{Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Il novembre 4790.] loin de nous ; déjà vous avez consacré cette vérité salutaire, que le plus solide éclat d'un Etat agricole dépend de la meilleure culture de son sol. Au milieu de ces progrès de patriotisme et de la raison, celui que ses talents appellent à des découvertes utiles ne sentira donc plus son zèle se glacer. Et moi qui jusqu’ici n’ai pu que désirer le bonheur de ma patrie, je viendrai avec une entière confiance être l’organe de l’un de ces hommes qui auront contribué par leurs travaux à sa véritable prospérité. Gomme son parent, comme son ami, il me charge de vous présenter l’hommage d’un métier d’agriculture au moyen duquel un homme seul fait tout à la fois l’office des bœufs ou des chevaux qui tirent la charrue et celui du laboureur qui la dirige. Quels avantages, Messieurs, n’avons-nous pas à attendre de cet ingénieux mécanisme ! Le fléau de l’épizootie n’amènera plus avec lui le fléau de la famine. Le cultivateur sera dispensé de ses grandes avances en achat de bœufs ou de chevaux et de leur nourriture ; l’intérêt de ses avances ne sera plus perdu dans les jours de fêtes, de dimanches de pluie, de gelée. De la diminutiondes frais journaliers résultera nécessairement un plus grand emploi de capitaux en avances foncières ; de là, l’amélioration de la culture ; de là, l’accroissement des récoltes annuelles et de la population. Nous n’aurons point à craindre la disette des engrais, etc. L’auteur a marché pendant dix ans d’idées en idées, de corrections en corrections; c’est assez vous dire quelle a été la constance de ce père de famille, transporté à cent lieues de son pays, éloigné depuis quatre ans de ce qu’il a de plus cher. Il doit cependant l’avouer : son courage a été fortement soutenu par une simple date que le principal ministre lui avait accordée en 1787, pour lui servir de titre à une récompense digne du succès qu’il espérait. Il est enfin parvenu à la démonstration d’un bénéfice sensible, indépendamment de toute considération accessoire; mais il craint de se voir enlever le mérite et le fruit de son invention. Placé dans un bourg peu distant de Paris, obligé de faire ses expériences en plein champ, par conséquent exposé à l’influence des spectateurs, tant qu il n’avait pas atteint un degré suffisant d’économie, il a pu n’être pas arrêté par les inconvénients de la communication des ouvriers avec la capitale et de la curiosité des habitants. Mais aujourd’hui qu’il a acquis la certitude d’une économie importante, aujourd’hui que l’état de simplicité auquelil a réduit son mécanisme le rend déjà très facile à saisir, il lui est permis de concevoir quelque alarme et de différer une nouvelle construction jusqu’à ce que la propriété de son invention lui soit solennellement assurée. Voilà ce que l’auteur demande en ce moment ; il vient remettre entre vos mains le dépôt de sa découverte, et vous prie de nommer des commissaires dans votre sein, afin de constater le genre du mécanisme et le principe du mouvement, etc. (Cette adresse est renvoyée au comité d’agriculture et du commerce.) M. de Cnssy, membre du comité des monnaies. Le comité des monnaies a arrêté aujourd’hui les termes de son second rapport: il vient d’être livré à l’impression et vous sera distribué prochainement (l).(Voy. ce document annexé à la séance de ce jour, p. 378.) (1) Le second rapport du comité des monnaies a été joint, dans les impressions de l’Assemblée nationale, au procès-verbal de la séance du 5 décembre 4790. m M. de Broglie, au nom du comité utilitaire. Il s’agit, dans le rapport que j’ai l'honneur de vous faire, d’une destitution prononcée arbitrairement contre M. de Keating, major titulaire au régiment irlandais de Walsh. Cet officier fut envoyé le 24 juin 1788 dans l’île de France, où était son régiment, avec le brevet de major titulaire, signé par M. l’archevêque de Sens ; mais à peine y fut? il arrivé qu’il éprouva les traits de la jalousie et les effets de la malveillance de ses ennemis, et notamment du colonel propriétaire du régiment, irrité de n’avoir pu faire nommer un sujet de sa présentation. M. de Keating avait servi ën Corse, avait fait cinq campagnes, et était par conséquent susceptible de la majorité. Il fut proclamé major dans les formes ordinaires ; rien ne manquait donc à la légalité de