669 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 septembre 1791.] daille allégorique sur les opérations de l’Assemblée. (L’Assemblée décrète qu’il sera fait mention de ces deux hommages dans le procès-verbal.) M. Bouche. Messieurs, vous connaissez tous le zèle avec lequel les officiers et gardes de la ci-devant prévôté de l'Hôtel, aujourd’hui grenadiers de la gendarmerie nationale, ont rempli leur service auprès de vous : celte troupe fidèle et vraiment patriotique vous a suivis dans vos travaux avec un zèle et un courage vraiment admirables. Elle a été pendant 2 ans et demi exposée, je ne dirai pas presque à l’abandon, mais elle a été ou mal payée ou non payée. Dans la réforme que vous avez jugé à propos de faire d’elle en l’établissant sous le nom de grenadiers de la gendarmerie nationale, cetle troupe a été obligée de faire faire de nouveaux habits : ces habits sont coûteux ; les individus qui composent cette troupe ont fait des pertes considérables relativement à leur étatet à leurs facultés. Je crois, Messieurs, que l’Assemblée nationale doit, autant à titre de justice qu’à titre de reconnaissance, accorder un faible dédommagement aux individus qui composent cetie troupe. Je penserais donc qu’il serait de toute justice d’accorder à chacun d’eux une gratification de 150 livres ; ils sont au nombre de 100 environ. M. Guillotl». J’appuie très fort la motion. ■ M. Bouche. Voici mon décret : « L’Assemblée nationale décrète qu’il sera compté par le Trésor public la somme de 150 livres à chacun des individus qui composaient la ci-devant compagnie de la prévôté de l’Hôtel, aujourd’hui grenadiers de la gendarmerie nationale. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Begnaud (de Saint-Jean-d'Angély). L’Assemblée nationale se rappelle que lorsqu’à Versailles, ses membres ne purent pas entrer dans la salle qui leur était destinée, M. Lataille, propriétaire du Jeu de Paume, fut le seul qui eut le courage, et, certes, il en fallait alors, de recueillir les représentants qui étaient, j’ose dire, sans asile et qui ne savaient où délibérer. H y avait certainement alors des dangers à courir, et si nous avons à nous étonner, c’est que, jusqu’à présent, ce dévouement et ce patriotisme soient restés sans récompense. Je crois que, lorsqu’on représente à l’Assemblée un pareil souvenir, elle ne peut se dispenser de faire quelque chose pour M. Lataille, surtout dans la position dans laquelle il se trouve, parce qu’il est absolument sans ressources et on peut dire ruiné. Je propose donc à l’Assemblée de décréter pour M. Lataille, en témoignage de la reconnaissance que vous lui devez, une gratification de 6,000 livres. M. Camus. J’appuie fort la motion ; il est étonnant que cela n’ait pas été fait jusqu’à présent. M. Begnaud (de Saint-Jean-d'Angély). Voici mon décret : « L’Assemblée nationale décrète qu’en témoignage de la reconnaissance publique, il sera payé au sieur Lataille, propriétaire du Jeu de Paume de Versailles, une gratification de 6,000 livres. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. le Président. M. Lami, auteur du Voyage pittoresque de la Grèce , fait hommage à l’Assemblée des 10 volumes de cette collection qui sont déjà au jour; il demande la permission de les faire déposer dans les Archives, ainsi que le reste de l’ouvrage, à mesure qu’il paraîtra. (L’Assemblée accepte cet hommage.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du jeudi 29 septembre au matin, sur lequel il est proposé et décrété qu’on ajoutera la mention du décret ci-devant rendu, qui ordonne que les décrets de l’Assemblée nationale constituante seront exécutés comme lois. M. Goupilleau. Je demande que le décret rendu hier sur la proposition du ministre de la guerre , qui augmente de 20 le nombre des officiers généraux , soit rapporté. Nous ne sommes point en état de guerre. Les officiers généraux sont en nombre suffisant pour le moment. Cette proposition n’a presque point été discutée, et il est à croire que ces places ont été créées plutôt pour des individus que pour la chose publique. (Applaudissements.) M. Pierre Dedelay (ci-devant Delley d’Agier). Je ne conçois pas comment on demande le rapport du décret : vous avez ordonné un établissement de 97,000 hommes de gardes nationales ; il est impossible que vous n’augmentiez pas le nombre de vos officiers généraux ; car, pour que ces troupes puissent être de quelque utilité, il est nécessaire que des officiers qui sachent leur métier soient à leur tête. M. Louis de Noailles. Il me semble que l’Assemblée nationale a fait dans la séance d’hier comme les ministres de l’ancien régime. Lorsqu’ils voyaient leur crédit s’échapper, et qu’ils étaient prêts à perdre leur place, ils laissaient une promotion pour s’assurer des créatures. 11 vous a été demandé, hier, sur la proposition du ministre de la guerre, de prier le roi de nommer 20 nouveaux officiers généraux. Le décret qui a été rendu sur cet objet a été adopté contre les règlements de cette Assemblée. En effet, vous aviez sagement arrêté qu’aucune délibération ne serait prise sur la proposition d’aucun ministre. Cependant, à peine la demande de M. Duportail a-t-elle ôté entendue, que l’on a décidé qu’il y aurait 20 officiers généraux de plus dans l’armée. Ce ne sont pas des officiers dont nous avons besoin, mais bien des soldats ; ce n’est pas du luxe qu’il nous faut, mais de la discipline. On nous a dit que l’armée était augmentée de 1,000 auxiliaires, mais cette augmentation avait élé arrêtée lors du départ du roi, et c’était pour subvenir au besoin que cette mesure exigeait, que vous aviez arrêté qu’il y aurait 20 généraux ajoutés au nombre de 96 que vous aviez fixé pour l’organisation de notre armée. Depuis cette époque, Messieurs, vous n’avez ordonné la levée d’aucun bataillon de gardes nationales, d’aucun régiment ou d’aucun corps. La demande qu’on vous a faite n’a donc pour objet que de favoriser quelques individus ; et n’étant plus rien contraire à l’iniérêt public et aux principes que vous avez constamment suivis, je demande et j’insiste sur le rapport du décret. M. Fréteau - Saint - Just. Il est essentiel que l’Assemblée sache que le roi a pris, depuis 670 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 septembre 1791.] plusieurs jours, des mesures infiniment propres à rétablir l’ordre avec les puissances étrangères, et les réduire au rôle qui leur convient dans cette affaire, c’est-à-dire, de spectateurs tranquilles de l’ordre qui va se rétablir en France et du règne de la liberté, des lois et de la prospérité de cet Empire. Le ministre des affaires étrangères a informé le comité diplomatique, dès le 20 de ce mois, par écrit, que le roi s’était empressé de faire notifier aux principales cours de l’Europe l’acceptation solennelle qu’il a faite de l’acte constitutionnel, et qu’il s’était expliqué vis-à-vis d’elles de la manière la plus ferme sur sa résolution de la faire exécuter. Le ministre annonçait que cette lettre devait ôter aux étrangers le plus léger prétexte de s’immiscer dans nos affaires : et vous devez savoir, Messieurs, que l’année dernière il fut annoncé à l’Assemblée qu’il devait se former, dans le Brabant, un rassemblement de 45,000 Autrichiens; que l’empereur avait chargé M. de Mercy d’annoncer combien cette mesure était éloignée de toute vue hostile et en même temps de représenter au ministre de France que jamais le conseil de Vienne n’avait abandonné cette maxime de première équité et de droit public, de ne pas se mêler dans les différends domestiques qui pouvaient agiter les puissances ses alliées. Ce sont les propres parob s de la dépêche deM. de Mercy. Lorsque le roi, dans sa lettre, emploie des expressions capables d’en imposer même à ceux qui ont des vues hostiles, peut-on douter qu'il ne maintienne, dans les dispositions pacifiques, ceux qui, l’année dernière, invoquaient eux-mêmes les principes du droit public et d’équité naturelle ? Sur ce point, je demande donc, ou que l’on rejette la proposition d’augmenter l’état militaire, ou que l’Assemblée ne s’y porte qu’en statuant l’époque très prochaine où ou les supprimera. M. Lanjuinais. On demande le rapport du décret et le renvoi à la législature. ‘ (L’Assemblée, consultée, décrèle que le décret rendu hier pour l’augmentation du nombre des officiers généraux employés, sera rapporté.) M. l abbé Grégoire. Messieurs, la rédaction du