366 [États g: en. 4789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] une main paresseuse, à recevoir un salaire qui serait le fruit de leurs travaux. Le vrai moyen d’y parvenir serait, nous croyons, de maintenir les bureaux de charité déjà établis dans différentes paroisses, et d’en établir dans celles où il n’y en a pas encore ; et pour cet effet affecter une somme prise sur les impôts et proportionnée au besoin de chaque paroisse, besoin qui peut être connu par les curés de chaque lieu et réglés par les assemblées de département. Art. 8. Abus à corriger dans les chassos; l’abondance de gibier de toute espèce, augmentant de jour en jour, fait, pour le cultivateur et même pour tout le peuple, l’impôt le plus désastreux. 1° Le cerf, la biche, etc., etc., rongeant et mangeant continuellement les bois déjà venus, en empêchent la croissance, et les bois nouvellement plantés ne peuvent être conservés que par le moyen des palis très-dispendieux. Ces circonstances réunies font que, depuis environ quinze ans, le bois a doublé de prix et que nous sommes menacés d’en manquer. 2° Peut-on voir d’un œil indifférent et de sang-froid le délit journalier causé par des troupeaux de lièvres, de lapins, de faisans et de perdrix qui inondent les campagnes à plus des vingt lieues à la ronde de Paris, tant sur les terres de particuliers, que sur les capitaineries, fléau plus désastreux que celui des grêles et des gelées, puisque celui-ci n’arrive que rarement et que l’autre se renouvelle chaque année et dure même l’année entière ? Pour le peu qu’on veuille y faire attention, on jugera facilement des faits que nous avançons. 11 est démontré et prouvé, d après l’expérience, que deux terres d’égale qualité, cultivées avec le même soin, que sur l’une il y ait peu de gibier, et que sur l’autre il y en ait-beaucoup, comme il n’arrive que trop souvent, sür celte dernière le cultivateur est obligé de mettre 3 boisseaux de semence par arpent plus que dans l’autre et est moins certain de sa récolte. Ainsi 100 arpents, à 3 boisseaux de plus par arpent, font 25 setiers à 24 livres le setier, ce qui fait 600 livres de perte pour le cultivateur. Nous avons dit moins sur de récolter : 1° parce que s’il vient un hiver sec, le lièvre et le lapin, broutant continuellement la fànne des blés, les tiennent dans un état de langueur ; la perdrix et le faisan viennent ensuite enfoncer leur bec meurtrier jusque dans le cœur des plantes, leur donnent la mort : aussi point de récolte ou très-peu; 2° s’il vient un hiver tendre et qui donne beaucoup de neige, et qu’elle reste longtemps sur la terre, le gibier ne peut plus prendre la portion que le cultivateur lui a sacrifiée ; alors le blé vient trop fort, il verse et ne produit que de mauvais grain et de mauvaise paille. Ainsi le cultivateur, malgré ses soins, est frustré du fruit de qes travaux, tandis que son voisin, n’ayant point de gibier, récolte abondamment, même avec moins de dépenses. On voit donc clairement que la bête se nourrit librement du pain que Dieu a créé pour l’homme, et l’homme partout meurt de faim ; la bête tient la place de l’homme et l’homme la place de la bête. Qu’il soit donc permis à tous les hommes de détruire ces sortes d’animaux si destructeurs et si nuisibles à la nourriture du genre humain. Art. 9. Il serait nécessaire d’arrêter plusieurs fermiers qui, non contents de faire valoir deux fermes, poussent leur ambition jusqu’à quatre et cinq, ce qui cause un dommage notable aux fermiers même et encore davantage dans le public. Telles sont nos doléances et les abus que nous croyons devoir être réformés. Paraphé ne varietur au désir de l’assemblée, le 17 avril 1789. . Signé François Châtelain, syndic; Dumont; Nicolas-François Châtelain; Nicolas Châtelain; Pierre Cousin; Etienne Pigneux; Jean Chatelaiu; Louis Garry; de Louvre; Jean-Baptiste Châtelain; Charles Olivier; Dumont; Antoine de Louvre, et Garry. CAHIER Des plaintes , doléances et vœux du tiers-état de la paroisse de Boudoufle, du ressort du châtelet de Paris , délibéré et arrêté en l’assemblée générale dudit tiers-état , présidée par Louis-Didier La-DEY, notaire et greffier des bailliages et baronnie du Plessis-Sebbeville, Boudoufle et dépendances , faisant pour l'empêchement de M. . le bailli , à cause de son indisposition , contenant les articles qui suivent (1). Art. 