[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 septembre 1790.J gJJ M. Bouche, député du même département, appuie celle proposition qui est adoptée à l’unanimité. M. Laurence, député du département de la Vienne, demande et obtient un congé de six semaines. M. de La Rochefoucauld présente une adresse de M. Ruel qui, par un procédé nouveau, a extrait 75 livres de cuivre de la matière des cloches, tandis qu’on n’avait pu en extraire que 45 0/0 jusqu’à présent. Un membre demande que le comité féodal présente incessamment un projet de loi pour la subsistance des enfants illégitimes; les ci-devant seigneurs féodaux qui étaient chargés de l’entretien de ces malheureux, n’entendent plus en faire la dépense. Un autre membre observe que cette partie de la dépense de l’administration publique n’est point du ressort du comité féodal, et la motion est renvoyée au comité de mendicité. M. Vernier, rapporteur du comité des finances, présente-deux projets de décrets, qui sont adoptés sans discussion en ces termes i PREMIER DÉCRET. « L’Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances de l’adresse faite aux officiers municipaux de Gompiègne, par le comité de mendicité de ladite ville ; de la délibération prise en conseil général le 6 septembre ; de l’avis donné par le district et département, avec approbation* les 12 et 16 septembre, autorise les officiers municipaux de ladite ville à faire un emprunt de 12,000 livres pour l’établissement d’un atelier de charité en filatures de toute espèce, sous la direction du comité de mendicité, et la surveillance tant des officiers municipaux, que du corps administratif, à charge de rembourser ledit emprunt en dix ans, tant en principal qu’intérêts, soit sur les revenus patrimoniaux de la ville, soit, à ce défaut, par la voie d’imposition, suivant le mode qui sera prescrit par le district et département. » DEUXIÈME DÉCRET. « L’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité des finances de la délibération du 30 mai, prise en conseil général de la ville de Ghauny, à l’effet d’être autorisée à un emprunt de 10,000 livres; de l’ordonnance préparatoire du district, du 6 août ; de son avis définitif et motivé du 21 dudit mois, à l’effet d’autoriser un emprunt de 8,000 livres ; de celui du département, en date du 3 septembre, autorise tes officiers municipaux de la ville de Ghauny à faire un emprunt de 8,000 livres aux intérêts ordinaires, pour ladite somme être employée au payement des ouvriers les plus nécessiteux, sans qu’il en puisse être distrait aucune partie à d’autres usages, à charge, par lesdits officiers municipaux, de rembourser ladite somme sur le prix à provenir du remboursement de la finance de leurs offices municipaux, s’il est fait dans les trois années prochaines, etr à ce défaut, par la voie d’imposition, suivant le mode qui sera fixé par les district et département. » M. "Vernier, au nom du comité des finances* fait un rapport sur la question de savoir si 1% nation doit remplir les engagements pris par le roi pour acquitter les dettes de M* k comte é1 Artois (l). _ Messieurs, si la question est bien présentée, elle se trouve résolue; aussi le comité des finances n’a-t-il point hésité d’adopter l’affirmative de. cette opinion. Il s’agit d’en démontrer la justice* Les peuples dont les droits sont reconnus in liénables et imprescriptibles peuvent en com-mettre l’exercice avec plus ou moins d’étendue. Nous ne parierons ici que de l’autorité et des pouvoirs confiés à l’ancienne administration. Le pouvoir des administrateurs est nécessairement fixé et déterminé par des mandats exprès ou tacites; l’un et l’autre ont la même force et prodnir seat les mêmes effets. Lu plus grand d é velop pement deviendrait ici superflu. Quand on a adopté le principe, on est forcéd’admeüre la conséquence. Ce que l’on a approuvé, ce que l’on a autorisé dans un temps, ne peut plus et ne doit plus être désavoué par la suite. Il ne reste alors, qu’à s’imputer ou une trop longue patience, ou un défaut de surveillance. La nation n’a point; hésité de mettre suas sa sauvegarde tous les créanciers de l’Etat. Quels sont donc ces créanciers ? Ce sont sans doute ceux dont les titres ont été souscrits, avoués et reconnus par des administrateurs approuvés ; tels sont, comme on le verra, ceux du sieur Ciia faudra y. Il répète un million seize cent mille livres classées dans les dépendes de 1790; payées d’après le bon du roi, et sur la foi de l'engageaient le plus formel et le plus exprès. D’apFès les principes posés, il importe peu qu’une dette n’ait pas été originairement celle de l’Etat : il suffit que la nation en ait fait la sienne propre, pour être forcée à remplir des engagements contractés par ses préposés ou par ses représentants, Il convient d’abord de vérifier, dans le point de fait, quelles sont les dettes de M. le comte d’Artois, que le roi (par cette bouté qui lui est si naturelle), s’est engagé de faire acquitter, et comment cet engagement a été contracté. Déjà le roi avait fait payer plusieurs sommes pour le comte d’Artois son frère, ce qui ne suffisait pas, à beaucoup près, pour mettre ce prince à l’abri des poursuites de ses créanciers. Il se trouvait réduit à la dure et triste nécessité de manquer à ses promesses, de ruiner des familles sans nombre, s’il ne parvenait à fléchir la bouté du roi. Il n’hésita pas à prendre ce dernier parti ; il fut secondé avec zèle par M. de Galonné, pour lors ministre des finances. Le 28 décembre 1783 on exposa au roi que les dettes du comte d’Artois étaient réduites à cette époque : 1* à 14,600,000 livres d’exigibles; 2° à 74,640 livres d’intérêts de rentes constituées ; 3° à 908,700 livres de rentes viagères . On n’oublia rien pour déterminer Sa Majesté à se charger de ces différentes dettes; on attacha la tranquillité du prince et l’honneur des lis au succès de cette demande; on fit valoir l’intérêt des créanciers, les dispositions où était le déhi-(1) Le Moniteur contient uniquement la simple mention de ce rapport. 84 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES [20 septembre 1790. J leur, de diminuer ses dépenses, de prévenir de nouveaux dérangements dans ses finances , et même de préparer des ressources pour l'avenir. On invoqua des promesses antérieurement faites sur cet objet par Sa Majesté; on présenta des moyens d’exécution ; on alla même jusqu’à dire qu'au moyen des arrangements à prendre, et de la division des payements , le service serait moins onéreux au Trésor royal; enfin, on mit pour condition expresse que le secret absolu serait gardé sur le détail de cet arrangement. Le roi se laissa toucher et souscrivit un bon de sa propre main, en ces termes : Approuvé les présentes propositions. Quoique ce bon soit imprimé en entier dans l’écrit si connu, intitulé : Livre rouge , nous ne croyons pas pouvoir nous dispenser d’une seconde impression, afin de mettre le lecteur à portée de vérifier sans peine la nature et la forme de l’engagement. Des propositions approuvées, il résultait que sur les 14,600,000 livres de dettes exigibles, on fournirait pour l’année suivante 1784, une somme de quatre millions, dont un servirait au payement des rentes viagères et constituées, et les trois autres seraient en déduction du capital, ce qui le réduirait à 11,600,000 livres payables en sept années (1), à raison d’un million six cent mille livres par an, sauf le dernier terme de 1791, qui est de deux millions. Les cinq premiers termes sont acquittés : il ne reste que ceux de 1790 et 1791. Le sieur Ghalan-dray, qui a fait ce service, qui a fourni les fonds pour ces acquittements, répète les 1,600,000 livres qui lui sont dues pour 1790. Il résulte encore de ces propositions approuvées, et nous ne devons pas le dissimuler, que l’Etat paye chaque année, pour le comte d’Artois, 74,640 livres d’intérêts de rentes perpétuelles, et 908,700 livres de rentes viagères, ce qui fait un million, à seize mille soixante-dix livres près : celte observation est essentielle pour l’intelligence des comptes où ces intérêts ont été portés à un million, comme on va le voir. D’après cet arrangement souscrit et confirmé par l’exécution, tous ceux qui ont écrit n’ont pas hésité de regarder ces dettes comme étant vraiment celles de la nation : elles l’étaient en effet, puisque le roi en avait fait les siennes propres. 1° Les premiers payements ont été faits et exécutés par différents ministres : ils reconnaissaient donc la validité de l’engagement; 2° 11 est rappelé dans les états fournis aux notables en 1787, et ils ne l’ont point improuvé ; 3° M. l’archevêque de Sens, dans le compte de 1788, en fait mention en ces termes, page 131 : Rentes perpétuelles et viagères dues par le comte d'Artois , dont le roi s'est chargé, ci 1,000,000 livres. C’est là une approbation formelle. 