110 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE 51 [ Dugommier , général en chef de l’armée des Pyrénées-Orientales, à la Convention nationale, s. d .] (129) Citoyens Représentants, Nous l’avons vu ce Palladium de la République; nous l’avons reçu ce drapeau par excellence ; il sera la terreur de nos ennemis et la gloire des républicains français qui combattront sous son influence. L’armée des Pyrénées Orientales a juré d’être reconnaissante. Recevez le tribut de ses sentiments, en attendant celui de ses actions. Les deux braves frères d’armes qui nous ont porté le témoignage authentique et sacré de votre confiance, retournent auprès de vous; ils vous diront que nos bras et nos jambes ne tiennent pas plus que les leurs lorsqu’il faut les sacrifier à la patrie, et nous nous sommes honnorés mutuellement en nous embrassant. Nous les suivrons à votre barre; nous y serons de coeur et d’esprit, pour répéter au milieu de vous : vive la Convention ! vive la République! Pour l’armée des Pyrénées Orientales. Le général en chef, Dugommier. 52 [Pétition à la Convention nationale pour l’intérêt de la chose publique, sans indication de lieu ni de date ] (130) Citoyens Législateurs Tous les décrets de la Convention nationale sont émanés de la justice et de l’équité inséparables des droits de l’homme qui sont imprescriptibles, les loix contre les émigrés sont pour punir ces traitres d’avoir abandonné leur patrie et non pas pour atteindre les citoyens qui lui ont toujours été attachés ; cependant beaucoup de cultivateurs et autres patriotes ont fait des acquisitions d’individus qui n’étoient portés sur aucune listes d’émigrés et dont les biens n’étaient pas alors séquestrés. Des administrations de district et de departement au bout de six mois et même plus d’un an de la plus paisible jouissance ont voulu annuller les ventes sous prétexte que les vendeurs etoient émigrés ; les citoyens se trouvent ruinés par les dépenses qu’ils ont faites pour l’amelioration des dits biens et par tous les frais que les actes occasionnent parce qu’ils ne peuvent se procurer des certificats de résidence de leurs vendeurs parce qu’ils ne peuvent être signés par eux et qu’ils ne sont pas assez connus quoi qu’émigrés depuis leurs ventes souvent (129) C 323, pl. 1376, p. 23. Cette adresse est à rapprocher de celle des représentants Vidal et Delbrel, ci-dessus Arch. Parlement., 5 brum., n° 31. J. Mont., n° 14. (130) C 325, pl. 1404, p. 25. faites par leurs gens d’affaire fondés de pouvoir, comme ont toujours faits ces individus même en étant en France. Les loix contre les émigrés concernant leurs créanciers ne font subir la déchéance pour faire les déclarations qu’après les quatre mois a dat-ter du jour que ces traitres sont portés sur les listes imprimées et affichées des émigrés et non pas du jour de leur émigration parce que la Convention nationale ne veut pas que les citoyens soyent lésés par cause d’ignorance ; la Convention nationale qui ne veut pas deux poids et deux mesures ne souffrira pas non plus que les bons patriotes soyent la victime de leur bonne foi dans leurs acquisitions lorsqu’elles auront été faites avant que les vendeurs ayent été portés sur les listes des émigrés, qui est la date autentique de leur émigration, lorsqu’il n’aura rien été payé aux dits vendeurs et confirmera les ventes a la charge d’en verser le prix à la trésorerie nationale. Ce décret dicté par la justice ne peut pas etre nuisible aux interets de la République, en considérant que si le prix des dits biens n’etoient pas portés en entier sur les contrats de vente il y auroit surenchère lors de leur exposition au tableau des hipoteques, surtout lorsqu’il y a opposition de la part des créanciers qui ont interet de voir les biens de leurs debiteurs vendus au plus haut prix. Ce decret feroit verser des sommes considérables dans les caisses de la République. Pendant le séquestre des dits biens, les bois sont souvent vendus a bas prix et il a fait des dilapidations en pure perte pour la Republique et au détriment des dits biens. Beaucoup de citoyens attendent ce decret pour jouir paisiblement de leurs propriétés et vacquer aux affaires publiques et particulières. Ils vous demandent, citoyens Législateurs, que vous renvoyiez cette pétition a votre comité des Six pour vous en faire un raport dans un delai fixé par ce que la loi générale contre les émigrés peut etre encore attendue longtems qu’on est dans l’intention d’abattre incessament des bois de ces biens séquestrés dont les arbres servent aux réparation des fermes et pour la marine de la République française. 53 [Le conseil général et les citoyens de la commune de Christolet, ci-devant Saint-Christol (Ardèche), à la Convention nationale, le 9 vendémiaire an III ] (131) Extrait des registres des délibérations de la commune de Christolet, ci-devant Saint-Christol, district du Mézenc, département de l’Ardèche. (131) C 323, pl. 1385, p. 18. Cette adresse est à rapprocher de ci-dessus Arch. Parlement. 5 brum., n° 10. Bull., 8 brum., (suppl.). SÉANCE DU 5 BRUMAIRE AN III (26 OCTOBRE 1794) - N° 53 111 Du neuvième jour de Vendémiaire, l’an troisième de la République française une et indivisible. Le conseil général de la commune de Christolet ci-devant Saint-Christol, assemblé dans la maison commune, président le citoyen Esprit Gratien; Dauteville, maire; présents les citoyens François Gras, Jean-Pierre Bard; Jean-Louis Avenas, officiers municipaux, Jean-Pierre Chirouze, Pierre Chambon, Louis Combier, Louis Clauzel, Mathieu Chambon, Jean Gras, Laurent Bard, Louis Avenas, François Blaches, Jean-Pierre Combier, Jean Clier et Jean-Antoine Dousson, notables; assisté du citoyen Louis-Félicien Ferraud, secrétaire greffier. Présent aussi ce jour, Soullier, agent national. Lecture faite des adresses des sociétés populaires de Bourg-sur-Rhône [ci-devant Bourg-Saint-Andéol] et de Viviers, où l’on expose impudemment à la Convention que l’aristocratie, le modérantisme et le fanatisme lèvent la tête dans le département de l’Ardèche, depuis le 9 thermidor; que les ennemis du peuple y sont élargis par milliers, tandis que les vrais amis y sont persécutés, incarcérés. L’agent national près la commune entendu. Le conseil transporté d’indignation contre des impostures si atroces, a arrêté unanimement que pour les confondre, il sera fait à la Convention nationale l’adresse suivante : Représentans du peuple français, Les voilà donc démasqués ces diffamateurs perfides qui soufflaient à leur protecteur Couthon ces calomnies atroces que pendant son règne, ce triumvir insolent répandait dans ses discours contre les républicains de l’Ardèche. Dans le délire de leur désespoir, ils ont déchiré le voile sous lequel ils se cachaient. Ouï, c’est à vous, factieux, qui nous représentez sous la domination de l’aristocratie, du modérantisme, du fanatisme, en un mot en proie à tous les fléaux politiques, c’est à vous que s’attache le premier anneau de cette suite effrayante d’horreurs vomies à la face de toute la République contre ce département. Les adresses que vous venez de présenter à la Convention, au nom de deux sociétés dont la masse vous abhorre, ne sont que le fruit de l’art perfide avec lequel trai-nant le peuple de séductions en séductions, vous le conduisiez au terme fatal où vous aviez creusé un tombeau pour les uns et un abyme de honte et de remords pour les autres. Mais les yeux sont dessillés et bientôt vos fronts seront marqués du sceau inéfaçable de l’opprobre dans les mêmes lieux où n’aguerres vous vous flattiez d’être chargés de couronnes. Non, Représentans des Français, non le département de l’Ardêche ne subira jamais le joug avilissant du modérantisme, de l’aristocratie, du fanatisme. Il peut avoir gémi sous l’oppression des stipendiaires, des sicaires de Robespierre. Mais aujourd’hui la liberté y élève sa voix et cette voix foudroyante répand l’effroi dans le coeur des oppresseurs. On y chante des hymnes en l’honneur du 9 thermidor, de cet heureux passage de la terreur à la justice, du crime à la vertu, de la cruelle défiance aux épanchements de l’amitié, de cette fréyeur mortelle où nous avaient plongés les forfaits les plus inouis, à tous les transports de la bienveillance, de la générosité, de la fraternité. On vous y rend les plus solem-nelles actions de grâce d’avoir fait remplir à la France la sublime destinée d’apprendre à toutes les nations comment un grand peuple sait faire sortir le bonheur du sein de l’oppression. On y surveille sans cesse ces hommes paîtris de sang et de boue qui voudraient obscurcir avec leur souffle impur l’aurore de ce bonheur. On y dévoile les fripons, les scélérats qui parlant sans cesse d’un patriotisme qui n’était que l’enveloppe d’une ambition et d’une cupidité insatiables, calculaient froidement leur intérêt, leur fortune sur le deuil des familles et se fesaient un jeu des larmes et des plaintes de leurs victimes, ces hommes farouches qui voulaient apprendre au peuple à s’ennivrer du sang de ses frères dans la coupe d’Atrée. On y instruit le peuple sur les sages lois que vous avez rendues et on lui apprend aussi à connaître ses vrais amis. On y répand les lumières de la philosophie et l’on y dissipe les erreurs et les illusions qui abusèrent les âges passés. Enfin toutes les occupations, toutes les veilles des habitants de l’Ardèche sont tournées vers l’intérêt général de la République. Ici le cultivateur s’empresse de transporter les fourrages dans nos magasins militaires ; là on ouvre des souscriptions d’offrandes pour la restauration de nos vaisseaux. Partout l’on fabrique les premiers éléments de la foudre qui doit réduire en cendres le trône des Rois. Voilà, Citoyens Représentants, voilà le tableau fidèle du département de l’Ardèche. Voilà le tableau qu’exposeront à vos yeux vos collègues envoyés parmi nous pour épurer nos autorités constituées. Mais nos coeurs sont ulcérés ! Toute la République a retenti des vociférations de nos détracteurs, de ces vils continuateurs de Robespierre. Représentans du peuple vengez-nous. Proclamez dans toute la République l’amour brûlant pour la liberté et l’égalité, l’attachement toujours invariable des ardêchiens à tous les principes républicains et leur haine étemelle pour l’aristocratie, le modérantisme, le fanatisme, pour toutes les tyrannies. Il est temps que la République entière sache qu’étrangers à toutes les factions, la Convention fut toujours notre phare, dans les temps orageux et notre seul point de ralliement. Représentans du peuple que la hache vengeresse des attentats contre notre liberté soit sans cesse levée sur la tête des provocateurs du retour d’un système horrible, sur la tête des continuateurs de Robespierre. Achevez de consolider le bonheur des Français, sous l’empire de la justice, de la probité et de toutes les vertus. Pour nous malgré les clameurs des Robespierristes, notre dernier cri sera vive la Convention et notre dernier soupir sera pour la liberté. Et ont les délibérants signé. 112 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE Dauteville, Gras, Bard, Avenas, Chirouze, Chambon, Dousson, Combier, Chambon, Avenas, Soullier, Clauzel, Combier, L. Félicien Ferraud, signés au registre. Dauteville, maire. Pour extrait conforme : L. Félicien Ferraud, secrétaire greffier. 54 La société populaire de Nancy, Meurthe, à la Convention nationale (132) Citoyens Représentans, Qu’avons nous besoin d’attendre une nouvelle exposition de vos principes pour vous donner un nouveau témoignage du respect, de l’attachement et de l’admiration que vous doivent tous les vrais républicains? Quand vous avez fait échouer tous les complots, et puni les conspirateurs qui tramoient la ruine du peuple au milieu de ses mandataires et jusques dans le sanctuaire des lois ; quand nos armées, partout triomphantes, attestent l’exactitude de vos soins, votre sagesse et votre courage; quand vous faites reposer le salut public sur les bases inébranlables de la justice et de la vérité, pour-roit-on douter raisonnablement de la pureté de vos intentions et croire que vous ne vouliez pas sincèrement le triomphe de la liberté? Qu’un système erroné ait dicté contre les sociétés populaires les mêmes blasphèmes que La Fayette, le traître Dumouriez