§34 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 juin 1790. donner et en rappeler l’exécution. Le comité féodal a répondu, à notre demande, que le pouvoir exécutif devait être requis de faire une proclamation qui rappelât les dispositions des décrets des 15 mars et 20 avril derniers. Nous avons sollicité cette proclamation. Je demande si les députés ne sont pas en règle, si le comité féodal n’est pas en règle, si les ministres sont en règle 1 M. Thibault, curé de Souppes. Je suis du même district que M. de Noailles. Je connais les faits qu’il vous a présentés, et j’insiste sur la proposition qui vous a été faite de mander M. le garde des sceaux à la barre. Il me semble que la roclamation demandée en ce moment devrait tre générale pour tout le royaume. M. Merlin. Il faut lier ensemble ce qui regarde les dîmes ecclésiastiques et les droits de champart. Le comité des dîmes a un projet de décret à vous proposer. La discussion présente pourrait être ajournée à demain. M. d’André. Cette discussion a deux objets : 1° la proclamation à faire ou le décret à rendre : c’est sur cette partie que peut porter le renvoi ; 2° la faute du ministre : s’il est coupable, il faut le punir; pour le punir, il faut s’assurer s’il est coupable : pour s’en assurer, il faut l’entendre. On doit donc le mander à l’instant à la barre. M. Martineau. M. Merlin vient de nous dire que le comité des dîmes ecclésiastiques étudiait la question du champart et qu’il allait vous proposer un décret. Il en résulte que si vos décrets antérieurs doivent être changés, nous devons nous trouver heureux que la proclamation n’ait pas été faite. Je demande l’ajournement. (L’Assemblée ajourne cette affaire à demain.) Le sieur Thoque, serrurier de Versailles, offre en don patriotique une serrure dont il est l’inventeur, et déjà approuvée par plusieurs académies. L’Assemblée accepte le don patriotique. M. Giraud-Duplessis, membre du comité des rapports , rend compte de ce qui s’est passé à l'assemblée électorale du district provisoire de Guise. Il fait, ainsi qu’il suit, l’historique de cette affaire : L’Assembléenationalea décrété, le 6 février, que les électeurs du district provisoire de Guise statueraient, lors de leur première assemblée, sur la fixation du chef-lieu, et sur la réunion ou le partage, entre Guise et Vervins, des établissements résultant de la Constitution. Guise craignait de voir ses prétentions frustrées, car le plus grand nombre des administrés a intérêt à ce que Vervins soit le chef-lieu de l’administration. Quefit'On? On sema des bruits capables d’éloigner de l’assemblée électorale, qui devait se tenir à Guise, tous ceux qui pouvaient voter pour Vervins, et ces menées devaient assurer par là la prépondérance des votants pour Guise. Ces bruits firent naître des inquiétudes, et la majorité des électeurs réunis à Chauny, pour la fixation du chef-lieu de département, adressa une requête à l’Assemblée nationale, pour demander que les électeurs, au lieu de s’assembler à Guise, fussent réunis dans un lieu neutre. Cette requête était signée de 83 électeurs sur 131 dont l’assemblée électorale devait être composée. Une seconde requête aux mêmes finsi souscrite en présence de M . le commissaire du roi, fut adressée au comité de Constitution, ainsi qu’une pétition du corps administratif du département qui sollicitait le lieu neutre. M. de Viefville des Essarts, député du Ver-mandois et citoyen delà ville de Guise, s’opposa avec la plus grande chaleur à ce que l’Assemblée nationale fît droit sur la demande d’un lien neutre : il répondit, sur sa tête, que les élec-lecteurs, quels qu'ils fussent et quelque fût leur avis, n’éprouveraient pas la moindre violence à Guise. L’Assemblée nationale refusa le lieu neutre, et les électeurs, par respect pour le décret, se rendirent, malgré leur répugnance, malgré les craintes les plus légitimes, à l’assemblée électorale indiquée à Guise. Le lundi 7 juin, au matin, on alla au scrutin sur la fixation du cbef-lieu : 70 électeurs votèrent pour Vervins, 60 seulement pour Guise ; Vervins fut proclamé chef-lieu ; il était alors midi. Dès qu’on sut que la majorité était en faveur de Vervins, et avant que le procès-verbal pût être rédigé et signé, le peuple de Guise s’attroupa : les électeurs suspects d’avoir voté pour Vervins furent menacés; des victimes furent désignées, des atrocités annoncées. Le détail en a été mis sous les yeux du comité des rapports. Dès ce moment, l’assemblée électorale put être regardée comme dissoute. Une grande partie des électeurs qui avaient voté pour Vervins disparurent; d’autres furent contraints de rester. A sept heures du soir, les officiers municipaux firent annoncer que l’assemblée pouvait se réunir. Le peu d’électeurs qui n’avaient pu s’échapper de Vervins s’y rendirent; et là, le peuple étant encore attroupé, un électeur de Guise proposa d’annuler tout ce qui s’était fait le matin. La motion ne fut point contredite, et, sans aucune réclamation, on annula la délibération du matin. Le lendemain, on délibéra de nouveau sur la fixation du chef-lieu, et, à la majorité de 72 voix contre 2, Guise fut proclamé chef-lieu. Dans la même séance, la réunion des établissements en faveur de Guise fut arrêtée à la majorité de 72 voix contre une. On eut soin de faire insérer dans le procès-verbal que les électeurs étaient libres. Quelle liberté que celle qui assurait à Vervins 2 suffrages sur 70-qui lui avaient été donnés la veille ! On se disposait à nommer les membres du corps administratif et à consommer ainsi le complot qu’on avait déjà réalisé en partie, mais toute la province était en mouvement sur l’avis de ce qui s’était passé la veille. Un corps de troupe très considérable était aux portes de Guise, redemandant les électeurs qui y étaient retenus: on menaçait delà plus terrible vengeance la ville inhospitalière qui avait osé violer les droits les plus sacrés : il fallut céder. Les électeurs de Vervins eurent la permission d’aller se présenter à l’armée libératrice qui les réclamait. Le procès-verbal des différentes séances fut enfermé dans une boîte que le président scella de son cachet, et cette boîte fut déposée chez un notaire, à Guise. Tel est l'état des choses. La province entière demande une justice éclatante ; elle l’attend avec la plus vive impatience et l’Assemblée nationale ne laissera pas impuni l’attentat dont les électeurs ont failli être victimes, Sur le surplus, le comité propose le décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu