AKCIîl VES PARLEMENTAIRES. (Il a o ' ! t 17-9. 307 |Ass<-mbI('e n Uiunale.j genre qui existaient entre les villes de Lyon, de Marseille et l’I'alie, et dont les Anglais demandaient depuis longtemps à jouir. M. Camus. Ces vues mercantiles et fausses ne doivent pas influer sur les principes d’une matière qui est d’un ordre plus important; passant ensuite aux déports, je ferai remarquer que cet usage qui consiste à percevoir les fruits d’une année des cures vacantes en faveur de l’évêque ou de l’archidiacre, est plus abusif en Normandie que partout ailleurs. Dans la plupart des can-tous de celte province, les curés gagnent la totalité des fruits de l’année la veille de Pâques, de manière que s’ils meurent après, le successeur n’ayant rien’à recevoir, ne dessert pas la cure; les héritiers la font desservir : vient ensuite l’année de déport pour l’archidiacre ; on adjuge au rabais la desserte; souvent un moine, qui veut sortir du cloître, écarte tous les concurrents par l’offre du prix le moins considérable. A Paris, le déport n’a pas lieu sur toutes les vacances qui arrivent pendant l’année, mais sur celles qui arrivent depuis le mercredi des cendres jusqu’à la Trinité. Il faut convenir cependant que dans plusieurs diocèses même de la Normandie, dans le diocèse du Mans et celui de Paris, le désintéressement des prélats qui les gouvernent et la véritable idée qu’ils ont de leurs devoirs, diminuent l’abus de la perception des déports; mais ces événements heureux ne sont qu’accidentels et l’abus est dans la chose même ; il faut donc supprimer les déports, mais avec cette réserve de pourvoir à la dotation des archidiacres qui n’en ontd’autre que ce droit. Il est des archidiacres qui remplissent un ministère utile, celui de visiter annuellement les paroisses, ce qu’ils ne pourraient faire sans dotation. Il est encore des droits de ce genre, tels que le droit de dépouille, de cotte-morte, de meilleur animal, de celui dcvacat dans plusieurs diocèses des provinces méridionales, et autres droits de pareille nature, qui, sous différents noms, ont lieu en divers diocèses, en faveur des évêques, archidiacres, chapitres et églises. Dans quelques-uns, l’archidiacre ou l’archiprêtre prennent après la mort du curé son bréviaire, son bonnet carré, son cheval ou sa vache. On a vu à Paris un procès assez singulier sur ce sujet. Un curé de Saint-Eustache laissa un carrosse et deux chevaux ; l’archidiacre voulut s’en emparer. Les héritiers le refusaient, parce qu’ils soutenaient que l’archidiacre n’avait droit qu’àla monture du curé et qu’un carrosse n’était pas une monture. On agita donc sérieusement la différence qu’il pouvait y avoir à être porté par un cheval ou traîné par deux chevaux, et de graves audiences furent employées à entendre une si savante discussion. « Il faut donc terminer de pareilles contestations et tarir dans son principe la source de toutes ces perceptions injustes. » Plusieurs membres présentent encore des observations sur l’article 12. Cet article est ensuite adopté. Les articles 13 et 19 sont adoptés sans grande discussion, et le décret est rendu dans les termes suivants: DÉCRET RELATIF A L ABOLITION DES PRIVILEGES. « Art, 1er. L’Assemblée nationale détruit entièrement le régime féodal. Elle décrète que, dans les droits et devoirs, Lan L féodaux que censuels, ceux qui tiennent à la main-morte réelle ou personnelle, et a la servitude personnelle, et ceux qui les représentent, sont abolis sans indemnité; tous les autres sont déclarés ra-clietables, et le prix et le mode du rachat seront lixés par l’Assemblée nationale. Ceux desdits droits qui ne sont point supprimés par ce décret continueront néanmoins a être perçus jusqu’au remboursement. «Art. 2. Le droit exclusif des fuies et colombiers est aboli. « Les pigeons seront enfermés aux époques fixées par les communautés ; durant lequel temps, ils seront regardés comme gibier, et chacun aura le droit de les tuer sur son terrain. «Art. 3. Le droit exclusif delà chasse etdesgarennes ou vertes est pareillement aboli, et tout propriétaire a le droit de détruire et faire détruire, seulement sur ses possessions, toute espèce de gibier, sauf à se conformer aux lois de police qui pourront être faites relativement à la sûreté publique. «Toutes capitaineries même royales, et toute réserve de chasse, sous quelque dénomination que ce soit, sont pareillement abolies; et il sera pourvu, par des moyens compatibles avec le respect dû aux propriétés et à la liberté, à la conservation des plaisirs personnels du lloi. « M. le président est chargé de demander au Roi le rappel des galériens et des bannis pour simple fait de chasse, l’élargissement des prisonniers actuellement détenus, et l’abolition des procédures existantes à cet égard. «Art. 4. Toutes les justices