748 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [l,r janvier 1791.] priété, ni établir son moulin que dans le lieu, et de manière qu’aucune habitation ne puisse souffrir des accidents qui pourraient arriver dans cet établissement. La fixation de remplacement de ce moulin sera faite par des commissaires du département de l’Oise. Art. 3. « Les mêmes commissaires veilleront à ce que le sieur de Veyland ne fabrique que la quantité de poudre nécessaire pour faire des essais; cette quantité ne pourra pas excéder trois quintaux ; aucun envoi n’en pourra être fait qu’avec la permission écrite desdits commissaires du département; chaque baril sera scellé de leur cachet; et sous aucun prétexte, le sieur de Veyland ne pourra disposer autrement de la poudre” qu’il aura fabriquée. Art. 4. « Si. par le résultat des essais dont il sera rapporté des procès-verbaux circonstanciés, il est reconnu que la poudre fabriquée n’est pas d’une qualité supérieure, le sieur de Veyland sera tenu de démolir son moulin dans quinze jours, sans pouvoir réclamer aucune espèce d’indemnité : si, au contraire, la qualité supérieure de la poudre est constatée, le sieur de Veyland sera tenu de remettre à la nation le moulin qu’il aura fait construire, et l’Assemblée nationale statuera sur les remboursements et récompenses qui seront dus audit sieur de Veyland. » Plusieurs amendements sont présentés; ils sont écartés par la question préalable. (Le projet de décret est mis aux voix et adopté sans modification.) L’ordre du jour est la suite du rapport du comité central sur l’ordre des travaux de l'Assemblée (1). M. Crillon le jeune, rapporteur du comité central. Messieurs, tous les travaux qui nous avons énumérés dans notre rapport du 26 décembre dernier, sont classés dans l’ordre qui nous a paru piéférable; nous ne nous flattons pas d’avoir choisi le meilleur; nous affirmons seulement que nous n’avons été guidés que par l’amour du bien; vous trouverez peut-être des erreurs dans notre classement; mais, nous osons le dire, vous n’y trouverez nas une prévention. Nous ajoutons qu’il est évidemment nécessaire de suivre un or ire quelconque, et de ne pas abandonner au hasard, pour ainsi dire, le fil de vos travaux : nous convenons cependant qu’il y aurait un plus grand inconvénient encore à discuter quels sont les objets qui méritent le premier rang dans la discussion; ce serait consumer en paroles un temps précieux. Ainsi, Messieurs, vous êtes entre deux écueils : perte de temps ou marche incertaine; c’est dans cette position que nous venons vous offrir notre travail; nous ne vous dirons pas si notre plan est bon; suivez-le; il nous est permis de vous dire, si vous ne le trouvez pas trop mauvais, vous devez l’accepter. Mais sur quoi nous insisterons bien plus fortement encore, c’est sur l’utilité, ou plutôt sur l’indispensable nécessité d’adopter la mesure que nous vous avons cou sei I lée dans uotre premier rapport; celle de prendre l’engagement formel de convoquer la législature prochaine, non à jour nommé, comme (1) Voyez ci-dessus le rapport de M. Crillon le jeune, seance du 26 décembre 1790. on vous l’a proposé, et comme vous ne pouviez pas y adhérer, mais lorsque vous serez arrivés à une époque déterminée de vos travaux. Si vous vous décidez, Messieurs, comme nous vous en conjurons, à cette solennelle déclaration, on n’aura pus celte opinion vague du temps où pourra finir votre session, elle sera fixée; on connaîtra le chemin que vous devez suivre, et l’espace qui vous reste à parcourir : on verra chacun de vos décrets en rapprocher le terme; c’est alors que cette absurde calomnie, cette prétendue volonté de nous perpétuer, projet auquel n’ont jamais cru les personnes qui en paraissent alarmées, mais dont elles savent tirer un si funeste parti; c’est alors, dis-je, que tous ces bruits mensongers disparaîtront; alors vous verrez le calme régner dans l’Empire, et tous les efforts pour le troubler devenir impuissants. Pour vous engager, Messieurs, à indiquer la convocation de la législature prochaine, à l’époque la plus rapprochée que vous permette votre serment, nous n’emploierons pas les motifs si puissants sur tous les hommes; nous ne vous dirons pas que le repos est enfin nécessaire après des travaux dont la longue durée paraît avoir déjà surpassé la mesure des forces humaines; nous ne vous dirons pas que vos affaires, que vos familles languissent après vous; nous savons que nous parlons à des législateurs, nous leur dirons : L’intérêt de la patrie le commande. Yoici le projet de décret que vous propose votre comité central ; L’Assemblée nationale, anrès avoir entendu le rapport de son comité central, décrète : 1° Qu’elle s'occupera sans interruption, dans les séances du matin, des objets suivants : des jurés, des impositions, de la haute cour nationale , des changements dans le code pénal, loi de responsabilité, gardes nationales et auxiliaires, organisation de la marine , loi qui détermine les rapports de l'autorité civile et militaire, complément de l' organisation des municipalités et corps administratifs, complément de /,’ organisation du pouvoir législatif et exécutif, de U organisation du ministère, du trésor national, de la comptabilité, de la régence, bases de éducation nationale, rapport constitutionnel sur la mendicité , démarcation de la juridiction civile ; et ior-qn’elle aura terminé ces differents travaux, la législature prochaine sera convoquée. 2° Elfe traitera dans ses séances du soir, et dans l’ordre qui lui a été soumis par son comité central, les objets compris dans la seconde section. 3° Elle ordonne à ses différents comités de préparer leurs rapuoits, pour qu’ils puissent lui être faits dans l’ordre adopté. M. Cevêque, curé de Tracy. Il est impossible d’avoir une prescience assez certaine, une certitude assez grande de l’avenir pour fixer l’époque à laquelle les opérations qui restent à faire seront finies. J’en appelle à l’expérience; souvent l’Assemblée a rendu des décrets d’ordre qu’il lui a été impossible de suivre. M. Charles de Lametli. Il me semble que le projet de décret est d’une part inutile, et de l’autre impolitique. (Il s'élève des applaudissements et des murmures.) Vous penserez sans doute avec moi que si vous preniez à cet égard un engagement, il serait très aisé aux ennemis de la chose publique de vous arrêter pour vous mettre en contradiction avec vous-mêmes. (Murmures.) Je vous prie, M. le Président, de m’obtenir du si- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. lence. Il arrivera qu’au moment où, pour l'exécution de votre décret, il faudra que vous voui occupiez de la marine, on vous forcera, en susci-citant des dangers à la chose publique, à délibérer sur autre chose ; par exemple sur l’armée de terre. Je crois de l’essence d’une assemblée libre, qui délibère sur des objets qui doivent amener la liberté... Je crois qu’il est convenable que cette Assemblée garde dans son sein l’indépendance nécessaire pour achever la Constitution. On vous dit qu’il est à souhaiter que vous indiquiez le moment et la convocation de la prochaine législature. Rieu ne serait plus dangereux, on multiplierait autour de vous les entraves, en suscitant des malheurs, des calamités publiques; ou vous retarderait infailliblement; car jamais vous ne pourrez fermer les yeux sur les intérêts et sur les souffrances même momentanées du peuple. Aujourd’hui au lieu de perdre votre temps, en vous livrant à une discussion aussi dangereuse, vous auriez pu rendre des décrets utiles à l’achèvement de la Constitution. (On demande à aller aux voix). J’entends dire au rapporteur que le décret ne fixe rien. Eh bien, c’est dans ce sens que j’ai dit qu’il était inutile. 11 veut que l’on convoque les législatures quand la Constitution sera finie; et certes, personne ici n’a d’autre intention... (On demande à aller aux voix.) Je crois de mon devoir de vous dire que si vous adoptez la mesure qu’on vous propose, vous verrez multiplier les obstacles, les difficultés... (On applaudit et Von murmure.) Je dis donc que l’Assemblée nationale ne doit pas compromettre ainsi la Constitution et la liberté... On croirait que la liberté, si précieuse, est un fardeau trop pesant pour elle. Je propose la question préalable. M. lie Chapelier. Je m’attendais bien à quelques objections contre ce projet de décret, qui n’est cependant que l’exécution du décret rendu sur ma motion, et en vertu duquel votre premier comité central avait été formé ; mais je ne m’attendais pas qu’on le présenterait comme inutile et dangereux. Il m’a toujours paru que la perte du temps venait de ce que nous n’avons pas un ordre du