et les brigands couronnés ont osé vomir contre elles, vous n’en êtes pas moins convaincus des droits qu’elles ont acquises à l’estime et à la reconnoissance publiques par les services distingués qu’elles ont rendus à la révolution; et le bien qu’elles peuvent et doivent faire encore, leur assure la protection que vous leur devez contre tous ceux qui ont osé et oseroient à l’avenir les calomnier auprès de vous. Non, vous ne vous séparerez jamais des vrais Jacobins, et ils ne se sépareront jamais de vous, ces hommes courageux qui luttent depuis cinq ans contre toutes les factions, ces hommes enfin qui, dans toutes les crises de la révolution, ont toujours été prêts à se sacrifier pour en assurer la marche et à faire de leurs corps un rempart à la représentation nationale. Législateurs, lorsqu’après y avoir mûrement réfléchi, vous croirez que la victoire a marqué le moment où l’ardeur révolutionnaire doit être tempérée, vous le direz franchement, et les plus chauds patriotes, ceux-la même dont le zèle a été le plus calomnié, et qui cependant abdiquant toute haine particulière et tout esprit de vengeance, n’ont jamais désiré l’effusion d’un autre sang que de celui des coupables frappés par le glaive de la loi, ceux-là seront les premiers à applaudir à l’adoucissement des mesures de sûreté générale; mais, avant d’en venir là, vous aurez calculé les inconvéniens qui (132) Bull., 5 brum. (suppl.). peuvent résulter du ralentissement trop subit de ces mesures, et dans tous les cas, vous ne souffrirez pas que les modérés et les égoïstes, qui se sont constamment tenus à côté de la révolution pour en calculer froidement les chances et en pomper tous les avantages, viennent après que les périls seront passés, ravir à ceux qui les ont courus, la gloire qui n’est due qu’aux vétérans. Vous ne permettrez pas que ceux qui n’ont connu la révolution que par les profits qu’ils en ont tirés, puissent se mettre à la place de ceux qui ne l’ont pas servie par les viles spéculations de l’intérêt particulier, mais par pur amour de la liberté et de l’égalité, pour lesquelles ils sont prêts à mourir. Tels sont, citoyens représentans, les principes d’une société nouvellement épurée par le représentant Michaud, que la Convention a envoyé à Nancy, pour y rétablir le calme trop souvent troublé par le modérantisme. La sagesse des opérations de ce représentant, en assurant le triomphe des patriotes, dont deux persécutions n’ont pu abattre le courage ni le dévouement à la patrie, a fixé, nous l’espérons, la paix et le bonheur dans cette cité. C’est un nouveau bienfait qui nous attacheroit inviola-blement à la Convention, si ses travaux ne nous faisoient d’ailleurs un devoir de cet attachement. 55 Les administrateurs du département de la Meurthe, et les employés dans cette administration, à la Convention nationale (133). Législateurs, Pleins de confiance dans les sentimens paternels que la Convention vient de manifester au peuple français par son Adresse du 18 de ce mois, nous nous empressons de rendre hommage aux principes qu’elle vient d’établir pour assurer le bonheur de toute la famille. Depuis longtemps la liberté comprimée, le patriotisme persécuté et avili, réclamoient la justice et la vengeance nationale, lorsque l’excès de la tyrannie amena les événemens salutaires du 9 au 10 thermidor, qui mirent fin au système d’oppression et de terreur que le nouveau Catilina avoit employé pour nous remettre sous le joug. Continuez, Législateurs, à travailler au salut de la République en restant à votre poste : surveillez sur tout ces enfans dénaturés qui ne sont restés parmi nous que pour déchirer le sein de leur mère. Pour nous, nous jurons à la Convention un attachement inviolable, et nous demandons avec les francs républicains, le maintien du gouvernement révolutionnaire, comme indispensable pour nous faire arriver au port de la félicité. Justice pour l’innocence, indulgence pour Terreur, et punition pour les ennemis de la République! Vive la Convention ! vivent les vrais amis de la patrie et de la liberté! (133) Bull., 5 brum. (suppl.).