SÉANCE DU 4 FLORÉAL AN II (23 AVRIL 1794) - Nos 7 et 8 179 7 La société populaire de Dol, département de l’Ille-et-Vilaine, instruit la Convention nationale que les autels du mensonge ont disparu; qu’ils ont été remplacés par l’autel de la patrie; que le peuple célèbre avec pompe les fêtes décadaires, et qu’en terminant la dernière il a brûlé l’effigie du dernier tyran et celle de Pie VI. Cette société annonce ensuite à la Convention nationale, qu’elle a équipé et armé un chasseur à pied qui va se rendre à Paris. Mention honorable et insertion au bulletin (1). [DoZ, 24 vent. II] (2). «Nous marchons au pas, Législateurs, nous vous suivrons toujours dans la carrière d’une révolution qui doit assurer le bonheur du monde. Il y a plus de deux mois que les autels du mensonge n’existent plus ici, nous ne sacrifions plus qu’à la raison, nous lui avons élevé un autel d’où s’élève une colonne triangulaire de près de cent pieds de hauteur enrichie des emblèmes de la liberté. C’est au pied de cette colonne que les autorités constituées de Dol et nous, consacrons les fêtes décadaires, à célébrer les actions civiques, les vertus des martyrs de la liberté et les exploits des héros sans -culottes. Nous fîmes, il y a 8 jours, une invitation aux frères de notre société de déposer l’argent monnayé qu’ils pouvaient avoir pour l’échanger contre des assignats, ils s’y déférèrent aussitôt et ce vil métal, flétri de l’image du tyran, fut sur le champ changé à la caisse de notre district pour des assignats républicains. Nous avons aussi arrêté d’armer et d’équiper un chasseur à pied pris dans l’âge de 26 à 30 ans. Tous les membres de notre société se sont empressés de fournir, selon leurs facilités, les uns des assignats, les autres des chemises, vestes, etc... Nous espérons sous peu de jours qu’il se rendra à Paris auprès du Ministre de la Guerre qui fixera sa destination. A la dernière décade, nous invitâmes Pie VI et le dernier tyran d’assister à la cérémonie; ils y jouèrent les grands rôles : nous avions fait préparer pour cette fête un feu de joie sur la place Brutus, et costumer deux vieilles idoles du fanatisme religieux, l’une en tyran couronné et fleur de lys et l’autre en pape thiarré et mulé. Un de nos frères prononça dans le temple de la Raison, un discours annonçant le triomphe des lumières, de la vérité et de la liberté sur l’ignorance, les préjugés et la tyrannie; aussitôt après, les images de ces deux ennemis des droits de l’homme furent tramés au bûcher et on en fit un auto-da-fe, autour duquel les citoyens et citoyennes dansèrent la carmagnole; les autorités constituées de Dol et la garnison partagèrent avec nous l’allégresse : les cris de (1) P.-V. XXXVI, 66. (2) C 303, pl. 1100, p. 25. vive la République, vive la Convention, vive la Montagne furent mille fois répétés. On brûla aussi quelques statues de bois, soit-disant saintes, à figures grotesques; mais la plus grande partie a été conservée pour le chimiste qui fait ici du salpêtre; cela économisera d’autant le bois à feu qui est rare et prouvera qu’ils n’avaient d’autre vertu que celle de faire de la cendre. Voilà comme travaillent les républicains de la société populaire de Dol et voici leur dernier mot : la liberté ou la mort. S. et F. » Dameaux, Talon, Poullet. 8 Celle de Pont-Libre, ci-devant Pont-l’Abbé, témoigne sa reconnoissance à la Convention nationale des mesures vigoureuses qu’elle vient de déployer pour anéantir les conspirateurs qui vouloient perdre la liberté et égorger la Convention nationale, et elle l’informe qu’elle s’est levée toute entière pour marcher contre les brigands de la Vendée, et qu’elle vient d’envoyer à l’adresse du président, en offrande patriotique, 617 liv. 15 sols tant en assignats qu’en numéraire, 5 onces 6 gros d’argenterie, un gros 22 grains d’or, 47 chemises, 7 paires de souliers, 12 paires de bas, 4 draps et environ 6 livres de charpie. Mention honorable, inscription au bulletin et renvoi au comité des finances (1). [Pont-Libre, 20 germ. Il] (2) . « Représentants du peuple français, Quoique la population de notre commune ne soit que de 475 individus, de tout sexe et de tout âge, nous venons de former dans son sein, une société républicaine de sans-culottes cultivateurs qui n’ont d’autre fortune que leur patrie. Un des premiers devoirs de cette société naissante est d’assurer la Convention nationale, de sa gratitude et de ses hommages. Notre cœur nous dicta toujours la vérité, nous vous la dirons seule et sans art. Oui, Représentants, vous avez dignement rempli l’auguste mission dont vous avez été chargés, et c’est à juste titre que la France entière vous témoigne sa reconnaissance. Avant notre immortelle révolution, nous, habitants des campagnes, toujours courbés sous le joug du despotisme et de la supertition et continuellement livrés à des travaux pénibles, nous n’osions nous entretenir du gouvernement sous lequel nous gémissions; mais aujourd’hui, dégagés de toutes nos chaînes, éclairés sur nos droits comme sur nos devoirs, nous savons apprécier vos immortels travaux. Législateurs, c’est à la sortie du plus long esclavage et sur les affreux débris du despotisme que vous avez jetté les fondements, impérissables de la République française, une et indivisible. (1) P.-V., XXXVI, 66. B(n, 10 flor. (2e suppl‘); J. Sablier, n° 1276. (2) C 301, pl. 1077, p. 26. SÉANCE DU 4 FLORÉAL AN II (23 AVRIL 1794) - Nos 7 et 8 179 7 La société populaire de Dol, département de l’Ille-et-Vilaine, instruit la Convention nationale que les autels du mensonge ont disparu; qu’ils ont été remplacés par l’autel de la patrie; que le peuple célèbre avec pompe les fêtes décadaires, et qu’en terminant la dernière il a brûlé l’effigie du dernier tyran et celle de Pie VI. Cette société annonce ensuite à la Convention nationale, qu’elle a équipé et armé un chasseur à pied qui va se rendre à Paris. Mention honorable et insertion au bulletin (1). [DoZ, 24 vent. II] (2). «Nous marchons au pas, Législateurs, nous vous suivrons toujours dans la carrière d’une révolution qui doit assurer le bonheur du monde. Il y a plus de deux mois que les autels du mensonge n’existent plus ici, nous ne sacrifions plus qu’à la raison, nous lui avons élevé un autel d’où s’élève une colonne triangulaire de près de cent pieds de hauteur enrichie des emblèmes de la liberté. C’est au pied de cette colonne que les autorités constituées de Dol et nous, consacrons les fêtes décadaires, à célébrer les actions civiques, les vertus des martyrs de la liberté et les exploits des héros sans -culottes. Nous fîmes, il y a 8 jours, une invitation aux frères de notre société de déposer l’argent monnayé qu’ils pouvaient avoir pour l’échanger contre des assignats, ils s’y déférèrent aussitôt et ce vil métal, flétri de l’image du tyran, fut sur le champ changé à la caisse de notre district pour des assignats républicains. Nous avons aussi arrêté d’armer et d’équiper un chasseur à pied pris dans l’âge de 26 à 30 ans. Tous les membres de notre société se sont empressés de fournir, selon leurs facilités, les uns des assignats, les autres des chemises, vestes, etc... Nous espérons sous peu de jours qu’il se rendra à Paris auprès du Ministre de la Guerre qui fixera sa destination. A la dernière décade, nous invitâmes Pie VI et le dernier tyran d’assister à la cérémonie; ils y jouèrent les grands rôles : nous avions fait préparer pour cette fête un feu de joie sur la place Brutus, et costumer deux vieilles idoles du fanatisme religieux, l’une en tyran couronné et fleur de lys et l’autre en pape thiarré et mulé. Un de nos frères prononça dans le temple de la Raison, un discours annonçant le triomphe des lumières, de la vérité et de la liberté sur l’ignorance, les préjugés et la tyrannie; aussitôt après, les images de ces deux ennemis des droits de l’homme furent tramés au bûcher et on en fit un auto-da-fe, autour duquel les citoyens et citoyennes dansèrent la carmagnole; les autorités constituées de Dol et la garnison partagèrent avec nous l’allégresse : les cris de (1) P.-V. XXXVI, 66. (2) C 303, pl. 1100, p. 25. vive la République, vive la Convention, vive la Montagne furent mille fois répétés. On brûla aussi quelques statues de bois, soit-disant saintes, à figures grotesques; mais la plus grande partie a été conservée pour le chimiste qui fait ici du salpêtre; cela économisera d’autant le bois à feu qui est rare et prouvera qu’ils n’avaient d’autre vertu que celle de faire de la cendre. Voilà comme travaillent les républicains de la société populaire de Dol et voici leur dernier mot : la liberté ou la mort. S. et F. » Dameaux, Talon, Poullet. 8 Celle de Pont-Libre, ci-devant Pont-l’Abbé, témoigne sa reconnoissance à la Convention nationale des mesures vigoureuses qu’elle vient de déployer pour anéantir les conspirateurs qui vouloient perdre la liberté et égorger la Convention nationale, et elle l’informe qu’elle s’est levée toute entière pour marcher contre les brigands de la Vendée, et qu’elle vient d’envoyer à l’adresse du président, en offrande patriotique, 617 liv. 15 sols tant en assignats qu’en numéraire, 5 onces 6 gros d’argenterie, un gros 22 grains d’or, 47 chemises, 7 paires de souliers, 12 paires de bas, 4 draps et environ 6 livres de charpie. Mention honorable, inscription au bulletin et renvoi au comité des finances (1). [Pont-Libre, 20 germ. Il] (2) . « Représentants du peuple français, Quoique la population de notre commune ne soit que de 475 individus, de tout sexe et de tout âge, nous venons de former dans son sein, une société républicaine de sans-culottes cultivateurs qui n’ont d’autre fortune que leur patrie. Un des premiers devoirs de cette société naissante est d’assurer la Convention nationale, de sa gratitude et de ses hommages. Notre cœur nous dicta toujours la vérité, nous vous la dirons seule et sans art. Oui, Représentants, vous avez dignement rempli l’auguste mission dont vous avez été chargés, et c’est à juste titre que la France entière vous témoigne sa reconnaissance. Avant notre immortelle révolution, nous, habitants des campagnes, toujours courbés sous le joug du despotisme et de la supertition et continuellement livrés à des travaux pénibles, nous n’osions nous entretenir du gouvernement sous lequel nous gémissions; mais aujourd’hui, dégagés de toutes nos chaînes, éclairés sur nos droits comme sur nos devoirs, nous savons apprécier vos immortels travaux. Législateurs, c’est à la sortie du plus long esclavage et sur les affreux débris du despotisme que vous avez jetté les fondements, impérissables de la République française, une et indivisible. (1) P.-V., XXXVI, 66. B(n, 10 flor. (2e suppl‘); J. Sablier, n° 1276. (2) C 301, pl. 1077, p. 26.