644 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 septembre 1791. « En conséquence, en renouvelant toutes les déclarations et protestations sur la nullité et iniquité, soit du susdit décret de l’Assemblée, soit de tout autre acte préjudiciable aux droits du Saint-Siège, et voulant et entendant que la présente protestation subsiste toujours, et soit censée renouvelée et publiée toutes les fois que l’on fera quelque nouvel acte contraire, eu sorte qu’il ne puisse être que nul, inutile et d’aucune valeur; je supplie de nouveau Votre Sainteté d’admettre et recevoir la présente protestation, et déclarer que le décret de l’Assemblée nationale, en date du 14 septembre dernier, est nul, injuste, violent et perturbateur des droits légitimes du Saint-Siège, et que le consentement que les rebelles sujets de ces provinces ont donné à ladite incorporation est pareillement nul, tu-multuaire et extorqué. Je fais instance en même temps, que ces sentiments que Votre Sainteté a déjà communiqués à toutes les cours de l’Europe, soient généralement connus de tout le monde, afin que personne n’ignore la détermination invariable où est Votre Sainteté de revendiquer les droits du Saint-Siège apostolique. Ainsi, je déclare, proteste, supplie et fais instance, ce 27 octobre 1791. « Signé : Jacques Borsari, commissaire général de la R. G. A. » Apres avoir pris lecture et mûrement examiné tout ce qui nous a été ci-dessus représenté par Je susdit J. Borsari, commissaire général de notre Chambre apostolique, ainsi que la protestation, la déclaration et les instances dont il nous a fait rapport, et ne pouvant nous refuser à l’évidence et à la justice de toutes ces requêtes, nous avons jugé convenable d’y adhérer, et d’appouver son réquisitoire en toutes ses parties. La conservation de nos droits et de ceux du Saint-Siège, que nous entendons conserver sans lésion et dans toute leur intégrité, l’exigent ainsi. A ces causes, de notre propre mouvement, science certaine et plénitude de notre suprême puissance, nous avons déclaré et déclarons, par le présent « chirographe », le prétendu décret de l’Assemblée nationale, du 14 septembre dernier, nul, injuste et violent. Nous approuvons, en outre, les deux « chiro-graphes » en date des 2 août et 15 novembre 1790, avec les prestations du procureur général du fisc et de notre Chambre apostolique, et le mémoire de réclamation que nous avons fait parvenir à toutes les cours, par le révérendissime cardinal de Zelada, notre secrétaire d’Etat, pour instruire les puissances catholiques de cet attentat contre les droits légitimes du Saint-Siège, et tout autre acte ou démarche dont il serait nécessaire de faire une mention expresse. Nous approuvons aussi et confirmons la protestation, déclaration et instance que nous a faites, comme dessus, notre susdit commissaire général de notre chambre apostolique, déclarons vouloir que ladite protestation soit toujours subsistante et valable contre tout attentat qui tendrait à usurper ou léser nos droits légitimes et ceux du Saint-Siège apostolique, lesquels nous voulons conserver dans leur intégrité et les défendre contre toute invasion, usurpation et violence. Et pouril’exécution des choses susdites, afin que ladite protestation et les déclarations et instances qui y sont contenues soient conservées à perpétuité, nous vous mandons, révérendissime cardinal camerlingue, qu’avec les formalités dont on s’est sévi à l’égard de nos précédents « chirographes » qui approuvent les autres protestations et instances faites par notre procureur général du fisc et de notre chambre apostolique, vous fassiez recevoir, dans la même forme, dans l’archive secret de la Chambre, notre présent « chirographe » qui approuve et admet ladite protestation de notre commissaire général de la Chambre, et le fassiez garder et conserver soigneusement à toute perpétuité, avec le mémoire de réclamation, envoyé à toutes les cours catholiques ; telle étant notre détermination et notre expresse volonté ; voulant en outre, et ordonnant que notre prétendu « chirographe », quoique non admis, ni enregistré dans la chambre, ni dans ses registres, en conformité de ce qui est prescrit par Pie VI, notre prédécesseur, dans sa bulle « de Registrandis » ait sa pleine et entière exécution, en vertu de notre seule signature, et que l’on ne puisse opposer aucun vice d’obreption ou de subreption ou autre défaut de notre volonté, et qu’ainsi, et non autrement, il soit décidé et inierprété par tout juge et tribunal, leur ôtant le droit de décider et d’interpréter différemment et annulant tout ce qu’ils pourraient faire contre la teneur de notre dit « chirographe » nonobstant toute formalité qui pourrait être requise pour la validité du présent acte, à laquelle s’il en est besoin, nous dérogeons amplementde notre suprême puissance, à l’effet des choses susdites. Donné de notre palais apostolique au Quirinal, ce 5 novembre 1791. Pie VI, pape. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. THOURET. Séance du mardi 15 septembre 1791 (1). La séance est ouverte à neuf heures du malin. M. Darnaudat, secrétaire. M. le ministre de la justice m’a remis hier, en ma qualité de secrétaire, l’acte constitutionnel dès que le roi l’eut accepté et revêtu de sa signature. De retour dans cette salle après avoir accompagné le roi avec les autres membres de la députation qui le reconduisit au château, je fus fort surpris de trouver la séance levée et d’apprendre qu’il n’y aurait séance que ce matin. Je témoignai mon inquiétude à plusieurs membres des différents comités et je leur demandai où je pourrais déposer l’acte constilutionnel. Il me fut répondu que je devais le garder jusqu’à la première séance, et que j’en étais responsable. Je leur assurai qu’on ne m’enlèverait ce dépôt qu’avec la vie. Aussi je ne le quittai pas; je le plaçai le jour contre mon sein, et la nuit dans mon lit... Je puis déclarer que jamais trésor n’a été mieux gardé par un seul homme. J’aime sans doute bien l’acte constitutionnel ; mais quelque forte que soit l’affection d’un homme, c’est une mission délicate que celle d’être un dépositaire responsable. Je conclus à ma décharge. M. Bouche. Il faut déposer ce document aux archives. (I) Cette séance est incomplète au Moniteur. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 septembre 1791.] 645 M. Target, secrétaire. J’ai aussi entre les mains, dans ce moment, la lettre que le roi a écrite avant-hier à l’Assemblée; je vais la déposer sur le bureau et je crois qu’il faut la déposer avec l’acte constitutionnel aux archives. (L’Assemblée ordonne que l’acte constitutionnel et la lettre du roi seront déposés aux archives.) Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du samedi 10 septembre au matin. Plusieurs membres , à l’occasion de ce procès-verbal, font différentes observations sur les décrets des 7 et 10 septembre concernant les receveurs des consignations et les commissaires aux saisies réelles. Un membre propose de renvoyer ces observations au comité de Constitution qui présentera une nouvelle rédaction desdits décrets dans laquelle seront prises en considération lesdites observations. (Ce renvoi est décrété et le procès-verbal adopté.) Le même secrétaire fait ensuite part à l’Assemblée d’une adresse du corps électoral du département de la Charente, qui donne les plus vifs applaudissements aux immortels travaux de l’Assemblée par lesquels la Constitution est achevée, et qui annoncent l’avoir scellée du serment de lui être fidèles et de la maintenir. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du mardi 13 septembre, qui est adopté. Le même secrétaire fait ensuite part à l’Assemblée d’une lettre du sieur Daytey, artiste , par laquelle il lui fait hommage d’un modèle en plâtre, représentant l’autel de la patrie, orné de 4 figures allégoriques, emblèmes de la justice, delà paix, de la force et de la sagesse. M. le Président donne connaissance d’une lettre des commissaires de la trésorerie, à laquelle est joint un mémoire sur la nécessité d’employer dans une plus grande proportion les assignats au payement des troupes, et sur les mesures à prendre pour que ce modèle de payement s’opère sans aucun inconvénient réel. (L’Assemblée ordonne le renvoi de ces deux pièces aux comités militaire et des finances, réunis.) M. d’André présente une pétition de la société des amis des arts et métiers, des manufactures et du commerce de Rouen, concernant le droit de pontage que l’on continue à percevoir sur les marchandises qui y étaient assujetties, en vertu d’un arrêt de la municipalité de Rouen. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette pétition au comité d’agriculture et de commerce.) M. de Villierg demande un congé pour affaires très pressantes. (Ce coDgé est accordé.) M. fionpil-Préfeln. Avant que l’Assemblée nationale passe à l’ordre du jour, je la prie de fixer son attention sur un objet très important. La Constituiion vient d’être acceptée officiellement par le roi ; c’est le moment d’ordonner que cette Constitution, faite pour être la base de notre droit public et la garantie éternelle de notre prospérité nationale, soit publiée avec toute la solennité qui exige un acte de celte importance. Je demande qu’il en soit déposé dans les archives une expédition en parchemin, munie du sceau de l’Etat, et qu’il soit ordonné au comité de Constitution de présenter à l’Assemblée ses vues sur les moyens qu’il jugera convenables pour donner à la publication de ce document dans tout l’Empire français le plus grand éclat possible. ( Applaudissements .) M. Régnant! (de Saint-Jean-d'Angélÿ). Une partie delà proposition de M. Goupil est remplie par l’usage de l’Assemblée de faire remettre aux archives une expédition sur parchemin de tous les décrets; mais il est une autre partie de sa proposition qui me paraît extrêmement importante à adopter. Lorsqu’un traité de paix était signé, il était proclamé dans la capitale par des hérauts d’armes, et dans toutes les villes du royaume par des officiers municipaux.il faut que l’acte constitutionnel qui forme aujourd’hui une alliance nouvelle entre tous les Français et leur chef, soit publié avec toute la solennité possible. L’Assemblée nationale a décrété qu’il y aurait des fêtes publiques pour célébrer les grandes époques de la Révolution ; je crois que nulle circonstance plus imposante n’a pu se présenter pour y donner lieu. Je demande, en conséquence, que dimanche prochain, à Paris, et dans tout s les autres communes du royaume, le dimanche qui suivra la réception de la Constitution, envoyée par le roi, l’acte constitutionnel soit solennellement proclamé; qu’un Te Deum soit chanté en actions de grâces, et que les municipalités ordonnent telles fêtes qu’elles jugeront convenables. M. Fréteau-Saint-Jnst. J’ajoute qu’il est nécessaire que cette proclamation soit aussi bientôt connue des puissances étrangères. M. Duport. Je remarque que, chez tous les peuples, on n’a jamais manqué de donner aux fêtes publiques le grand intérêt des actes de bienfaisance et d’humanité ; à Paris, par exemple, on accordait la délivrance des prisonniers détenus en prison pour défaut de payement de mois de nourrice. Il serait fâcheux que le plus grand acte que nous ayons pu faire pour le bonheur des Français ne fût pas, lui aussi, accompagné d’un acte de bienfaisance. Je demande donc que la proclamation qui sera faite dimanche, à Paris, de l’acte constitutionnel soit solennisée par la délivrance de tous ceux qui y sont en prison pour dettes de mois de nourrice, et que cette mesure soit prise aux frais du Trésor public. M. Lanjuinais. J’appuie la motion de M. Duport, soit en trouvant extraordinaire qu’il veuille borner cette faveur à la capitale et je demande qu’elle soit étendue à toutes les communes du royaume. C’est comme cela seulement que nous pourrons faire quelque chose de juste et de sage, Quant à la dépense qu’entraînera cette mesure, doit-elle être municipale ou doit-elle être à la charge du Trésor public? Si elle est à la charge du Trésor public, je demande une somme qui puisse être distribuée dans tout le royaume; mais je crois plutôt que ce doit être une dépense municipale.