sa nomination et de sa réception. Cependant, le 6 juillet de la même année, un autre officier, M. Onet, reçut un brevet du même ministre, M. de Brienne, pour remplacer M.de Keating, sans qu’aucune accusation, aucun jugement eussent précédé cette destitution. Doit-on i 'attribuer à un oubli du ministre, ou est-elle l’effet de l'intrigue? Ce qui est à remarquer dans ce second brevet, c’est qu’il nomme M.Onet pour remplacer M. Nugent, prédécesseur de M. de Keating, comme si ce dernier n’eût jamais été nommé. Le gouver-neurdes îles de France et de Bourbon, M. André Castro, le fil passer en France, l’adressa au ministre de la marine; M. La Luzerne envoya les dépêches du gouverneur à M. La Tour-Dupin. Celui-ci, quoique également convaincu de l’injustice dontM. de Keating était victime etde la légalité de sa nomination, ne crut pouvoir faire autre chose que de lui réexpédier un brevet, afin de le faire jouir des avantages de la majorité, conime s’il était effectivement pourvu, et de lui accorder une gratification extraordinaire. Cependant, au mois de janvier 1790, M. de Keating, voyant que vous alliez vous occuper d’une nouvelle organisation militaire, s’adressa au comité pour que celui-ci vous, proposât en sa payeur telle exception à vos décrets que son sort et ses services rendraient convenable. Nous avons d’abord pensé qu’il fallait le renvoyer à un conseil de guerre; mais nous avons remarqué depuis qqe ce n’était pas le cas d’employer cette mesure, puisqu’il n*y a point d’accusation, point de jugement à porter; c’est donc à l’Assemblée nationale � prononcer. Nous lui proposons le décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité militaire et pris connaissance des pièces qui constatent: 1° la légalité de la nomination de M.deKeating à la place de mai or titulaire au régiment d’infanterie irlandais de Walsh; 2° la légalité de sa réception, 3° l’il légalité de sa destitution; etc., décrète qqp M.defteating est; le véritable major dudit régiment, qn’il a toujours dû passer pour tel, qu’il a le droit d’en reprendre les fonctions, que la nomination subséquente es$ nulle, qu’il lui sera remis un relief de sesapppiqr tements, etc.; décrète, en outre, que le roi sera supplié de prendre en considération le sort dp M. Onet, qui lui a succédé dans la place 4® tnar jor titulaire, et de donner des prdçes pqnr qup ses appointements lui soient continués, et pour qu’il parvienne à son tour à la place 4e lieutenant-? colonel, etc... » (La lecture de ce projet de dépret est interrompue par quelques murmures.) M. Onquesnoy . L'Assemblée nationale ne doit s’occuper que des affaires générales. Le Corps législatif ne doit pas porter des jugraaaents, 70 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [11 novembre 1790J et vous avez d’ailleurs déjà décrété que ces détails devaient être renvoyés au pouvoir exécutif. Je demande donc la question préalable. M. Bureaux de Pusy. D’après les lois que vousavez décrétées sur le remplacementmilitaire, le ministre ne pourrait remplacer M. de Keating sans enfreindre vos décrets ; car, n’étant pas sur la ligne, il est dans le cas d’une exception que vous seuls pouvez prononcer. M. Chabroud. Vous avez anéanti tous les ordres arbitraires, non seulement pour l’avenir, mais encore dans leurs effets pour le passé. Je supplie l’Assemblée de considérer que, si elle recevait la pétition d’un homme détenu en vertu d’une lettre de cachet, même donnée antérieurement à vos décrets, je demande si elle prendrait sans doute des mesures pour le faire relâcher. M. de Keating, major, est dans le même cas; destitué sans que son brevet soit anéanti, sans qu’il y ait un jugement de prononcé, il gémit sous un ordre arbitraire et réclame l’exécution des ordonnances militaires et de vos décrets. Je demande où il pourra se pourvoir : A un conseil de guerre? il n’est point accusé ; au ministre de la guerre? celui-ci n’a pas le droit de prononcer une exception à l’exécution de vos décrets sur le remplacement militaire. Il faut donc que vous prononciez. M. Merlin. Nous ne pouvons nous dissimuler que, si nous entendons toutes les réclamations de ce genre, bientôt il vous en arrivera de toutes parts, et que tous les moments de l’Assemblée seront employés. Nous devons justice à nos concitoyens militaires, mais nous ne la leur devons pas par nous-mêmes. Je