472 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [46 novembre 1790.] occasionnés par le débordement de la Loire. Quatre arches du pont de Nevers ont été emportées et trois sont affaissées : !a communication de Paris à Lyon est interceptée. A ce moment nous avons cru, Monsieur, que le seul parti à prendre pour le départ des dépêches dont les courriers sont chargés était de faire transporter dans une barque les paquets renfermés dans la malle de Lyon, pour les renvoyer dans celle de Paris, et ceux de la malle de Paris pour les faire asser à Lyon par le courrier de Lyon qui attend l’autre bord. Nous vous prions, Monsieur, de prévenir l’Assemblée nationale que l’intérêt public exige que nous prenions les même précautions jusqu’à ce que nous ayons pourvu aux moyens de rendre la communication facile. Deux commissaires de la session générale sont occupés à inspecter les paquets de la malle de Paris qui a été submergée près de la Charité et qui, après 24 heures de retard, est enfin arrivée à sept heures du matin. « Les procès-verbaux des dommages causés au pont de Nevers seront adressés à l’Assemblée nationale quand le tout sera constaté. Nous craignons bien d’apprendre de nouvelles calamités, la crue du 13 novembre n’ayant jamais eu d’exemple. On nous assure que la plupart des marchandises qui étaient sur les ports ont été entraînées ; la Loire hier en était couverte. « Nous avons l’honneur d’être, etc. « Les administrateurs composant le comité du département de la Nièvre. » M. Salomon, député du Loiret, lit ensuite une lettre du district d’Orléans qui apprend que la pluie du 12 novembre a été si prodigieuse, qu’elle a emporté la chaussée sur plus de cent toises de longueur, tellement que le Val se trouve submergé. 74 barques sont continuellement occupées à aller sauver les habitants du Val qu’on transporte dans la ville. Les gardes nationales s’exposent très courageusement pour sauver les victimes, mais ils ont la douleur de n’espérer pas pouvoir les sauver toutes. Ce désastre est d’autant plus malheureux que, l’année dernière, pareil accident est déjà survenu dans l’Orléanais. Le district demande un secours de 20,000 livres. M. de Tracy donne des nouvelles tout aussi affligeantes du département de l’Ailier. La partie basse de la ville de Moulins a été entièrement inondée. L’eau est parvenue dans les maisons jusqu’à huit pieds de hauteur; sans les prompts secours, les soins et le zèle infatigable de la municipalité et des gardes nationales, beaucoup d’habitants eussent été victimes du double fléau de l’eau et de la famine. A la suite de ces communications, le décret suivant est rendu : « L’Assemblée nationale accorde provisoirement 30,000 livres à chacun des département de la Nièvre, du Loiret et de l’Ailier, pour être employées aux plus pressantes réparations des dégâts occasionnés parla crue subite des eaux dans ces départements, et pour secourir les malheureux qui eu ont le plus pressant besoin, à la charge, par les administrateurs, d’en rendre compte. Elle charge sou président de se retirer, le plus tôt possible par-devers le roi, pour le prier de donner les ordres nécessaires pour faire parvenir promptement ces secours à leur destination. » M. le Président lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHASSET. Séance du mardi 16 novembre 1790, au soir (1). La séance est ouverte par la lecture des adresses suivantes : Adresse des dragons du régiment de Noailles, en garnison à Carcassonne, qui expriment, dans les termes les plus nobles et les plus touchants, leur profond repentir des erreurs dans lesquelles ils se sont laissés entraîner. Ils annoncent qu’ils prouvent à leurs officiers, par mille témoignages de soumission, qu’ils sont encore dignes d’être commandés par eux. Ils rappellent, avec le plus vif empressement, un de leurs capitaines, qu’ils avaient eu l’audace d’exclure de leur corps, et il ne