4° Dans le compte général de M. Necker, en date du 1er mai 1789, page 50, on lit ce qui suit : « Portion de rentes constituées par Son Altesse « Royale, et dont le roi s’est chargé par décision « du mois de décembre 1783. » Et plus bas, dans une note : « Nota. Ces rentes s’élèvent àprès de 1,300,000 li-« vres, dont l’amortissement au profit du roi ne « partira que de l’époque où leur total sera au-« dessous d’un million. » Il y a lieu de conjecturer que les rentes viagères (1) Comme les payements ne commençaient qu’en 1785, cela donnait huit années. sont déjà au-dessous d’un million, puisque M. Lebrun, dans son rapport fait au nom au comité des finances, partie seconde de la dette publique, dit à la page 7 : « Ainsi les rentes constituées par « Monseigneur le comte d’Artois, ne sont plus « que d’environ 850,000 livres. » Le comité des finances, ayant approuvé ce rapport, avait donc déjà préjugé la légitimité de la dette. 5° Dans l’aperçu des dépenses des huit derniers mois de 1790, fourni par le premier ministre, il s'en explique ainsi : « Avant-dernier payement sur le secours ci-« devant accordé pour les dettes de Monseigneur «■ le comte d’Artois, et pour lequel il y a eu des « engagements pris par des particuliers, ci, .... « 1,600,000 livres. » Le sieur Ghalandray est précisément un des particuliers qui, à l’aide de beaucoup d’autres, avait pris des engagements, et la manière dont ils ont été contractés rend encore, à son égard, l’obligation plus stricte et plus rigoureuse. Pour en donner une juste idée, il faut dire ce qu’étaient en général les faiseurs de service, et celui qui a été fait en particulier par le sieur Ghalandray et associés. Les besoins de l’Etat faisaient tirer par anticipation des valeurs sur les revenus de l’année suivante. Faire un service n’était, à parler exactement, que s’obliger à fournir en comptant le montant des valeurs ou des mandats dont les échéances étaient plus ou moins rapprochées ; cette avance exigeait un salaire : il fallait donc escompter, et cet escompte se payait en général sur le pied de 5 0/0 par an, et de 1 0/0 de commission. Mais l'on doit dire aussi que les faiseurs de service ne manquaient jamais, pour obtenir des augmentations ou des conditions plus favorables, de faire valoir la difficulté de se procurer des deniers, l’obligation de conserver oisives de grosses sommes pour faire les payements à temps, la perte nécessaire pour les négociations, les droits à payer aux agents de change, quelquefois aussi l’éloignement des lieux où les payements doivent être faits; et par là ils trouvaient presque toujours le moyen de se faire accorder au delà de6 0/0. Lorsque les sommes à fournir étaient considérables, les faiseurs de service avaient des associés et des personnes qui leur confiaient leur fortune, dans l’espoir de participer aux bénéfices du traité. Telle est la position du sieur Ghalandray; ceux qui croiraient n’évincer qu’un seul créancier en envelopperaient vingt et trente autres dans sa ruine. Le service entrepris par le sieur Chalandray, sur la confiance du Bon du roi pour le trésor de M. lecomte d’Artois, était absolument calquée sur ceux qui se faisaient au Trésor royal ; il avait été expressément convenu que toutes les valeurs qui lui seraient fournies seraient, à leur échéance, réunies ou acquittées comptant au Trésor royal ; mais lorsqu’il recevait ces valeurs, il devait incontinent en remettre le montant au trésor du prince, eten reprendre d’autres dans la proportion des payements dont il se chargeait : c’est par suite de ce renouvellement successif, que les valeurs qui restent actuellement entre ses mains ne portent pas la date de l’origine de son service. D’après ces notions, l’on doit voir, par le Bon du roi, que c’est vraiment Sa Majesté qui prend à sa charge les dettes énoncées du comte d’Artois ; aussi le ministre s’explique-t-il ainsi : M. le comte d’Artois demande que Votre Majesté [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 septembre 1790.) veuille bien lui faire payer le montant de telles et telles dettes... ; il paraît indispensable d'accorder les secours demandés... En même temps le ministre se montre empressé à prendre des précautions pour que le service du Trésor royal ne soit point troublé par des demandes imprévues... Il lui paraît convenable , pour soulager d'autant plus les finances deSa Majesté, de nepayer ces 11,600,000 livres qu'en sept ans; que les effets sur le Trésor royal, payables auxdites échéances, soient remis pour chaque année à l'administration de M. le comte d'Artois au mois d'octobre, qui précédera chacune desdites années. Cette dernière condition détermina les faiseurs de service à prendre leurs précautions; le roi s’était à la vérité engagé à faire remettre des effets payables au Trésor royal, mais la remise devait en être faite à l’administration de M. le comte d’Artois : par là ils avaient lieu de craindre de n’être pas aussi assurés de leur recouvrement, que s’ils étaient