demande que vous établissiez un tribunal uniquement pour juger toutes les contestations, toutes les plaintes des officiers et soldats de l’armée. M. de Folleville. Je demande que le décret que vous allez rendre ne soit pas réduit à une forme insuffisante. Le roi ne peut accorder de traitement à un officier qui n’est pas sur la ligne sans la volonté de l’Assemblée nationale. M. d’Ambly. Cette affaire doit être renvoyée à un conseil de guerre composé d’officiers de tous les grades. M. Bureaux de Pusy propose un projet de décret qui obtient la priorité et qui est décrété en ces termes : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité militaire relativement à la destitution u’a éprouvée le sieur de Keating, major titulaire u régiment d’infanterie irlandaise de Walsh ; « Décrète que son président se retirera par devers le roi, à l’effet de lui exposer que la justice et la loi ont été violées à l’égard du sieur de Keating, major titulaire du régiment d’infanterie irlandaise de Walsh, et pour supplier Sa Majesté de donner les ordres nécessaires pour qu’il soit fait droit sur les plaintes de cet officier ; « Décrète aussi que le comité militaire présentera incessamment un projet de loi générale, pour le jugement des réclamations qui ont été ou seront par la suite élevées par des militaires, contre les destitutions prononcées sur des ordres arbitraires. » Sur la proposition du comité d’agriculture et çle commerce, le décret suivant est rendu : L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité d’agriculture et de commerce, et la pétition du directoire du département de la Gironde, décrète : « Que toute espèce de grains, farines et légumes venant de l’étranger dans un port de France, quel qu’il soit, seront déclarés par entrepôt, et pourront être réexportés pour tels autres ports de France ou de l’étranger qu’on voudra, à la charge par celui qui en fera la réexportation, do justifier, par devaat les officiers municipaux des lieux, que ce sont réellement les mêmes grains, farines et légumes venant de l’étranger qu’il se propose de réexporter, en se conformant, au surplus, à son décret du 18 septembre 1789. » M. Collin, député de Metz, absent par congé du 18 septembre dernier, pour constater son retour qui date d’aujourd’hui, présente son congé et le fait viser au bureau des secrétaires. M. le Président. L'ordre du jour est la suite de la discussion sur la législation domaniale. Les articles 1 à 21 ont été décrétés dans la séance du 8 novembre. M. Fnjubault, rapporteur, donne lecture des articles 22 à 39 et dernier. Après quelques débats et plusieurs amendements consentis par le rapporteur, les articles sont décrétés ainsi qu’il suit : Art. 22. « L’échangiste, dont le contrat sera révoqué, sera, au même instant, remis en possession réelle et actuelle de l’objet par lui cédé en contre échange, sauf les indemnités respectives qui pourraient être dues; et s’il a été payé des soultes ou retours de part ou d’autre, ils seront rendus à la même époque; et si les souites n’ont pas été payées, il sera fait raison des intérêts pour te temps de la jouissance. Art. 23. « Les échangistes qui auront rempli toutes les conditions prescrites, et qui, par le résultat des opérations, se sont trouvés débiteurs d’une soulte dont iis ont dû payer les intérêts jusqu’à ce qu’ils eussent fourni des biens et domaines fonciers de même nature, qualité et valeur, seront admis à payer lesdits retours ou soultes, avec les intérêts en deniers ou assignats, sans aucune retenue, et l’administrateur général des domaines sera autorisé à donner toute quittance bonne et valalable, et il sera tenu de verser le tout dans la caisse de l’extraordinaire, et, à cet effet, on retirera des greffes des chambres des comptes et autres dépôts publics tous les renseignements nécessaires. Art. 24. « Tons contrats d’engagement des biens et droits domaniaux postérieurs à l’ordonnance de 1566 sont sujets à rachat perpétuel; ceux d’une date antérieure n’y seront assujettis qu’autant qu’ils en contiendront la clause expresse. Art. 25. « Les ventes et aliénations des domaines nationaux, postérieures à l’ordonnance de 1566, seront réputées simples engagements, et comme telles, perpétuellement sujettes à rachat, quoique la stipulation en ait été omise au contrat, ou même qu’il contienne une disposition contraire.