(États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Forcalquier.] 365 mutation des immeubles , et Ceux établis sur les productions de première nécessité seront supprimés ou simplifiés. Art. 6. Que tous les droits qui appartiennent à des particuliers ou itdes corps autres que ceux qui sont librement établis par les provinces ou communautés*. et qui portent sur le commestible, et notamment sur les blés et grains, seront supprimés, sauf le remboursement, s’il y échet, à dire d’experts, et successivement tous les droits de péage et pulvérage, sauf aussi l’indemnité au propriétaire. Art. 7. Que l’impôt ou les impôts à établir soient établis de manière que les commerçants et les capitalistes n’en soient point exempts. Art. 8. Que l’état des pensions sera vérifié par une commission, et qu’à l’avenir le montant des pensions faites par l’Etat sera invariablement déterminé. Art. 9. Qu’il sera dressé un état des sommes affectées à chaque département. INSTRUCTIONS PARTICULIÈRES POUR LES DÉPUTÉS DE LA NOBLESSE DE PROVENCE. Les députés demanderont Instamment que les trois ordres de la Provence soient incessamment assemblés pour réformer nos Etats et les rendre véritablement représentatifs de la nation; ils représenteront même que ce n’a été que par obéissance pour les ordres du Roi, obéissance dont la noblesse doit donner l’exemple, et pour ne pas retarder les Etats généraux, que nous n’avons pas réclamé contre la convocation par sénéchaussée, qui sépare une nation unique et individuelle, et en conséquence, ils solliciteront une assemblée générale des trois ordres, meme pendant la tenue des Etats généraux, ou du moins immédiatement après. Les députés soutiendront les pactes de notre réunion a la couronne, qui, ayant été accordés, consentis et sanctionnés dans une assemblée générale des trois ordres, ne peuvent être modifiés que dans une pareille assemblée. En conséquence de ces pactes, les subsides consentis par les Etats généraux ne pourront être levés en Provence qu’après le consentement de la nation provençale, et ils seront payés dans la forme que la nation provençale avisera. * Les droits et augmentations sur le sel seront supprimés comme contraires à notre droit et destructifs de la province, dont le sol aride ne peut se passer de bestiaux qui ne subsistent en Provence que par le moyen du sel ; ses fontaines salées seront rouvertes et le sel rendu absolument marchand. Suppression des droits sur les cuirs, destructifs de nos fabriques. Suppression de la milice, établissement d’un corps de troupes nationales et résidant, lequel sera payé par un impôt également réparti. Les évêques bénéficiers et officiers de justices seront Provençaux, d’après les pactes de réuuion, La t'olice appartenant aux municipalités sera par elle, exercée sans qu’on puisse les y troubler. L’établissement de juridictions consulaires dans les principales villes de la Provence. Et attendu l’heure tarde M. le président a renvoyé la séance à demain 2 avril, à trois heures de relevée. Et advenu ledit jour et heure, les membres susdits du susdit ordre se sont rendus à la présente Chambre, et après avoir mûrement examiné le verbal, doléances ét instructions ci-dessus, et les avoir unanimement approuvés et ratifiés dans toutes les parties , ladite Chambre, toujours en conformité desdits règlements et ordonnances, procédant à la nomination de six de ses députés, a unanimement délibéré de nommerM. Jacques de Lombard, seigneur de Château-Arnould, M. Jean-Etienne Lolivier de Bone, M. François-Charles de Burle, lieutenant général en ! la sénéchaussée de cette ville, M. Jean-Joseph de Castagny, ancien capitaine d’infanterie, chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis, M. Joseph-Honoré de Richaud de Lervoules, officier d’infanterie, M. Pierre-Honoré de Bérard de Saint-Denis, capitaine d’infanterie, et de suite il a été nommé en remplacement M. Jean-Joseph-Laurent de Gour-bert fils, M. Casemière Lolivier de Bone, lieutenant de vaisseau, et M. J.