[19 septembre 1790.] 67 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. règlement pour les religieux et les chanoinesses séculières. Après une très courte discussion les articles suivants sont adoptés. « Art. 28. Ne sont compris dans les dispositions des décrets concernant les ordres religieux, ceux qui étaient dans les ordres supprimés, en vertu de lettres patentes enregistrées sans réclamation, avant l’époque de la publication du dé* cret du 13 février dernier, et sera leur sort réglé par les décrets concernant le clergé séculier, sans néanmoins aucune dérogation à l’article 2 du décret des 19 et 20 février, en ce qui concerne les jésuites. « Art. 29. Les religieux pourront être employés comme vicaires, et même devenir éligibles aux cures; dans le cas où ils occuperaient un emploi dont le traitement serait inférieur à leur pension, ils jouiront pour tout traitement du montant de ladite pension ; dans le cas où le traitement de leur emploi serait supérieur, ils ne jouiront que dudit traitement. « Art. 30. Les successions des curés réguliers, et celles des religieux sortis de leurs maisons, qui sont décédés depuis le 13 février dernier, seront réglées conformément à l’article 3 du décret des 19 et 20 mai dernier, et seront, en conséquence, recueillies par leurs parents les plus proches, conformément auxdits articles. « Art. 31. Il sera dressé sur les tableaux des religieux qui seront envoyés par les directoires des départements, un état général de tous les religieux, dans lequel seront distingués ceux qui auront préféré la vie commune, et ceux qui l’auront quittée : sera ledit état rendu public par la voie de l’impression. « Art. 32. Les municipalités seront tenues de donner avis aux directoires du district, du décès de chaque religieux, soit qu’il ait quitté, soit qu’il ait continué la vie commune, et ce, dans la quinzaine dudit décès ; le district instruira tous les trois mois le directoire du département, des religieux qui pourraient être décédés dans son arrondissement; le directoire du département enverra tous les ans au Corps législatif les noms desdits religieux, pour en être dressé une liste qui sera rendue publique. <■ Art. 33. Tous les religieux sans distinction, avant de toucher leurs peusions, seront tenus de déclarer s’ils ont pris ou reçu quelque somme, ou partagé quelques effets appartenant à leur maison ou à leur ordre, autres que ceux mentionnés en l’article 8 ci-dessus, et d’en imputer le montant sur le quartier ou sur les quartiers à échoir de leur pension; ne pourront les receveurs des districts payer aucune pension religieuse, que sur le vu de ladite déclaration, laquelle sera et demeurera annexée à la quittance de chaque religieux ; et seront ceux qui auront fait une fausse déclaration, privés pour toujours de leur pension. « Art. 34. Les religieux sortis de leur maison depuis le 29 octobre dernier, ou qui désireront en sortir avant le 1er janvier 1791, recevront provisoirement, jusqu’à cette époque, un secours qui sera fixé par le directoire des départements sur l’avis du directoire des districts, et d’après la demande des municipalités, sans néanmoins que ledit secours puisse, dans aucun cas, excéder la proportion des traitements fixés par le décret des 19 et 20 février dernier, sauf à compter ainsi qu’il a été réglé par l’article 1er du présent titre. « Art. 35. Ne pourront néanmoins les religieux actuellement occupés à l’éducation publique et au soulagement des malades, quitter leurs maisons, sans au préalable avoir prévenu les municipalités six mois d’avance, ou sans un consen-sentement par écrit desdites municipalités. « Art. 36. Il sera pareillement accordé pour la fin de la présente année, par les directoires de département, sur l’avis des directoires de district et d’après la demande des municipalités, des secours aux maisons qui ne jouissent d’aucun revenu, ou dont les revenus sont notoirement insuffisants pour l’entretien des membres qui les composent, et sauf à compter conformément à l’article 1er ci-dessus. » (La séance est levée à onze heures.) ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BUREAUX. Séance du dimanche 19 septembre 1790 (1). La séance est ouverte à onze heures et demie du matin. M. l’abbé ©udot, député de Chalon-sur-Saône , demande à s’absenter pour quinze jours. M. Oarnaudat demande un congé pour affaires pressantes. M. de Chambrai, député d’Évreux , demande également la permission de se rendre dans son département pour ses affaires. Ces congés sont accordés. M. de Ufoailles, membre du comité militaire, député de Nemours. Il s’est présenté aux casernes de Courbevoie et de Ruel un particulier se disant député d’unesociété helvétique, porteur de papiers et d’imprimés à distribuer aux soldats, avec défense d’en donner connaissance aux officiers et sous-officiers. Cette démarche peu conforme aux lois militaires, et notamment à celles que vous avez décrétées, a excité des soupçons parmi les braves soldats suisses; ils ont requis les municipalités, et leur ont dénoncé cette démarche insidieuse. Les municipalités ont fait des informations; et après avoir eu communication des pièces dont le député était porteur, elles ont pris des arrêtés dont je vais vous faire lecture. Extrait des registres des délibérations de la municipalité de Courbevoie. « M. Gillet, procureur-syndic de la commune, a demandé la parole et a dit, etc., etc., etc. L’Assemblée, prenant en considération les conclusions de son procureur de la commune, a arrêté et délibéré à l’unanimité : 1° que quiconque se présentera à la caserne du régiment des gardes-suisses, pour y lire ou faire signer des adresses ou pétitions, sans être porteur des ordres du roi, d’un décret de l’Assemblée nationale, des pouvoirs des souverains des cantons suisses, ou d’un ordre signé d’un officier de l’état-major du régiment (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 68 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 