150 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. { “ Le citoyen Guyomar, député du département des Côtes-du-Nord, expose à l’Assemblée que, depuis quinze jours, il est travaillé d’une fièvre qu’il craint de voir continuer tout l’hiver, que plusieurs de ses collègues en ont connaissance; il demande que l’Assemblée l’autorise à aller respirer, pendant un mois l’air natal, pour réta¬ blir sa santé. La Convention accorde le congé (1). Suit la lettre de Guyomar (2). Au citoyen Président de la Convention nationale. « Paris, 22 brumaire an II de la République française. « Citoyen Président. « Depuis quinze jours la fièvre me travaille malgré les remèdes que j’ai employés. Je crains que cette incommodité ne se prolonge à l’entrée de l’hiver et ne me prive par là d’assister aussi régulièrement aux séances, que je l’ai fait jus¬ qu’ici. Je désire donc prendre . mon air natal pour rétablir ma santé; ma maladie étant connue de plusieurs de mes collègues, je me trouve à l’abri du reproche de vouloir tromper la religion de l’assemblée pour obtenir le congé d’unmois que je demande. « Pierre Guyomar. » « La Convention nationale, sur la motion faite par un membre [Basire (3)] de décréter que la Société des Jacobins avait bien mérité de la patrie, en venant donner une nouvelle manifestation de son zèle pour le triomphe des principes révolu¬ tionnaires, passe à l’ordre du jour, motivé sur ce que cette Société célèbre n’a pas cessé un ins¬ tant de bien mériter de la patrie. » Sur la proposition d’un membre [Maribon-Montaut (4)], « La Convention décrète que son comité de sûreté générale lui fera, pour le plus tard, au 1er frimaire prochain, son rapport sur les 73 dé¬ putés mis en état d’arrestation (5). » (1) Procès-verbaux de la Convenlion, t. 25, p. 200. La minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton G 278, dossier 732, est de la main de Philippeaux. (2) Archives nationales, carton C 278, dossier 746. (3) D’après les divers journaux de l’époque. (4) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 278, dossier 732. (5) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 201 et 202. Nous séparons ces deux paragraphes du pro¬ cès-verbal par une ligne de points, parce que, dans le procès-verbal imprimé, divers décrets sont inter¬ calés entre eux; mais ils sont intimement liés, ainsi que le lecteur pourra s’en convaincre par le compte rendu du Moniteur. C’est pourquoi, contrairement à la règle que nous nous sommes imposé de suivre l’ordre adopté par le procès-verbal, nous avons cru devoir les réunir. Compte rendu du Moniteur universel (1). Une députation de la Société des amis de la liberté et de l'égalité, séante aux Jacobins, est admise à la barre. Dufoumy, orateur. Représentants, les Français l’ont juré: vivre libre ou mourir; la Convention l’a juré : la liberté, l’égalité triompheront : tels sont nos serments, tels sont vos devoirs. Nous tenons nos serments. Les Français s’élançent aux frontières et, sur les cadavres des tyrans et de leurs soldats, la victoire ouvre la marche triom¬ phale de la liberté, qui, du sommet de son char, distribue le bonheur aux nations détrompées, annonce et proclame enfin la paix universelle. Nous tenons aussi nos serments à l’intérieur, en réduisant les villes rebelles, en exterminant les brigands, et c’est ainsi que le fer et la flamme dévoreront tous les ennemis ouverts de la Ré¬ publique; mais il est des ënnemis cachés, il est des traîtres, des conspirateurs, et il est aussi des patriotes immuables qui les jugent, et enfin la hache si tardive cfe la justice les extermine sans distinction. Il est enfin des hommes sus¬ pects, des malveillants, des intrigants, et les plus méprisables de tous, des indifférents dont la coalition coupable corrompt l’esprit public, enfouit les subsistances, souille les élections; mais la prudence, tendant scs filets pour la sûreté générale, a ordonné leur arrestation; et fidèles à leurs serments, les Français les ont enchaînés. *'• i Le précipice était ouvert ; les conspirateurs qui avaient jusque dans votre sein établi le foyer du volcan qui devait tout engloutir, avaient fait nommer cette exécrable Commission des douze qui devait proscrire tous les patriotes ; mais le peuple était là; mais toute la France, qui a juré d’être libre ou de périr, était révolu¬ tionnaire. Paris, ses autorités constituées, étaient révolutionnaires. Grâces vous soient rendues, représentants, vous avez enfin orga¬ nisé la révolution. Des comités de Salut public et de sûreté générale, des comités de surveil¬ lance, des comités révolutionnaires font, sous l’œil des autorités constituées, le départ des individus de toute la France : et c’est ainsi que la patrie sera sauvée par la valeur des com¬ bats, par l’inflexibilité dans les tribunaux, et plus encore peut-être par cette sévérité qui imprime aux hommes suspects une terreur salutaire. Oui, représentants, le Français dans son dévouement ne connaît que le courage ou la mort, la justice ou la mort, la terreur ou la mort, pour assurer la liberté. La terreur, elle est le salut même de ces lâches ennemis que la pitié veut bien épargner; con¬ tinuez donc, représentants, par pitié même, la méduse de la terreur; opposez aussi cette méduse à ces mielleux et perfides orateurs qui, (1) Moniteur universel [n° 55 du 25 brumaire an II (vendredi 15 novembre 1793), p. 223, col. 2]. Le Supplément du Bulletin de la Convention du 3e jour de la 3e décade du 2e mois de l’an II, le Journal des Débats et des Décrets (brumaire an II, n° 421, p. 312) et le Mercure universel [25 bru¬ maire an II (vendredi 15 novembre 1793), p. 232, col. 1] reproduisent textuellement l’adresse de la Société des Jacobins telle que la donne le Moniteur. D’autre part, voy. ci-après, annexe n° 1, p. 164, le compte rendu de la même discussion d’après divers journaux,