432 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Novembre îm de l’Orne a invité tons les citoyens à venir au secours d’Alençon; qu’il va rassembler des hommes solides et qu’il marchera vers cette ville. Hier, Lindet est arrivé du Calvados. Il a coo¬ péré aux mesures qui ont été prises. Il rapporte que la Sarthe est bien bonne et entièrement bonne; elle fournit 25,000 hommes qui sont con¬ duits par l’instinct de la liberté et qui mènent avec eux les grains et les bestiaux qui leur sont nécessaires. Dans toutes les parties qui envi¬ ronnent les brigands, nous sommes en mesure; on dit qu’ils sont maintenant à Domfront. Barère reprend : Que présentent à vos esprits ces correspondances vagues et variées? Nous pensons que vous y aurez vu, comme nous, une armée de fugitifs, poursuivie par la terreur, et par les défenseurs de la liberté. Le comité a pris diverses mesures depuis huit jours soit pour empêcher les brigands de repas¬ ser la Loire et de se rejeter dans la Vendée, soit pour faire mouvoir nos armées, indépendam¬ ment des mouvements que pourront produire la Sarthe et l’Orne. Le ministre de la guerre a déjà donné des ordres pour effectuer une attaque qui doit exterminer les brigands dans leur fuite ; nous avons reçu ce matin la nouvelle que tout était disposé pour cela. Merlin et Chou dieu reviennent; le comité attend leur arrivée et les détails qu’ils donne¬ ront pour préparer son rapport définitif sur la Vendée. Les dernières dépêches qui nous ont été adres¬ sées portent ces mots : « Vous pouvez être tran¬ quille, nous ne voyons plus devant nous que des fuyards qui tentent d’échapper à la ven¬ geance nationale : c’est une humeur dont le corps politique tend à se dégager. » Ce n’est pas au moment où ü va s’opérer une attaque générale que nous pouvons vous offrir «des détails; il suffit de vous dire que cette nou¬ velle Vendée, tant grossie par les oisifs, par les malveillants et par les nouvellistes à la journée n’est que le débris de l’ancienne Vendée dé¬ truite. Aujourd’hui, parmi les lettres qui sont arri¬ vées, il y en a une des représentants du peuple qui sont à Coutances ; elle porte qu’on est debout pour marcher à l’ennemi; que le désarmement des hommes suspects à Caen a servi pour armer de bons républicains; qu’il est parti des batail¬ lons pour remplacer la garnison de Cherbourg; qu’il y a une armée à Avranches; que tout est en réquisition, que tout le monde a obéi. « Nous n’entendons, disent les représentants commissaires, que des éloges sur notre activité et sur les ressources que nous mettons en usage. Nos braves défenseurs ont juré, en partant, de ne revenir qu’après avoir exterminé jusqu’au dernier des brigands. » Nous attendons le résultat des mouvements qui vont s’opérer. ANNEXE N° 3 A la séance de la Convention nationale du 1 5 brumaire an II. (Mardi, 5 novembre 1993.) Lettres (1) des représentants du peuple en mission à l'armée des Cotes de (1) Toutes ces lettres sont mentionnées dans le l’Onest, à l’armée des Cotes de Cher¬ bourg et en d’antres lieux pouvant ser¬ vir de pièces justificatives au rapport sur la Vendée fait par ISarère (B) dans la séance du fl 5 brumaire an II. I. Jean-Baptiste Le Carpentier, représentant du peuple délégué par la Convention nationale dans le département de la Manche, au comité de Salut publie (2). « Valognes, le 1er jour de la lre décade du 2e mois de l’an II de la République. « Le courrier extraordinaire que je vous ai dépêché hier vous aura informé des mesures ra¬ pides et assurées que j’ai prises aussitôt après la réception de la dépêche de Pocholle, pour porter dans l’Ille-et-Vilaine le renfort qu’il de¬ mandait d’une manière si pressante. Après avoir été remplacés dans leurs postes, les deux ba¬ taillons de la Côte-d’Or et de la Réunion étaient en marche, le premier depuis hier, et le second depuis ce matin, lorsqu’un courrier est venu me remettre un arrêté de mon collègue Garnier, qui est à Coutances, d’après lequel la marche de ces troupes avait été suspendue. Étonné de ce