528 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juillet 1791. j fer platiné qu’ils tirent des Hayons à la destination de la Moncelle. Ils ont même obtenu le 2 avril dernier un jugement du district de Sedan, qui, ordonnant la restitution des droits perçue sur les fers platinés, venant desdits Hayons, a défendu aux préposés du bureau de Givonne, de percevoir aucuns droits sur les fers bruts qui seraient transportés de la Moncelle aux Hayons, et qui eu seraient rapportés aplatis. Depuis ce jugement, les fers platinés sont entrés sans acquit de droit; la ferraille est sortie malgré la prohibition. Votre comité d’agriculture et de commerce n’a pas besoin de grands efforts pour vous prouver combien l’exécution de cette disposition serait contraire à vos décrets et aux intérêts de vos finances. Il est sensible que, tant que le village des Hayons ne fera pas partie de l’Empire français, et ne sera conséquemment point assujetti aux mêmes impositions, soit directes, soit indirectes, les fabriques ne doivent point être traitées comme les fabriques nationales de même nature, qui ne pourraient pas soutenir leur concurrence. Aussi votre comité a pensé qu'il ne pouvait rien faire de plus favorable pour les fabriques des Hayons, que de laisser extraire pour leur aliment, nonobstant la prohibition portée à cet égard, uue quantité de vieux fer proportionnée à celle des fers qui seront rapportés platinés desdites forges. li m’a en conséquence chargé de vous proposer le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité d’agiicullure et de commerce, décrète que les fers et autres objets qui passeront du village des Hayons, situé à 3 lieues des frontières de la ci-devant principauté de Sedan, dans l’enceinte des barrières, et tout ce qui sortira du royaume pour ledit village, seront soumis aux droits et aux prohibitions réglés par la loi du 15 mars dernier, sans rien préjuger re-lati\ emcnt à la souveraineté sur ledit village; permet cependant de faire sortir en exemption de droits, jusqu’au premier janvier 1793, pour les fabriques du lit village, une quantité de vieux fers proportionnée à celle des fers platinés, qui seront apportés desdites fabriques dans le royaume. » (Ce décret est adopté.) Un membre demande que l’ouverture de la séance du matin soit invariablement fixée à 9 heures précises, et qu’il suit accordé des séances extraordinaires du soir pour la discussion du projet de loi sur les traites. Un membre observe que l’Assemblée n’est pas encore assez nombreuse pour délibérer sur cette proposition. (Cette motion est remise à midi.) M. Frïcaud représente à l’Assemblée qu’il a été saisi plusieurs sommes d’argent sur les frontières, lesquelles sommes sont exportées vers l’étranger, en contravention des décrets; il observe que le comité, à qui ces arrestations ont été dénoncées, n’en a pas encore rendu compte, et il demande que cet objet soit mis, pour demain, à l’ordre du jour. M. d’André. Depuis longtemps, on met à l’ordre du jour un rapport sur la garde soldée de Paris ; tous les jours ce rapport est retardé, et les ennemis du bien public eu profitent pour séparer de nous des soldats de la liberté, qui lui seront toujours lidèles. Je demande que le rapport soit fait sur-le-champ. M. le Président. Je viens de recevoir une lettre de M. de Menou, rapporteur de cette affaire, qui m’annonce que son rapport n’est pas encore prêt en ce moment. (Murmures.) M. Dauchy, au nom du comité d'imposition, présente un projet de décret tendant à décharger le Trésor public des dépenses municipales de la ville de Paris. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale, sur le rapport du comité des contributions publiques, décrète : /' Qu’à compter du 1er juillet présent mois, les dépenses municipales de la ville de Paris cesseront d’être à la charge du Trésor public. « Se réserve de sta uer incessamment sur la dépense de la garde nationale soldée de la ville de Paris, et sur le mode de payement des rentes et delt s arriérées de la même ville. •> (Ce décret est adopté.) M. de Montesqufou, au nom du comité des finances, présente un projet de décret concernant le trésorier de la marine et son contrôleur . « L’Assemblée nationale décrète que les articles 8 et 9 de son décret du 17 de ce mois, relatifs au trésorier de la marine et à son contrôleur, seront rapportés, et en ordonne le renvoi à son comité des finances. » (Ce décret est adopté.) Une députation du directoire du district, du conseil général de la commune et de la garde nationale de Meaux , réunis , est introduite à la barre. L'orateur de la députation s’exprime aini : « Messieurs, le district de Meaux, ainsi que le conseil général de la commune, le corps de la garde nationale, nous ont dép ités vers l’Assemblée nationale pour lui présenter une adresse ; nous osons lui demander la permission d’en foire la lecture. (Oui! oui!) « Messieurs, « L’inviolabilité du roi est fondée sur la Constitution que nous avons juré de maintenir : elle met le chef de la nation à l’abri des attentats des factieux; elle garantit la tranquillité publique; et, loin d’être dangereuse pour la liberté, elle en assure les heureux effets, puisque les ministres sont responsables. Toujours semblables à vous-mêmes, toujours fermes et inébranlables dans vos principes, vous n’avez point voulu que la loi pût varier au gré des erreurs passagères d’un roi séduit. En décrétant de nouveau l’inviolabilité de Louis XVI, vous avez affermi la Constitution, et, pour ainsi dire, doublé les raisons qu’il avait de se fier à vous. Puisse ce roi trompé voir ses vrais amis dans les représentants de la nation, comme nous voyous en eux les pères de la patrie I Sachent les factieux qui ont osé protester contre votre décret, que, quand la loi a parlé, tous les citoyeus doivent se taire et obéir I Oui, Messieurs, tels sont nos principes, tels sont ceux de la Constitution que nous jurons de maintenir de tout notre pouvoir. « Achevez, sages législateurs, achevez vos sublimes travaux; comptez sur notre vive reconnaissance. Vous nous trouverez toujours prêts à soutenir l’exécution de vos décrets. Notre union et notre courage feront le désespoir des ennemis du bien public, et nous périrons plutôt que de souffrir que la Constitution reçoive la moindre atteinte. » ( Applaudissements .) [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juillet 1791.] 529 M. le Président répond : « Messieurs, « Vous éprouvez ce que commande le véritable amour de la liberté; vous reconnaissez l’empire de la loi, et vous lui promettez un dévouement sans bornes. Avec ces sentiments, vous réaliserez les espérances de l’Assemblée nationale ; elle verra la liberté et la Constitution hors de toute atteinte, et la prospérité publique s’accroître rapidement. « L’Assemblée vous inviteà assister à sa séance. » {Applaudissements.) (L’Assemblée ordonne l’impression du discours de la députation et de la réponse du Président, ainsi que leur insertion dans le procès-verbal.) M. Heurtanlt-Eamerville, au nom du comité d'agriculture et de commerce , présente un projet de décret tendant à autoriser le directoire du département de l'Orne à faire vendre 40 étalons du haras du Pin. Ce projet de décret est ainsi conçu : « L’Assemblée nationale autorise le directoire du département de l’Orne à faire vendre, par estimation, 40 étalons du haras du Pin, à des cultivateurs de ce département, aux conditions que le directoire croira les plus avantageuses au bien public, et avec la clause expresse que ces étalons seront conservés dans l’étendue de ce département, pour y servir à la propagation de leur race. » (Ce décret est adopté.) M. Regnaud {de Saint-Jean-d' Angély). Messieurs, vous avez chargé hier votre comité diplomatique de vous présenter un rapport circonstancié sur les événements dont M. Duveyrier vous a rendu compte afin d’examiner si le droit des gens n’a pas été violé. Je viens vous proposer une autre mesure, non moins importante qui est la conséquence directe de la mission de M. Duveyrier, c’est d’ordonner au ministre des finances de faire mettre à exécution le décret que vous avez rendu contre Louis-Joseph de Bourbon-Condé. Vous avez décrété, en effet, entre autres dispositions, que faute par lui de rentrer sous quinzaine dans le royaume ou de s’éloigner des frontières, ses biens seraient mis sous séquestre. 