[États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Sénéchaussée de Rhodez.J 555 CAHIER lies doléances , plaintes et remontrances de l'ordre de la noblesse de la sénéchaussée de Rhodes (1). Notre député aux Etats généraux demandera : Premièrement. Art. 1er, Qu’il soit reconnu dans la forme la plus solennelle, par un acte authentique et permanent, que la nation seule a le droit de s’imposer, c’est-à-dire d’accorder ou de refuser les subsides, d’en régler l’étendue, l’emploi, l’assiette, la répartition et la durée, d’ouvrir et garantir des emprunts, et que toute autre manière d’emprunter ou d’imposer est illégale, inconstitutionnelle et de nul effet. Art. 2. Qu’il soit arrêté irrévocablement un terme fixe et périodique pour l’assemblée des Etats généraux, qui prendront en considération l’état du royaume, examineront l’état des finances et l’emploi des subsides accordés pendant l’année précédente, en décideront la continuation ou la suppression, l’augmentation ou la diminution, ordonneront des réformes et améliorations dans toutes les branches et l’économie politique et prescriront les moyens de mettre leurs règlements à exécution. Art. 3. Que si la convocation de l’assemblée nationale n’a pas lieu dans le délai fixé par la loi, les Etals provinciaux soient autorisés après une année révolue à refuser la concession des impôts, et qu’il soit ordonné aux cours souveraines de poursuivre comme concussionnaires ceux qui oseront en continuer la perception. Qu’il soit statué que non-seulement aucun édit bursal, mais encore aucune ordonnance générale et permanente n’aura force de loi, s’ils ne sont rendus dans l’assemblée des Etats généraux et du consentement des trois ordres, sanctionné par le Roi, qu’ils porteront dans le préambule ces mots consignés dans toutes nos anciennes chartes : De V avis et consentement des gens des trois Etats, du royaume , et qu’ils seront publiés et enregistrés pendant la tenue des, Etats généraux. Art. 3 bis. Que les villes soient réintégrées dans le privilège d’élire librement leurs officiers municipaux et de disposer entièrement du revenu des communes, lesquels ne seront plus soumis à l’inspection, ni des commissaires départis, ni des ministres,, mais à celle des. Etats provinciaux constitutionnels et de leur commission intermédiaire. Art. 4. Qu’il soit arrêté irrévocablement qu’il ne sera jamais voté par tête, mais par ordre, ainsi qu’on l’a toujours pratiqué sous quelque prétexte que ce puisse être, Dusage ne pouvant être changé à cet égard sans violer les droits les plus sacrés et renverser la constitution de l’Etat. Ce sont les points préliminaires sur lesquels nous enjoignons à notre député de faire statuer dans l’assemblée des Etats généraux préalablement à toute autre délibération, surtout avant de voter sur l’impôt, déclarant que si notre représentant, sans avoir égard aux clauses expresses du présent mandat, prenait sur lui de concourir àil’ocütoi. des subsides, nous le désavouerions formellement et le déclarons dès à présent déchu de son pouvoir, incapable de nous lier par son consentement et à jamais indigne de notre confiance. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de V Empire. Deuxièmement. Après l’obtention de ces articles fondamentaux, il sera permis à notre représentant de délibérer sur les subsides, et alors il exigera : Art. 1er. Un tableau exact et détaillé de la situation des finances. Art. 2. Des renseignements pour constater le déficit et ses véritables causes. Art. 3. La publication annuelle des états de recette et de dépense auxquels on joindra une liste des pensions avec l’énonciation des motifs qui les auront fait accorder. Art, 4. La reddition publique des comptes par pièces justificatives à chaque tenue des Etats généraux. Art. 5. La fixation motivée des dépenses de chaque département. Ces objets étant réglés, nous autorisons notre député à substituer à cette foule d’impôts qui nous accablent les seuls subsides qui seront jugés nécessaires pour subvenir aux besoins de l’Etat, entendant que pour remplacer ceux qui existent et qui seront probablement abolis en partie, et peut-être en totalité par les Etats généraux, on préfère les taxes peu nombreuses et d’uneperception facile, peu dispendieuse, lamoins propre à satisfaire l’avidité du fisc et de ses agents, et surtout la moins onéreuse aux cultivateurs. Telles sont les taxes sur plusieurs objets de luxe, sur tous les brevets autres que ceux accordés aux militaires et sur les capitalistes ; on pourrait y ajouter