24 2 [Assemblée nationale] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 113 juillet 1191.1 être libre; convaincus que désormais il est impossible de réintégrer au milieu d’elle les abus et les préjugés qu’elle a détruits, que tous les efforts, toutès les tentatives seront vaines; puissent-ils revenir dans leur terre natale y jouir des bienfaits d’une Constitution qu’ils n’ont jugée que d’après les pertes qu’ils ont faites, et non d’après le bonheur public qui en est la suite! Puissent-ils apprécier entin le titre glorieux de citoyen libre! Je puis exprimer ouvertement ces pensées au moment où la nation vient de déployer tant de puissance, et où sa volonté s’est manifestée avec tant d’unanimité. Une grande circonstance se présente, s’ils savent se saisir du rôle honorable qu’elle leur offre, ils peuvent trouver encore au sein de leur patrie ces sentiments dont elle n’eût jamais voulu se dépouiller pour eux. Bientôt, et vous ne pouvez trop accélérer ce moment, vous allez terminer l’acte constitutionnel : qu’ils reviennent en ce moment au milieu de nous; que, ramenant dans leur patrie, qui les appelle, de nouveaux moyens d’abondance et de prospérité, ils nous disent : nous venons effacer par notre retour les calomnies que notre fuite avait répandues contre la nation : vous avez fait la Constitution; nous venons terminer la Révolution, en éloignant de vous, non pas des dangers, il n’en est point pour ceux qui veulent être libres, mais vos inquiétudes; nous allons rendre superflues ces mesures de défense, ces précautions que vous preniez pour votre sûreté, et, nous réunissant sincèrement à vous de sentiments et d’opinions, nous présenterons à l’Europe entière le spectacle nouveau d’une nation heureuse que son union, encore plus que sa puissance, rend invincible, et nous forcerons les puissances jalouses à nous admirer, et surtout à nous respecter. Puisse ce vœu être rempli, et puissent les membres de la famille royale dispersés, se réunissant autour de leur chef, présenter à la nation de nouveaux garants des engagements qu’elle pourra lui demander! Je dois vous présenter à présent, Messieurs, le projet de décret de vos comités réunis : PROJET DE DÉCRET. « L’Assemblée nationale, après avoir ouï ses comités militaire, diplomatique, de Constitution et de révision, de jurisprudence criminelle, des rapports et des recherches, réunis ; « Attendu qu’il résulte des pièces dont le rapport lui a été fait, que le sieur de Bouillé, général de l’armée française sur la Meuse, la Moselle et la Sarre, a conçu le projet de renverser la Constitution; qu’à cet effet il a cherché à se former un parti dans le royaume, sollicité et exécuté des ordres non contresignés, attiré le roi et sa famille dans une ville de son commandement, disposé des détachements sur son passage, fait marcher des troupes vers Mcmtmédy, et préparé un camp auprès de cette ville, cherché à corrompre les soldats, les a engagés à la désertion pour se réunir à lui, et sollicité les puissances voisines à faire une invasion sur le territoire français : « Décrète : 1° Qu’il y a lieu à accusation contre ledit sieur de Bouillé, “ses complices et adhérents, et que son procès lui sera fait et parfait par-devant la haute cour nationale provisoire, séant à Orléans. « Qu’à cet effet, les pièces qui sont déposées à l’Assemblée nationale, seront adressées à l’officier qui fait auprès de ce tribunal les fonctions d’accusateur ; « 2° Qu’attendu qu’il résulte également des pièces dont le rapport lui a été fait, que les sieurs d’Heymann, de Klinglin et d’Offlise, maréchaux de camp employés dans la même armée du sieur de Bouillé, Desoteux, adjudant général, de Bouillé fils, major de hussards, et Goglas, aide de camp; « Que les sieurs de Damas, colonel du 13e ré-gimentde dragons; de Choiseul-Stainville, colonel du 1er régiment de dragons; d’Andoius, capitaine au même corps; de Vellecourt, commissaire ordonnateur à Thionviile; les sieurs de Mandel, Morassin et Thalot, officiers de Royal-Allemand; le comte de Fersen, colonel de Royal-Suédois, et les sieurs de Valory, de Maldent etDuMoustier, tous prévenus d’avoir eu connaissance dudit complot du sieur de Bouillé, et d’avoir agi dans la vue de le favoriser, il y a lieu à accusation contre eux, et que leur procès leur sera fait et parfait devant la haute cour nationale provisoire; « 3° Que les personnes dénommées dans les articles précédents, contre lesquelles il y a accusation, qui sont ou seront arrêtées par la suite, seront conduites, sous bonne et sûre garde, dans les prisons d’Orléans; « Que les sieurs de Floriac et Remy, l’un capitaine et l’autre sous-officier au 1er régiment, les sieurs Lacour, lieutenant au 1er régiment de dragons, Pehondy, sous-lieutenant au régiment de Castella, suisse, de Brigcs, écuyer du roi, et Mme de Tourzel, resteront en état d’arrestation jusqu’après les informations prises, pour, sur icelles, être statué ultérieurement sur leur sort. « Que les dames Brunier et Neuville seront remises en liberté. » M. Jouye-des-Roches. Je crois que dans une affaire de cette importance, où il y a autant de griefs, il est nécessaire d’ordonner l’impression du rapport et des pièces, et l’ajournement. M. d’André. Je m’oppose à la motion de renvoyer la discussion jusqu’après l’impression du rapport et des pièces. (Murmures.) Cette impression entraînera nécessairement un long délai. Plusieurs membres : Tant mieux ! M. d’André. Je ne suis pas de cet avis. C’est très certainement tant pis. Oui, tant pis pour ceux qui veulent la tranquillité publique. (Applaudissements.) M. ïe Président. Plus une délibération est importante, plus l’Assemblée doit être calme. Je demande le plus grand silence et qu’il n’y ait aucune interruption. M. d’André. Depuis la fuite et le retour du roi, tout le monde s’est occupé du point de savoir ce qu’il fallait faire dans une circonstance aussi importante. Les détails que nous adonnés le comité des rapports étaient connus de tout le monde, deux jours après l’arrestation du roi. L’impression des pièces ne peut ajouter aucune nouvelle lumière. Touîes les sociétés se sont occupées de ce qu’il fallait faire dans cette circonstance, elles ont eu des discussions très publiques. Nous ne pouvons pas ignorer qu’une classe de gens qui ont voulu saisir l’occasion du départ da roi pour renverser la Constitution qu’ils avaient