K06 |Af semblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [28 février 1791,] destinés à notre département. Je demande que, sans les ouvrir, on les renvoie au comité des recherches pour que, d’après l’adress on découvre ceux qui les ont écrits. M. Robespierre. Il serait d’un bien dangereux exemple que, sous le prétexte d’un envoi qui a pour objet des écrits aristocratiques ou antipatriotiques, comme on voudra les nommer, on se permette de violer le secret des lettres.' Certainement , si l’administration des postes s’arroge le droit d’arrêter des paquets , sous prétexte qu’ils contiennent des écrits antipatriotiques, il n’y a pas de raison pour ne pas en user de la même manière à l’égard des écrits patriotiques. Si l’Assemblée disposait de ces paquets, elle donnerait elle-même l’exemple de la violation du secret drs lettres. Je demande que les paquets soient renvoyés au dépôt d’où on les a enlevés. ( Applaudissements .) M. Carat l'aîné. J’appuie la motion du préopinant; je propose toutefois, par amendement, de taxer les paquets. Ce sera une sorte de peine infligée à ceux qui font servir le contre-seing de l’Assemblée nationale à des correspondances aaticiviques. M. d’André. M. Bouche est chargé, au nom des commissaires de l’in'érieur, de présenter un règlement pour remédier aux abus des contreseings. Je demande que ce règlement soit mis à l’ordre du jour de la prochaine séance du soir. M. de Menas». Je propose que chaque député contresigne lui-même son paquet en le remettant au bureau. Plusieurs membres observent que cette mesure aurait de grands inconvénients; qu’elle faciliterait la supposition des signatures et que des malveillant' couvriraient du nom d’un patriote leurs mauvais desseins et leurs correspondances. M. Charles de Lameth. Je demande la question préalable sur la motion de M. de Menou. M. de Menou. Je retire ma motion. (L’Assemblée rejette l’amendement de M. Garat l’aîné et décrète la motion de M. Robespierre.) L’ordre du jour est un rapport du comité de Constitution sur les émigrations. M. Le Chapelier, au nom du comité de Constitution. Messieurs, votre comité de Constitution, pour remplir la tâche que vous lui avez imposée de vous soumettre un projet de loi sur les émigrations, a dû examiner avec une sérieuse attention si les principes de votre Constitution, si ces principes conservateurs de la liberté et de l’ordre public, s’accordaient avec une loi sur les émigrations ; il a dû surtout chercher dans les maximes de votre Constitution, dans les décrets que vous avez déjà rendus, s’il trouvait quelques principes ou quelques bases à cette loi. Votre comité doit commencer par convenir du résultat de ses recherches. Ce n’est pas en suivant les principes que vous avez décrétés, qu’une loi pareille peut être formée; au contraire, attendez-vous, si vous nous ordonnez d’en montrer le projet, qu’il blessera directement les principes de votre Constitution, qu’il sera contraire aux droits de l’homme que vous avez déclarés. Dans les efforts que nous avons faits pour remplir la mission que vous nous aviez donnée, nous avons successivement préparé plusieurs projets de loi. Nous avons vu bientôt que plus nous travaillions et plus nous rencontrions la nécessité de former des exceptions au projet de loi que nous faisions. Car nous n’avons pas pensé qu’il fût possible, en interdisant les émigrations ou en rappelant les Français qui sont hors du royaume, d’étendre celte loi aux étrangers qui voyagent en France, ainsi qu’à la liberté qu’ils doivent avoir d’en sortir. Nous n’avons pas pensé encore qu’il fût possible, sans détruire toutes les parties de notre industrie et sans arrêter le commerce, de se dispenser de prononcer une exception en faveur des commerçants pour fait de leur commerce; ainsi voilà encore une exception à proposer, à établir par la loi. A mesure que les exceptions se multipliaient à nos yeux, les difficultés d’exécution de la loi se multipliaient également. Dans les pays étrangers, il n’est pas possible que la puissance française fasse des proclamations. Nous n’avons donc pas pensé qu’il fût possible d’enjoindre aux agents dii pouvoir exécutif de notifier personnellement à chaque Français qu’on veut appeler, l’injonction qui serait faite par la loi ; et cet ordre, qui serait donné au pouvoir exécutif, nous a paru presque impossible dans son exécution; car, comme les ambassadeurs ou les envoyés ne connaissent pas tous les Français, ils notifieraient peut-être à rii iiiiii' qui est étranger, ou dans les ai mées des puissances étrangères, ou qui s'occupe à son commerce, ou même qui est naturalisé dans les pays étrangers, un ordre que vous n’avez pas l’intention de lui donner. Ainsi, Messieurs, cherchant toujours à concilier les principes, et trouvant tou joui s que ne us les violions, le dernier parti auquel nous nous sommes déterminés, c’est de rédiger, puisque vous l’exigiez, un projet de décret; mais vous êtes prévenus que ce décret est hors des principes et que c’est une véritable dictature. D’après cet exposé du comité de Constitution et avant que nous ne vous fassions lecture de ce projet de loi, lions vous prions de décider préalablement si vous voulez qu’il vous soit présenté. Plusieurs voix : Non ! non ! M. de Caslellane. D’après l’aveu qui vient de vous être fait, au nom du comité de Constitution, je ne crois pas qu’il y ait un seul membre dans l’Assemblée qui veuille l’engager à adopter une loi qui serait contraire à tous les principes de la Constitution et de la liberté publique : j’ajouterai qu’il est extrêmement instant que l’Assemblée prenne une délibération à cet égard. Le simple projet d’une loi contre les émigrants intimide déjà les étrangers qui voulaient s’établir en France et y acheter des biens nationaux. (Murmures à gauche.) Toute loi contre les émigrations paraîtra sans doute à l’Assemblée un moyen de les augmenter. Ce qui empêchera les émigrations, ce qui fixera les étrangers en France, ce sera le rétabl ssement de l’ordre. ( Applaudissements unanimes.) Liberté et protection à tous ceux qui ne troublent pas l’ordre public, voilà la loi que vous demande l’intérêt général. Je demande donc, Messieurs, que M. le Président soit chargé de se retirer par devers le roi, pour