[Assemblée natioûaIe,l ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 juin 1790.) 397 présent décret, qui sera présenté sans délai à la sanction de Sa Majesté. » (Ces articles sont mis aux voix et adoptés sans discussion.) M. l’ernier, rapporteur du comité des finances, propose un projet de décret concernant l’hôpital de la ville de Bourges , qui est adopté ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité des finances, sur les délibérations prises par les administrateurs du bureau de l’hôpital de Bourges, les 17 décembre 1789 et 1er juin 1790 ; lesdites délibérations confirmées et approuvées par les officiers municipaux de ladite ville, autorise lesdits administrateurs à faire l’emprunt d’une somme de 30,000 livres, qui sera acquittée par les deniers à provenir des 60,000 livres léguées audit hôpital par feu M. Phelippeau, archevêque de Bourges, lequel legs demeurera spécialement affecté et délégué audit remboursement, à charge d’éteindre, par ce nouvel emprunt, ceux de 12,000 livres et 6,000 livres, déjà faits en vertu des délibérations ci-dessus énoncées. Un membre demande et obtient la parole pour rendre compte des troubles près de s’élever entre les habitants de la vallée d’Aran et ceux de Com-minges. M. Roger, député de Comminges. La discorde se répand entre une province de France et une province d’Espagne. La vallée d’Aran menace le Comminges d’une incursion ; ces Espagnols se préparent à venir les armes à la main, pour y chercher des denrées de première nécessité. J’ai déjà exposé quelle était la position géographique de la vallée d’Aran : elle est séparée de l’Espagne par une chaîne de montagnes impraticables ; cette vallée est attachée au Gomminges depuis plusieurs siècles par des sentiments de paix et de fraternité. Depuis lesdécretsquidéfendentl’expor-tation des grains, les habitants du Comminges, fidèles observateurs de vos décrets, ont cessé d’en fournir à la vallée d’Aran. Dans les années les plus fertiles, cette contrée, si elle était abandonnée à elle-même, serait privée de subsistances. Dans ce moment-ci, elle est dans une affreuse misère, et la famine oblige ses habitants à venir enlever des grains sur une terre étrangère. Si vous le voulez, je vais vous faire lecture d’une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays du Comminges. (Cette lecture est faite.) On demande la lecture du décret. M. Roger le lit : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture d’une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays de Comminges, a décrété et décrète que les habitants de la vallée d’Aran continueront de s’approvisionner dans le Comminges de grains et autres denrées nécessaires à leur subsistance, et que l’exportation sera libre de l’une à l’autre des deux provinces. » M. Rewbell. Je demande que l’on mette provisoirement, parce que cette province quine trouve pas actuellement le chemin de l’Espagne, le trouverait bien dans un autre temps. M. Frétean. Je demande qu’il soit ajouté par amendement que l’assemblée administrative sera chargée de surveiller l’exportation de manière que, sous prétexte de l’approvisionnement de la vallée d’Aran , il ne soit point fait d’enlèvement capable de faire manquer les grains nécessaires au Comminges. L’amendement de M. Fréteau et l’article de M. Roger sont successivement décrétés. Le décret est rendu ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture d’une adresse des membres composant le bureau intermédiaire du pays de Comminges, a décrété et décrète que les habitants de la vallée d’Aran continueront provisoirement de s’approvisionner, dans le Comminges, de grains et autres denrées nécessaires à leur subsistance, et que l’exportation et l’importation sera libre de l’une à l’autre de ces deux contrées. « Elle charge, en outre, l’assemblée administrative de surveiller ladite exportation, de manière que, sous prétexte de l’approvisionnement de la vallée d’Aran, il ne soit point fait d’enlèvement capable de faire manquer les grains nécessaires au Comminges. » M. Camus présente la rédaction du décret qu’il avait proposé dans la séance de samedi 19 juin pour obtenir de nouveaux états du ministre des finances . Le décret est adopté sans opposition dans les termes ci-dessous : « L’Assemblée nationale a décrété