septembre 1790. des gardes-suisses, sera regardé comme violateur de la loi, ennemi du roi, de la nation, et de nos braves et fidèles amis, les Suisses et Grisons ; « 2° Que les délinquants seront conduits par-devant nous, et de là envoyés au Châtelet de Paris, si le cas le requiert, pour être poursuivis comme voulant fomenter une insurrection dans notre paroisse ; « 3° Que M. Saint-Firmin, commandant de la garde nationale, sera invité à se présenter chez M. le commandant des casernes pour lui communiquer notre délibération, avec invitation à mon-dit sieur commandant du régiment des gardes-suisses , de nous instruire des démarches et tentatives que des gens malintentionnés pourraient faire auprès des compagnies qu’il commande, pour les porter à l’insubordination : arrête que copie sera envoyée à l’Assemblée nationale, à M. le colonel et à toutes les compagnies de gardes-suisses. « Fait et délibéré en l’assemblée générale de la municipalité de Courbevoie, le 14 septembre 1790. « Signé Colombier, maire; Bouché, Delêtre, Lefort, Lebrel, Romain, Gois ; Gillet, procureur de la commune ; Morel, Lépine; et Béhuzé, secrétaire-greffier. » L’arrêté de la municipalité de Ruel, dans une autre forme, contient les mêmes sentiments : — ces arrêtés vraiment patriotiques prouvent la vigilance extrême des municipalités de Ruel et de Courbevoie, et l’activité de leurs soins pour le maintien de l’ordre et de la discipline ; de pareilles dispositions pouvant avoir lieu vers le corps de l’armée, et y porter le trouble, le comité militaire croit devoir vous offrir des mesures convenables pour s’y opposer ; en conséquence et conformément à vos précédents arrêtés, il a l’honneur de vous proposer le décret suivant : « L’Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par son comité militaire, des démarches qui ont eu lieu aux casernes de Ruel et de Courbevoie, et des soins que les municipalités de ces deux bourgs ont pris pour s’opposer aux inconvénients qui pourraient en résulter, décrète ce qui suit : « Art. 1". Le président sera chargé d’écrire aux municipalités de Ruel et de Courbevoie que l’Assemblée nationale approuve la conduite sage et prudente qu’elles ont tenue, pour arrêter l’effet des démarches qui ont été faites vers le corps des gardes-suisses, approuve également le respect que les gardes-suisses ont montré à la loi et à ses organes. « Art. 2. Il est défendu à l’avenir à toutes associations ou corporations d’entretenir, sous aucun prétexte, aucunes correspondances avec les régiments français, suisses et étrangers qui composent l’armée; il est également défendu auxdils corps d’ouvrir et de continuer de pareilles correspondances, à peine, pour les premiers, d’être poursuivis par les magistrats chargés du maintien des lois comme perturbateurs du repos public, et pour les seconds, d’être punis suivant la rigueur des ordonnances. » (Ces articles sont décrétés.) M. Rodât fait une motion sur les moyens d'assurer la permanence du Corps législatif. (Voy. le texte de cette motion aux annexes de la séance.) M. de Crillon l'aîné, ci-devant le marquis, reud compte, au nom du comité militaire, de la réclamation du régiment de Soissonnais en garnison à Montélimart, contre la vérification et le règlement des comptes de la masse de ce régiment. Il propose un projet de décret. M. d’André observe que si l’Assemblée se décide à écouter les réclamations de chacun des régiments, elle perdra un temps très considérable. Il croit qu’il vaudrait beaucoup mieux que le comité proposât l’établissement d’un tribunal devant lequel seraient portées les réclamations. M. Emmery. La proposition va devenir sans objet par suite de l’établissement prochain des cours martiales. M. d’André. En ce cas, je retire ma motion. Le projet de décret présenté par M. de Grillon est adopté en ces termes : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu la lecture du procès-vérbal dressé par l’officier général chargé de la vérification des comptes du régiment de Soissonnais, celle des observations faites par les soldats de ce régiment sur le procès-verbal, et le rapport de son comité militaire, déclare que l’officier général chargé par le roi a jugé conformément aux ordonnances ; décrète, en conséquence, qu’il sera alloué à chaque homme 5 livres 8 sous, pour lui tenir lieu dmn sarrot, comme la seule réclamation fondée sur les ordonnances, et que son président se retirera par-devers le roi pour prier Sa Majesté de donner les ordres nécessaires pour la prompte exécution du présent décret. M. le Président rend compte de la députation à la tête de laquelle il s’est présenté hier soir chez le roi, en faisant lecture de son discours, et de la réponse du roi. Discours de M. le président de l'Assemblée nationale au roi, en lui présentant , à la tête d'une députation , le décret du 18 septembre. « Sire, « Instruite des excès auxquels se sont portés des hommes, je n’ose dire des Français qu’on a trompés sans doute, l’Assemblée nationale nous a chargés d’exprimer à Votre Majesté son indignation et ses regrets à la nouvelle de ces coupables désordres. Affligée de la détermination qu’a prise Votre Majesté de se priver d’une partie des objets qui contribuaient à son délassement et à ses plaisirs, elle ose espérer, Sire, que vous ne consommerez point un sacrifice digne de vos vertus, mais qui coûterait trop à la sensibilité d’un bon peuple dont le bonheur est inséparable de la satisfaction personnelle de son roi. Daignez, Sire, donner aux représentants de la nation un témoignage bien précieux de confiance et de bonté en sanctionnant ce décret, dépositaire et garant de leur empressement à vous plaire : surtout, Sire, gardez-vous de juger, par l’expression mesurée qui caractérise les lois, du degré d'intérêt que met l’Assemblée nationale à vous voir accueillir un vœu dicté par le sentiment pur de son respect, de son dévouement et de son amour pour la personne de Votre Majesté. » E