nantis eux-mêmes de ces effets. C’est dans cette vue qu’ils se firent donner un Bon de M. le comte d’Artois, sous la date du 14 mars 1784, portant délégation en leur faveur desdits effets (1). Le créancier qui n’agit que d’après de telles précautions, et sur la foi de l’ordre du roi, pourrait-il donc être trompé? Le sieur Chalandray est encore muni de trois lettres de M. Gojard, pour lors premier commis des finances, qui viennent à l’appui de ses prétentions. La première porte une décision du ministre, pour que les valeurs du service fait pour M. le comte d’Artois fussent payées comptant au Trésor royal. La seconde annonce les ordres donnés au caissier du Trésor royal, en exécution de la décision précédente. Par la troisième, en confirmant les arrangements pris, on promet au sieur Chalandray qu’il n’éprouvera plus de difficultés, et que l’on réparera l’oubli que l’on avait fait d’en prévenir M. de Laborde, pour lors garde du Trésor royal (on peut voir ces trois lettres sous les numéros 3, 4 et 5). Gomment pourrait-on donc mettre sérieusement en question, si l’on remplira des engagements de cette nature, surtout dans les circonstances actuelles ? On va voir que ces circonstances rendent de plus en plus nécessaire ce qui déjà est reconnu juste. En effet, l’Assemblée nationale, constamment pénétrée des sentiments d'amour et de respect pour un roi qu’elle révère, n’oubliera jamais que c’est sur ses instances qu’il s’est déterminé à fixer sa liste civile; qu’il ne l’a fait qu’en présupposant que tous les engagements antérieurement souscrits de sa part seraient exécutés. G’est dans cette persuasion que Sa Majesté, par sa lettre du 9 juin, dit : « Qu’elle croit que les vingt-cinq « millions lui suffiront, mais en observant qu’il « lui serait impossible d’acquitter sur un fonds « annuel, limité, la dette arriérée de sa maison, « dont l'Assemblée a connaissance ; pourquoi elle « désire que la nation comprenne cet objet dans « ses plans généraux de liquidation. » Le roi n’a pas rappelé les engagements dont il s’agit ici, parce qu’ils étaient connus de l’Assemblée par tous les comptes qui lui avaient été présentés, tandis que la dette arriérée de sa maison ne l’était point, parce qu’ils étaient présumés adoptés, parce qu’il était tacitement entendu que (1) Yoyez ce Bon, aux pièces justificatives, n° 2. tous les engagements pris de sa part seraient ratifiés et exécutés. Sj la Dation refusait aujourd’hui de remplir ces mêmes engagements, il faudrait que le roi prît sur sa liste civile, non seulement les 1,600,000 livres payables en 1790, et les deux millions de 1791, mais encore le payement annuel des 850,000 livres de rentes viagères jusqu’à leur extinction : ne craignons point de le dire, on ne croit pas que cela soit jamais entré dans le vœu et dans l’intention de l’Assemblée. Une autre circonstance, non moins grave, non moins déterminante, est le retrait qui a été fait des apanages; la nation, en usant de ses droits, voudra sans cloute faire jouir librement nos princes de ce qui leur a été accordé en remplacement. Nous laisserons de côté nombre de moyens secondaires, que la commission établie pour l’administration des finances de M. le comte d’Artois a fait valoir dans une lettre écrite au roi sur l’objet en question, qui a été imprimée et rendue publique. Nous passerons également sous silence une foule d’objections, pour ne répondre qu’à une seule. On ne manquera pas de dire, que même dans l’ancien régime, une créance ne pouvait être classée dans la dette publique, et approuvée par la chambre des comptes, qu’après avoir été dûment enregistrée. Rien n’est plus vrai, en thèse générale, etdans les choses soumises aux règles ordinaires; mais pour être de bonne foi, on doit convenir que les Bons du roi étaient acquittés de préférence au Trésor public, et se trouvaient dispensés, par l’usage, de ces formalités : or l’usage fait loi, surtout quand il est consacré par les siècles, par le silence, et par l’approbation tacite de ceux qui avaient intérêt à le modifier ou à l’intervertir. Ainsi le roi a donc pu donner le Bon dont il s’agit; les circonstances sollicitaient sa bonté, aujourd’hui la justice la plus rigoureuse, les convenances, notre amour, notre respect pour le plus révéré des rois nécessitent notre adhésion. De l’exposé des faits, des titres et des moyens, on doit conclure que la demande du sieur Gha-landray est juste; que ce n'est plus ici la créance de M. le comte d'Artois, mais celle de l'Etat; que le chef, le représentant de la nation, en a fait la sienne propre; que c’est sur la foi d’un titre avoué, d’un