duc du Châtelet a reçu ce qui lui est légitimement dû, ou ne peut accepter son offre; les circonstances lui donneraient l’apparence d’un don forcé. S'il a reçu ce qu’il ne devait pas recevoir, il ne peut donner : c’est une restitution qu’ii doit faire. M. Voidel. Je demande comment il se fait que M. le duc du Châtelet se trouve pour 28,000 livres sur l’état des paiements de l’extraordinaire des guerres; je demande encore s’il est possible qu’il ait reçu, soit de l’argent, soit des ordonnances de paiement, sans avoir fourni ses quittances. M. le duc du Châtelet. Le préopinant ne connaît pas les arrangements d’usage, On remet à un homme d’affaires des blancs-seings pour toucher; les blancs-seings sont arrangés de manière qu’il ne puisse pas en user pour un autre objet. J’ai vu ce matin des ordonnances payables de mois en mois, qui auraient été payées à mon homme d’affaires, à mesure qu’elles se trouveront sur les rôles de distribution. On a dit hier que les gouvernements étaient donnés à la faveur. Je serais bien fâché d’avoir ainsi obtenu les grâces dont je jouis. Cinquante ans de service, un coup de fusil à travers le corps, six campagnes, huit ans d'ambassades; voilà mes titres. M. Garat l'ainé. Quand un fait est sujet à deux interprétations, l’une bonne et l’autre mauvaise, la justice et la raison veulent qu’on s’arrête à la première; et rien n'est digne de cette Assemblée que ce que veut Ja raison, que ce que veut la justice. Il suffit que M. du Châtelet atteste les détails qu'il nous a donnés, pour que nous n’en doutions