[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 décembre 1790.] le temps nécessaire pour poser les dernières pierres de notre Constitution ; non, Messieurs, cette motion serait aussi dangereuse qu’inconséquente, et je vous exhorte à travailler encore pendant trois mois, et même pendant quatre, si vous le jugez nécessaire, de manière que vous ne finissiez vos travaux que le dernier jour de mars ou d’avril au plus tard : commençons donc par fixer cette époque désirée, occupons-nous ensuite avec une ardeur persévérante des opérations qui ne peuvent se remettre, et le reste, nous le placerons dans les mains de nos successeurs. Il est encore une autre précaution bien essentielle à prendre; il faudra songer bientôt à convoquer les électeurs et les faire procéder, au moins un mois d’avance, à la nomination de ceux qui doivent nous remplacer, afin qu’ils nous suivent immédiatement dans l’exercice des fonctions que nous devons leur abandonner. Peut-être, Messieurs, ces observations et les précédentes offenseront-elles quelques vues particulières, peut-être me reprochera-t-on de n’avoir consulté que moi dans la proposition d’un projet de celte importance; mais je me suis mis, dès longtemps, au-dessus de considérations pareilles, et quand je me sens soutenu par l’assentiment de ma conscience, je ne crains plus de témoigner ouvertement ma manière de penser : d’ailleurs, j’achèverai le cours de nos travaux politiques, sans avoir jamais appartenu à aucun ctub, ni à aucune association, et quoique j’aie l’estime la plus véritable pour la plupart de ceux qui composent quelques-uns de ces clubs, j’ai cru dans tous les temps, qu’en m’abstenant d’y paraître, mon opinion absolument dénuée d’impulsions étrangères, serait plus franche et plus à moi ; ainsi je n’ai pas été à même de prendre des éclaircisse cents préalables pour savoir quelbs pourraient être les intentions de cette Assemblée relativement à la motion que je fais : n’importe, je manifeste la mienne; je la crois juste, je crois son exécution indispensable, et dès lors rien n’a dû m’empêcher de m’exprimer avec cette vérité indépendante, qui convient à mes principes et au caractère dont je suis revêtu. Qu’il sera beau, Messieurs, le dernier jour de nos travaux, pour tous ceux qui, dirigés constamment par l’amour du bien, n’ont pu perdre de vue, à travers toutes les traverses qui les agitèrent si longtemps, le calme et l’aimable obscurité de la vie privée ! Qu’il sera beau ce jour où, réunis sous les yeux de l’Eternel, dans l’un des premiers temples de cette capitale, le roi, cet excellent monarque, dont le nom sera toujours béni dans cet Empire, les législateurs actuels et les membres de la législature suivante renouvelleront le serment authentique et sacré de maintenir la liberté et la Constitution I Ah I oui, celle journée mémorable servira de pendant à celle de la confédération générale du 14 juillet; ces deux époques, tout à fait neuves l’une et l’autre dans les fastes de tous les pays et de tous les temps, seront immortelles dans les annales de notre histoire; et leur souvenir, lié de si près à celui des derniers efforts du despotisme et de la conquête de la liberté, demeurera éternellement gravé dans tous les cœurs français. PROJET DE DÉCRET. L'Assemblée nationale, voulant annoncer d’a-Ve Séuie, T. XXL Soi vance au royaume entier l’époque où elle finira ses travaux, et procéder sans délai à l’achèvement définitif de la Constitution, a décrété ce qui suit : Art. 1er. Le 30 mars prochain sera le jour irrévocablement fixé pour la clôture des séauces de la législature actuelle. Art. 2. Le comité central fera sous huitaine son rapport sur la détermination des travaux indispensables qu’il faudra faire d’ici à cette époque. Art. 3. Le comité de Coustiiution présentera incessamment un mode de convocation, afin que les membres de la législature prochaine puissent être nommés dans le courant du mois de février. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. PÉTION. Séance du dimanche 19 décembre 1790. La séance est ouverte à onze heures et demie du matin. M-Poulain de Boutancourt, secrétaire sortant, donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier, samedi, au soir. Ce procès-verbal est adopté. M. le Président. J’ai reçu de M. le maire de Paris une lettre dont je donne connaissance à l’Assemblée. Monsieur le Président, j’ai l’honneur de vous prévenir que la municipalité a fait hier l’adjudication de trois maisons nationales situées : La première, rue Saint-Denis, louée 1,200 livres, estimée 17,000 livres, adjugée 44,100 livres; La deuxième, petite rue de Nevers, louée 1,425 livres, estimée 17,000 livres, adjugée 33,500 livres; Et la troisième, rue de la Mortellerie, louée 1,721 livres, estimée 29,000 livres, adjugée 45,300 livres. Je suis avec respect, Monsieur le Président, votre très humble et très obéissant serviteur. Bailly. M. d’André. Messieurs, il est douloureux, quand on a à gémir sur les maux de sa patrie, à pleurer la mort d’un ami, d’être obligé de parler de soi : cependant, permettez-moi de vousentre-nir un moment. Les bontés dont vous m’avez comblé me sont un sûr garant de votre indulgence. M. Pascalis prononça, le 27 septembre, au parlement au nom des avocats, un discours dans lequel il témoignait de la manière la plus énergique son attachement pour les tribunaux que vous avez supprimés et ses regrets pour l’ancienne constitution de Provence. Ce discours fut dénoncé an comité des recherches par le département; de son côté, la municipalité informa contre M. Pascalis et le décrela d’ajournement. M. Pascalis qui avait pris soin de ma jeunesse, auquel je dois, peut-être, l’honneur de siéger parmi vous, parce que c’est peut-être à son exemple que je dois la franchise, la fermeté et B 6