titre légitime, que les particuliers ont fait ce service; que cet engagement a été confirmé par son exécution, par les notables convoqués, par tous les ministres qui ont succédé à M. de Galonné, et par l’Assemblée elle-même; que la nation ne pourrait désavouer ces dettes sans trahir ses principes, sans manquer à ses propres engagements; et pour tout dire enfin, la justice nous fait une loi impérieuse de ce que nos seuls sentiments pour le meilleur des rois nous auraient inspiré; et à tout rompre, il vaudrait mieux mettre nos princes dans le cas d’être ingrats envers nous, que de cesser d’être généreux envers eux. Le comité des finances, déterminé par tous cea motifs et par tous ces moyens réunis, a proposé le décret suivant : « L’Assemblée nationnale, ouï le rapport de son comité des finances, décrète: que les 1,600,000 livres qui forment l’avant-dernier payement de l’entière liquidation des dettes exigibles, dont le roi a bien voulu se charger à l'acquit de M. le comte gg [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 septembre 1790.J £ Artois, et qui sont portés dans l’aperçu des dépendes des huit derniers mois de l’année présente 1790, seront payées au sieur Chalandray et associés, aux époques qui ont été fixées pour le remboursement. I. Copie de la décision du roi , du 28 décembre 1783, pour le payement des dettes de M . le comte d'Artois. J’ai l’honneur de mettre sous les yeux de Votre Majesté deux mémoires qui lui ont été présentés par M. le comte d’Artois ; le premier, pour demander un secours de quatre millions dans le courant de l’année 1784; et le second, pour obtenir que Votre Majesté veuille bien statuer définitivement sur la libération totale de ses dettes. Suivant les états successivement remis à Votre Majesté par M. le comte d’Artois, ses dettes se divisent en deux classes : 1° les dettes exigibles, et 2° les rentes viagères et constituées. La masse totale de la première classe, c’est-à-dire des dettes exigibles, y compris 4,400,000 livres d’anticipations, montait originairement à la somme de..... 18,500,000 liy. Votre Majesté a bien voulu faire payer à M . le comte d’Artois, En 1781.... 1,500,0001. En 1782.... 4,000,000 Et en 1783 ----- 2,000,000 Total ..... 7,500,000 1. Sur celte somme il y a eu deux millions employés au payement des rentes viagères , et constituées en 1782 et 1783 : ci, à déduire ............ 2,000,000 . Reste ..... . 5,500,000 I. Qui ont éteint pareille somme de dettes exigibles, dont 2,400,000 liv. d’anticipations, ci.. ......................... 5,500,000 liv. Reste à payer en dettes exigibles, y compris le restant des anticipations de deux millions. 13,000,000 liv. La seconde classe des dettes consiste dans 908,700 livres de rentes viagères; et de plus, en 74,640 livres de rentes au principal de 1,600,000 livres, remboursables par tiers en 1789, 1790 et 1791 ................. 1,600,000 Total général des dettes échues et rentes remboursables qui restent à payer au moment actuel, non compris les rentes viagères. 14,600,000 liv. M. le comte d’Artois demande que Votre Majesté veuille bien ordonner que ces 14,660,000 livres qu’il restera devoir au 31 décembre 1783, tant en capitaux exigibles, qu’en anticipations et rentes remboursables, lui soient payés dans les termes les moins éloignés que l’ordre des finances de Votre Majesté pourra le permettre ; et il représente que si ces termes étaient portés au delà de cinq ans, il en résulterait des poursuites contre lui de la part de ses créanciers, d’autant plus justes que ces mêmes sommes leur sont dues depuis six ans, et que son administration n’a pu obtenir qu’avec peine de nouveaux délais. M. le comte d Artois demande aussi que Votre Majesté veuille bien lui faire payer le montant de ses rentes viagères, payables moitié en janvier et février de chaque année, et l’autre moitié ea juillet et août, suivant le détail au vrai qui sera fourni jusqu’à leur extinction par son trésorier, et visé par le surintendant de ses finances. M. le comte d’Artois sollicite également des bontés et de la justice de Votre Majesté la rentrée dans les adjudications des bois de Champagne, dont la propriété lui appartient, et dont il n’avait consenti de remettre la jouissance entre les mains de Votre Majesté, que comme un garant de la résolution qu’il avait annoncée, de ne point abuser de ses bontés. Enfin, M. le comte d’Artois représente que ce qu’il demande aujourd’hui, n’est que l’exécution de la promesse que Votre Majesté a bien voulu lui faire, non seulement défaire payer ses dettes, mais de le mettre à portée de n’en plus contracter