[Assemblée nationale ] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [14 avril 179-1. J 94 nissant ses auteurs. Pourquoi couvrir de ce nom chéri des peuples l’autorité ministérielle? Pour-uoi revêtir une lieutenance générale de police es couleurs populaires? Je ne dirai pas qu’avec le beau titre déjugé de paix, et ce terrible pouvoir d’arrêter et d’amener d’un bout du royaume à l’autre, le ministre de la justice pourra donner des entraves à la justice même; qu’un grand coupable sera soustrait au jugement des tribunaux établis sur les lieux; que les juges du peuple seront paralysés par les ordres naturellement et inévitablement arbitraires. Je sais qu’on m’oppose la responsabilité, ce frein utile si souvent écrit dans nos lois, si rarement employé dans nos tribunaux ; mais j’v aperçois un danger de plus pour la liberté et pour les vertus civiques. Le ministre livre un mandat d’arrêt; le ministre peut être trompeur ou trompé dans l’expédition de ce mandat. L’accusé innocent réclame une réparation, une indemnité. N’y aura-t-il pas quelque ministre qui calculera entre les indemnités qui peuvent être prononcées et la corruption des juges et des témoins? Je m’arrête : ce crime ne serait pas celui du ministre, ce serait celui de l’autorité dont la Constitution l’aurait investi. Epargnons des crimes à la loi ; je conclus à la question préalable sur les articles proposés par le comité de Constitution. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHABROUD. Séance du jeudi 14 avril 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un d$ MM. les secrétaires donne lecture des adresses suivantes : Adresse des municipalités de Rive-de-Gier et des communautés voisines , qui remercient vivement l’Assemblée de la suppression des aides. Adresses de la garde nationale de Honfleur , de celle de Longwy et de la Société des amis de la Constitution établie à Amiens , qui, pénétrées d’une douleur profonde au sujet de la mort de M.de Mirabeau, ont fait célébrer en son honneur un service solennel. Adresse de MM. Sa-uer et Briatte, tendant à offrir à la nation la découverte de la ductilité et de la malléabilité du métal des cloches, et de sa conversion en monnaie, à très peu de frais. L’Assemblée en ordonne le renvoi au comité des monnaies, pour en rendre compte avec les autres offres qui ont été laites à ce sujet. Adi'esse du sieur De fer, concessionnaire du canal destiné à conduire les eaux de V Yvette à Paris ; il se plaint de l’interruption de cette entreprise, occasionnée par les violences des communautés riveraines, qui ont détruit une partie des travaux commencés, ont comblé plusieurs parties exécutées et coupé ou arraché 7,000 pieds d’arbres qui garnissaient les francs bords du canal. Il demande d’être autorisé par l’Assemblée nationale à poursuivre l’entreprise du canal de l’Yvette et, quedès ce moment, les constructions, plantations et approvisionnements relatifs à cet objet soient mis sous la sauvegarde de lois. (L’Assemblée renvoie cette adresse au comité d’agriculture et de commerce, pour que, d’après les renseignements qu’il recevra du département de Paris, il puisse rendre compte de cet objet.) Adresse des membres composant le district de Pont-à-Mousson, qui annoncent qu’ils ont fait célébrer un service solennel pour le repos de l’âme de M. de Mirabeau. Adresse de la Société des amis de la Constitution séant à Clermont, qui assure l’Assemblée qu’elle usera de vigilance et d’activité pour déjouer les projets et les trames contre la patrie. Adresse des électeurs du district de Cusset, qui ont repoussé une factionxle 13 curés, réfractaires à la loi du serment. Suit un extrait de cette adresse : « Nous venons d’effacer la honte qu’une faction de 13 curés, réfractaires à la loi du serment constitutionnel, s’efforçait de répandre sur un district vraiment patriotique. Sans doute la plupart de ces insermenlaires n’ont été égarés que par l’influence d’un mauvais voisinage. Cependant après avoir vainement attendu aussi longtemps que la prudence pouvait le permettre, que la réflexion et l’exemple de nos prêtres citoyens amenassent à résipiscence ces aveugles ou perfides dissidents, on leur a enfin donné pour successeurs des vicaires éprouvés, de mœurs pures, d’un caractère ferme, et qui les feront bientôt oublier. « Qu’elle paraisse maintenant cette bulle ultramontaine, fabriquée avec des intentions si perverses dans les fallacieux bureaux du Vatican, tous nos fonctionnaires publics sont prêts à la combattre avec les armes d’une saine doctrine, et nous, à la fouler aux pieds ..... Ils sont passés ces temps où des prêtres fanatiques, l'oeil en pleurs, le visage en convulsion, montrant une poitrine desséchée, un crucifix en main, entraînaient sur leurs pas un peuple trop crédule. « Nous ne respirons plus que l’égalité et la liberté que nos représentants nous ont donnée... « C’est surtout dans les campagnes que la Constitution nouvelle a fait de rapides progrès. Ce sont ces hommes que l’orgueil flétrissait du nom de paysans et de vilains, qui ont embrassé avec le plus d’ardeur cet immortel et sublime ouvrage. C’est là qu’en dépit des détracteurs intéressés, vous trouverez autant de défenseurs de vos lois qu’il y a d’individus. . . « Quelques dévotes abandonnées du monde pourront encore se laisser attendrir, mais fanatiques et dévotes seront conspués et chassés par nos seuls enfants; et nous vous jurons que nous mourrons plutôt que de laisser porter la moindre atteiDie à la personne de nos représentants, ou aux lois bienfaisantes qu’ils ont si courageusement substituées au régime le plus barbare et le plus oppresseur. » M. le Président. M. Poinçot, libraire, rue de La Harpe, demande à offrir à l’Assemblée nationale sa belle collection des œuvres de J.-J. Rousseau. M. Poinçot est admis à la barre et dit : « L’hommage que la nation française a rendu à l’auteur du Contrat social était digne d’elle et de lui. C’était aux régénérateurs de notre Empire qu’appartenait le droit d’apprécier le génie de Rousseau. Le monument le plus durable de sa gloire sera [sans doute celui qu’il s’est élevé lui-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur.