[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j 99 octoSmS ' 5 Mention honorable et insertion au « Bulle¬ tin » (1). Suit la lettre d'envoi (2). « Perpignan, 10 octobre, l’an II de la République française une et indi¬ visible. « Citoyen Président, « J’adresse à la Convention nationale une pro¬ clamation du conseil du département des Pyré¬ nées-Orientales à ses administrés nouvellement rendus à la République et à la liberté. Puisse sa lecture lui donner juste mesure des principes et des sentiments des administrateurs. Puisse-t-elle surtout intéresser sa sensibilité au sort des administrés ! « L’administrateur Adèle et le citoyen dévoué. « Jean-Joseph-Etienne Sérane. » Proclamation (3). Les administrateurs du département des Pyrénées-Orientales, à leurs concitoyens, Citoyens, frères et amis, Vous qui avez été ûdèles à la liberté; vous qui avez souffert si longtemps pour sa cause, qui avez combattu si opiniâtrément pour sa dé¬ fense, qui triomphez enfin avec elle, recevez nos f élicitations ; vous avez été délivrés du joug du despotisme, mais vous avez été en même temps soustraits aux ûlets de la trahison; recevez aussi nos conseils; écoutez-nous, vous recon¬ naissez sans doute la voix de vos administrateurs ûdèles. Braves patriotes qui n’avez pas lâchement habité nos campagnes envahies, qui n’avez pas indignement déserté nos foyers menacés, nous ne nous sommes pas montrés indignes de vous; nous avons lutté avec vous de courage; vous attendez encore de nous l’exemple de la constance, nous vous le promettons; et si, après tant d’efforts, la liberté est votre juste dédommagement, votre estime sera notre ré¬ compense nécessaire. Allons, enfants de la patrie! marchons ensemble au but qu’elle nous a mar¬ qué; unissons-nos forces et doublons nos efforts pour elle : nous serons dans le calme heureux de notre réunion; et, s’il le faut encore, nous l’op¬ poserons à d’autres tempêtes; c’est à ce prix qu’un jour nous entendrons dire de nous : Eux aussi, ils ont bien mérité de la patrie. Quel miracle de liberté vient tout à coup d’at-franchir le département ! Tu es donc délivré de la présence de cette horde étrangère, peuple des districts de Prades et de Perpignan ! Tu peux donc relever ton front indépendant, et faire entendre ta voix souveraine ! Tu ne vois plus tes anciens oppresseurs, les nobles et les prêtres, venir de nouveau pomper le fruit de tes sueurs, commander à ta pensée et à tous tes mouvements; tu es libre une seconde fois; eon-nais-en tout le bienfait. Peuple du Conûent, tu n’entends plus le général d’un despote te parler de modération, et te grever de contributions arbi¬ traires; habitants d’Eus, ses satellites ne vien¬ nent plus vous parler de justice, et en même (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 24, p. 183. (2) Archives nationales, carton G 278, dossier 748. (3) Archives nationales, carton G 278, dossier 748, temps incendier vos maisons, enchaîner vos vieillards et outrager vos femmes; peuples du Ribéral, ses prédicateurs fallacieux ont cessé de t’entretenir d’un dieu de paix, pour rallumer de longues haines, pour faire proscrire des conci¬ toyens et enlever leurs biens et leurs familles; habitants de Corneilla, de Rivesaltes, etc., il n’est plus là, ce guide de nos transfuges, qui avait miné son pays, et qui a voulu ûnir par le dévaster ; ce traître commissionné par sa majesté catholique, rappelant les villageois dans leurs demeures, sous peine de la vie, aûn de les enchaî¬ ner comme des bêtes de somme, sous le bâton, à des travaux qui devaient tourner contre eux-mêmes Peuple du département entier, tu respires et tu sens que tu t’appartiens; tu ne te laisseras plus intimider ou séduire par les jactances de ces ûers esclaves de maîtres si lâches qui voulaient rendre à la France la tyrannie royale qu’ils en avaient jadis reçue; de ces con¬ quérants d'un jour, qui se vantaient de t’avoir enchaîné sans retour, et aux émigrés et aux Espagnols, c’est-à-dire à tous les féaux ensem¬ ble. Ils s’appelaient déjà tes consuls, tes com¬ mandants, et te faisaient les parts du despotisme: quelques jours se sont écoulés, et le despotisme a fui ou est tombé avec eux; les ruines de leurs camps, les