contre-ordre, je me suis empressé d’ouvrir la lettre qui y était jointe, dans l’espoir qu’elle contiendrait des motifs péremptoires, maik j’ai vu avec non moins de surprise que ce contre - ordre n’était fondé que sur l’opinion où était mon collègue que la garnison de Cherbourg se trouvait dénuée, et que par là la sûreté de nos côtes serait compromise. « Certes, cette considération était d’une im¬ portance trop majeure pour que je l’eusse né¬ gligée, et mon arrêté, dont vous avez eu commu¬ nication, et que j’avais envoyé de suite à mon collègue, ne m’a laissé qu’un regret, celui de voir que Garnier n’en avait pas saisi les dispo¬ sitions et avait confondu un arrêté du district de Cherbourg avec mon arrêté même, ce qui l’avait induit en erreur sur le nombre des troupes dont je disposais et avait faussé son opinion sur la prudence et l’efficacité de mes mesures. « En effet, citoyens, les trois bataillons que j’ai mis en mouvement ne produisent aucun vide, ainsi que vous avez déjà pu le voir : par suite des ordres du ministre pour un déplace¬ ment de troupes sur divers points de ce dépar¬ tement, le bataillon de la Côte-d’Or venait d’être remplacé à Cherbourg par le 6e bataillon de la Manche et il l’est à Valognes, où il était envoyé en garnison, par le contingent du district qui avait été levé en vertu de la proclamation de nos collègues Le Cointre et Prieur, pour l’armée des Côtes de Cherbourg, ce contingent était formé en bataillon mais ü n’avait pas d’armes : je lui ai donné les fusils de la garde nationale; Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public de M. Aulard; mais M. Aulard n’ayant donné de la plupart d’entre elles qu’une simple analyse, nous avons cru devoir en reproduire le texte exact. (1) Voy. ci-dessus, même séance, p. 403, le compte rendu du rapport de Barère d’après le Moniteur. (2) Archives nationales, carton AFii 275, pla¬ quette 2304, pièce 26, [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. « brumaire an H 433 (5 novembre 1793 ainsi le voilà armé tout à coup, il va être tout à fait habillé, il n’y a donc pas de lacune de ce côté. Le bataillon de la Réunion, remplacé à la Hougue et à l’île de Tatihou par un bataillon de la Somme, remplacé à Coutances par un autre contingent de la même formation, qui va être armé, tant avec les fusils de la garde natio¬ nale, qu’avec ceux que l’on attend de Caen. Il n’y a donc pas encore de vide par ici. Quant au 9e bataillon de chasseurs dont j’ai disposé sur l’offre même du district de Cherbourg, il est suppléé par la garde nationale qui a trois ba¬ taillons, tous bien armés et en activité de ser¬ vice. Il n’y a donc pas encore d’inconvénient par là. L’arrêté ci-joint (1) que je viens de prendre à la suite et que je vous prie bien de lire aus¬ sitôt après ma lettre vous convaincra de plus en plus en vous faisant connaître toutes les troupes qui sont à Cherbourg, outre les batail¬ lons de remplacement, en vous instruisant de tous les rapports sous lesquels j’ai considéré l’état respectif des choses, de la prudente com¬ binaison et même de la nécessité de mes opéra¬ tions. « Je vais sur-le-champ me rendre à Coutances pour faire part de toutes mes observations à Garnier, pour mieux sentir les siennes et pour nous concerter ensemble dans la conjoncture où nous nous trouvons. « Nous avons à combattre le même ennemi en deux personnes, il faut frapper le corps qui attaque et nous défendre contre celui qui me¬ nace. C’est ce que j’ai fait. Si on traîne en lon¬ gueur, le parti des rebelles de l’Ille-et-Vilaine, la Vendée est ressuscitée, le Calvados peut se rani¬ mer, et quand nos forces auront éprouvé de plus grandes divisions, l’Anglais viendra descendre sur nos côtes. « Je le répète, Cherbourg et ses environs ont les mêmes forces qu’auparavant, et notre sur¬ veillance double notre vigueur. Avec des troupes mal armées et organisées à la hâte, on ne peut guère se flatter de remporter un avantage com¬ plet. Des bataillons parfaitement exercés et rem¬ placés par d’autres en bon