11 n’a point fait de réponse; les délais sont plus qu’expirés; il ne s’est point soumis à la loi que vous aviez le droit de lui faire. Vous avez un double intérêt à faire exécuter votre décret, d’abord pour lui apprendre que ce n’est pas en vain qu’on manque à une nation ; en second lieu parce que, lorsque ses biens seront entre les mains de la nation, vous serez plus sûrs que les propriétés seront respectées. Je demande donc que l’Assemblée nationale décrète que le ministre des finances sera chargé de faire mettre à exécution le décret que vous avez rendu relativement à la séquestration des biens de Louis-Joseph de Bourbon-Condé. M. Rabaud-Saint-Etieime. J’observe que c’est l’exécution totale du décret que nous devons demander. M. le Président. Je crois qu’un nouveau décret n’est pas nécessaire pour cela. M. Camus. Voici ce que je propose à cet égard : « L’Assemblée nationale a décrété que le ministre de l’intérieur lui rendra compte, dans lre Série, T. XXVIIi. 3 jours, de l’exécution du décret rendu le 11 jui» dernier contre Louis-Joseph de Bourbon-Condé. » (Ce décret est adopté.) M. Camus. J’ai encore une autre proposition à faire. Je demande que le ministre de la justice rende compte incessamment de l’état dans lequel se trouvent les procédures relatives aux falsificateurs d'assignats. Il est inconcevable qu’après avoir pris des personnes sur le fait, ces personnes-là ne soient pas encore punies comme elles auraient dû l’être, et qu’aucune affaire de ce genre ne soit encore terminée. Voici mon projet de décret : « L’Assemblée nationale décrète que le ministre de la justice rendra compte, dans 3 jours, des diligences qui ont dû être faites et de l’état des procédures du tribunal de Paris, chargé du procès contre les prévenus du crime de falsification des assignats ». (Ce décret est adopté.) M. Eanjuinais. Je ne pense pas que l’on doive établir une différence entre M. de Condéet tous les autres officiers émigrés qui ne sont pas moins coupables que lui. Je demande que l’Assemblée se fasse rendre compte incessamment, par le ministre de la guerre, de la liste des officiers transfuges et qu’il soit appliqué à ces officiers la même mesure qu’à M. de Condé. M. Regnaud {de Saint-Jean-d’ Angély). Dans le projet de décret que M. Emraery vous a présenté hier sur la discipline militaire, il y a une disposition relative aux officiers des troupes de ligne qui sont allés chez l’étranger. Lorsque cet article sera mis en discussion, la motion de M. Lanjuinais pourra être utilement examinée. M. Eanjuinais. Je consens au renvoi. (L’Assemblée renvoie la motion de M. Lanjui-nais à l’époque de la discussion du projet de décret sur la discipline militaire.) M. Rabaud-Saint -Etienne. Vous avez ordonné, il y a 10 ou 12 jours, le recensement général des habitants de Paris. 11 arrive dans Paris une infinité d’étrangers. Déjà on s’est aperçu que dans le nombre il y avait plusieurs repris de justice. Tous ces hommes sont infiniment suspects. Cependant nous n’avons pas encore appris que la municipalité de Paris ait très avancé son travail à cet egard. Je demande que l’on fasse incessamment ce recensement général, que l’on y mette les formes les plus exactes, que l’on vienne me demander, comme je m’y attendais tous les jours, qui je suis, où je demeure, d'où je viens et ce que Je fais à Paris; que l’on en fasse de même dans toutes les maisons : que tout citoyen soit obligé sur sa responsabilité et telle peine que la municipalité pourra proposer, de déclarer s’il recèle un étranger chez lui; qu’en un mot, chacun des étrangers arrivés à Paris, dans l’espoir de la curée générale qui leur avait été promise, soit dénoncé; que la vigilance des citoyens soit éveillée; que tout les citoyens de Paris se regardent comme les sentinelles de la Constitution, obligés en conscience de déclarer les étrangers suspects. Qu’ils les connaissent, afin que la ville de Paris soit connue, comme l’on connaît une maison. Que l’on prenne toutes les précautions nécessaires pour expulser les brigands, les assassins, les scélérats et les conspirateurs dont Paris 34