592 (Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j JJ « Tridi (sic), 21 brumaire, l’an II de la Ré¬ publique, une et indivisible (J). « Tu es sans doute depuis longtemps inquiet sur mon sort, père tendre et chéri; mais ras-sures-toi, ton fils jouit toujours d’une santé par¬ faite quoi qu’il soit accablé de fatigues. Depuis un mois il couche au bivouac dans les haies de Maroilles, pays aux bons fromages; depuis un mois il est en face de l’ennemi qui occupe la forêt de Monnaie; le poste honorable qu’ü dé¬ fend, puisque le sort de Landrecies dépend du temps que le poste de Maroilles sera à la Répu¬ blique, l’engage et lui donne un nouveau zèle pour supporter les fatigues qu’il endure, car quoi de plus dur que d’être chaque jour au bel air dans une prairie, dans l’eau jusqu’à la cheville du pied; mais le bien de la patrie l’exige, il faut s’y conformer. Puissent mes fatigues n’être point vaines et puisse la liberté fixer à jamais malgré le despotisme, son séjour dans la France ! Tels sont et tels seront toujours les vœux que mon cœur adressera à l’Etre suprême, non pas à celui qu’un fanatique imposteur nous représentait sous un triple emblème, et ne formant cepen-dans qu’un seul quoiqu’il assurât qu’ils fussent trois. Il est temps que les préjugés et les vieilles erreurs cèdent la place à la vérité et à la raison. Il est temps que la divinité qu’on outrageait en osant la dépeindre sous mille formes différentes reçoive de l’homme, rendu à l’état primitif de nature un hommage pur, simple et le seul qui lui convienne. Qu’ils étaient audacieux ces hommes qui osaient concentrer dans un édifice do pierre la demeure du modérateur de l’univers, comme s’il pouvait en avoir une autre que le cœur de l’homme juste. Oui, c’est là que cet Etre suprême se plaît à habiter et à s’entretenir avec celui qui n’a point étouffé en lui ce flam¬ beau que la nature donne à chaque individu. O état de nature! (sic). Pourquoi les hommes t’ont-ils abandonné pour suivre mille prestiges et mille préjugés, toi seul pouvais les conduire au bonheur suprême et leur faire goûter cette félicité à laquelle va parvenir le Français régé¬ néré. Qu’il m’a été agréable de voir la Conven¬ tion saper d’une main hardie et forte le temple du fanatisme et élever sur ses ruines un Pan¬ théon à toutes les vertus civiles et sociales. Une telle conduite me rassure sur le sort de la Ré¬ publique et j’ose espérer que la philosophie et les lumières répandues à grands flots sur son sol feront ce que les armes ne pourraient achever; et quel que soit le sort de la guerre actuelle la liberté trouvera un asile sûr et stable au milieu des Français. « Adieu, père tendre, adieu, et crois que ton fils se fera toujours un devoir de t’aimer et de te chérir. « Aristide -François Quatresols, soldat républicain. « Embrasses pour moi celle qui daigna pren¬ dre soin en quelque partie de ma jeunesse et qui m’adopta pour son fils. « Sous peu le capitaine Taveau ira à Paris, il passera çar Charmentray où il verra le citoyen Bejot car il n’a reçu aucune nouvelle de la re¬ mise que tu avais fait faire à ce dernier pour ce que mon capitaine m’avait avancé. « Tesnier a dû recevoir mon certificat de vie. « Vive la République!» (1) Archives nationales, carton C 284, dossier 816. Le citoyen Frison, procureur de la commune de la Fèrevdistrict de Chauny, écrit à la Conven¬ tion nationale que dans cette commune le fana¬ tisme est anéanti, et que les prêtres se sont empressés d’abjurer leurs erreurs; quelques-uns ont fait remise de leurs pensions; les églises sont fermées et leur dépouille envoyée au district, qui la fait passer à la trésorerie nationale. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Compte rendu du Bulletin de la Convention (2). La commune de La Fère, département de l’Aisne, écrit qu’elle vient de terrasser le fana¬ tisme et de fermer toutes les églises, dont les dépouilles ont été envoyées au district pour les faire passer à la trésorerie nationale. La com¬ mune ne connaît plus d’autre culte que celui de la raison. Les ci-devant nobles sont arrêtés, et tous les sans-culottes ne forment plus qu’une même famille de républicains, qui vouent tous à l’exécration la horde des tyrans et des fédéralistes, et qui sont prêts à verser jusqu’à la dernière goutte de leur sang pour défendre la Constitution. Mention honorable. Les administrateurs du département de la Ven¬ dée écrivent que le rebelle la Douèpe-Biffardière, ci-devant noble, avant de tomber sous le glaive de la loi a confié un écrit qui indiquait des dépôts de numéraire, avec lequel il a été recouvré 59,000 livres en or, et une certaine quantité d’argenterie, qu’ils ont remis chez le payeur général. Mention honorable, insertion au ('Bulletin» (3). Suit la lettre des administrateurs du départe¬ ment de la Vendée (4). Les administrateurs du département de la Vendée, à la Convention nationale. Fontenay -le-Peuple, le 18 frimaire, l’an II de la République française, une et indivisible. « Citoyens représentants, « Un grand coupable, Ladouèpe-Biffardière, de la caste des ci-devant privilégiés, qui habi¬ tait la commune de Sainte-Gemme-des-Bruyèies, district de La Chataigneraye, est tombé sous le glaive de la loi. Avant de mourir, il a confié un écrit à son confesseur qui indiquait qu’il avait déposé un numéraire considérable à divers citoyens. Cet écrit nous ayant été remis, l’un de nous a été nommé pour aller recouvrer les fonds, et il est parvenu à faire remettre 59,000 li¬ vres en or, et une certaine quantité d’argen¬ terie. Le tout a été apporté hier soir à notre administration; de suite nous l’avons fait (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 287. (2) Second supplément au Bulletin de la Convention de la séance du 28 frimaire an II (mercredi 18 dé¬ cembre 1793). (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 287. (4) Archives nationales, carton C 284, dossier 816, [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. *J SSXwiiifâ 593 déposer chez le payeur général, et incessamment nous en ferons l’envoi à la trésorerie nationale. « Salut et fraternité. « J. -G. Gaixot, pour le président ; Jean-M. CoiTGNAUD, secrétaire général. » Le conseil général de la commune de Foix mande que le peuple de cette commune recon¬ naît maintenant que l’état républicain, qu’il chérit, est incompatible avec la superstition; qu’en conséquence ils font passer les signes du culte, montant à 56 livres trois quarts 2 onces d’argenterie, et à 40 livres demi-quart de galons d’or et d’argent. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre du conseil général de la commune de Foix (2). Le conseil général de la commune de Foix, en permanence, au Président de la Convention nationale. « Foix, ce 16 frimaire, an II de la Répu¬ blique. « Citoyen Président, « Le peuple ouvre enfin les yeux; après dix-huit siècles d’aveuglement, la raison, toujours enveloppée dans l’hypocrisie et l’imposture, commence à colorer de ses rayons éclatants la terre sacrée de la liberté. Le tyran dévoilé, ses attributs avec l’orgueil qui les environ¬ nait bannis à perpétuité, la vérité est plus puissante qu’eux, que la gente calotine plus funeste encore que toute leur puissance, avoue ingénument sa complicité, et qu’elle échappe par une bonne foi tardive au supplice qu’elle mérite, c’est bien son affaire. Mais l’intérêt et le bonheur du peuple consistent à se passer de cette branche cafarde de la plus monstrueuse coalition. Le peuple de Foix connaît mainte¬ nant que l’état républicain qu’il adore est incompatible avec la superstition, il nous charge de vous faire offrande de tous les attributs du luxe calotin, pour que vos mains habiles lui donnent une autre forme, une autre destina¬ tion; tous les signes extérieurs du culte catho¬ lique ont été par nous enlevés, sur l’invitation de notre Société populaire, tout le monde ap¬ plaudit à cette opération et nous charge de vous faire passer une caisse adressée à la Conven¬ tion nationale, contenant, savoir : 56 livres 3 /4 2 onces d’argenterie; « Galons en or ou en argent, 40 livres demi 1 /4 « Salut et fraternité. (Suivent 14 signatures). La commune de Ferney-Voltaire écrit que l’on ne jugera pas de son zèle et de son civisme par la modicité du don de l’argenterie qui était dans leur ci-devant église, que feu Voltaire avait dédiée à Dieu seul, mais que, pour suppléer à cette modicité, les citoyens ont fait un don (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 288. (2) Archives nationales, carton C 285, dossier 825. lre SÉRIE. T. LXXXI. de 1,269 livres en assignats, 6 médailles en argent, 2 paires de boucles d’argent et une petite pièce d’or. Elle annonce que leur curé a remis volon¬ tairement ses lettres de prêtrise, qui ont été brûlées. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre de la commune de Ferney-Vol¬ taire (2). « Fernay-Voltaire le 17 frimaire, an II de la République française une indivisible et démocratique, Liberté1 Égalité. « Citoyen Président, « La commune de Ferney-Voltaire, envoie aux représentants de la nation française le denier de la veuve; nous espérons que vous ne jugerez pas de notre zèle, de notre patriotisme, et de notre civisme, par la modicité d’argenterie qui était dans la ci-devant église de ce lieu. que feu Voltaire, fondateur de cette colonie, avait rebâtie et dédiée à Dieu seul, et qu’il ne s’était pas plu à enrichir. Pour suppléer à cette médiocrité, les citoyens d’ici ont fait un don de 1,269 livres en assignats, 6 médailles en ar¬ gent de plusieurs grandeurs, 2 paires de boucles d’argent, et une petite pièce d’or, que nous joignons ici. « Le curé de Femey a remis volontairement en nos mains, ses lettres de prêtrise, avec prière de les brûler, ce que nous avons fait avant-hier dans notre brave Société desans-culottes; nous avons fermé l’ancienne église, ôté les croix, etc. L’amour de la patrie, la soumission aux décrets des représentants du peuple, et la morale, voilà la religion qui sera prêchée dans la colonie fon¬ dée par celui qui, un des premiers, osa dire : « Nos prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple [pense; « Notre crédulité fait leur seule science. Vive la nation, vive la République, vive la Montagne l (Suivent 8 signatures.) Les corps administratifs de la commune de Beaucaire écrivent qu’en sortant des cachots de la tyrannie, leurs premiers regards se tour¬ nent vers la Montagne de la Convention natio¬ nale, qui a écrasé les auteurs de leurs tourments et les auteurs des complots criminels qui vou¬ laient anéantir la souveraineté du peuple fran¬ çais; donnent leur adhésion aux décrets émanés de la Convention nationale depuis le 31 mai, et invitent les représentants à rester sur le sommet de la Montagne jusqu’à ce que les orages conju¬ rés contre elle aient été entièrement dissipés. Insertion au « Bulletin » (3). Suit V adresse des corps administratifs de la commune de Beaucaire (4). Représentants du peuple, « Nous sortons des cachots dé la tyrannie, et nos premiers regards se tournent vers la-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 288. (2) Archives nationales, carton G 284, dossier 816. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 288. (4) Archives nationales, carton C 285, dossier 825. 38