à l’avenir : il ajoute que depuis deux ans ses recettes et dépenses sont balancées, de manière qu’il ri’a besoin d’aucune augmentation annuelle pour sa maison ; que son seul objet est la libération de ses dettes; que toutes les sommes qui lui ont été accordées n’ont servi qu’à en diminuer la masse, ainsi qu’il en a justifié à Votre Majesté par les états qu’il lui a présentés à la fin de chaque année, et qu’il demande à prouver également à Votre Majesté, par les états annuels qu’il lui remettra, que les nouveaux secours qu’il sollicite ne seront employés qu’à la libération successive et totale de ses dettes,- en même temps que Votre Majesté aura la certitude que depuis le mois de septembre 1781, il n’en aura point contracté de nouvelles. Sur quoi le contrôleur général a l'honneur d’observer à Votre Majesté qu’il est à désirer qu’elle veuille bien prononcer sur les deux mémoires de M. Je comte d’Artois, par une seule et et même décision. Eu effet, s’il importe à la tranquillité de ce prince de pouvoir prendre, avec ses créanciers, des arrangements qui assurent leur payement, il n’est pas moins essentiel, pour l’ordre que Votre Majesté a intérêt de maintenir dans ses finances, que toutes les administrations particulières, qui correspondent à son trésor royal, soient tellement dirigées, qu’elles ne puissent en troubler le service par des demandes imprévues. En réunissant dans un même résultat tous les objets de demandes de M. le comte d’Artois, il s’agit, pour mettre ce prince à l’abri des poursuites de ses créanciers, de pourvoir a® payement de 14,600,000 livres de dettes exigibles et remboursables à différentes époques, et au payement de 74,640 livres de rentes constituées, et de 908,700 livres de rentes viagères. 1° Il nse paraît indispensable d’accorder à M. le comte d’Artois un secours de 4 millions pour le service de l’année 1874: un million servira au payement des rentes viagères et constituées; et ies trois autres millions, dont un pour satisfaire aux condamnations prononcées au Parle ment, et les deux autres pour éteindre les anticipations, réduiront les 14,600,000 livres dedet- [Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J20 septembre 1790]. 8” tes exigibles et de rentes remboursables à 11,600,000 livres. Je crois devoir observer à Votre Majesté, à l’égard de ccs quatre millions, que les deux millions destinés à éteindre les anticipations ne sont plus à fournir, parce que, dans le fait, le Trésor royal a retiré pour pareille somme d’assignations de l’administration de M. le comte d’Artois, au moyen de quoi il n’y aura à donner que les deux autres millions pour les rentes viagères et les condamnations au parlement, lesquels encore ne seront payables que de mois en mois jusqu’à la fin de l’année prochaine; de manière que le service du Trésor royal, n’en souffrira pas. 2° Au lieu de diviser en cinq années ultérieures, comme le demande M. le comte d’Artois, ïe payement des 11,600,000 livres restant, dont dix des dettes échues , et 1,600,000 livres de principal de rente , remboursable par tiers en 1789, 1790 et 1791, il me paraîtrait convenable, pour : soulager d’autant plus les finances de Votre Majesté, de ne payer ces 11,600,000 livres qu’en sept années, En Savoir : 1783 1,600,000 liv. 1786 1,600,000 1787 1,600,000 1788 1,600,000 1789 1,600,000 1790 1,600,000 1791 2,000,000 11,600,000 liv. f Chacune de ces sommes payable en espèces dans les mois de mars, avril, juin, septembre, octobre, novembre et décembre, à raison d’un Ihuitième, c’est-à-dire à rai-I son de 200,000 livres par chacun desdits huit mois pour /les six premières années; et \ de 250,000 livres pour la der-jnière ; et les effets sur le Trc-Isor royal, payables auxdites I échéances, seront remis pour | chaque année à l’administra-f lion de M. le comte d’Artois, au mois d’octobre qui précédera chacune desdites an-I nées. trente années - ce qui me parait conforme au désir de Votre Majesté. Elle voit aussi que les huit années qui termineront la libération absolue de M. le comte d'Artois seront infiniment moins fortes qne celles qui précèdent; et qu’au moyen de l’attention de diviser le secours de chaque années en douze payements, dont les plus considérables n’excéderont pas 250,000 livres par mois, cet arrangement sera moins onéreux au Trésor royal. Si Votre Majesté approuve ces dispositions ainsi qu'elle m’a déjà fait l’honneur de me ie dire, je la supplie de ies revêtir de son approbation, ainsi que les conditions qu’elle m’a chargé d’y ajouter; savoir : 1° Que le secret sera gardé sur le détail du présent arrangement; 