et décrète; « 1° Que le premier ministre des fiuances remettra, le 15 juillet prochain au plus tard, le compte détaillé des recettes et dépenses du Trésor public, depuis le premier mai 1789, jusqu’au premier mai de l’année présente ; « 2° Qu’il sera remis dans la huitaine un état détaillé et précis des dépenses auxquelles sont destinés tant les 30 millions accordés par le décret du 19 de ce mois, que les revenus provenant des autres recettes, et, dans le cours du mois prochain, l’état détaillé de l’emploi desdites sommes. « 3° Qu’il en sera usé de même, de mois en mois, jusqu’à ce que l’Assemblée nationale ait déterminé le nouvel ordre qu’elle se propose d’établir dans la comptabilité du Trésor public et qu’en conséquence, lorsqu’il sera fait une demande de fonds, l’état des dépenses auxquelles ils seront destinés sera joint à la demande; « 4° Qu’il sera remis tous les mois au comité des finances un relevé, article par article, du registre des ordonnances qui sont expédiées chaque semaine, et du registre journal du bureau du grand comptant ; « 5° Que le comité des finances sera tenu de faire imprimer le rapport sommaire des états qui auront été fournis à ses commissaires, et des vérifications qu’ils auront faites, pour être distribués chaque mois aux membres de l’Assemblée. » M. de Sabran, évêque de Laon, député de Ver-mandois, demande un congé de six semaines, pour motif de santé. M. Duhart, député de Soûle, sollicite l’autorisation de s’absenter pouraffaires et pour un temps indéfini. Ces congés sont accordés. L’Assemblée passe à son ordre du jour qui est la suite de la discussion sur les articles concernan t la constitution civile du clergé . M. le Président. Dans la séance du 18 juin, l’Assemblée a rejeté les articles 9 et 10 du titre III du projet de décret; l’article 8 a été rejeté dans la séance du 17 juin; l’article 7 a été ajourné [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES* [21 juin 1790.] 398 le même jour, et le dernier article adopté est le 6e. M. le rapporteur a la parole. M. Martineau, rapporteur , donne lecture de l’article 11 ainsi conçu: « Art. 11. Le traitement en argent des ministres de la religion leur sera payé d’avance de trois mois en trois mois, par le trésorier du district, à peine d’y être contraint par corps, après� une simple sommation ; et dans le cas où l’évêque, curé ou vicaire viendrait à mourir ou à donner sa démission avant la lin du quartier, il ne pourra être exercé contre lui ni contre ses héritiers aucune répétition. » Cet article est mis aux voix et adopté sans discussion, ainsi que l’article 12 ci-dessous: « Art. 12. Pendant la vacance des évêchés, des cures et de tous offices ecclésiastiques payés par la nation, les fruits du traitement qui y est attaché, seront versés ou resteront dans la caisse du district pour subvenir aux dépenses dont il va être parlé. M. Martineau, rapporteur , donne lecture des articles 13 et 14 concernant la dotation des vieux prêtres. (M. Pous demande et obtient la parole sur ces articles.) M.Pous ,curé de Mazamet, députéde Toulouse(\). Messieuis, un mandat précis et fortement exprimé, que j’avais reçu des mains de mes commettants, me faisait un devoir de solliciter auprès de vous l’amélioration des curés à portion congrue. Jaloux d'exécuter un ordre si conforme à mes intentions, je n’eusse pas manqué de le remplir avec fidélité, si votre sagesse n’avait prévenu ma demande, en décrétant que dans les dispositions à faire pour subvenir à l'entretien des ministres de la religion, il ne pourra être assuré à la dotation d'aucune cure moins de douze cents livres par année, non compris le logement et les jardins en dépendant. D’après un arrêté si raisonnable, je pense que ma mission sur cet objet est entièrement consommée. Mais les vœux de mes commettants ne finissent pas là. J’ai à vous demander un honoraire pour MM. les vicaires. Je sais et je n’ignore pas qu’il entre dans vos vues de leur assigner un traitement plus fort que celui dont ils jouissent actuellement. Vous voulez bannir pour jamais tout motif de plainte, et faire cesser les éternelles mais vaines réclamations de ces respectables confrères auxquels nous ne pouvions offrir nous-mêmes, en leur payant leur dotation, trop faible pour eux, et néanmoins écrasante pour nous, que de stériles regrets. Mais permettez, Messieurs, que je vous demande si leur pension future ne se montera qu’à la moitié de celles des curés les moins partagés? J’ai entendu, dans notre tribune, un jeune prélat, dont la générosité envers la nationnepeut être suspecte, assigner aux vicaires, pour leur portion congrue, la somme de 600 livres. Il tient sans doute à l’antique méthode, si constamment suivie jusqu’à nos jours, de ne donner à cette classe laborieuse des ministres des autels qu’une demi-portion de l’honoraire accordé aux plus pauvres titulaires, comme si cette terrible proportion arithmétique était une base assurée pour calculer l’étendue des besoins.Non, Messieurs, (1) Le discours de M. Pous n’a pas été inséré au Moniteur. je ne pense pas que vous portiez votre jugement sur un fondement si décrié. Assurément, vous peserez dans votre justice la dignité de leur état, les fatigues de leur ministère, la nécessité de se concilier la vénération des peuples, la haute et délicate mission qu’ils exercent,etsurces données si imposantes et si vénérables, vous fixerez d’une manière plus franche et plus généreuse la dotation que vous leur réservez. D’ailleurs, Messieurs, considérez que l’état de vicaire ne sera plus le même après la nouvelle organisation de la hiérarchie ecclésiastique. Jusqu’ici, salariés d’une manière indécente, ils ont eu, pour la plupart des ressources de famille, parce que l’espoir d’un placement plus fortuné engageait les parents à joindre aux sacrifices d’une longue éducation celui d’un secours de quelques années. Pour ceux qui vivaient sans aucun moyen, je tais, par respect pour la religion, le détail triste et déchirant de leur dégoûtant ménage. Les vicaires avaient encore le faible, mais utile secours d’un casuel que vous avez heureusement supprimé 1 L’attente fondée d’une cure ou d'un autre bénéfice quelconque soutenait de plus leur espérance, et leur position transitoire les engageait à regarder les premières années de leur ministère comme un noviciat, à la vérité rigoureux, mais qui devait bientôt se terminer par une profession plus aisée. Mais aujourd’hui où les titres de bénéfices vont devenir beaucoup plus rares par les suppressions des collégiales, par celles des bénéfices sans fonctions, par la réduction du nombre des cathédrales, et peut-être même par celle des canonicats qui composeront à l’avenir ces chapitres échappés à vos destructions économiques ; aujourd’hui, où l’espoir des résignations est absolument éteint, ou le casuel n’existera plus, trouveront-ils chez leurs parents les mêmes facilités? Est-il juste qu’ils doivent y avoir recours, lorsque de longues études auront absorbé plus que leur patrimoine, et qu’occupés des fonctions les plus sacrées et les plus nécessaires à la société, ils ne travailleront, ils ne veilleront, ils ne s’épuiseront que pour elle et pour son bonheur? Oui, Messieurs, j’estime que dans la suite l’état de vicaire sera presque un état fixe ou qui ne changera qu’après bien des années; il me paraît donc infiniment raisonnable de l’envisager sous ce point de vue et d’y joindre en conséquence un traitement qui en soutienne la dignité, qui en adoucisse les rigueurs, et qui soit, pour des familles honnêtes, un véhicule suffisant pour engager leurs enfants à se tourner vers le saint ministère. Ce ne serait donc point la pension de 6(10 livres que je voudrais que l’on leur assignât. Trop modique pour fournir aux aliments, aux frais d’un vestiaire décent, aux gages et à la nourriture d’un domestique, à l’entretien d’un mobilier, vous laisseriez encore ces hommes que vous aimez et dont vous êtes les patrons dans un véritable état de détresse, et vos intentions bienfaisantes manqueraient leur but, si vous déterminiez à cette somme l’honoraire qui leur est dû. Je voudrais donc que la portion congrue de MM. les vicaires se montât au moins à 80Ü livres, sans y comprendre le logement et le jardin pour ceux qui vivent dans les annexes, et que cette portion fût absolument libre de toute imposition quelconque. Au reste, la plupart de vous et de vos commettants y avez un prochain intérêt, intérêt qui devient presque général par le nombre d’individus sur lequel il frappe. Car, dans une famille nombreuse, ce qui tourmente l’amour paternel est