soupirent qu’après l’occasion de réparer leur égarement, en répandant pour lapatrie, pour ses dignes représentants, et pour le maintien de leurs sages décrets, jusqu’à la dernière goutte de leur sang. Adresse de la municipalité de la ville de Liège, qui exprime à l’Assemblée sa sensibilité profonde à l’occasion des désordres commis à Belfort par le régiment Royal-Liégeois : elle envoie un arrêté de l’assemblée des représentants de toutes les villes et communes du pays de Liège et comté de Looz, tenue le 8 du présent mois, par lequel elle déclare qu’elle n’a jamais eu de part à la formation du régiment dont le chef vient de souiller le nom ; que ce chef avait été choisi par l’évêque de Liège, qui n’avait consulté que son utilité particulière. Adresse des administrateurs du district de Casr telnaudary, qui sollicitent l’animadversion de l’Assemblée contre les émigrants. Adresse du sieur Vaudrey, citoyen de la commune de Spoy, district d’Issurtille, qui fait hommage à l'Assemblée de 250 exemplaires du prospectus de Télémaque en vers. Adresse des gardes nationales de ParteDav, qui ont lait célébrer un service solennel pour honorer la mémoire de leurs frères d’armes morts à Nancy. Adresse de félicitation, adhésion et dévouement des administrateurs du département de la Vienne, du district de Saint-Gheli et de celui de Saint-Affrique. Adresse et délibération de la section du Luxembourg, par laquelle elle supplie l’Assemblée de rendre, le plus promptement possible, un décret général sur le duel. Adresse de l’assemblée administrative du département de l’Ariège, qui rend compte à l’Assemblée nationale de ses premières opérations, et notamment du choix qu’elle a fait d’un receveur d’imposition : elle a fait une pétition à ce sujet. Adresse des habitants du Sénégal, qui supplient l’Assemblée de révoquer le privilège exclusif du Sénégal, et de leur accorder l’établisseinent d’un (1) Cette séance est incomplète au Moniteur . [16 novembre 1790.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 473 [Assemblée nationale.) conseil administratif et judiciaire. Ils renouvellent entre ses mains le serment civique. M. Boucher fait l’annonce d’un ouvrage de M. Buissard, d’Arras, membre de l’académie de cette ville, de celle de Dijon et de plusieurs autres, sur les poids et mesures. Le renvoi au comité d’agriculture et de commerce est demandé et décrété. M. Palasne-Champeaux demande une prolongation du délai accordé aux municipalités pour celles d’Arras et de Saint-Brieuc. Cette demande est renvoyée au comité d’aliénation. M. Defermon présente une adresse de la société des murins de Saint-Malo aux citoyens du département, embarqués sur t’escadre de Brest. Dans cette adresse, les marins de Saint-Malo, en rappelant à leurs frères les bienfaits de la Constitution, les invitent à concourir au maintien de l’ordre et de la subordination. Il est décrété qu’il en sera fait mention honorable au procès-verbal. M. l’abhé Orégoïre, membre du comité de vérification des pouvoirs, annonce qu’à la suite du décès de M. Margonne, député du bailliage du Perche, décédé, M. Etienne-Augustin Bourdeaux, son suppléant, se présente pour le remplacer : le comité ayant trouvé ses pouvoirs en règle, M. Bourdeaux est admis à la charge de prêter serment. M. Daugremont présente une adresse par laquelle il fait hommage à l’Assemblée de sa méthode pour l’éducation des jeunes gens. M. le Président répond en ces termes : « Monsieur, l’Assemblée nationale a mis au rang de ses obligations d’établir des bases générales sur l’éducation publique; ce grand moyen de régler les mœurs est de la plus haute importance. Les citoyens qui consacrent leurs veilles à en méditer le développement travaillent utilement pour leur pays. Vous venez offrir à l’Assemblée les premiers fruits de vos travaux; vous demandez qu’elle fasse vérifier vos expériences, elle prendra votre demande en considération, et