[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (3 août 1791.] 133 ne sacrifient à un sordide intérêt la fortune publique? « Les petits assignats se vendent dans leurs caisses; ils peuvent s’y vendre impunément; au lieu de passer directement entre les mains des consommateurs, des rentiers, des créanciers de l’Etat, ils sont trafiqués par des gens d’affaires, par des fondés <le procuration, et c’est dans les mains de ces intermédiaires, qui en font un commerce, outre les bénéfices de leurs commissions, que s’écoulent ces petits assignats. Le salut de l’Etat est encore à la merci des anciens agents de finances. « Les mêmes inconvénients se font sentir dans l’échange d-la monnaie de cuivre. Une seule caisse < st ouverte, et l’on y exige des formalités immenses ; on quitte cette odieuse caisse en murmurant ; on se demande comment l'Assemblée nationale, qui ne s’est mêlée en aucune manière de l’éiaidissement des caisses des départements, a établi elle-même celle de Paris. « Nous venons vous demander la faculté de faire jouir, d’une manié e effective, la capitale, de vos bienfaits ; nous avons dans Paris 48 comités de sections; ces comités sont nommés par le peuple, et malgré les odieuses couleurs dont on les a peints à l’Assemblée, lorsqu’il s’agissait de la distribution des petits assignats, ils ne sont pas 48 compagnies de finances. « Nous vous supplions, Messieurs, de considérer tous les avantages pour la capitale et pour vous-mêmes de préférer ces agents à ceux que vous avez déjà adoptés. « Nous supposons que les 100 millions dont vous avez décrété l’émission soient partagés en deux parts, l’une pour le Trésor public, et l’autre pour les besoins journaliers des citoyens; nous réclamons, Messieurs, pour la ville de Paris, la portion de cette seconde part qui lui revient, et nous vous supplions d’eri laisser la distribution aux comités de section, chacun dans son arrondissement ; nous vous supplions de leur faire remettre de même la quantité de la monnaie de cuivre, correspondant à la quantité d’assignats que nous vous demandons, et pour sûreté de ce dépôt, nous consentons d’engager, s’il le faut, toutes nos fortunes. « Nous sommes disposés, Messieurs, à tous les sacrifices, pourvu que vous nous tiriez des mains des financiers. ( Applaudissements et murmures), « Les avantages de cette opération sont évidents, tout d’abord par ce mode de distribution, le citoyen qui rapportera un assignat de 5 livres de son travail ne sera pas obligé de payer un gros intérêt pour t’échange ou de passer la journée du lendemain à la caisse. « D’un autre côté, les commissaires des sections sont des hommes dévoués depuis longtemps à la Révolution ; et comme, dans les sections, nous nous connaissons les uns les autres, il est im-fiossible qu’il puisse y avoir malversation dans a distribution des assignats qui pourront être échangés contre d’autres, sans crainte qu’on les accapare. « Enfin, les assignats échangés peuvent être ristitués à la caisse de l’extraordinaire très p rom tement, et si le service public pouvait en souffrir, nous ferons les fonds d’avance à mesure que l’on délivrera les petits assignais et la monnaie, et cela en assignats de deux mille li res; telle est, Messieurs, la pétition que nous avons l’honneur de vous faire. « Nous vous le répétons, Messieurs, hâtez-vous de porter remède au mal que nous vous avons dénoncé et qui déchire la capi'ale et que nos ennemis qui ont ré-ervé t mies leurs attaques pour ce moment décisif n’aient pas l’espérance de faire rétrogader la dévolution. Ce bienfait que nous recevrons de votre sagesse, ne sera pas le moindre de ceux qui vous auront mérité le tribut de nos éloges et de notre reconnaissance. » M. le Président répond : « Messieurs, « Quand les efforts des mauvais citoyens ou la cupidité de ceux qui ne connaissent point de patriecherchent à préparerune calamité publique, l’Assemblée nati male ne peut qu’être satisfaite de voir le contraste consolant de citoyens généreux, dirigeant tous leurs soins pour la prévenir, et portant une surveillance utile sur les besoins journaliers de toutes les classes du peunle. L’Assemblée prendra en considération les vues que vous venez de lui soumettre ; elle a déjà accordé à cet important objet une discussion étendue qu’elle reprendra avec intérêt aussitôt que ses comités lui présenteront le résultat de leurs travaux. « Elle vous engage à remédier à ce délai par la continuation de votre zèle; et, si les soins que ce zèle vous commande vous le permettent, elle vous engage à assister à sa séance. » M. l’abbé Gouttes, évêque d'Autun. Les maux qui vous sont signalés dans la pétition dont il vient de vous être donné lecture doivent attirer toute l’attention de l’Assemblée. Je demande que les comités présentent incessamment un projet de decret contre l’agiotage de ces grippe-sou, qui se constituent intermédiaires entre b s payeurs et les créanciers de l’Etat et qui, au lieu de remettre les assignats à qui de droit, les gardent pour les vendre sur la place. M. Gaultier-Biauzat. Tout le mal ne vient pas seulement des grippe-sou, mais de ce que ron ne surveille pas assez les payements faits par les payeurs des rentes, payements dont un tiers doit être fait en petits assignats. Il est un moyen bien simple de pourvoir à cet objet. Il faut que le Trésor public soit tenu de publier tous les huit jours un état rt la quantité respective de petits assignats qu'il a ira versée dans les différentes caisses du ruyaume, afin que chaque partie prenante sache dans quelle proportion elle doit recevoir ces petits assignats dans son payement. Le Trésor public par exemi le donnera 3 millions dont un payé en petits assignats ; le petit créancier pourra exiger comme il en a le droit, sur un payement dé 300 livres, 100 livres en petits assignats. M. Fréteau-Saint-Just. J’ai déjà fait sentir dans le temps à l’Assemblée, l’inconvénient qui résulte d’un seul établissement pour des échanges aussi multipliés que ceux qui s’opèrent chaque jour dans une ville telle que Paris, mais je n’avais pas osé donner un trop long développement à mes . observations parce que j’avais craint qu’étant opposé à un projet longtemns réfléchi dans deux comités, elles ne fussent mal reçues de l’Assemblée. M. Tarbé, ministre des contributions publiques, présent à la séance , demande à soumettre quelques observations sur l’objet en discussion; il obtient la parole et dit :