[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j |4fn�ïmbr � 1793 81 des mouvements que faisaient les rebelles vers notre territoire. « Depuis cette époque, ils s’étaient emparés de Dol, ville ouverte et sans défense; ils y sont restés plusieurs jours, pendant lesquels ils n’ont cessé de se livrer au pillage. Nos avant-postes étaient alors bien garnis ; leurs maraudeurs sont venus auprès, et si l’ennemi ne s’est pas porté sur eette commune, c’est qu’il avait sans doute appris que nous avions des moyens pour le repousser vigoureusement. Notre crainte était alors qu’il ne se fût porté vers Dinan, pour pénétrer dans la ci-devant province de Bre¬ tagne; mais nos inquiétudes sur ce point dis¬ parurent, lorsque nous apprîmes qu’une petite armée, aux ordres du général Tribout, était arrivée à Dinan. « Les rebelles évacuèrent Dol et se portèrent sur Âvranches ; ils marchèrent ensuite sur Gran¬ ville, qu’ils ont attaquée avec opiniâtreté; mais ils y ont éprouvé, fort heureusement, une perte assez considérable. Trois fois ils ont tenté l’esca¬ lade et trois fois ils ont succombé sous les coups des braves républicains qui leur étaient opposés. » r. Première lettre des représentants Bourbotte, Turreau et Prieur (de la Marne) (1). Minute. Bourbotte, Turreau et Prieur de la Marne, représentants du peuple près les armées réunies de VOuest et de Brest, au comité de Salut public. « Antrain, 29 brumaire, an II de la Répu¬ blique, une et indivisible. « Citoyens collègues, « Nous sommes arrivés hier à Antrain à 4 heures après-midi. Nous y avons trouvé une division de 10,000 hommes des deux armées réunies, l’autre de 8,000 hommes est à Fougères. Au moment où les généraux allaient s’occuper d’un plan d’attaque contre les bri¬ gands, combiné avec les 5,000 hommes qui se trouvaient à Pontorson sous le commande¬ ment de Tribout, nous avons appris que ee dernier venait d’être attaqué par la colonne des brigands qui s’était portée d’ Avranches sur lui, et qu’il avait été obligé de faire sa retraite sur Dol après avoir perdu grande partie de son artillerie. Nous ne pouvons vous donner de détails officiels de ce combat, attendu que nous n’avons, depuis cette époque, aucune nouvelle positive de Tribout et que tout ce que nous avons pu recueillir nous est parvenu par des prisonniers, des déserteurs ou par une colonne de fuyards que l’irruption des brigands a séparés, dès le premier instant du combat, des autres troupes du corps d’armée qui était dans la ville. Il paraît, d’après toutes les relations, que le combat a été très chaud, qu’il a duré longtemps à l’arme blanche et que le nombre seul l’a emporté. On nous annonçait à chaque instant que les brigands se portaient sur Antrain pour nous attaquer pendant la nuit d’hier. Toutes les dispositions ont été (1) Archives nationales, carton AFn 277, plaquette 2323, pièce 45. Ir« SÉRIE. T. LXXX. prises pour le» recevoir et nous avons paasé la nuit au bivouac avec l’armée. Nous nous sommes encore attendus toute la journée à cette atta¬ que, nous la présumons (pour) cette nuit ou demain matin, et le général prend en consé¬ quence le parti de faire venir cette nuit la division qui est à Fougères pour se réunir à celle d’ Antrain. L’armée, au surplus, paraît disposée à les bien recevoir et nous espérons qu’ils auront devant. Antrain le sort qu’ils paraissent avoir éprouvé devant Granville, car nous ne connaissons encore le résultat de cette action que par le rapport des déser¬ teurs et des prisonniers. Il paraît, d’après ce que nous avons appris par la même voie, qu’il y a de la division entre les chefs de l’armée, les paysans et les Allemands; Les chefs voulaient, après l’échec de Granville, en recommencer le siège, et au besoin s’enfoncer dans ces parties de la France, soit pour s’em¬ parer d’un port de