352 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE courber la tête sous le joug du despote et repoussé les caresses perfides. Il s’en est trouvé de ces cœurs fidèles à la République, qui sont restés purs au milieu de la corruption et libres au milieu des fers. Ce n’est point parmi ceux qui faisaient grands bruits de leur patriotisme, lorsque l’ennemi était loin, et qui se sont humiliés devant lui lorsqu’ils ont été en sa puissance, mais parmi des citoyens simples et sans ostentation. Ceux-là traînaient le char de l’empereur dans les rues de Valenciennes, tandis que ceux-ci bravaient les menaces de ses satellites et que des femmes modestes refusaient courageusement de balayer les rues par lesquelles il devait passer. Les représentants du peuple ont pris aussi les mesures les plus efficaces pour la sûreté des récoltes des riches contrées que nous avons reconquises, pour remettre en activité l’exploitation des importantes mines de charbon d’An-zin, pour rétablir les manufactures de batistes et de mousselines, pour que la levée de la jeunesse de première réquisition s’exécutât sans délai ; et enfin pour la réorganisation des autorités constituées. Voilà, citoyens, ce qu’ont fait les défenseurs de la patrie pour la délivrer de ses cruels ennemis ; voilà ce qu’ils faisaient au nom de la liberté, au nom de la République, au cri mille fois répété de vive la Convention nationale. Ce cri de ralliement les rendait invincibles. Oui, citoyens, la France a des armées de héros ; toujours ceux qui combattront pour la défense de leurs foyers et de leurs droits sacrés renverseront les esclaves, comme un vent impétueux enlève et roule un tourbillon de poussière. On a vu ces jeunes guerriers étonner les bandes germaniques par leur audace et par leur discipline ; on les a vu surpasser en constance tout ce que l’histoire rapporte des phalanges grecques et des légions romaines. Et sur quoi étaient fondées ces vertus sublimes de nos frères d’armes sortant de leurs charrues? quels étaient les liens de cette discipline étonnante? Citoyens, ces vertus, c’est l’amour seul de la patrie ; cette discipline, c’est la confiance et la fraternité. Oh, si la même énergie, le même ensemble, étaient déployés contre les ennemis de l’intérieur, combien la République serait prospère ! comme on verrait se rouvrir à l’instant les sources de la félicité nationale! Eh qui donc en empêcherait? Seraient-ce quelques factions obscures, quelques hommes avides d’or, de sang ou de pouvoir? Non, le peuple veut que les viles passions disparaissent. Prononcez donc, dépositaires de sa puissance; déclarez que vous la conserverez dans toute sa plénitude, que vous ne souffrirez jamais que ce dépôt sacré soit violé, que vous ne permettrez pas qu’aucune partie de ce qui a été confié à votre garde par le peuple tout entier soit usurpé par aucune fraction du peuple. Soyez seuls sa boussole, son point de ralliement. Il n’est qu’une ligne droite dans la nature, il en est mille de tortueuses ; il n’est qu’un moyen d’être pur, il en est mille d’être pervers. Sauvez le peuple et de ses faux amis et de ses ennemis déclarés ; sauvez votre dignité qui lui appartient, proscrivez à jamais de votre sein ces honteuses dénonciations qui déchirent les entrailles de la patrie ; punissez le crime, et le crime seul; portez la sécurité dans le cœur de l’homme simple et dans l’asile du malheureux; que le génie de l’égalité ranime l’émulation, et que l’amour du travail et de l’économie fasse revivre l’agriculture et les arts. Nous vous avons parlé des armées de terre, que vos armées navales fixent maintenant votre plus grande sollicitude. Il vous appartient d’affranchir un autre élément. Faites pour la marine ce que vous avez fait pour le continent ; tournez vers elle tous vos moyens révolutionnaires : point de domination sur mer ; qu’elle devienne une grande route ouverte à toutes les nations ; toutes, excepté une, y ont le même intérêt que vous. Que celle qui veut subjuguer toutes les autres soit subjuguée elle-même, si elle ne peut être contenue. Que l’Europe s’éclaire, et que de tous les points des Deux Mondes parte ce cri unanime : La liberté des mers ! L’Assemblée, après avoir fréquemment couvert ce rapport d’applaudissements, en ordonne l’impression, la distribution à ses membres au nombre de six exemplaires, et l’envoi aux armées. ROUX : Pour imposer silence aux malveillants qui osaient répandre des bruits aussi faux qu’injurieux ; [(qui) ont publié que le comité de Salut public avoit épuisé les trésors de la nation pour racheter ces places] (31) ; qui disaient que le comité ne pourrait, ni n’oserait rendre compte, je demande que l’Assemblée décrète qu’elle approuve formellement toutes les mesures prises par son comité de Salut public pour la reprise de ces quatre places. Cette proposition est décrétée. La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [Carnot, au nom de] son comité de Salut public sur les mesures qu’il a prises pour l’exécution du décret du 16 messidor, pour la restitution à la République des places de Landrecies, le Quesnoy, Valenciennes et Nord-Libre [ci-devant Condé, département du Nord], décrète : Article premier.- La Convention nationale approuve les mesures prises par le comité de Salut public pour l’exécution du décret du 16 messidor. Art. II.- Le rapport fait par ledit comité sera imprimé, distribué au nombre de six exemplaires aux représentans du peuple, et envoyé aux départemens, aux armées et aux sociétés populaires (32). (31) Ann. Pair., n° 630. C. Eg„ n° 765 ; J. Fr., n° 727 ; M.U., XLIV, 12; Rép., n° 2; Ann. R.F., n° 2. (32) P.-V., XLVT, 4. C 320, pl. 1327, p. 3. Décret non numéroté, minute de la main de Roux. C* II 21 indique Roux et Bentabole, rapporteurs. J. Perlet, n° 730 ; Rép., n° 2 ; C.Eg., n° 765 ; Ann. Patr., n° 630 ; Ann. R. F., n° 2 ; Mess. Soir, n° 765.