elle vous permet d’assister à sa séance. » (On demande le renvoi de cette adresse au comité de Constitution.) (L’Assemblée prononce ce renvoi.) M. Weusel, fleuriste de la reine , présente une adresse, par laquelle il fait hommage à l’Assemblée d’un projet qu’il a conçu, pour l’établissement d’une manufacture de fleurs artificielles, qui occuperait utilement pour eux un grand nombre de femmes et d’enfants. M. le Président répond : « L’Assemblée nationale s’est déjà occupée des moyens de raviver le commerce et les arts, ainsi que de ceux de multiplier les travaux pour les citoyens qui sont sans fortune. Tous ceux qui voudront concourir à ses vues ne pourront que bien mériter de la patrie. Vous venez faire hommage à l’Assemblée d’une découverte aussi utile qu’agréable; vous avez pour objet la plus parfaite imitation de la nature. Ces vues seront appropriées aux arts du luxe, mais elles le seront aussi à la science de la botanique, à une science d’une étude aussi vaste et aussi longue; l’Assemblée prendra votre demande en considération; elle vous permet d’assister à sa séance. » (On demande le renvoi de cette adresse au comité d’agriculture et de commerce. Ce renvoi est décrété.) M. Coroller, secrétaire , lit ensuite une adresse de la ville de Lyon, qui informe l’Assemblée que plus de 300 citoyens patriotes de cette ville ont fait fabriquer des billets de caisse de 6 livres, pour la commodité des ouvriers et des pauvres. Ils supplient l’Assemblée d’autoriser les receveurs des deniers publics de les recevoir en payement. (On demande le renvoi de cette adresse au comité des finances. L’Assemblée le décrète.) M. Paul Haïra© demande le renvoi de l’adresse des habitants du Sénégal, dont il a été question plus haut, aux comités d’agriculture, de commerce et colonial réunis. Ce renvoi est prononcé. M. le Président annonce à l’Assemblée que le sieur Jabin a fait remettre aux archives nationales une partie de la collection des portraits de MM. les députés. M. le Président. Il vient de m’être adressé une dépêche du garde 'des sceaux, contenant des lettres par lesquelles M. Montmorin envoie : 1<> une lettre du prince de Deux-Ponts, qui se plaint d’avoir été imposé, pour les terres qu’il possède en France, à un taux exorbitant, d’avoir été taxé pour la contribution patriotique, et enfin de ce qu’on procède à l’établissement du nouvel ordre judiciaire sur ses terres; 2° la réponse du prince de Wirtemberg à la négociation que le roi a fait ouvrir avec lui, pour l’indemnité qui pourrait lui être due pour les droits qu’il possédait en France; 3° une lettre de réclamations de l’évêque de Bâle contre la suppression de plusieurs droits dont il jouissait ; 4° enfin, des instructions relatives à l’affaire d’Avignon. (L’Assemblée renvoie les deux premières lettres au comité ecclésiastique et la troisième aux comités des finances et féodal.) M. le Président fait lecture d’une lettre de M. le maire de Paris, dans laquelle il informe l’Assemblée que la municipalité a fait, le 15 de ce mois, trois adjudications des biens nationaux : la première, d’une maison rue Saint-Martin, près la grille, louée 2,418 livres, estimée 32,000 livres, adjugée 66,000 livres; la seconde, du chantier de la Fleur-de-Lys, quai Saint-Bernard, louée 4,200 livres, estimée 62,500 livres, adjugée 100,200 l i v . ; et la troisième, d’une maison, quai des Théatins, louée 5,000 livres, estimée 40,021 livres, adjugée 87,200 livres. M. Merlin. Le département du Nord, c’est-à-dire les provinces belges, sur la résistance duquel ont tant compté les ennemis de la Révolution, vient d’envoyer au comité d’aliénation un état des ventes des biens nationaux, très nombreuses et faites aussi très au-dessus du prix des estimations. M. l-avie. Je peux dire la même chose du département du Bas-Rhin. M. Yarii», au nom du comité des rapports. En 1767, le roi, voulant rendre à l’agriculture en-