mer, et établir par là des relations avec les Anglais, soit en gagnant Tes départements du Nord, pour se réunir, dans le Brabant, aux Autrichiens. Les paysans veulent à tout prix regagner leurs foyers par la route de Laval et d’Angers. Les Allemands qui sentent qu’ils seront victimes de cette désunion si elle a des suites, voudraient bien quitter la partie, neuf d’entre eux ont déserté depuis hier, et nous cherchons les moyens de seconder ce mouvement qui porterait un coup terrible à l’armée royaliste, qui les compte pour ses meilleurs soldats. « Il y eut hier, dans la journée, entre Pon¬ torson et Antrain, un petit engagement entre un détachement de nos troupes légères com¬ mandé par Boin-Marigny. Il a tué 30 brigands, et ce qu’il y a eu de plus satisfaisant dans le résultat de cette affaire, c’est que les paysans des communes où l’action s’est passée, encou¬ ragés par l’apparition de nos troupes, ont arrêté 60 de ces scélérats. « Nous ne hasarderons rien sur le nombre des brigands qui composent l’armée, et vous jugerez d’après les données que nous avons combien nous devons être circonspects à cet égard; ces données sont de 8 à 200,000 hommes. Quoi qu’il en soit, le caractère de royalisme dont est infectée cette horde de scélérats doit les faire considérer comme de très sérieux et très dangereux ennemis de la République, qu’elle ne doit pas ménager jusqu’à ce qu’il» soient totalement exterminés. Nous pouvons donc applaudir à la sage mesure que vous avez prise de faire marcher 15,000 hommes de l’armée du Nord, dans ces contrées, et ne perdez pas de vue la "Vendée où le feu couve encore sous la cendre. « Salut et fraternité. » G. Deuxième lettre des représentants Turreau, Bourbotte et Prieur (de, la Marne ) (1), Minute, de la main de Prieur (de la Marne)., Thureau (sic), Bourbotte et Prieur (de la Marne)» (1) Archives nationales, carton AFn 277, plaquette 2323, pièce 47. Aularrï : Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 8, p, 581, G 82 4 frimaire an li 24 novembre 1793 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j représentants du peuple près les armées réunies de l'Ouest et de Brest, au comité de Salut public. « Antrain, 30 brumaire, 9 heures* du soir, 2e de la République française. « Nous n’avons pas été attaqués, ni la nuit dernière, ni aujourd’hui, comme nous nous y attendions. La division de Fougères est réunie au reste de l’armée. Les brigands ont évacué Pontorson ; nous leur avons repris 7 à 8 pièces de canon, beaucoup de chariots et quelques cais¬ sons. Notre cavalerie poursuit les traînards et en a déjà tué beaucoup. L’avant-garde s’avance sur Dol, qu’elle doit attaquer à minuit, du côté de Pontorson; une autre colonne atta¬ quera au même instant par la route d’ Antrain. Le restant des forces est disposé de manière à soutenir l’expédition ou à seconder la retraite au besoin.* « D’après ce que nous avons dit, dans notre dernière, des dispositions des habitants des campagqes de ces départements, qui paraissent détester les brigands [et qui, au moins, ne se sont pas ébranlés en leur faveur, nous avons pensé qu’il fallait employer toutes les mesures possibles pour que les brigands trouvassent leur tombeau et qu’ils ne pussent aller se recruter ou dévaster ailleurs. C’est d’après cela que nous avons pensé qu’il fallait les cerner comme des bêtes féroces, en coupant les ponts, rompant les routes et faisant des abattis. Par ce moyen, ils périront bientôt de famine. S’ils s’échappent, ce ne pourra être en grande masse, et leur artillerie et leurs bagages ne pourront les suivre. « Nous avons encore pensé qu’il fallait leur faire une guerre de tirailleurs, en les extermi¬ nant sans cesse dans tous les villages où ils se répandent en désordre pour piller. Nos soldats sont très disposés à ce genre de guerre et je (1) vois avec plaisir que leur haine contre les brigands est fortement prononcée. « La retraite que Tribout a été forcé de faire à Pontorson nous a fait faire beaucoup de réflexions. Nous avons vu avec étonnement que l’on n’eût pris aucune mesure pour le seconder dans le cas où il serait attaqué, et une reconnaissance que nous avons faite hier soir jusqu’à une demi-lieue de Pontorson nous a convaincus que rien n’eût été plus facile. Ajoutez que, le soir d’hier, il se tint un conseil de guerre de la plus grande importance, et que nous vîmes avec étonnement que Vergnes, chef de, l’état-major de l’armée, n’y parut pas, sous prétexte qu’il était malade. Cette con¬ duite nous parut suspecte, et cela rapproché des réflexions que nous avait fait naître l’abandon de Tribout, nous nous sommes décidés à faire mettre Vergnes en état d’arrestation et à le faire traduire sur-le-champ à Rennes; nous examinerons ses papiers sur lesquels nous avons fait mettre les scellés; nous examinerons aussi sa conduite et nous vous rendrons compte du tout. Nous avons nommé provisoirement à sa place Savary, adjudant général, qui exercera eeB fonctions jusqu’à l’arrivée de l’adjudant-major de l’armée des côtes de Brest, que Ros¬ signol attend. Nous allons prendre un arrêté pour Nouvion, » (1) Il ne faut pas oublier que c’est Prieur (de la Marné) qui écrit au nom de ses collègues. Le procureur général syndic du département de la Manche au comité de Salut public (1). « Le 1er frimaire, l’an II de la République, « L’armée de Sépher est partie ce matin de Coutances; elle dirige sa marche vers Avran-ches. Nous avons nommé deux commissaires de notre sein pour dresser procès-verbal de l’état de cette ville évacuée et pour mettre en état d’arrestation tous les scélérats qui ont eu intelligence avec les rebelles. Ils sont partis pour remplir leur mission. « Il nous arrive à chaque instant des pri¬ sonniers élargis et tondus. Nous prenons tous les renseignements. Je vous enverrai le* recen¬ sement du tout pour vous faire connaître la vraie force de l’ennemi. Si on en croit les diffé¬ rents rapports, ils ont au moins 3,000 prêtres à leur suite et autant de femmes. Ils manquent de subsistances. Un de ces prisonniers a reconnu parmi les chefs le ci-devant duc de La Trémouille, d’ Antichamp et Tallemond. Les prêtres les prêchent au milieu des places publiques. Après l’affaire de Granville, l’armée voulait se dis¬ soudre à Avranches; un prêtre leur a donné la bénédiction et leur a fait un sermon qui leur a arraché les larmes et les a ralliés. « On n’a point vu dans l’armée de prêtres normands; ceux du mont Saint-Michel n’ont point voulu sortir. Us ont dans leur armée deux compagnies de Suisses et deux d’Alle¬ mands; ils ont emporté d’ Avranches 20 blessés. » I. Autre lettre du procureur syndic du départe¬ ment de la Manche (du 30 brumaire) (2). « L’ennemi a évacué Avranches avant-hier matin. Il a dirigé sa marche du côté de Pon¬ torson. On croit qu’il en est venu aux mains avec l’armée du général Thibaut (3) et que ce dernier aurait eu le désavantage. Nous n’avons point de nouvelles officielles de cette action; mais l’évacuation d’ Avranches est constante. Je vous soumettrai mes réflexions à cet égard, sur les divers plans pris et non exécutés pour envelopper les rebelles. » J. Lettre du citoyen Jean-Bon-Saint-André, repré¬ sentant du peuple, datée de Coutances le 2 fri¬ maire, au comité de Salut public (4). « Je me hâte citoyens collègues, de vous faire passer la copie de deux lettres que je (1) Bulletin de la Convention du 5e jour de la lre décade du 3e mois de l’an II (lundi 25 novembre 1793). (2) Ibid. (3) Il s’agit probablement du général Tribout. (4) Supplément au Bulletin de la Convention du 5e jour de la lre décade du 38 mois de l’an II (lundi 25 novembre 1793).