une retenue de vingtième et de 2 sous par livre sur les intérêts des dettes de l’Etat qui n’ont essuyé aucune réduction. La répartition des impôts doit être proportionnée à la population, à la richesse et à la fertilité des provinces et aux propriétés mobilières ou immobilières de chaque contribuable, et notre député observera que les impositions de la province de Rouergue doivent être diminuées parce que c’est une des moins fertiles et des moins commerçantes du royaume, qu’un tiers de ses fonds est forcément inculte, qu’elle est dépourvue de grandes routes et de rivières navigables, et qu’elle ne renferme environ que cinquantième partie du sol et de la population du royaume, ce qui prouve combien il est injuste qu’elle paye environ le vingt-cinquième des tailles, vingtièmes et capitations. Pour subvenir aux nécessités pressantes de l’Etat et soulager nos concitoyens, notre député offrira de souffrir et supporter toutes les impositions conformément et proportionnellement avec les autres ordres de l’Etat, nous réservant que ces impôts personnels seront répartis par les Etats provinciaux constitutionnels ou parleur commission intermédiaire, et que la portion proportionnellement assignée à chaque ordre sera répartie par ledit ordre ou par les commissaires amovibles, et sous la condition expresse qu’au moyen du payement des impôts accordés par les Etats généraux, les privilèges des trois ordres de l’Etat seront sacrés et toutes les propriétés, intactes. Notre député demandera quai soit permis aux Etats provinciaux constitutionnels d’accorder aux communautés qui voudront faire un essai, la liberté de percevoir la dîme royale en remplacement des impôts réels. Que tous les receveurs particuliers et généraux soient supprimés de mêhie que tous les agents du fisc ; qu'il soit pourvu à leur remboursement de droit, et que les provinces versent elles-mêmes leurs impositions dans la caisse du Roi, en recevant la même gratification que Sa Majesté avait 550 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [Sénéchaussée de Rhodes.] accoutumé d’accorder aux receveurs généraux et particuliers, à la charge par les Etats provinciaux de prendre les mêmes engagements avec le trésor royal. Troisièmement. Notre député demandera le rétablissement des Etats particuliers et constitutionnels du pays de Rouergue, avec les modifications que les circonstances pourront taire désirer pour le bien public. Il demandera que les députés qui les composeront soient élus par des suffrages libres, chacun dans son ordre, et que celui qui présidera pour un temps déterminé sera pris alternativement dans l’ordre du clergé et dans celui de la noblesse. Quatrièmement. 11 demandera qu’on s’occupe à simplifier la forme judiciaire, tant en matière civile que criminelle, à la rendre moins coûteuse et moins difficile, à bannir tout ce qui peut éterniser les procès, et qu’on fasse provisoirement beaucoup de réductions dans les droits, surtout dans les fiscaux et dans ceux des procureurs. Il demandera la suppression des tribunaux d’exception et en remboursant la financent de tous droits de committimus. Le rétablissement d’une troisième sénéchaussée dans le pays du Rouergue et dans la ville de Milhau, en formant dans les trois sénéchaussées des arrondissements proportionnés dans leur étendue respective. Une extension de compétence en faveur des présidiaux pour juger en dernier ressort. Le privilège pour les premiers juges de prononcer en dernier ressort jusqu’à la somme de 50 livres dans les actions personnelles seulement. 11 demandera qu’il soit enjoint aux sénéchaux de nommer chaque année des commissaires pour vérifier les greffes des juridictions inférieures et punir les prévarications. Que les parlements soient tenus d’apporter le plus grand soin dans le choix de leurs membres et des magistrats des tribunaux qui leur sont subordonnés et de veiller aux études des universités et des admissions aux grades. Cinquièmement. Notre député demandera la suppression de tous privilèges exclusifs destructeurs du commerce et de l’industrie, notamment des privilèges qui concernent les mines de charbon, comme étant très-nuisibles aux cultivateurs et à la société entière. L’abolition de toutes commissions particulières et évocations au conseil. Le reculement des douanes jusqu’aux frontières du royaume et la suppression totale de la gabelle. Sixièmement. Notre député demandera que le Languedoc soit tenu de restituer à la province du Rouergue la portion de l’impôt de la crue du sel, qu’il a ci-devant indûment perçu, et que dans le cas où cet impôt subsisterait, cette portion soit directement perçue par le Rouergue sans que le Quercy, qui n’y contribue point, puisse en aucune manière y participer. Septièmement. 