seigueuriales sont supprimées sans aucune indemnité, et néanmoins les officiers de ces justices continueront leurs fonctions jusqu’à ce qu’il ait été pourvu par l’Assemblée nationale à l’établissement d’un nouvel ordre judiciaire. « Art. 5. Les dîmes de toute nature, et les redevances qui en tiennent lieu, sous quelque dénomination qu’elles soient, connues et perçues, même par abonnement, possédées par les corps séculiers et réguliers, par les bé-nélieiers, les fabriques, et tous gens de main-morte, même par l’ordre de Malte, et autres ordres religieux et militaires, même celles qui auraient été abandonnées à des laïques, en remplacement et pour option de portions congrues, sont abolies, sauf a aviser aux moyens de subvenir d’une autre manière à la dépense du culte divin, à l’entretien'des ministres des autels, au soulagement des pauvres, aux réparations et reconstructions des églises, et presbytères, et à tous les établissements, séminaires, écoles, collèges, hôpitaux, communautés et autres, à l’entretien desquels elles sont actuellement affectées. « Et cependant, jusqu’à ce qu’il y ait été pourvu, et que les anciens possesseurs soient entrés en jouissance de leur remplacement, l’Assemblée nationale ordonne que lesdiles dîmes continueront d'être perçues suivant les lois et en la manière accoutumée. « Quant aux autresdîmes, de quelque nature qu’elles soient, elles seront rachetables de la manière qui sera réglée par l’Assemblée; et jusqu’au règlement à faire à ce sujet, l’Assemblée nationale ordonne que la perception en sera aussi continuée. «Art. 6. Toutes les rentes foncières perpétuelles, soit en nature, soit en argent, de quelque espèce qu’elles soient, quelle que soit leur origine, à quelques personnes quelles soient dues, gens de main-morte, domanistes, apanagistes, ordre de Malte, seront rachetables; les champarts de toute espèce, et sous toutes dénominations, le seront pareillement, au taux qui sera fixé par l’Assemblée. Défenses seront faites de plus à l’avenir créer aucune redevance non remboursable. « Art. 7. La vénalité des offices dejudicature et de municipalité est supprimée dès cet instant. La justice sera rendue gratuitement. Et néanmoins les officiers pourvus de ces offices continueront d’exercer leurs fonctions et d’en percevoir l£s émoluments jusqu’à ce qu’il ait été pourvu par l’Assemblée aux moyens de leur procurer leur remboursement. « Art. 8. Les droits casuels des curés de campagne sont supprimés, et cesseront d’être payés aussitôt qu’il aura été pourvu à l’augmentation des portions congrues et à la pension des vicaires, et il sera fait un règlement pour fixer le sort de curés des villes. « Art. 9. Les privilèges pécuniaires, personnels ou réels, en matière de subsides, sont abolis à jamais. La per- 398 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [12 août 17S9.J ception se fera sur tous les citoyens et sur tous les biens, de la même manière et de la même forme : et il va être avisé aux moyens d'effectuer le payement proportionnel de toutes les contributions, même pour les six derniers mois de l’année d’imposition courante. «Art. 10. Une constitution nationale et la liberté publique étant plus avantageuses aux provinces que les privilèges dont quelques-unes jouissaient, et dont le sacrifice est nécessaire à l’union intime de toutes les parties de l’empire, il est déclaré que tous les privilèges particuliers des provinces, principautés, pays, cantons, villes et communautés d’habitants, soit pécuniaires, soit de toute autre nature, sont abolis sans retour, et demeureront confondus dans le droit commun de tous les Français. « Art. 11. Tous les citoyens, sans distinction de naissance, pourront être admis à tous les emplois et dignités ecclésiastiques, civiles et militaires, et nulle profession utile n’emportera dérogeance. a Art. 12. A l'avenir il ne sera envoyé en cour de Rome, en la vice-légation d’Avignon, en la nonciature de Lucerne, aucuns deniers pour annales ou pour quel-ue autre cause que ce soit; mais les diocésains s’a-resseront à leurs évêques pour toutes les provisions de bénéfices et dispenses, lesquelles seront accordées gratuitement, nonobstant toutes réserves, expectatives et partages de mois, toutes les églises de France devant jouir de la même liberté. « Art.l3.Lesdéports, droits decotte-morte, dépouilles, vacal, droits censaux, deniers de Saint-Pierre, et autres du même genre établis en faveur des évêques, archidiacres, archiprêtres, chapitres, curés primitifs et tous autres, sous quelque nom que ce soit, sont abolis, sauf à pourvoir, ainsi qu’il appartiendra, à la dotation des archidiaconés et des archiprêtres qui ne seraient pas suffisamment dotés. «Art. 14. La pluralité desbénéfices n’aura plus lieu à l’avenir, lorsque les revenus du bénéfice