jour fixe. Il me semble indispensable, pour le salut de la Constitution, d'écarter de nous tout ce qui peut être laissé à la législature. J’avais souvent observé que des décrets qui pouvaient être renvoyés aux séances du soir occupaient une grande partie de celles du matin, et qu’on ne terminait pas des discussions commencées. J'ai senti qu’il était nécessaire de mettre la nation dans la confidence de nos travaux et d’apprendre aux comités l’époque fixe à laquelle ils doivent vous soumettre le résultat de leurs opérations. Voilà ce que vous avez demandé aux membres qui remplacent votre premier comité central; voilà l’esprit dans lequel ils ont rédigé le projet de décret qu’ils vous proposent. Certes, cette mesure dissipera l’impatience de la nation, en lui montrant le terme de vos travaux, en en accélérant la marche; et l’on dit qu’elle est dangereuse et inutile! Croyez-vous que, si l’ordre de vos délibérations était immuablement établi, la séance aurait été ce matin employée en grande partie à rendre des décrets qui appartenaient à une séance du soir? On prétend qu’il est dangereux d’arrêter qu’on ne s’occupera que d’objets constitutionnels, parce qu’on suscitera des mouverm-uts dans les départements, pour nous détourner de notre marche; mais quand nous nous occuperons des événements qui pourraient mettre obstacle à la [l9r janvier 1791.] 749 Constitution, ne travaillerons-nous pas à la Constitution? Ceux qui seraient d’une moindre importance se porteraient à des séances extraordinaires du soir, que l’Assemblée, qui jusqu’à ce jour s’est montrée infatigable, accordera sûrement sans difficulté. Il ne s’agit point de fixer le terme de la convocation de la législature; mais il faut, pour répondre aux ennemis de la Constitution, qui ne cessent de dire que nous voulons nous perpétuer, montrer que les objets constitutionnels nous occuperont privativement, et qu’après les avoir épuisés, nousconvoquerons nos successeurs. Il s’écoulera nécessairement, entre cette convocation et la nomination, deux mois, qui sufiiront pour décréter les matières indispensables de législation. (On applaudit.) (La question préalable, mise aux voix , est rejetée.) M. Buzot. Il y a dans la seconde section du travail du comité central des objets qui se rapprochent beaucoup do la première; pur exemple, la question sur les ordres de la chevalerie et de Malte. Je demande que ces objets soient ajoutés au projet que vient de nous présenter M. de Crülon. M. Camus . Il y a quatre mois que l’Assemblée, sur ma proposition, avait ajourné cette question, en ordonnant à son comité de Constitution, auquel devaient se réunir des commissaires de quelques autres comités, de lui en faire le rapport. Le comité n’a pas même été convoqué pour cet objet qui me paraît des plus instants. J’appuie doue la proposition de M. Buzot. (La proposition de M. Buzot est adoptée.) M . Moreau de Saiut-Méry . D’après la nature et la multiplicité des objets qui restent à traiter, il serait ditlicile de décider si l’Assemblée actuelle pourra réunir le vœu des colonies sur leur constitution, ou si elle devra déléguer à la prochaine législature le pouvoir de la déterminer. Mais, dans tous les cas, il y a deux objets à classer parmi ceux à discuter le matin. Le premier, c’est la représentation des colonies et par rapport à celles qui ont déjà des députés et par rapport à celtes qui doivent en avoir, d’après les decrets mêmes de l’Assemblée. Le deuxième, c’est de fixer l’époque où les colonies doivent s’occuper de nommer leurs représentants, à la prochaine législature, afin qu’ils s’y trouvent pour y soutenir leurs intérêts expliquer les motifs des parties de leur constitution, et éclairer sur des localités avec lesquelles on n’est pas eucoie assez familiarisé dans le royaume. Je demande donc q e l’Assemblée décrète qu’elle s’occupera, dans les séances du matin, de la représentation des colonies, et de tixer l’époque où elles doivent nommer leurs députés à la prochaine législature. M. de I�a Charrière. Je demande le renvoi de la proposition de M. Moreau au comité colonial. M. Moreau de Salnt-Méry. J’accepte ce renvoi. (Le renvoi est ordonné. ) M. IMonis. L’Assemblée a aussi ajourné la question très importante des substitutions. Je demande qu’elle fasse partie des objets détaillés dans le projet de décret.