11 demandera en faveur de nos habitants de nos campagnes l’abolition du commun de paix établi par les Etats particuliers de Rouergue, pour fournir aux gardiens de la sûreté publique, devenus sans but depuis l’établissement des maréchaussées, du plus petit produit pour le Roi, et du plus grand tracas pour les peuples, et l’établissement des maréchaussées à pied, à cause de l’insuffisance de la maréchaussée à cheval pour le maintien de la sûreté publique. Huitièmement. Notre député réclamera contre l’anoblissement attaché à certaines charges onéreuses, du moins inutiles à l’Etat, et demandera qu’il soit réservé au mérite et à la vertu. Neuvièmement. Pour la facilité du commerce et des transactions en argent, de citoyen à citoyen, il demanderaque le prêt à terme avec l’intérêt légal soit élabli et autorisé dans le royaume. Dixièmement. Il demandera que le contrôle soit réduit à ce qu’il était dans son origine et qu’il serve uniquement à augmenter l’authenticité des actes publics; que les droits en soient diminués et établis d’une manière claire et précise qui n’ouvre plus la porte aux exactions odieuses qui se renouvellent tous les jours, et que la connaissance des procès qui y seront relatifs soit attribuée aux tribunaux ordinaires. Onzièmement. Il demandera qu’à l’avenir les corps municipaux aient avec les Etats provinciaux constitutionnels, ou avec leurs commissions intermédiaires , les mêmes rapports qui existent actuellement entre eux et les commissaires départis. Douzièmement. Que les dettes du clergé et les dettes personnelles des provinces, communautés et corporations quelconques soient consolidées et conservées par la nation dans leurs droits et leur intégrité pour être payées, tant en capital qu’intérêts, par chacun des corps, provinces, communautés et corporation qui les ont contractées. Treizièmement. Qu’il soit accordé une augmentation , la plus forte possible, aux dignes pasteurs de nos paroisses, afin qu’ils puissent vivre décemment, secourir les pauvres et renoncer à tout casuel. Quatorzièmement. Notre député demandera qu’on emploie tous les moyens que la piété et la sagesse du Roi peuvent suggérer pour réprimer les progrès effrayants de l’irréligion, et surtout la licence effrenée de la presse, manifestée avec autant d’impunité que d’audace ; qu’on prenne les mesures les plus propres pour remédier à la dépravation des mœurs qui en est la triste suite, et que pour y parvenir plus facilement, les évêques soient tenus de résider dans leur diocèse. Quinzièmement. Il réclamera l’exécution la plus sevère des ordonnances qui ont été rendues au sujet des jeux de hasard. Seizièmement. Notre député, pour assurer la liberté individuelle, demandera l’abolition des lettres closes, de cachet ou d’exil et de toute espèce d’ordres arbitraires. [États gén. 1789. Cahiers.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Rhodez.] Dix-septièmemen t. Il demandera qu’à l’avenir la noblesse ait une députation aux Etats généraux double de celle du clergé, et il se plaindra de ce que la sénéchaussée de Rhodez a été jointe au bailliage de Milhau et n’a pas obtenu deux députations que sa population exigeait. Dix-huitièmement. Enfin la noblesse de la sénéchaussée de Rhodez, qui se glorifie d’avoir eu Henri IV pour un de ses comtes, charge principalement son député de réseuter au digne successeur de ce grand, de ce on Roi, et à la reine l’hommage des sentiments d’amour, de fidélité, de dévouement et de respect dont elle est pénétrée, et dont elle a toujours donné et ne cessera jamais de donner des preuves. Eloignée de la cour, placée dans un coin presque ignoré du royaume, connue par sa franchise, elle n’a point appris l’art de dissimuler, si funeste ux rois. Et en se conformant à tout le contenu du présent cahier, nous donnons à notre député tous pouvoirs généraux et suffisants pour proposer, remontrer, aviser et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l’Etat, la réforme des abus, l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de �administration, la prospérité générale et le bien de tous et chacun des sujets de Sa Majesté, ainsi qu’il est porté aux lettres de Sa Majesté pour la convocation des Etats généraux. CAHIER GÉNÉRAL Des demandes, remontrances et doléances du tiers-état de la sénéchaussée de Rhodez et du bailliage de Milhau (1). Les députés demanderont : Art. 1er. Une constitution nationale qui assure la liberté individuelle et la propriété. Art. 2. Le retour périodique des Etats généraux à des époques rapprochées. Art. 3. Que les biens et les personnes, sans distinction d’ordre, seront soumis aux mêmes impôts et compris dans le même rôle, et qu’il soit observé une égalité proportionnelle dans la répartition. Art. 4. Que la loi qui doit assurer l’exécution de ces trois articles soit prononcée avant de délibérer sur l’octroi de l’impôt. Dans le cas où ces trois articles ne seraient pas accordés, le tiers retire tous pouvoirs à ses députés. Art. 5. Ses députés demanderont l’abolition des distinctions humiliantes pour le tiers-état aux Etats généraux, et l’égalité des peines. Art. 6. Qu’il soit arrêté que provisoirement on opinera par tête aux Etats généraux et que la forme des Etats à venir, quant à la représentation, soit déterminée à la pluralité des suffrages du tiers-état. Art. 7. Qu’il soit délibéré à haute voix. Art. 8. Qu’il soit assuré par une loi fixe que le tiers n’ait pas la liberté de choisir de députés d’un autre ordre que le sien, ni de délibérer en commun avec les autres ordres pour le choix de ses députés. (1) Nous publions ce document d’après un manuscrit de» Archives de l’Empire. Art. 9. Que tout député du tiers aux Etats généraux qui acceptera des grâces de la cour, soit déclaré infâme. Art. 10. Que les impôts n’aient lieu que d’une tenue à l’autre. Art. 11. Que toutes les lois dorénavant soient publiées au prône et affichées dans toutes les communautés et paroisses. Art. 12. Que le tiers-état soit admis à toutes les charges, places, dignités, emplois, ain i qu’à tous les grades militaires. Art. 13. Que les Etats généraux avisent aux moyens de corriger les abus résultant de la vénalité des charges, et que la vénalité de la noblesse soit abolie. Art. U. La liberté de la presse pour les ouvrages avoués et même pour les ouvrages anonymes dont les auteurs auront fait inscrire leur nom dans les registres d’un officier public qui sera préposé à cet effet. Art. 15. Que les poids et mesures soient rendus uniformes dans tout le royaume. Art. 16. Que les droits et appointements des gouverneurs de province soient supprimés. Art. 17. La suppression des pensions de faveur et de survivance. Art. 18. Qu’il soit assigné des fonds à chaque département, et que les ministres en soient comptables envers la nation. Art. 19. Que la régie de l’impôt soit confiée aux provinces, et qu’il y soit établi des caisses dont les fonds seront versés au trésor royal. Art. 20. Que la plus juste proportion soit observée entre les provinces dans la répartition des impôts, le Rouergue étant écrasé par les surcharges. Art. 21. Que les Etats généraux examinent quels sont les impôts les moins onéreux dont la répartition peut être faite avec le plus d’égalité et dont la perception doit être la moins dispendieuse, et qu ils en substituent aux impôts qui pèsent le plus sur le cultivateur, comme l’impôt de la gabelle et celui de la capitation sur les habitants de la campagne, en reversant ce dernier impôt sur le commerce et sur les capitalistes et sur l’industrie, arts et professions et sur les individus aisés de tous les ordres. Art. 22. Qu’on supprime aussi, s’il est possible, les droits de contrôle, centième denier, scéau, parchemins timbrés , droits réunis , droits réservés ou qu’on abonne ces droits, ou bien qu’on statue qu’il sera établi un nouveau tarif qui prête le moins possible à l’arbitraire, et que les contestations qui s’élèveront à raison de la perception soient portées devant les juges des lieux. Art. 23. Que l’impôt de franc-fief soit supprimé comme injuste et avilissant le tiers-état. Art. 24. Qu’on abolisse aussi les impôts connus sous le nom de commun de paix et de bassine, et dans le cas où il serait nécessaire de créer de nouveaux impôts, qu’ils soient établis de préférence sur les objets de luxe. Art. 25. Qu’on supprime tout ce qui gêne la liberté et l’activité du commerce, et que les douanes de l’intérieur du royaume soient reculées aux frontières. Art 26. Que l’intérêt du prêt à jour soit autorisé par la loi. . Art. 27. Qu’il soit procédé devant les sénéchaux à de nouvelles adjudications des biens du domaine qui se trouvent engagés, et que ces adjudications soient confirmées au conseil s’il n’y est fait de nouvelles enchères. Art. 28. Qu’il soit fait une recherche des échanges des biens du domaine qui ont eu lieu depuis