ou des bénéfices dont on sera titulaire excéderont la somme de 3,000 livres. Il ne sera pas permis non plus de posséder lusieurs pensions sur bénéfices, ou une pension et un énéfice, si le produit des objets de ce genre que l’on possède déjà excède la même somme de 3,000 livres. « Art. 15. Sur le compte qui sera rendu à l’Assemblée nationale de l’état des pensions, grâces et traitements, elle s’occupera, de concert avec le Roi, de la suppression de celles qui seraient excessives, sauf à déterminer à l’avenir une somme dont le Roi pourra disposer pour cet objet. «Art. 16. L’Assemblée nationale décrète qu’en mémoire des grandes et importantes délibérations qui viennent d’être prises pour le bonheur de la France, une médaille sera frappée, et qu’il sera chanté en actions de grâces un Te üearn daus toutes les paroisses et églises du royaume. « Art. 17. L’Assemblée nationale proclame solennellement le Roi Louis XVI Restaurateur de la liberté française. « Art. 18. L’Assemblée nationale se rendra en corps auprès du Roi, pour présenter à Sa Majesté l’arrêté quelle vient de prendre, lui porter l’hommage de sa plus respectueuse reconnaissance, et la supplier de permettre que le Te Deum soit chanté dans sa chapelle, et d’y assister elle-même. « L’Assemblée nationale s’occupera, immédiatement après la constitution, de la rédaction des lois nécessaires pour le développement des principes qu’elle a fixés par le présent arrêté, qui sera incessamment envoyé par MM. les députés dans toutes les provinces, avec le décret du 10 de ce mois, pour y être imprimé, publié, même au prône des p croisses, et affiché partout où besoin sera. » On fait lecture d’une proclamation faite au nom du Roi, par laquelle Sa Majesté annonce la suppression de toutes les capitaineries, et mande aux officiers et gardes de continuer leurs fonctions pour le fait seulement de la conservation des moissons et récoltes. Cette proclamation est conçue dans les termes suivants : « Sa Majesté, toujours disposée à tous les sacrifices que l’intérêt de ses sujets peut demander, même lorsqu’ils sont relatifs à ses plaisirs personnels, veut et entend que toutes les capitaineries soient supprimées ; mais en même temps Sa Majesté doit, pour le maintien de l’ordre et la conservation des propriétés, prendre des mesures efficaces, afin que, sous prétexte de chasse, personne ne puisse porter atteinte au droit d’autrui. A ces causes le Roi fait inhibitions et défenses à tous et à chacun de s’introduire dans les plaines ncn moissonnées, sous prétexte de chasse, et d’y commettre aucun dégât sous peine d’être puni suivant la rigueur des ordonnances. « Mande et ordonne à tous les officiers et gardes de ses capitaineries de continuer leurs fonctions pour le fait seulement de la conservation des moissons et récoltes ; enjoint aux maréchaussées de s’y réunir, aux milices bourgoises d’y veiller, et aux troupes réglées de prêter main-forte sur la réquisition des officiers de police. Et sera la présente ordonnance imprimée et affichée partout ou besoin sera , à ce qu’aucun n’en ignore. « Fait à Versailles, le 10 août mil sept cent quatre-vingt-neuf. « Signé : LOUIS. Plus bas, le comte de Saint-Pjuest. » En discutant l’article des pensions il a été observé qu’un ancien officier, M. de üarbonne, a offert dès le mois de novembre dernier, de faire remise au Trésor royal de 34,500 livres d’arrérages de pensions, et qu’il a fait le sacrifice de tous les droits qu’il percevrait dans sa terre même des droits honorifiques. Ensuite on fait la lecture d’une lettre datée de Lamotte-Tilly, le 8 de ce mois, écrite par M. Terray, qui fait remise d’une pension de 4,000 livres dont il jouit depuis trois ans, et qui lui avait été accordée après treize années employées à des fonctions publiques; il déclare que dans ce moment, l’avoir méritée et pouvoir en offrir l’extinction, était d’un prix infiniment au-dessus de ses services. (On applaudit .) MM. de Bonneville et de Chambray, députés de la noblesse du bailliage d'Evreux , ont présenté une déclaration, signé d’eux, portant qu’ils ont l’honneur de remettre sur le bureau les nouveaux pouvoirs qui leur ont été donnés par leurs commettants le 14 juillet dernier et qu’ils adhèrent. selon l’étendue de ces pouvoirs, à l’arrêlé pris par l’Assemblée nationale le 4 de ce mois; qii’en conséquence, ils ont envoyé ledit arrêté à leurs commettants. M. le Président a indiqué la séance à demain neuf heures du matin. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHAPELIER. Séance du mercredi 12 août 1789 (1). M. le Président annonce à l’Assemblée qu’il n’a pu hier être admis auprès du Roi, mais qu’il doit obtenir audience aujourd’hui à deux heures et demie. Il met ensuite eu délibération si on ira (1) Celle séance est incomplète au Moniteur.