-H. Charles de Boniface deFonteta, officier de cavalerie, lesquels fiéputés ont de leur part promis de se conformer aux instructions tant générales que particulières conter nues dans le présent procès-verbal, et ont signé avec tous les membres dudit ordre, et le greffier; ensuite est écrit à l’original. Le présent contenant dix-huit pages, la présente comprise, et avant la signature un de Messieurs aurait dit, qu’il serait convenable de communiquer, tant les doléances que les instructions ci-dessus, à Messieurs du clergé et du tiers-état ; en conséquence; l’ordre aurait député MM. de Bone et de Bérard, pour remplir cet objet, et revenus, ils auraient rapporté que leur commission avait été accueillie avec reconnaissance par Messieurs du clergé et Messieurs du tiers-état, qui, de leur côté, auraient envoyé une députation à la noblesse pour lui témoigner leur sensibilité, et Messieurs du clergé auraient de leur part communiqué leur cahier de doléances. Signé à l’original de Bernard Bayon, Burle d’Aujarde, Domerau, Gombert, de Bernard, Suzac, le chevalier de Servan, J. -Lombard de Château-Arnould, de Tourneau. Casimir de Bonnayy Laides de Bonne, de Bonne, Ventavon. Castagny, Gombert fils, d’Eparron, Bérard de Saint-Denis, de Boniface Fonteta, Reybaud, greffier. _ Le présent cahier de doléances et instructions de l’ordre de la noblesse, contenant dix-huit pages, la présente comprise, a été paragraphe .par nous, lieutenant général, ne varietur , à Sisteron, le 3 avril 1789. Signé de Burle. CAHIER Des remontrances et doléances du clergé de la vallée de Barcelonnette \l). Le clergé de Barcelonnette, assemblé cejour-d’hui 31 mars 1789, par-devant M. le préfet de cette vallée, après avoir prêté serment, conformément au règlement donné par le Roi pour les Etats du comté de Provence, composé de vingt curés, leurs vicaires et quelques bénéficiers simples, obligés pour se substanter de partager la médiocre Fortune de leurs familles, remontrent : 1° Qu’ils sont obligés de ne pouvoir venir au secours de l’Etat autant qu’ils le souhaiteraient, mais qu’ils consentent que leur peu de fonds soient assujettis aux impositions que Sa Majesté jugera nécessaires au bien de l’Etat. 2° Que les prêtres de la vallée, obligés de servir, dans le climat le plus dur, au sommet des Alpes, pays fort stérile, ont besoin pour subsister d'ôtre maintenus, eux et leurs paroissiens, dans leurs (1) Nous reproduisons ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire. 366 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée de Forcalquier.] usages, privilèges et droits, desquels ils ont toujours joui sous la domination des comtes de Provence, des princes de Piémont, et depuis qu’ils ont eu le bonheur d’être réunis de nouveau à la Provence, en passant sous la domination du Roi de France par le traité d’Utrech. 3° Que leur portion congrue suffit à peine pour leur bien médiocre alimentation, et ne leur permet pas de venir au secours de la classe indi-ente de leurs paroissiens, et supplient Sa Majesté e continuer à tendre une main paternelle à cette partie intéressante de ses sujets. 4° Que, par un abus général glissé dans cette vallée, les jours de dimanches et fêtes sont profanés, et ont recours à Votre Majesté pour renouveler et mettre en vigueur les ordonnances et règlements faits à ce sujet, de faire cesser en ces jours tous travaux publics, tout négoce, et de protéger par ces sages lois la religion en qualité ae Roi Très-Chrétien. 5° Que le casuel usité dans les paroisses avilit l’état ecclésiastique et pèse sur la classe inférieure de leurs ouailles, et qu’en assignant un revenu fixe pour y suppléer, Sa Majesté fournirait aux ministres de l’autel un moyen de subsistance plus conforme à la décence de leur état. 6° Que dans la paroisse de Barcelonnette, les assemblées paroissiales sont présidées et autorisées par les magistrats et officiers municipaux, contre les usages de tout le royaume ; le curé demande de les présider lui-même pour épargner des frais à son peuple. 7° Que dans cette même paroisse, composée de trois mille âmes, il n’y a qU’un vicaire réduit au revenu de 200 livres, provenant de deux chapelles réunies ; le suppliant réclame que son vicaire soit traité comme ses confrères, conformément à la déclaration du Roi, ou qu’il y soit mis quelque nouveau bénéfice qu’il indiquera dans sa pa roisse. 