squelettes épars de leurs soldats, voilà son cadavre; il ne régnera certainement plus ici; s’il doit se survivre encore quelque temps, que ce soit au delà de ces monts, rem¬ parts immuables de la liberté Dans cette en¬ ceinte est le peuple français, indépendant, ré-pubhcain. Peuple, toi seul y resteras; et les flots de tes ennemis, semblables à la f amme dé¬ vorante qui épure ce qu’elle atteint, mais qui consume ce qui la nourrit, tes ennemis jonchant tes fions de l’or du Mexique et des ossements de tes célèbres dévastateurs : Us n'ont fait que passer et ne sont déjà plus Plus d’humiliation, plus de persécution pour le patriotisme, dans le département des Pyré¬ nées-Orientales. La trahison et la lâcheté ont épuisé contre nous tous leurs moyens pendant quatre mois ; la victoire commence pour nous, et la force nous restera. Doux espoir, chers conci¬ toyens, qu’il nous appartient aussi d’accomplir ! Nous le’pouvons. L’armée qui défend l’habitant, et l’habitant qui la soutient doivent se seconder de toutes les manières. Vous, cultivateurs et marchands, quelques sacrifices vous coûteraient-ils pour nourrir ou vêtir celui qui conserve vos propriétés au prix de son sang? Vous, journa¬ liers, artisans, refuseriez-vous vos bras aux travaux qui doivent servir à défendre vos frères, les soldats? Classe nourricière de lajRépublique, donne partout cours au papier national; songe que le gage en est cette même terre que tu tou¬ ches; qu’il se convertira pour toi en superbes domaines, et qu’il te doit être aussi précieux que l’or que tu recevais avec l’esclavage et la dé¬ vastation. Écoles de liberté et d’égalité, foyers de patriotisme et de philosophie, pour qui il ne doit plus être de vains combats d’opinion, de¬ vant l’étendard de l’inquisition, réveillez-vous, sociétés populaires du département, et saisissez-vous de cette Constitution républicaine qui doit vous servir à repousser le code de sang de la royauté, de la noblesse et de la superstition? Soldats de votre pays, miquelets, n’imitez pas ses barbares ennemis; défendez-le et ne le ra, vagez pas. Et toi, jeunesse de nos campagnes* hâte-toi de te former en bataillons, et de t’offrir 6 [Convention nation�] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j H aussi aux drapeaux de la liberté. Officiers muni-, eipaUx, juges de paix, ne soyez pas les déserteurs des communes qui vous avaient nommés leurs chefs; c’est maintenant qu’il s’agit pour nous de protéger ceux dont nous avions recherché la confiance. Cantons qui aviez été envahis, abjurez des serments forcés ; les tyrans ne sont plus là; mais ce sont vos amis et vos frères qui viennent à vous : vos administrateurs doivent rechercher les mauvais citoyens, auteurs de tant de calamités, mais c’est pour venger et consoler les hons. O ! vous tous, nos administrés, hâtez-vous d’accueilhr, comme par le passé, les décrets de la Convention nationale, les arrêtés des re¬ présentants du peuple et les décisions de vos magistrats ; et nous vous garantissons la pro¬ tection de la loi, la bienfaisance de la Répu¬ blique et les consolations de la fraternité. Ainsi, nos administrés auront été rendus à la France; d’autres lui ont été, ici même, déjà con¬ quis, et la liberté aura assuré et agrandi son dépar¬ tement. Républicains régénérés des Pyrénées-Orien¬ tales, nous avons dû vous déclarer ce que nous attendions de vous," après ce temps d’épreuves; sans doute, qu’il est aussi des obligations que vous nous imposez à votre tour, et nous vous entendons. Depuis l’envahissement de notre territoire, nous avions dû tourner tous nos efforts vers le but de sa libération; nous lui avions subordonné nos autres pensées et nos vues; maintenant elles doivent tendre à effacer les traces de ses malheurs. Les plaies de la guerre découvertes, e’est à l’Administration à les cica¬ triser; et les administrateurs sont en même temps, dans oette circonstance, les défenseurs et les consolateurs de leurs concitoyens, et leurs sur¬ veillants : telle sera notre marche, et telle est la direction que le cours de nos travaux ordinaires, qui avait été comme suspendu, doit; maintenant recevoir : soulager les familles privées de leurs soutiens et de leurs ressources, assurer