394 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 octobre 1789.] province où il voudra se retirer ; enfin des procès faits àdes coupables qui ne sont plus, et dont on flétrit plutôt les parents que la mémoire ? Mais, Messieurs, vous réformerez en vain ces abus, si vous laissez subsister le tribunal Sanguinaire de la maréchaussée ; et les expressions manquent à quiconque en connaît le régime, pour peindre l’horreur qu’inspire, je ne dirai pas cette juridiction, mais cette boucherie judiciaire. 11 est enfin, Messieurs, dans cette partie, des améliorations de détail qu’il suffira d’exposer à celte Assemblée pour lui en faire sentir l’importance. C’est d’après ces considérations que je crois devoir vous proposer de décréter ce qui suit : Article 1er. La peine de mort ne sera prononcée que contre les assassins, les empoisonneurs et les incendiaires. Les galères à perpétuité seront substituées au dernier supplice, dans tous les autres cas où il avait lieu. Art. 2. L’édit de Henri II, concernant les filles et veuves enceintes, est et demeure abrogé ; en conséquence, il n’y aura lieu à la peine portée par cette loi, qu’autant qu’abstraction faite du défaut de déclaration de grossesse, il y aura preuve suffisante que lesdites filles ou veuves auront détruit leur fruit. Art. 3. On ne condamnera plus au fouet, et nul ne sera flétri d’un fer chaud, s’il n’est condamné aux galères perpétuelles. Art. 4. La peine du bannissement sera remplacée par celle de la réclusion du coupable dans une maison de force, où il sera employé à des travaux, pendant la même durée de temps qu’il aurait dû, suivant les lois anciennes, rester expatrié. Art. 5. On ne fera plus de procès à la mémoire. Art. 6. La juridiction des prévôts des maréchaux est supprimée, et tous les détenus dans leurs prisons, et en vertu de leurs décrets, seront par eux transférés, avec les charges et les pièces de conviction, par devant les juges ordinaires, qui continueront l’instruction des procès à la Charge de l’appel. Art. 1. Défenses sont faites au ministère public d’interjeter appel des jugements d’absolution, et de ceux qui ne prononceront aucune peine afflictive ou infamante, lorsque les condamnés y auront acquiescé. Art. 8.Tous jugements d’absolution seront rendus publics par la voie de l’impression et de l’affiche, aux frais de l’Etat, et l’accusé obtiendra en outre des indemnités proportionnées aux dommages qu’il aura soufferts, contre son dénonciateur, et subsidiairement sur les fonds publics qui seront à ce destinés. Art. 9. Hors les cas d’émeute populaire et de sédition, il sera sursis à l’exécution de tout jugement portant peine de mort, pendant trois mois, à compter de la notification qui en sera faite au conseil de l’accusé, et la révision du procès se fera de droit huit jours avant l’exécution. Art. 10. Aucun jugement de mort, hors les cas d’exception mentionnés en l’article précédent, ne sera exécuté qu’il n’ait été signé par le Roi. Art. 11. Le Roi pourra faire grâce, excepté lorsqu’il s’agira de crimes de lèse-nation, ou de lèse-majesté, au premier chef, de haute trahison, de péculat ou de concussion ; il pourra aussi dans tous les autres cas commuer les peines ; le tout néanmoins, seulement après le jugement en dernier ressort de l’accusé. Art. 12. Les articles ci-dessus seront incessamment présentés à la sanction du Roi, et Sa Majesté sera suppliée de donner les ordres nécessaires pour leur exécution. Plusieurs membres demandent l’ajournement des articles proposés par M. Guillotin et par M. Guillaume. M. le Président met aux voix l’ajournement : il est prononcé. Ôn passé à la discussion du préambule du projet de décret : Il a été proposé sur ledit préambule un amendement qui a été admis. On a été aux voix sur le susdit préambule avec l’amendement adopté, et ledit préambule a été décrété ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, considérant qu’un des principaux droits de l’homme, qu’elle a reconnus, est celui de jouir, lorsqu’il est soumis à l'épreuve d’une poursuite criminelle, de toute l’étendue de liberté et de sûreté pour sa défense, qui peut se concilier avec l’intérêt de la société qui commande la punition dés délits; que l’esprit et lës formes de la procédure pratiquée jusqu’à présent en matière criminelle, s’éloignent tellement de ce premier principe de l’équité naturelle et de l’association politique, qu’ils nécessitent une réforme entière de l’ordre judiciaire, pour la recherché et le jugement des crimes; qüe si l’exécution de cette réforme entière exige la lenteur et la maaturité des plus profondes méditations, il est cependant possible de faire jouir dès à présent la nation de l’avantage de plusieurs dispositions, qui, sans subvertir l’ordre de procéder actuellement suivi, rassureront l’innocence et faciliteront la justification des accusés, en même temps qu’elles honoreront davantage le ministère des juges dans l’opinion publique, a arrêté et décrété les articles qui suivent. » Alors, plusieurs membres de l’Assemblée ont demandé que le préambule et les 28 articles sur la réformation provisoire de la procédure criminelle , qui ont été arrêtés , fussent présentés incessamment à la sanction royale : on a été aux voix, et il a été décrété que les 28 articles arrêtés seraient présentés incessamment à la sanction royale. Enfin, sur les représentations faites par M. Baudouin, imprimeur de l’Assembléé nationale , touchant la nécessité où il se trouvé de transporter son imprimerie à Paris, et sur spn inquiétude de trouver dans Paris un local à portée de celui que l’Assemblée y occupera, afin qu’il puisse correspondre plus directement avec elle, et la servir avec la plus grande exactitude, l’Assemblée a autorisé M. le président à écrire à MM. les commissaires déjà rendus à Paris, de déterminer pour le transport de l’imprimerie dudit sieur Baudouin, le local qu’ils jugeront le plus Commode pour le service de ladite Assemblée. Plusieurs membres ont demandé qu’il fût donné lecture des 28 articles décrétés sur la procédure criminelle. Cette lecture a été faite ainsi qu’il suit : DÉCRET % DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE sur la rèformation de quelques points de la jurisprudence criminelle. L’Assemblée nationale, considérant qu’un des principaux droits de l’homme, qu’elle a reconnus, est celui