[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 juillet 1790.] M. de Brogiie, rapporteur , modifie la rédaction du projet de décret, d’après les observations qui viennent d’être faites. Le décret est rendu en ces termes : * L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, sur ce qui s’est passé dans le département de Seine-et-Marne, notamment dans les paroisses de la Chapelle-la-Reine, Àchères, Ury et Chevry-sous-le-Bignon; improu-vant et déclarant criminelle toute résistance à la |pi, et tout attentat contre l’ordre public, a décrété et décrète qu’il sera informé par les tribunaux ordinaires contre les infracteurs du décret du 18 juin, sanctionné par le roi, concernant le payement des dîmes, des champarts et autres droits fonciers, ci-devant seigneuriaux, et que leur procès sera fait et parfait, sauf l’appel, qu’il sera même informé contre les officiers municipaux qui auraient négligé à cet égard les fonctions qui leur sont confiées, sauf à statuer, à l’égard desdits officiers municipaux, ce qu’il appartiendra ; réservant aux débiteurs, lorsqu’ils auront effectué les payements accoutumés, à se ourvoir, en cas de contestation, devant les tri - unaux, conformément audit décret du 18 juin, pour y faire juger la légitimité de leurs réclamations contre la perception. « Et que son président se retirera par devers le roi, pour le supplier de mettre des troupes réglées à portée de seconder les gardes nationales sur la réquisition des municipalités ou des directoires de département et de district, pour le rétablissement de l’ordre dans les lieux où il aurait été troublé. « Et sera le présent décret lu, publié et affiché dans toutes les paroisses sujettes aux dits droits. » Une députation de V armée de terre demande à être admise à la barre. Elle est immédiatement introduite. M. de Rossel, lieutenant-colonel d’artillerie, portant la parole, dit. : Messieurs, si jamais une longue suite d’années de services militaires a eu des charmes, c’est dans ce moment où les augustes représentante delà nation ont fait choix des plus anciens guerriers pour resserrer les nœuds qui unissent le soldat et le citoyen. Deux corps armés vont assurer le maintien de la Constitution et le repos de l’Etat, par une fédération fraternelle, et un serment plus développé, mais qui n’était pas moins actif dans les cœurs français. Si les corps que nous avons l’honneur de représenter, ont été assez heureux pour mériter les suffrages de la nation, vous ne le devez, Messieurs, qu’à nos braves et vertueux vétérans, nos compagnons d’armes aux champs de Say, de Fontenoy, de Lauffeld, de Berguen, et dans les combats, où pendant trois guerres, leur courage a décidé la victoire; ce sont eux qui, par leurs exemples et leurs leçons, ont élevé l’âme des jeunes militaires qui leur ont été confiés ; ils leur çnt appris à être valeureux sans orgueil, subordonnés par l’amour de l’ordre, et guerriers, saps cesser d’être citoyens. Enflammés pour la patrie, soumis à vos décrets, scrupuleux observateurs de la loi, pleins de fidélité, de respect et d’amour pour le plus juste des rois, nous sommes prêts à verser notre Sang pour le maintien de la Constitution sanc-iWùbée par Sa Majesté, et contre les ennemis de M. le Président répond ; Messieurs, le courage sait mettre à profit toutes les armes, et sous quelques drapeaux qu'un citoyen serve sa patrie, il a des droits égaux à sa reconnaissance. Je ne rappellerai point ici tous vos titres de gloire. Les nobles cicatrices dont vous êtes couverts en disent plus que toutes les paroles. Les vétérans de l’armée française en sont encore l’élite ; ils furent le salut de la patrie, ils en sont toujours l’espoir. Mais, Messieurs, aujourd’hui qu’une meilleure Constitution va rendre au caractère national toute son énergie; aujourd’hui qu’une nouvelle organisation militaire va fixer l’étendue de vos droits comme celle de vos devoirs, vous saurez rentrer dans les uns et rester fidèles aux autres; vous ajouterez des vertus nouvelles à vos anciennes vertus, et vous serez citoyens libres sans cesser d’être soldats soumis. — Vous n’oublierez point que vous devez au roi une obéissance égale à votre fidélité ; que destinés à maintenir l’ordre, c’est à vous à en donner l'exemple ; que c’est la discipline qui fait la force, et qui prépare la gloire des armées; que des guerriers enfin qui ne marchent qu’au nom de la loi, et pour le salut de la patrie, doivent à la première une soumission absolue, comme un dévouement sans bornes à la seconde. — L’Assemblée nationale contemple avec intérêt cette variété de légions, dont il n’est aucune qui ne lui rappelle et ne lui promette un triomphe. Rassurée par vous sur l’intérêt de la gloire de la France, elle vous recommande encore l’intérêt de son repos ; ses travaux préparent en silence votre bonheur; le bonheur public, protégé par vous, sera sa récompense. L’Assemblée nationale, sensible à votre hommage, vous invite, Messieurs, à assister à sa séance. Divers membres demandent l’impression de l’adresse de l’armée de terre. L’impression est ordonnée. M. le Président rend compte qu’il a porté aujourd’hui à la sanction du roi huit décrets ; savoir : 1° Celui du 9 juillet, sur le serment à prêter par les experts nommés pour l’estimation des biens nationaux ; 2° Celui du 10, qui renvoie au roi une réclamation de M. de Mazière, au sujet de son emprisonnement à Bruxelles ; 3° Celui du même jour, portant que les rôles de taille, rédigés par les officiers municipaux de la commune d’Eglise-Neuve-de-Liare, seront exécutés et mis en recouvrement par les consuls ou collecteurs; 4° Celui du même jour, relatif à des difficultés élevées entre les administrateurs du département de Saône-et-Loire, et du département de la Côte-d’Or, d’une part, et les ci-devant élus du duché de Bourgogne, d’autre part, au sujet du parachèvement du canal du Charolais ; 5° Celui du 11, qui charge le président� de se retirer par devers le roi, pour supplier Sa Majesté de donner les ordres nécessaires pour la continuation du service de la poste aux lettres, de la poste aux chevaux et des messageries ; 6° Celui du 12, sur la constitution civile du clergé; 7° Celui d’aujourd’hui, relatif aux réclamations faites contre la perception, que le ci-devant seigneur du Quesnoy, près Lille, continue [Assemblée national,} ARCHIVES PARLIUIJNTA1RES, [13 juillet 1790.} de faire d’un péage et ! pontonage sur la rivière de Deule; 8° Celui d’aujourd’hui encore, qui charge le président de se retirer par devers le roi, pour supplier Sa Majesté de faire donner des ordres, afin d’assurer la perception des droits d’aides, octrois et barrières établis aux entrées de la ville de Lyon. Un de MM. les secrétaires rend compte des expéditions en parchemin de différentes lettres patentes ou proclamations du roi sur plusieurs décrets de l’Assemblée nationale, expéditions destinées à être déposées dans les archives, savoir : Expéditions en parchemin, pour être déposées dans les archives de l’Assemblée nationale. 1° D’une proclamation sur le décret du 5 juin, concernant l’augmentation de la solde des gens de mer; 2° De lettres patentes, sur le décret du 19, qui abolit la noblesse héréditaire, et porte que les titres de priqce, de duc, de eomte, marquis et autre? titres semblables, ne seront pris par qui que ce soit, ni donnés à personne; 3° D’une proclamation, sur le décret dq 23, qui autorise le directoire du district de Nogent-le-Rotrou à rendre exécutoires les rôles d’imposition dp la présente année faits par les officiers municipaux de la même ville; 4° Et de lettres patentes sur le décret du 26, concernant la confection et vérification des rôles de supplément, sur les cb-devant privilégiés, pour les six derniers mois de 1789, tant dans le département de l’Ain que dans les autres départements du royaume, et portant que les fonctions des commissaires départis, intendants et subdé-légués, cesseront au moment où les directoires de départements et de districts seront en activité. Paris, le 13 juillet 1790. La séance est levée à neuf heures quarante-cinq minutes. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE Dïî L’ASSEMBLÉE NATIONALE du 13 juillet 179,0. ADRESSE AU ROI pdV les gardes nationales de France (1). Une députation de toutes les gardei nationales du royaume a été admise auprès . du roi le 13 juillet 1790. M. de Lafayette, portant la parole, a donné lecture de l’adresse suivante : « Sire, « Dans le cours de ces événements mémorables qui nous ont rendu des droits imprescriptibles, lorsque i’énergie du peuple et les vertus de son (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. Nous l’empruntons au Journal de Beaulieu, n° 358, suppléât, ¥ 83 roi ont présenté aux nations et à leurs chefs de si grands exemples, nous aimons à révérer en Votre Majesté le plus beau de tous les titres, celui de chef des Français et roi d’un peuple libre. « Jouissez, sire, du prix de vos vertus, et que ces purs hommages, que ne pourrait commander le despotisme, soient la gloire et la récompense d’un roi citoyen. « Vous avez voulu que nous eussions une Constitution fondée sur la liberté et l’ordre public ; tons vos vœux, sire, seront accomplis : la liberté nous est assurée, et notre zèle vous garantit l’ordre public. « Les gardes nationales de France jurent à Votre Majesté une obéissance qui ne connaîtra de borne que la loi, un amour qui n’aura de terme que celui de notre vie. LE ROI a répondu : « Je reçois avec beaucoup de sensibilité les té-« moignages d’amour et d’attachement que vous « me donnez an nom des gardes nationales réu-» DEUXIÈME ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE du 13 juillet 1790. DÉNONCIATION de M. Guignard de Saint-Priest, ministre et secrétaire d’État , par la commune de Paris (1). (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. Nous l’empruntons à la Chronique de Paris, tome III, page 790.