2° Que pour s'assurer que les finances de M. le comte d’Artois ne retomberont plus dans le même dérangement, et ne pourront plus en aucun cas devenir à charge au Trésor royal , ce prince s’occupera des moyens de prévenir tout excédent de dépense, et même de préparer des ressources pour l’avenir, par la plus grande attention à diminuer les dépenses des différents départements de sa maison, et notamment de l’écurie, qui doit être réduite à son état originaire; 3° Qu’au même effet M. le comte d’Artois continuera de remettre, chaque année, à Votre Majesté un état de ses recettes et dépenses ; 4° Que M. le comte d’Artois ne pourra faire aucune acquisition de terres, sans le consentement de Votre Majesté. Au bas est écrit de la main du roi : Approuvé les présentes propositions. Et au-dessous : pour ampliation, Signé : de CalonnE-3° Il paraît également nécessaire de pourvoir au payement des rentes viagères et constituées, qui font partie de l’état des dettes, fourni par M.le comte d’Artois. Le payement pourra en être fait à l’administration de ee prince à chaque semestre, dans les mois de janvier, février, juillet et août de chaque année, suivant l’état détaillé qui en sera remis au Trésor royal, pour l’année 1785, et suivant l’état des extinctions, ou un certificat négatif à chaque semestre des années ultérieures, jusqu’à l’extinction totale de ces rentes. 49 Enfin, ie même sentiment qui engage Votre Majesté à venir au secours de M. le comte d’Artois, paraît devoir la porter ’à ne point insister sur la cession des bois de Champagne, dont la propriété est le seul patrimoine que ce prince puisse laisser à ses enfants; et lorsque Votre Majesté s’est déterminée à faire des acquisitions au profit de Monsieur, il est naturel de croire qu’elle ne voudra pas priver M. ie comte d’Artois de celles qui lui sont utiles: en conséquence, il sera donné ordre à l’administration des domaines et bois pour qu’elle laisse jouir ce prince des deux dernières adjudications et des suivantes. Votre Majesté aperçoit que, par cet arrangement, Ja libération totale de M. le comte d’Artois se trouve divisée en deux parties, dont l’une, qui est celle des dettes exigibles, montant à 14,600,000 livres, ne sera acquittée qu’en huit années ; et l’autre, consistant en rentes viagères, s’éteindra successivement en vingt-cinq ou trente ans, suivant le cours ordinaire des probabilités ; en sorte qu’on peut dire avec vérité que l’acquittement total ne s’effectuera que dans l’espace de N° il. Copie du bon de M. le comte d’Artois, du 14 mars 1784, portant délégation en faveur du sieur de Chalandray. Monseigneur m’avait fait l’honneur de me prévenir, qu’en conséquence des arrangements qm le roi avait bien voulu prendre pour sa libération, le ministre des finances avait autorisé MM. de Montchevrel et de Chalandray, receveurs généraux des finances, à se charger d’une partie du service du trésor de Monseigneur, jusqu’à ce qu’ils pussent être remboursés sur les sommes annuelles que le roi a eu la bonté d’accorder à Monseigneur jusqu’en 1791. Monseigneur connaît l’honnêteté et le zèle de M. de Montchevrel, qui a l’honneur de lui être attaché. M. de Chalandray jouit également de Ja réputation la mieux méritée. Ils "doivent commencer le service du trésor de Monseigneur, le mois prochain, à raison de trois millions dans le cours de cinq mois, et qui serviront à éteindre pareille somme d’assignations, tirées originairement par le Trésor, et qui successivement renouvelées, échoient dans ces mêmes cinq mois. Dans l’horrible gêne où sont les finances de Monseigneur, c’est au moins une première satisfaction d’avoir sorti des mains du public cette quantité énorme d’assignations, qui ne se faisaient à la Bourse, mois par mois, qu’avec la plus grande peine, et dès lors avec les plus grands sacrifices. Toutes les affaires de Monseigneur se trouveront «8 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 septembre 1790.] concentrées dans les maiDS de MM. de Montche-vrel et de Ghalandray pour une partie, et pour l’autre dans celles de MM. le Gouteulx, du Molay et de la Noraye. Leur remboursement se fera dans les années 1788, 1789, 1790 et 1791 sur les 1,600,000 livres de ces trois premières années, et les 2 millions de la dernière portés dans la décision du roi. Mais pour cela il est absolument nécessaire que Monseigneur tienne ses résolutions pour la réduction de sa cassette et de son écurie. Je ne cesserai de lui rappeJer que se sont les seuls objets qui ont introduit le désordre dans ses finances, et qui le perpétueraient, si Monseigneur n’écoutait pas les justes