8° Enfin le clergé de la vallée de Barcelonnette assure le Roi que l’objet de ses vœux les plus ardents est le maintien de son autorité ; que Dieu daigne l’éclairer, avec ceux que la confiance des peuples conduira à ses pieds pour l’aider de leurs conseils, et qu’ils ne trouvent aucun obstacle à ses vues de bienfaisance. Lecture faite dans l’assemblée des présentes doléances, 'elles ont étéradoptéespar les soussignés. Signé J au froid, curé ; Gatinel, curé ; üonnaud, curé; Tirau, prieur-curé; Allair, prêtre, curé; Gastenel, curé; Reynaud, curé; Grores, curé; Audiffred, curé ; Billy, vicaire ; Pascalis, prêtre , curé de Revel ; Jombert, vicaire perpétuel ; Audif-fred, prêtre; Falsque, prêtre; Jubert , prêtre; Lainé, bénéficier; Coltotaur, prêtre bénéficier; Arnauld, prêtre; Colomb, bénéficier; Jauffred, secrétaire; Rinier, curé de Barcelonnette, président de l’assemblée A l’original est écrit : Après avoir signé, les curés de la susdite assemblée ont prié M. le président de remettre le présent cahier àM. lepréfet, qui aura la bonté de le faire parvenir à M. le sénéchal qui présidera l’assemblée de Forcalquier, auquel ils observent que la moitié des curés n’a pu comparaître que par des représentants à raison de la grande quantité de neige et impraticabilité des chemins. Par cette raison, et la proximité du temps pascal, qui exige leur présence dans leurs paroisses, ils n’ont pu faire des dépenses, et supplient M. le sénéchal d’approuver la légitimité de leurs raisons, et de faire attention à leur présent cahier signé par nous et notre secrétaire. Signé Rinier, curé de Barcelonnette, président, et Jauffred, secrétaire. Paraphé ne varietur, l'assemblée tenant à Barcelonnette le 3 avril 1789. Signé Curault et Donnaud, greffier. RÉDACTION DES CAHIERS DE DOLÉANCES Du tiers-état de la ville et communauté de la, vallée de Barcelonnette , composant P arrondissement de la préfecture (t). Sire, Quel sentiment délicieux de penser que nous touchons au moment où le souverain va s’entourer de ses sujets, de ses enfants, pour poser, de concert avec eux, les bases de la félicité publique; qu’il va régénérer l’Etat et rappeler par une constitution solide les siècles fortunés du gouvernement patriarcal! Un monarque que la sollicitude du bien public prive du calme et de la tranquillité, qui ne peut se promettre de les recouvrer que par le remède aux maux de l’Etat et la réforme des abus en tout genre, et dans toutes les parties de l’administration, qui ne fait consister le droit des rois qu’à rendre les hommes heureux, qui ne compte ses jours que par les actes de sa justice, commande l’amour et la reconnaissance; il mérite le sacrifice de nos biens et de nos vies. Si Louis XII, si Henri IV sont encore aujourd’hui l’idole des Français par le souvenir de leurs bontés paternelles, Louis XVI, Louis le Bienfaisant, en est le Dieu; l’histoire le proposera pour le modèle des rois dans tous les pays et dans tous les siècles. Qu’il est beau , qu’il est grand et qu’il est consolant de se peindre un Roi allant au-devant de tous ses sujets pénétrés par son amour jusqu’aux régions les plus reculées, les interroger sur leurs besoins , écouter favorablement leurs avis sur tout ce qui peut intéresser leur bonheur! Le temps est enfin arrivé, où il est permis de développer sans crainte ses maux, d’en indiquer et d’en attendre le remède. SITUATION GÉOGRAPHIQUE DE LA VALLÉE DE BARCELONNETTE. Si, par sa situation, la vallée de Barcelonnette est un pays important à l’Etat, si les montagnes escarpées offrent à la France une clef sûre contre les entreprises de ses ennemis et une porte facile pour s’introduire dans l’Italie, elle n’est pour les habitants qui la cultivent qu’une marâtre qui refuse à leurs sueurs des productions pour les nourrir. Des torrents fort nombreux tant au nord qu’au midi, des vallons ne présentent à la vue que des espaces dévastés par leurs débordements. La rivière d’Hubaye dévaste à son tour tout le pays plat qu’elle parcourt, elle y dépose le gravier quelle reçoit des torrents, et des Versements journaliers enlèvent à la culture le sol le plus productif. Les eaux de filtration que la rivière d’Hubaye fixe dans la ville de Barcelonnette et à Jausiers, dont la situation est la même, y causent des dommages considérables et infectent l’air que les habitants y respirent. D’après ce tableau, il est inutile d’observer que dans cette vallée les habitants ne peuvent mettre en culture que la mi-côte des montagnes' et quel-(1) Nous publions ces pièces d’après up manuscrit des Archives de VEmpire.