297 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» [17 juin 1791.] la dégradation civique, dans ce cas, est une peine suffisaute comme dans le précédent article. Plusieurs membres : Aux voix ! aux voix ! M. lie Pelletier-Saint-Fargcau, rapporteur. Je consens, en mon nom, à l’addition proposée par M. de Biauzat, parce qu’il me semble que si un fonctionnaire public veut continuer ses fondions, le seul moyen d’empêcher cette continuation et d’arrêter le scandale, c’est de le détenir pendant quelque temps hors de la société, et que si on nele condamnait qu’à la dégradation civique, qui est une peine grave, mais qui le rendrait sur-le-champ à la société, il ren'r-rait au milieu de tous ceux qui s’obstineraient à le regarder comme fonctionnaire public avec un nouveau mérite à leurs yeux : c’est-à-dire avec le mérite du martyre.Voici, Messieurs, la nouvelle rédaction que je propose : Art. 6. « Tout fonctionnaire public révoqué ou destitué légitimement, tout fonctionnaire public électif et temporaire, après l’expiration de ses pouvoirs, qui continuerait l'exercice des mêmes fonctions publiques, sera puni de la peine de 2 années de gêne. « Si, par suite et à l’occasion de la résistance, il survient un attroupement séditieux, il en sera responsable et puni des peiues prononcées contre les instigateurs desdits attroupements. » A droite : Pas de voix ! (L’article 6 est décrété dans sa nouvelle rédaction.) M. Fe Pelletier-Saint-Fargeau , rapporteur, donne lecture des articles 7 et 8, ainsi conçus : « Art. 7. Tout fonctionnaire public qui sera convaincu d’avoir, moyennant argent, présents ou promi sses, trafiqué de son opinion ou de l’exercice du pouvoir qu’il lient de la loi sera puni de la peine de la dégradation civique. «Art. 8. Tout juré, après les récu=ations consommées, tout juge crimmel, tout officier de police en matière criminelle, qui sera convaincu d’avoir, moyennant argent, présents ou promesses, trafiqué de soiUopinion sera puni de la peine de 20 années de gêne. » M. de Lachèze. Je demande dans l’article 8 le retram hument de ces mots : « après les récusations consommées », parce que cela supposerait qu’un juré pourrait vendre sa voix avant les récusations consommées. M. Tuaut de Fa Bouverie. Messieurs, si les membres des législatures sont compris sous la dénomination des fonctionnaires publics énoncés en l’article 7, je trouve la peine trop faible; s’ils n’y sont pas compris, je prie M. le rapporteur de proposer un article à leur égard. M. Prieur. Il faut punir les hommes par où ils ont péché. Si un avare a reçu de l’argent, je crois qu’il faut le punir en lui faisant rendre l’argent qu’il a reçu. Je demanderais que l’on ajoutât à la peine de la dégradation civique une amen ie triple de la somme d’argent, ou de la valeur des présents qu’auraient eu la bassesse de recevoir le fonctionnaire public. On nous dit ; il faut ajouter qu’indépendam-ment de l’amende, le fonctionnaire public, qui aurait prévariqué, soit tenu de rembourser l’argent. Mais moi je dis ; non, il ne faut pas qu’il le restitue, car i’homme qui l’a corrompu est lui-même coupable ; et je demande l’attention du comité sur le corrupteur. M. Barnave. J’ai demandé la parole pour faire un amend ment, ou un article additionnel relatif aux membres du Corps législatif. La corruption des membres du Corps législatif a un caractère beaucoup plus important et beaucoup plus grand que celle des autres fonctionnaires publics; le Corps législatif est, pour ainsi dire, la source de toutes les fonctions publiques: lorsque la source est empoisonnée, tout ce qui en dérive participe du même vice. Outre cela, la nécessité d’arrêter le respect du peuple sur le Corps législatif, par conséquent sur les membres qui le composent, impose la nécessité de leur assigner des peines pl ns graves lorsqu’ils manquent à leurs devoirs. Un caractère plus respecté soumet à des obligations plus rigoureuses, et des peines sévères lui conviennent mieux que des peines simplement humiliantes. La corruption d’un député n’est point une simple bassesse : c’est une grande trahison nationale. Je demande donc, pour la dignité du Corps législatif, pour la dignité nationale attachée à ceux qui la représentent, pour la pureté ne ce gardien unique de notre libeité, que la peine de mort soit atiachée à la corruption d’un membre du Corps législatif, et qu’en conséquence, un article additionnel soit rédigé par le comité dans le sens que je présente. ( Applaudissements .) M. Duport. J’appuie l’amendement de M. de Lachèze; mais cependant il y a une di-tin lion à faire entre le juré qui a prêté serment et celui qui ne l’a pas prête : il doit être puni dans les deux cas. Je demanderais donc : 1° que le juré qui n’a pas prêté le serment fût puni de la dégradation civique, et ensuite que le juré, après le serment, fût puni de 20 années dj gêne; voilà la division que je propose dans l’amendement. Quant à ce qu’on a proposé relaiivement aux mem bres de la législature, je pense qu’il faut faire un article additionnel pour déterminer la peine qne l’on y appliquera. Je ne crois pas que ce doive ê re la peine de mort: non pas qu’il ne mérite bien la mort, car en graduant la peine sous le point de vue de l’utilité publique, il est certain qu’il l’a méritée, mais je désire que cette peine soit plus aisément api liquée, et que la poursuite en soit moins difficile. Or, je crois que la peine de mort aurait cet inconvénient, que la poursuite en deviendrait rare et impossible. Au lieu de cela, je propos que la peine soit celle de la dégradation civique, et en voici le résultat : C'est que l’Assemblée voudra bien se fixer quelquefois sur l’idée et l’effet de cette peine qui n’est pas, comme on le croit, de rayer un citoyen de la classe des citoyens actifs, car il y a beaucoup de gens à qui' c la est indifférent, mais qui est d’être exposé aux yeux du public au carcan, et d’être déclaré infâme. C’est la peine du blâme, avec un appareil beaucoup plus affreux et plus dé:-agréable. Je pense que cette peine est beaucoup plus répressive pour ceux qui auraient été ou qui seraient dans le cas d’être corrompus; c’est sous ce rapport-là qu’elle me paraît intéresser la liberté publique. Aussi, je voudrais que