1er. Les habitants supplient Sa Majesté de réformer tous les privilèges, exemptions et abonnements, afin que tout seigneur, privilégiés et ecclésiastiques, soient sujets à l’impôt ci-après demandé. Art. 2. La suppression de tous les impôts, sous quelque dénomination qu’ils soient établis; création d’un seul impôt appelé territorial, réparti également sur tous les biens-fonds. Art. 3. La suppression de tous les droits d’aides sur tous les vins et autres boissons, et taxation d’une somme par arpent de vigne qui fera partie de l’impôt ci-dessus : ce qui occasionnerait la réformation des commis des aides. Art. 4. La suppression des gabelles, le sel pris dans les salines, rendu marchand suivant un prix uniforme, la propriété exclusive desdites salines conservée à Sa Majesté, le tabac rendu de même marchand. Art. 5. La destruction de tout gibier et les re-' mises supprimées, ainsi que les colombiers et volières. Art. 6. L’abolition des grosses et menues dîmes en nature, et création d’une somme par arpent payable en argent. Art. 7. La diminution des entrées de toutes denrées à Paris. Art. 8. Demandent, les habitants, que les droits honoraires de MM. les curés et vicaires soient égaux dans toutes les paroisses, et que leurs revenus soient fixés. Art. 9. La suppression des offices de jurés-pri-seurs et des 4 deniers pour livre, afin de ne point gêner la volonté et confiance des particuliers. Art. 10. La suppression de la corvée. Art. 11. La suppression des droits de minage, péage et autres droits domaniaux. Art. 12. La suppression des milices. Art. 13. L’uniformité des poids et mesures dans tout le royaume. Art. 14 et dernier. Au surplus, les députés du tiers-état du village et paroisse de Boudoufle seront et demeureront autorisés à proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui sera avantageux pour le bien de l’Etat et ce qui pourrait être employé dans le cahier général de la prévôté et vicomté de Paris, même contre et outre les articles ci-dessus et d’autre part. Fait, délibéré et arrêté en l’assemblée générale du tiers-état de là paroisse de Boudoufle, tenue cejourd’hui 16 avril, avant midi, de l'année 1789, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les mors.] 367 en la maison bourgeoise du sieur Baldé, bourgeois et syndic, par les habitants nommés au procès-verbal de l’élection des députés de ce jour, fait pareillement en notre présence et signé des mêmes syndic, officiers municipaux et habitants de cette paroisse, ainsi que le présent cahier que nous avons, avec les susnommés, signé. Signé Baldé, syndic; Josse ; Jugrant; Fortin; David ; Duval ; F.Lulain; Vaury ; Joseph-Noël Gui-chot ; Nicolas David ; Bouchenay, et Ladev. CAHIER Des doléances de la paroisse de Bouffemont (l). Nous, Jean-Jacques Picard, syndic de la municipalité de la paroisse de Bouffemont, village situé dans l’étendue de la prévôté et vicomté de Paris, Claude Noël, laboureur et ancien syndic; Jean-Baptiste Tierce, aussi ancien syndic ; Pierre Re-naul ; Denis Allegrain ; Nicolas Mlgnau; JacquesBu-quet, aussi tous anciens syndics ; François Gerbe ; François-Benoit Belleville ; Georges Martin ; Régnault; Pierre-Nicolas Denis; Jean-Robert Bu-quet, autres notables haabitants de ladite paroisse, tous assemblés et réunis au son de la cloche, en exécution et pour obéir aux ordres de Sa Majesté, ortés en ses lettres données à Versailles le 4 janvier 1789 pour la convocation et tenue des Etats généraux de ce royaume, et satisfaire, en ce qui nous concerne, aux dispositions du règlement y annexé, ainsi qu’à l’ordonnance de M. le lieutenant civil au châtelet de Paris, le 4 de ce mois, avons rédigé nos doléances pour être présentées par les députés qui seront par nous choisis le 18 du présent mois. Art. 1er. Le vœu de l’assemblée est d’avoir un bon établissement de gouvernement, qui rende stable et à toujours les "mesures que les Etats généraux trouveront convenables. Art. 2. Que l’impôt sur les terres et immeubles, tel qu’il soit, doit être également réparti entre toutes les classes de citoyens sans distinction, et qu’à cet effet toutes exemptions pécuniaires en faveur de tout individu, corps et communauté quelconque, doivent être supprimées. Art. 3. Qu’attendu que la corvée qui se perçoit en argent est onéreuse aux gens de la campagne, la milice qui prive les pères de famille du secours de leurs enfants, dont les bras sont si nécessaires à la culture, soit supprimée. Art. 4. Comme lalenteur des procès, la difficulté de se faire rendre justice, et les frais qui se font pour y parvenir sont onéreux aux habitants des campagnes, les votants supplient les Etats généraux de pourvoir aux abus qui les oppriment, et observent qu’il est à désirer que toutes les petites justices soient supprimées et qu’il soit établi un tribunal dans un chef-lieu dont l’arrondissement serait de deux à trois lieues tout au plus, et qu’à l’avenir il n’y ait que deux degrés de juridiction, et qu’il n’y ait plus d’emprisonnement arbitraire ; et attendu qu’il se cause beaucoup de dégâts dans les bois vassaux et en général sur toute la récolte, et que pour l’ordinaire les délinquants sont hors d’état de payer les amendes, la punition qu’ils auront encourue soit de la prison pour le moins pendantun mois, et en cas de récidive, condamné aux travaux publics, tel que pour la réparation des chemins, ce qui viendrait au soulagement du peuple en général. Observent encore, les votants, que les occupations de terrain pour la confection (1) Nous publions (Se cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. des chemins sont autant de maux qui pèsent sur eux et auxquels il est pressant de remédier. Art. 5. Que les assemblées provinciales dont les membres devraient être élus par les municipalités, n’ayant pas encore toute l’autorité nécessaire pour espérer le bien dont elles sont capables, il est très-urgent d’y pourvoir. Art. 6. Comme depuis plusieurs siècles il existe des abus énormes sur le fait de la chasse, ce qui est destructeur de l’agriculture, puisqu’il est démontré par l’expérience que le gibier de toute espèce enlève chaque année au moins le tiers des récoltes et plus particulièrement dans l’étendue de cette paroisse dont le territoire est limitrophe de la forêt, où, outre le petit gibier, les bêtes fauves telles que cerfs, daims et sangliers causent le plus grand ravage, les votants supplient les Etats généraux d’employer leurs lumières pour opérer l’anéantissement de cet abus, qui leur préjudicie encore plus que les intempéries des saisons. Art. 7. Les votants se trouvent cruellement opprimés par la cherté du pain ; iis réclament la protection des Etats généraux , pour qu’il soit promptement pourvu à la vexation quirègnedans le moment actuel dans toute la France et empêcher le monopole, en fixant à un taux honnête le prix de chaque setier de blé et que les marchés en soient suffisamment fournis les jours fixés aux endroits ordinaires. Art. 8. Désirent, les votants, qu’il soit arrêtéaux Etats généraux que les laboureurs ne puissent faire valoir plus d’un corps de ferme à la fois, afin que l’agriculture puisse être multipliée entre plusieurs mains, et que tous les bénéficiers en général ne puissent faire valoir les terres de leurs bénéfices ni autres quelconques. Art. 9. Requièrent, les votants, la suppression des droits de péage et travers exigés par les seigneurs dans l’étendue du territoire de leur seigneurie, et la suppression de beaucoup d’autres abus sur lesquels il sera porté des plaintes par les autres municipalités. Fait et arrêté par nous susnommés et soussignés en une salle du presbytère de ce lieu de Bouffemont, cejourd’hui 14 avril 1789, en présence de maître Jean-Simon Parmentier, licencié és lois, ayant maison de campagne en ce lieu de Bouffemont. Signé Parmentier; G. Noël; Delleville; P. -H. Denis ; Pierre Régnault; Aliegrain;Buquet, L.-F Gerbe; M. Mignan; Boutroné, et J. -J. Picard , syndic. Cahier paraphé par nous, François-Romain Couet, prévôt de la prévôté, haute, moyenne et basse justice de Bouffemont, les jour et an susdits. Signé Couet. CAHIER Des plaintes et doléances , rédigé par les habitants de la paroisse de Boulogne assemblés cejourd' hui 16 avril 1789 (1). Ce village, situé dans la banlieue de Paris, renferme une population d’environ deux mille âmes dont le tiers à peu près sont des journaliers; son territoire contient 949 arpents 92 perches, il est sablonneux et de la plus mauvaise qualité. La partie la moins aride appartient aux dames religieuses de Montmartre, dames de Boulogne, aux religieuses de Longchamps et à M. le prince de Couty. 11 y a des maisons bourgeoises qui ont des jar-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire .