236 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 janvier 1790 ] nés, et l’Assemblée admet cette proposition. Sur la réflexion d’un de ses membres, l’Assemblée ajourne à jeudi prochain à deux heures la reprise de la discussion au sujet des matières criminelles. M. Dupont (de Nemours ), membre du comité de Constitution, fait un rapport sur les limites du département de Paris. 11 dit qu’il s’est élevé quelques légères difficultés entre les députés du département de Versailles et ceux du département de Paris relativement à Sèvres et à Saint-Cloud. Les premiers réclament ces deux endroits comme essentiels à leur arrondissement; les députés de Paris le réclament comme essentiel à leur administration et pour pouvoir empêcher la contrebande et avoir la garde et la police immédiate des ponts de Sèvres et de Saint-Cloud. Le comité, après avoir pris les raisons de convenance, a donné gain de cause aux députés de Versailles et fixé pour limite de ce côté le milieu de la Seine ; d’ailleurs le village de Saint-Cloud et la ville de Saint-Denis demandent à n’être pas compris dans la banlieue de Paris. M. Camus observe qu’il est très important pour la ville de Paris d’avoir dans son département les ponts de Sèvres, Saint-Cloud et Neuilly, tant pour son intérêt propre que pour celui de tout le royaume à cause de la surveillance qu’elle pourra exercer. M. Dupont (de Nemours ) répond que la ville de Paris aura tout le pont de Neuilly dans son département et que le comité de constitution a pensé qu’il lui suffisait de partager l’administration des deux autres avec la ville de Versailles. M. Ce Pelletier de Saint-Fargeau. J’observe aussi que des raisons de police et d’utilité publique doivent engager à ne pas considérer la rivière comme la limite de la banlieue ; si cela était ainsi, Sèvres offrirait une grande facilité pour la contrebande, et les bois de Meu-don présenteraient aux malfaiteurs une retraite sûre; il paraît, en conséquence, indispensable de placer sous la surveillance de la capitale ces deux parties de son voisinage. Au reste, je suis persuadé que la ville de Paris recevra la décision, quelle qu’elle soit avec la soumission dont elle doit donner l’exemple. On demande à aller aux voix. Le comité de Constitution présente un projet de décret qui est adopté en ces termes : L’Assemblée nationale décrète : « Que le département de Paris aura environ trois lieues de rayon, excepté depuis Meudon jusqu’au-dessous de“ Saint-Cloud, où il sera borné par les murs du parc de Meudon, et par une ligne, qui, embrassant GJamartet les Moulineaux, ira finir au pont de Sèvres, d’où le milieu de la rivière servira de limite, les deux ponts de Sèvres et de Saint-Cloud réservés néanmoins en entier au département de Paris; qu’au-dessous de Saint-Cloud, les limites s’élèveront au nord-ouest jusque vis-à-vis le village des Carrières de Saint-Denis, à partir duquel le milieu de la rivière bornera le département en remontant jusqu’au territoire de la paroisse d’Epinay; que depuis ce point, le rayon aura trois lieu es jusqu’au coude de la Marne à Champigny; qu’il aura trois lieues et demie depuis le coude de la Marne jusqu’à Bonneuil; et que depuis Bonneuil jusqu’au-dessus du Plessis-Piquet, le rayon de trois lieues, à partir du parvis Notre-Dame, servira déréglé, conformément au décret de l’Assemblée, qui a décidé que ce rayon s’étendrait à trois lieues au plus; enfin, que depuis les bornes du Plessis-Piquet, une ligne tirée jusqu’aux murs du parc de Meudon, clora le département. » M. le Présideut annonce un don patriotique de la paroisse de Greissy et de la commune de Largillière-en-Bourgogne. M. le Président. Conformément à l’ajournement prononcé dans la séance d’hier, je donne la parole à iM. le marquis de Bouthillier, chargé de faire un rapport au nom du comité militaire sur la force et sur la solde de l'armée française. M. le Marquis de Bouthillier (1). Messieurs, quatre questions importantes sont aujourd’hui soumises à votre décision : Quelle est la force nécessaire de l’armée à entretenir en temps de paix? Dans quelle proportion doivent être, entre elles, les différentes armes destinées à la composer? Quelle doit être celle des officiers de tout grade, avec les soldats qu’ils doivent commander? Enfin, quelle dépense son entretien doit-il occasionner annuellement? PREMIÈRE QUESTION. Force nécessaire de l'armée en temps de paix. La politique de la France ne doit point être de chercher à agrandir ses possessions. Le système destructeur des conquêtes rend les rois guerriers un fléau funeste pour l’empire soumis à leur administration. Une nation sage ne saurait prendre trop de précautions pour enchaîner leur ambition ; et si les principes nécessaires d’une monarchie prescrivent que les rois aient le-droit de faire la paix et la guerre; si la prudence exige que des forces nécessaires pour la défendre, et pour faire respecter son nom, soient déposées entre les mains de celui qui la gouverne, l’intérêt particulier de la nation lui fait impérieusement la loi de les fixer habituellement au simple nécessaire, non seulement afin de lui ôter la tentation d’en pouvoir abuser, mais encore afin de n’être jamais écrasée sous le poids des dépenses d’une armée, vain appareil de puissance toujours menaçante sans nécessité. La force militaire de terre doit avoir pour but de défendre le royaume contre ses ennemis extérieurs, et de fournir au dedans main-forte à l’autorité civile, lorsqu’elle pourrait la requérir pour la protection des lois. Une bonne constitution militaire sera celle qui, en réduisant pendant la paix les forces aux besoins indispensables du service, organisera l’armée de manière à être augmentée facilement, saris secousses, sans moyens violents, lorsque les attaques de nos ennemis obligeraient à des efforts extraordinaires. (I) Le Moniteur ne donne qu’une analyse du rapport de M. le marquis de Bouthillier.