la subsis¬ tance des cantons affamés par l’ennemi, appeler les indemnités et les dégrèvements pour les pertes essuyées dans le service de la République, consoler et encourager notre intéressante agri¬ culture, ramener l’industrie et le commerce fu¬ gitifs, ranimer surtout le flambeau sacré du civisme et substituer en même temps le cours paisible de l’union à l’éclat de tant de haines èt de violenoes; et, à cet effet, nous entourer de tout 1© zèle des magistratures populaires et des bons citoyens, et envoyer partout des commis¬ saires qui rétablissent l’ordre, les propriétés, les cultures, les communications et le règne pai¬ sible des lois; voilà notre tâche, nous l’avons mesurée; nous pouvons la remplir. Le temps attachera notre administration à une grande époque pour ce département. Nous nous mon¬ trons à notre poste aveG assurance; nous l’occu¬ perons désormais sans amertume, Les jours de deuil sont effacés; l’aurore du bonheur luit de¬ vant nous; les ombres du passé emportent toutes nos peines. Etres intéressants, patriotes réfugiés, vous allez rentrer enfin dans vos foyers, dans vos champs, au sein de vos familles; qu’elle sera pure et glorieuse votre jouissance ! Eh bien, nous aussi, nous avions été chassés du domaine de nos travaux et de nos sollicitudes habituelles. Le bien que nous faisions était notre propriété; notre famille, c’étaient nos administrés. Nous allons rentrer avec vous dans tous nos biens ; nous allons cultiver de nouveau et féconder en¬ semble ce beau domaine de la République, que les Espagnols aimaient à appeler déjà le jardin de V Espagne, et ce sera en nous souvenant tou¬ jours, nous Français, qu’il est devenu le tombeau du despotisme. O vous, qui êtes nés dans ces belles contrées, vous le voyez, les esclaves et les hommes libres ne seront pas longtemps à se les disputer. O ! vous, qui avez éprouvé en si peu de temps toute la différence de la liberté et de l’esclavage, vous savez maintenant ce que vous devez à cette chère patrie, qui vous a deux fois affranchis ! nous venons de renouveler aussi en votre présence, nos engagements pour elle. Unissons-nous, en¬ fants de la Révolution, zélateurs de la liberté et amis de votre pays; serrons-nous comme des frères rendus les uns aux autres, autour de cette mère commune, vengée enfin de tant d’outrages; que par les mains triomphantes des patriotes, l’arbre de la liberté, qui sera celui de l’abondance et de l’union, se replante et refleurisse ici par¬ tout de ses propres cendres; que ces cendres inu¬ tiles, monument léger, aient seules marqué le passage rapide de l’Espagne sur notre territoire. Et, quant aux émigrés, cette écume du monde, qu’elle passe à jamais, et fasse seulement diré après nous, à nos ennemis jadis nos alliés : Les émigrés ont failli nous perdre. Arrêté en conseil du département des Pyré¬ nées-Orientales, ce Dr octobre 1793, l’an U do la République française, une et indivisible. Signé : J.-J.-E. Eérane, président; P. Estèvb, secrétaire général. Le directoire du département de la Charente* Inférieure invite, par une adresse aussi courte qu’énergique, la Convention nationale à rester à son poste. Mention honorahle et insertion aq « Rulle* tin » (1), Suit le texte de Vadresse (2). Le directoire du département de la Charente-Inférieure, 4 |a Convention nationale. « Saintes, le 2e jour du 2e mois do l’an II do la République une et indivisible. « Changer de pilote, lorsque le vaisseau est agité par la tempête, c’est l’exposer � une perte certaine. Représentants du peuple, restez à votre poste jusqu’à la fin de l’orage, le salut de la patrie le commande. « Ardouix, vice-président; P. -liée. S a vart; Barthélémy ; Le valu ois ; Beraijd ; B ouju ; Emond, secrétaire général. » Le ministre de la guerre envoie un assignat de 50 livres, que lui a adressé le citoyen Dulphé, capitaine au 6e régiment dHnfanterie, et membre de la Société populaire de Sffetz. Ce citoyen s’en* gage à faire le même don tous les deux mois, tant que durera la guerre. Bïention honorable et insertion an t( Bulle* tin » (3). (1) Procès-verbaux de ta Convention , t. 24, p. 1�3. (2) Archives nationales, carton G 278, dossier 748. (3) PfQçès-mrbaux de la CmomtiQnf 24, p, J 84.