représentations que j’ai l’honneur de lui faire, et qui ne sont dictées que par mon respectueux attachement à sa personne. Au bas : écrit de la main de Monseigneur est Bon. Pour ampliation : Signé : VERDUN. Nota. Il faut observer, qu’en finances, le plan présenté par un ordonnateur et approuvé par le roi ou le prince, vaut le mandat et la délégation formelle, connus des jurisconsultes. N° III. Paris, 11 avril 1784. J’ai pris, Monsieur, vendredi dernier, les ordres du ministre, sur l’échange que vous avez demandé des récépissés de M. Bourbouion (il était alors le trésorier de M. le comte d’Artois) contre des valeurs du Trésor royal. Il m’a chargé d’autoriser le Trésor royal à recevoir pour comptant ces récépissés lorsque leur échéance ne passerait pas trente jours ; mais il n’a pas jugé devoir se prêter à la demande que vous avez faite pour l’échange des valeurs. Belles du Trésor royal lui sont absolument nécessaires, soit pour les négocier dans le besoin, soit pour les donner à l’avance aux trésoriers généraux qui ont des dépenses à faire dans les provinces. Je serai demain matin à vos ordres, comme vous le désirez. J’ai l’honneur d’être, etc. Signé : GoJARD. IV. Paris, le 23 septembre 1784. Je viens, Monsieur, d’envoyer à M. Ghenot (alors caissier du Trésor royal) la note des payements à faire, chaque mois, au trésorier de monseigneur le comte d’Artois; je lui marque en même temps que vous êtes autorisé à lui remettre les récépissés du trésor de ce prince, qui n’auront que trente jours à courir, et qu’il vous en fournira la valeur en argent. Je joins ici le double de l’état que j’adresse à M. Ghenot. J’ai l’honneur d’être, etc. Signé : GoJARD. V. Autre du 9 mars 1786. Je me rappelle parfaitement, Monsieur, l’arrangement que nous avons fait, relativement au service dont vous vous êtes chargé pour le trésor de monseigneur le comte d’Artois. Je verrai demain M. de la Borde deMérevilleà ce sujet, et je vous promets que vous n’éprouverez plus de difficulté; je vous avoue que j’avais oublié de l’en prévenir. J’ai l’honneur d’être, etc. Signé : GOJARD. Plusieurs membres demandent la parole sur le rapport de M. Vernier. M. Camus. Je me permets d’élever quelqués doutes sur la légitimité de la créance de M. de Ghalandray parce qu’étant un jour au comité des finances, pendant qu’il s’y trouvait également, je lui ai demandé de prouver qu’il avait réellement fait les avances dont il demande le remboursement; or, il a gardé le silence. Mais, puisqu’on veut s’occuper de cet objet, je demande : 1° l’impression du rapport; 2° que M. de Ghalandray soit tenu dénommer les personnes qui, concurremment avec lui, ont fait les avances dont il réclame le payement ; 3° que l’on y joigne les pièces qui prouvent que ces avances ont été faites ; 4° qu’il soit dressé un état exact de l’actif et du passif des affaires de M. d’Artois; 5° qu’il y ait huit jours d’intervalle depuis l’époque de l’impression et de la distribution des rapports jusqu’à ce qu’il soit discuté. M. Coys. La nation ne devant pas acquitter la partie des dettes de M. d’Artois dont le roi ne s’est pas chargé, l’état demandé par M. Gamus est inutile. M. Malonet. M. Camus et M. Loys oublient que M. d’Artois doit être considéré comme créancier de l’Etat, attendu ses droits à la succession mobilière du feu dauphin son père, ainsi que du feu roi et de la feue reine. M. le Président met aux voix la motion de M. Gamus. Elle est décrétée en ces termes : « L’Assemblée nationale décrète que le rapport sera imprimé, que l’on y fera connaître les associés et co-intéressés de M. de Ghalandray ; « Que l’on y joigne les preuves que M. de Cha-landray et ses co-associés ont fait les services et avances dont il est mention dans le rapport; « Que l’on produise l’état actuel de l’actif et du passif des affaires de M. d’Artois ; « Qu’il y ait huit jours d’intervalle entre la distribution du rapport et des pièces jointes, et la discussion qui sera faite de ce rapport dans l’Assemblée. » (Voyez aux annexes de la séance, page 94, le supplément de rapport par M. Vernier, sur le payement des dettes de M. le comte d’Artois , fait en conformité du décret ci-dessus.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion des projets concernant l’armée et des rapports du comité militaire sur cette matière. M. Alexandre de I�ameth monte à la tribune et donne lecture de son rapport sur l'admission et V avancement dans l'armée. (Voy. plus haut ce rapport inséré aux annexes de la séance d’hier 19 septembre). M. le Président interrompt la lecture du rapport pour annoncer à l’Assemblée une lettre