décret que vous avez rendu hier, relativement aux sociétés populaires , porte dans son préambule que nulle société, club ou association de citoyens ne peut exercer aucune action ni inspection sur les actes des pouvoirs constitués et des autorités légales. Vous ne pouvez ôter à aucun citoyen, pas plus qu’à une société de citoyens, le droit d’inspection sur les autorités constituées; je demande donc la suppression des mots : « ni inspection ». M. Le Chapelier, rapporteur. Aucun club ne peut se permettre d’inspecter des arrêtés, des actes faits par des autorités constituées. M. Bnzot. Vous ne pouvez pas empêcher les sociétés de délibérer dans l’intérieur de leur salle, sur quelque objet que ce puisse être; vous voulez seulement dire qu’ils ne pourront, hors de leur salle, prendre une part active aux actes des autorités constituées. Changez alors votre rédaction et dites qu’elles ne pourront exercer une « inspection active ». M. Le Chapelier, rapporteur. On ne peut mettre cela; il faut dire tout simplement « inspection ». M. Robespierre. L’Assemblée entend sans doute que les sociétés ne peuvent pas contrarier les actes des autorités constituées, qu’elles doivent y obéir, s’y soumettre; mais l’Assemblée n’entend pas que, dans une terre libre, des citoyens n’auraient aucune inspection sur ces mêmes autorités; l’Assemblée ne peut pas empêcher des citoyens qui apercevront un fonctionnaire public qui trahira la nation, de le dénoncer. {Applaudissements à l'extrême gauche et dans les tribunes.) Dans tout pays libre, cela est permis; tout citoyen y a le droit d’inspection : je demande donc la radiation du mot «inspection» dans le préambule du décret. M. Camus. Il n’est pas question de faire ici des phrases d’académie, il est question d’exprimer ce qu’on a voulu dire. Je mets eu fait que les mots « action et inspection » ont été décrétés hier. Ce que l’Assemblée a voulu, c’est que les sociétés patriotiques ne puissent avoir aucune action sur les autorités constituées. Ainsi, Messieurs, il n’est pas question de savoir si « action et inspection » sur des actes est une expression délicate ou non : la loi doit s’exprimer comme le législateur le veut. Je demande, en conséquence, pour faire finir cette discussion, que le décret rendu subsiste. M. Malouet. Vous allez faire une chose absolument indécente. (L’Assemblée, consultée, décrète la radiation des mots « ni inspection ».) Un membre demande, par amendement à l’article 1er, que le jugement des délits ait lieu, non sur la poursuite, mais sur la dénonciation du procureur général syndic des départements. (Cet amendement est adopté.) En conséquence, le préambule et l’article 1er du décret modifié sont mis aux voix comme suit : « L’Assemblée nationale, considérant que nulle société, club, association de citoyens ne peuvent avoir, sous aucune forme, une existence politique, ni exercer aucune action sur les actes des pouvoirs constitués et des autorités légales ; que sous aucun prétexte, ils ne peuvent paraître sous un nom collectif, soit pour former des pétitions ou des députations, pour assister à des cérémonies publiques, soit pour tout autre objet, décrète ce qui suit : Art. 1er. « S’il arrivait qu’une société, club ou association se permît de mander quelque fonctionnaire public ou de simples citoyens, ou d’apporter obstacle à l’exécution d’un acte de quelque autorité légale, ceux qui auront présidé aux délibérations ou fait quelques actes tendant à leur exécution, seront, sur la dénonciation du procureur général syndic du département, et sur la poursuite du commissaire du roi, condamnés par les tribunaux à être rayés pendant deux ans du tableau civique et déclarés inhabiles à exercer pendant ce temps aucune fonction publique. » {Adopté.) M. Canins, au nom du comité des pensions , propose un projet de décret concernant la répartition d'une somme de 44,200 livres entre les employés dans les divers bureaux de l’Assemblée nationale, en exécution du décret du 26 septembre 1791. Ce projet de décret est mis aux voix dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, vu l’état ci-après, décrète que les sommes y portées seront payées conformément à la répartition portée audit état.