458 {Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 janvier 1791.J connaîtrevos saintes lois ; s’il pouvait savoir que la nation française est rentrée dans ses droits de souveraineté, qu lie serait sa douleur de n’être pas témoin de cet heureux changement! maiss’il pouvait jeter les yeux sur cette liste auguste, qui lui offrirait les noms les plus chers aux lettres, à la philosophie et à l’hamanité, il sentirait ranimer son espoir, il ne se croirait plus abandonné. « Get espoir que nous avons senti renaître pour lui ne sera point trompé. Ce n’est pas pour des objets frivoles, pour son avantage particulier que M. la Pérouse a bravé des périls de tous genres , la nation généreuse qui devait recueillir le fruit de ses glorieux travaux, lui doit aussi son intérêt et ses secours. « Déjà nous avons appris la perte de plusieurs de ses compagnons englout s nar les ondes, ou massacrés par les sauvages. Soutenez l’espérance qui nous reste encore de recueillir ceux de nos frères qui ont échappé à la fureur des flots ou à la rage des cannibales ; qu’ils reviennent sur nos bords, dussent-ils mourir de joie en embrassant cette terre libre ! « Le roi s’intéresse à l’expédition de M. de la Pérouse, il a la gloire d’en avoir conçu le projet. Il ordonna pendant la guerre dernière, à tous ses vaisseaux de respecter partout le pavillon Cook. Cet hommage rendu par lui au génie, l’esprit d’humanité qui l’avait dicté, firent chérir partout sa bonté et partager à tous les peuples l’estime que les Français font de ses vertus. « La nation ne sera pas aujourd’hui moins généreuse. « Si les recherches pour retrouver ce navigateur sont infructueuses, elle sera encore dédommagée de ses avances par les découvertes nautiques et astronomiques qu’on peut espérer de ce nouveau voyage par la transplantation de végétaux utiles que la France pourrait cultiver avec succès, par les rapports commerciaux qu’il sera facile d’établir. « Mais que parlons-nous de dédommagements, d’avantages à recueillir? Nous demandons aux amis des hommes un acte d’humanité. Gardons-nous, par ces considérations particulières, de corrompre leur bienfait. « Nous demandons à l’Assemblée nationale de prier le roi : « 1° D’ordonner au ministre de la marine de communiquer à ses comités les ordres et les instructions remises à M. de la Pérouse, atin de fixer la route que suivront les navigateurs; « 2° D’envoyer, le plus tôt possible, des vaisseaux pour chercher M. de la Pérouse et de joindre à l’équipage des naturalistes et des astronomes; « 3° D’inviter, par une adresse, tous les peuples dont les vaisseaux parcourent la mer du sud, à prendre à cet égard toutes les informations que peut inspirer l’amour de l’humanité. « Signé : Lerminas, président. « Brougniar, Pelletier, secrétaires. » (L’Assemblée ordonne l’impression de cette pétition et son renvoi aux comités d’agriculture et de commerce, et de la marine, pour en rendre compte à la séance de mardi soir.) Un Membre du comité d'aliénation propose et l'Assemblée décrète la vente de biens nationaux à diverses municipalités dans les termes suivants : L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l’aliénation des biens nationaux, des soumissions faites par les municipalités ci-après dénommées, en exécution des délibérations prises par le conseil général de leurs communes, pour, en conséquence du décret du 14 mai 1790, acquérir, entre autres domaines nationaux, ceux dont les états sont annexés à la minute du procès-verbal de ce jour, ensemble des estimations ouévaluationsfaites desdits biens, en conformité de l’instruction décrétée le 31 dudit mois de mai dernier; Savoir : Département de l'Ain. A la municipalité de « Le tout ainsi qu’il est plus au long porté aux décrets et états d’estimation annexés à la minute du procès-verbal de ce jour. » M. le Président lève la séance à 10 heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. L’ABBÉ GRÉGOIRE. Séance du dimanche 23 janvier 1791 (1). La séance est ouverte à onze heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, qui est adopté. M. Camus. Les administrateurs du département de la Côte-d’Or me chargent de vous faire part de la (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. [Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 janvier 1791.} 459 vente du Clos Vougeot; il a été estimé 760,590 livres et a été vendu 1,140,600 livres. Je profite de cette occasion pour apprendre à l’Assemblée que les habitants de Dijon viennent de démentir d’une manière bien remarquable les calomnies répandues contre eux. Le conseil général de la commune, par délibération d’hier (la lettre est datée du 18), a fait effacer de différents endroits, comme rues et places, les noms des anciens agents du pouvoir exécutif pour y substituer des noms chers aux citoyens qui sont les apôtres de la liberté; et la déclaration des droits va remplacer sur la principale porte de la ville les armes du ci-devant prince deCondé qui étaient au-dessus du portrait de Louis XVI. (App laudissements.) M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angély). Tous les administrateurs des départements et districts de l’Empire ont soin d’instruire l’Assemblée de tous les détails de leur administration et des dépenses d’emplacement; Paris seul se dispense de donner les mêmes éclaircissements. Beaucoup de citoyens se plaignent des dépenses inutiles qui sont faites pour les maisons d’administration. En conséquence, je demanderais que le comité des finances rendît compte à l’Assemblée de la quantité de bâtiments nécessaires au service des administrations, et au logement de ceux des administrateurs qui doivent en avoir, ainsi que des dépenses de constructions ou réparations qui seront nécessaires. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette motion au comité des finances.) M. le Président annonce à l’Assemblée l’hommage que lui fait M. Quinio d’un ouvrage sur les domaines congéables. M. le Président donne lecture d’une lettre de M. Montmorin, qui lui envoie les prestations de serment de MM. Mathieu-Basquiat-Engomez, ministre plénipotentiaire du roi près le roi de Danemarck; Frameri, secrétaire de cette légation, et Laborde, aumônier de la chapelle de ce ministre, De MM. Louis-Agathon Flavigny, ministre plénipotentiaire près l’infant duc de Parme, et Orcelle, son secrétaire, De MM. Gaussen, chargé des affaires de France à Stockolm, et Glisses Salis Marchelins, chargé des affaires de France, près les Grisons. M. le Président. J’ai reçu de M. Leclerc, ci-devant de Buffon, fils du célèbre naturaliste, une lettre dont je vais donner connaissance à l’Assemblée (1). « Monsieur le Président, « Je m’adresse avec la plus grande confiance pour obtenir, de l’Assemblée nationale, une justice éclatante des procédés que les municipalités de Quincy et de Rougemont, deux villages dont j’étais ci-devaut seigneur, ont eus envers moi. Je vous envoie les copies des deux écrits dont je me plains, et que les municipalités sont venues déposer chez le greffier de la municipalité de Montbard, chef-lieu du canton dont je suis maire. J’aurai l’honneur de vous observer qu’à l’instant où j’ai eu connaissance de la proclamation du departement de la Côte-d’Or au sujet des armoi-(1) Nous empruntons ce document au Journal le Point-du-Jour , t. XXII, p, 326. ries et dps fourches patibulaires, j’envoyai sur-le-champ des ouvriers pour effacer tous les écussons des armes de mon père, qui étaient autour des églises où on les avait placées, et c’est après avoir agi ainsi, que les deux municipalités ont fait les deux écrits ci-joints. J’ai, quelques jours après, fait effacer les litres noires, qui régnaient autour des églises, et même d’anciennes armes, que ni mon père, ni moi, n’avions fait placer. Je sollicite de l’Assemblée qu’elle improuve la conduite imprudente de ces municipalités de Quincy et de Rourgemont qui ont excédé leurs pouvoirs en faisant des injonctions au chef de la municipalité de Montbard, étendant ainsi leurs pouvoirs hors de leur arrondissement. « Je joins ici une lettre que j’ai eu l'honneur d’adresser à M. le président de l’Assemblée nationale, en juin 1790, et j’ajoute que jamais je n’aurais dû m’attendre à me voir disputer en France un nom qu’a tant honoré ce royaume, et surtout la partie de ce royaume où des gens, malintentionnés et peu instruits, se permettent de m’enjoindre de le quitter. » M. de Choiseiil-Prasltn. Je demande qu’il soit fait mention de cette adresse dans le procès-verbal et que l’Assemblée décrète que la municipalité ne puisse pas inquiéter M. de Buffon, par égard pour la mémoire de son père. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angêly .)Je réclame pour qu’on ne rende pas de décret la-dessus, parce que les municipalités croiraient avoir le droit que je crois qu’elles n’ont pas, d’inquiéter un homme qui, dans une société, prend un autre nom que le sien. M. de Choisenl-Praslin. Je demande au moins qu’on fasse mention de l’adresse dans le procès-verbal, en consignant les observations de M. Regnaud. (L’Assemblée passe à l’ordre du jour.) L’ordre du jour est un rapport du comité de surveillance de V extraordinaire sur les moyens de prévenir les fâcheux effets des spéculations sur l'échange des petits assignats. M. liaborde de Mléréville, rapporteur . Messieurs, les commissaires que vous avez chargés de l’inspection de la caisse de l’extraordinaire, en suivant, avec la surveillance la plus plus attentive, toutes ses opérations, ont cru devoir examiner les causes de l’agiotage qui vient de s’établir sur les petits assignats, et vous proposer des moyens de le détruire. Il est fâcheux sans doute que l’émission de ce petit papier, destiné à faciliter les échanges, et à diminuer le besoin des espèces monnayées, ait pu produire des mouvements de ce genre; mais vous verrez que plusieurs circonstances étrangères à la division du papier national en ont été les causes nécessaires, et qu’il vous sera facile d’empêcher qu’elles continuent d’exister. Vous vous rappelez que lorsque vous vous vous déterminâtes à la première création de 400 millions d’assignats, les besoins du Trésor public étaient très considérables ; la fabrication ne pouvait les atteindre, et vous fûtes forcés de demander à la caisse d’escompte 230 millions de promesses d’assignats pour acquitter avec fidélité les engagements énormes dont l’année 1790 était chargée. Ges papiers furent donc émis en attendant les assignats décrétés» et ils ne