état marchent contre les rebelles et vont les exterminer. « Nos forts sont garnis comme à l’ordinaire et si l’Anglais pouvait tenter une descente, la gar¬ nison de Cherbourg et les légions de gardes na¬ tionales, rassemblées d’un coup de tocsin en feraient justice. « Voilà notre position. Il n’y a ni à craindre ni à tâtonner. Portons ici des coups de vigueur, restons là sur une soigneuse défensive. Nous serons vainqueurs d’un côté et non entamés de l’autre. Si nous ne sommes pas partout aussi actifs que prudents, nous serons vaincus par¬ tout. « Après mon voyage de Coutances, je reviens ici. Si Garnier se met à la tête des troupes qui vont dans l’Ille-et-Vilaine, je vais aller sur les côtes invoquer une descente et la ruine des Anglais. « Soyez persuadés, citoyens collègues, que l’énergie qui m’anime est celle de tout le dépar¬ tement de la Manche et particulièrement de la garnison et des habitants de Cherbourg. Ils sont indignés de la prise récente de notre frégate, et mon indignation, à moi, est à son comble. Le rivage était bordé d’hommes armés, mais on (1) Voy. ci-après cefc arrêté, lre SÉRIE. T. EXXVIII. n’a pu sauver la J Réunion qui a été attaquée par une frégate supérieure, et emmenée par deux ou trois autres. Il est pressant que le ministre de la marine envoie plusieurs frégates sur ces parages; il nous reste un vaisseau de ligne et des chaloupes canonnières; mais cela ne suffit pas pour protéger nos convois et découvrir le large. Si l’Anglais n’ose descendre sur nos côtes, il est toujours aux aguets sur nos navires et nos bateaux. Réprimons partout cet insolent et lâche ennemi. «Je pense qu’il serait essentiel qu’ après avoir médité sur mes deux derniers arrêtés, vous con* Armassiez les mesures que j’ai prises, si votre avis est d’accord avec le mien. En attendant, les troupés s’organiseront à Avranches. « Le Carpentier. « P.-S. Je vous envoie une nouvelle série d’ar¬ rêtés, depuis le n° 147 jusqu’au n° 195 inclusi¬ vement. C’est la suite de mes opérations. Je n’en ai plus que quelques-uns à prendre ici pour les affaires administratives. » Arrêté (1). Nous, représentant du peuple délégué par la Convention nationale dans le département de la Manche, Vu l’arrêté, en date d’hier, par lequel notre collègue Garnier, actuellement à Coutances, autorise le citoyen Bécus, commandant le 9e ba¬ taillon de la Manche, chargé de nous remettre une dépêche de donner ordre aux troupes qu’il rencontrera dans sa route, et que nous avions mises en mouvement par notre arrêté d’avant-hier, de les faire stationner dans le lieu le plus voisin où elles se trouveront, et où elles pour¬ ront convenablement loger, jusqu’à ce que par nous ou par lui, elles reçoivent de nouveaux ordres de rétrograder ou de continuer leur route. Considérant : 1° que d’après la dépêche adressée aux administrateurs du département de la Manche par Pocholle, représentant du peuple dans le département de l’Ille-et-Vilaine, laquelle portait littéralement que les rebelles de la Vendée étaient presque aux portes de Bennes, et demandait tous les renforts que pourrait lui fournir ce département, il n’y avait pas à déli¬ bérer sur la nécessité d’envoyer de prompts secours dans l’Ille-et-Vilaine, et qu’il ne res¬ tait qu’à combiner par des mesures aussi sages que rapides la quantité des forces présumées nécessaires pour faire face aux brigands de la Vendée, avec celle exigée pour la sûreté de nos côtes ; 2° Que par suite des ordres antérieurs du mi¬ nistre de la guerre, relatifs à la mutation des garnisons de plusieurs points de ce département, deux bataillons, le 6e de la Côte-d’Or et celui de la Réunion, dont l’un était destiné à rester en garnison à Valognes, et l’autre à se rendre à Coutances, pour le même effet, se trouvaient avant-hier réunis en cette première ville, et que cet heureux hasard nous fournissait l’occasion d’envoyer sur-le-champ ces deux corps au se¬ cours de Rennes, sans faire tort à la garnison de (1) Archives nationales , carton AFn 275. pla quette 2304, p. 27, 28